Thread by @qffwffq

Hey mais c'est la nouvelle année !

Et qui dit nouvelle année dit nouveaux lapins !

Et qui dit lapin dit #UnLapinUnThread

Alors discutons un peu de Parkinson, d'intestins, et du risque, quand on vante certains régimes alimentaires, de se prendre la science en pleine gueule.

On va commencer cette jolie histoire par justement un peu d'histoire.

Depuis longtemps on sait que la maladie de Parkinson est liée à la disparition de neurones qui sécrètent de la Dopamine. Ces neurones on les connait par cœur. On pourrait presque leur donner un nom à chacun.

On sait où ils sont, avec qui ils causent, qu'est-ce qui les stimule, comment ils produisent de la dopamine.

On connaît presque leur jeu favori sur Switch ou leur opinion sur la couleur des pass Navigo.

Mais y'a un truc qu'on ignore, c'est pourquoi ils meurent.

Et on a tout cherché : la faute à pas de chance, la génétique, un élément toxique, un vieillissement anormal, une infection, un plan secret des reptiliens de la lune creuse etc...

Mais sans rien trouver.

On parle d'ailleurs de maladie idiopathique pour dire qu'on sait pas.

Mais quand-même on a quelques pistes.

En regardant de plus près ce qui se passe, on trouve dans les neurones atteints, des choses qui ne devraient pas s'y trouver. Ces choses se nomment des inclusions et quand on examine ces inclusions on trouve des protéines anormales.

Ces protéines anormales, pour faire court et en caricaturant un peu parce que c'est pas le sujet de ce thread, ont la particularité de ne pas pouvoir être détruites par le système cellulaire dont c'est le rôle.

Du coup elles s'accumulent et provoquent la mort des neurones.

Donc on a avancé, on sait pourquoi les neurones meurent, mais on sait pas d'où viennent ces protéines, et surtout, pourquoi elles s'accumulent.

En y regardant de plus près, et en simplifiant encore plus, on constate que ce qui est anormal avec ces protéines... c'est leur forme.

En gros (désolé les neurobiologistes, je sais que je saccage vos données, mais c'est pour la bonne cause) ces protéines sont normales dans leur composition mais anormales dans leur structure, ce qui empêche leur destruction.

C'est un peu comme si quand vous faites le ménage votre aspirateur ne pouvait aspirer que les poussières sphériques, et que pour une raison inconnue votre poussière à vous était cubique. Du coup l'aspirateur n'aspire rien, la poussière s'accumule, et vous mourez sous les moutons.

C'est une mort un peu ridicule et triste.

Mais au-delà de ça, ce mécanisme d'accumulation d'une protéine en raison de l'impossible de l'éliminer parce que sa forme est anormale, est surtout connu dans une autre maladie, la maladie de Creutzfeldt Jakob avec les protéines prions.

Ce qui ne veut pas dire que la maladie de Parkinson est une maladie de Creutzfeldt Jakob, ni qu'elle est due aux prions, mais qu'elle appartient à un groupe plus vaste de maladies également appelées protéinopathies.

Et ça pour notre enquête c'est bien, parce qu'on peut essayer de regarder ce qui se passe dans le Creutzfeldt Jakob et voir si ça peut nous aider à comprendre ce qui se passe dans la maladie de Parkinson.

La maladie de Creutzfeldt Jakob, on ne va pas se le cacher, n'est pas super connue.

Ceux qui en ont déjà entendu parler, sont ceux qui se souviennent de l'épidémie de maladie de la Vache Folle, et du risque d'attraper un Creutzfeldt en mangeant du steak contaminé.

Ce qui nous intéresse là-dedans, c'est que le Creutzfeldt peut s'attraper comme une infection, et que la porte d'entrée est digestive.

Du coup, question suivante, peut-on trouver une cause à la maladie de Parkinson en regardant ce qui se passe dans le système digestif ?

Et là encore en allant très vite, la réponse semble être : PLUTÔT OUI.

En fait depuis 2003 on sait que dans la maladie de parkinson, les inclusions anormales retrouvées dans les neurones au niveau du cerveau, sont également retrouvées dans les intestins.

Mieux, depuis 2019, on sait qu'elles commencent à se former dans les intestins puis progressivement sont retrouvées dans des régions de plus en plus proches du cerveau, en suivant le système nerveux autonome digestif puis le nerf vague, puis le tronc cérébral.

Et encore mieux, avec certains modèles animaux, on a pu montrer que sectionner le nerf vague, permettait d'interrompre cette propagation.

Et encore mieux mieux, on a pu montrer que les humains qui pour une raison quelconque avaient eu une section du nerf vague, avaient nettement moins de risques de développer une maladie de Parkinson que les autres.

Donc...il se passe bien un truc au niveau digestif.

Mais quoi ?

Une des façons de répondre à la question est d'employer une technique d'étude assez élégante et subtile nommée : ANALYSE BOURRIN DE TOUT CE QUI EXISTE DANS LES TRIPES.

En pratique ça veut dire prendre toutes les selles des personnes atteintes de parkinson, faire une analyse génétique de tout ce qui s'y trouve, identifier les bactéries auxquels ces génomes correspondent, et les comparer aux résultats des prélèvements réalisés chez les gens sains

On est dans du gros bourrinage.

Et si on part du principe que les sujets sains le sont (sains) alors toutes différences entre eux et les personnes atteintes de Parkinson, sont peut-être une des causes de maladie de Parkinson.

Et ça tombe bien, parce que des différences on en trouve. Et pas que des minimes.

On a tous des bactéries dans nos intestins. Et heureusement parce que ce sont elles qui assurent la part la plus utile de la digestion. Sans elles, on meurt.

Et quand on regarde ce qui se passe chez les sujets parkinsoniens, on observe deux choses :

1/ ils ont tout un tas de familles de bactéries en moins.

2/ ils ont tout un tas de familles de bactéries en plus.

Parmi celles qui manquent, on trouve des bactéries qui d'une part permettent l'assimilation de ce qui nous sert à synthétiser de la Dopamine, du Glutamate, de la GABA et de la sérotonine (4 grands neurotransmetteurs) ainsi que des protéines anti inflammatoires.

Et parmi celles qui sont en excès, on retrouve entre autres, des bactéries qui favorisent la formation de protéines anormales.

Là où ça devient drôle, c'est le type de ces bactéries en trop, qui favorisent la formation des inclusions anormales, et semblent contribuer très fortement à l'apparition d'une maladie de parkinson.

Parce que...

La plupart....

Sont également très très présentes dans....

...Les probiotiques commercialisés pour "améliorer votre santé" et vous "protéger contre [insérer un truc qui fait peur]".

Bref, quand vous mangez des yaourts hors de prix avec de probiotiques magiques, vous ingurgitez des millions de bactéries dont on pense sérieusement qu'elles sont pro parkinsoniennes.

Allez quelques noms pour rire un peu :
- bifidobacterium dentium
- lactobacillus fermentum

Si vous voulez essayer (et tenter de voir si on peut chopper un parkinson rapidement) vous pouvez même en acheter directement en flacon dans toutes les bonnes épiceries bio ou sur internet.

Bon bref, deux choses à retenir :

1/ si la maladie de Parkinson est multifactorielle, une origine digestive est de plus en plus étayée.

2/ notre flore intestinale est essentielle à notre survie, essayer de la modifier est toujours casse-gueule

Et comme d'habitude voilà la source de l'article, ainsi qu'une version résumée.