Le rejet de la climatisation responsable d'un risque élevé de mortalité prématurée aux canicules? Vraiment?
Petit 🧵qui explique pourquoi ce n'est pas si simple, avec en bonus, un rappel des conseils de prévention.
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De nombreuses études ont mis en évidence les risques de surmortalité liés à la chaleur, notamment dans les villes, et plus particulièrement les villes denses. 1/
Comparons la part de ménages équipés de climatisation et la carte précédente : TOUTES les villes sont concernées par la surmortalité, y compris celles avec des taux élevés de climatisation et « habituées » aux canicules (Lisbonne, Madrid, Rome, Athènes). 2/
Sur 854 villes étudiées, Bologne et Milan sont en 1ere et 2e position, Salamanque et Capri en 3e et 4e, Paris 5e.
➡️ le problème n’est pas le rejet de la climatisation.
⚠️ personne n’a dit qu’il fallait 0 climatisation !
C'est la généralisation individuelle qui pose problème 3/
La mortalité découle de la combinaison de 3 éléments
➡️ L’aléa : ici la température élevée
➡️ L’exposition directe ou indirecte des personnes, du bâti, des réseaux, etc.
➡️la vulnérabilité : ici, on parle de la fragilité physique et physiologique face à la chaleur 4/
L'aléa canicule augmente en fréquence, intensité, durée et précocité avec le réchauffement climatique d'origine humaine. 5/
Toujours pour les canicules, deux phénomènes sont particulièrement dangereux. Le premier est l’effet « thermomètre mouillé » (wet bulb), qui représente un danger absolu pour la vie humaine, même pour des gens en parfaite santé. 6/ 👉 bonpote.com/mourir-de-chau…
Le second, ce sont les nuits tropicales, où la température ne descend pas la nuit sous les 20°C, ce qui fatigue énormément les organismes les plus fragiles.
L’exposition joue un rôle essentiel : directe (dehors au soleil) ou indirecte (habiter une « bouilloire thermique »).
👉les SDF ou les personnes vivant sous les toits sont très exposées.
ENFANTS : linges sur les poussettes, turbulettes ou bébés trop couverts, etc. 8/
La vulnérabilité est la 3e composante du risque.
Elle désigne le fait que certains organismes sont intrinsèquement plus fragiles face à la chaleur : personnes âgées, nourrissons, malades, détenus dans des prisons surpeuplés, personnes isolées ou à mobilité réduite. 9/
La surmortalité n’est donc pas due au « rejet de la climatisation », mais à la vulnérabilité générique ET spécifique des individus et à l’exposition, qui augmente en fonction des caractéristiques morphologiques du territoire et du logement. 10/ metropolitiques.eu/Canicule-et-mo…
Le retour d’expérience de la canicule de 2003 permis d’améliorer considérablement la prévention des hyperthermies en agissant sur exposition ET vulnérabilité : vigilance et alerte, surveillance, mobilisation des personnels de santé, etc. 11/
Dès 2004, un plan canicule impose des mesures et obligations strictes, dont la climatisation pour les Ehpad. Les hôpitaux sont aussi équipés, mais les pannes, la mauvaise isolation des bâtiments, leur conception limite trop souvent l’effet.
La climatisation ne suffit pas. 12/
Alors on fait quoi?
Si vous m'avez suivie, la 1er manière de lutter contre la mortalité, c’est d’agir sur l’aléa : neutralité des émissions de GES pour stabiliser le réchauffement climatique.
👉Atténuer le réchauffement, c’est contenir l’aléa canicule et nuits tropicales. 13/
L'autre levier d'action, local cette fois, est la production de froid. La climatisation ne suffit pas, notamment si le logement est mal isolé.
👉 Plus que la climatisation, la construction de réseaux de froid et la rénovation confort d’été qui doivent être généralisés. 14/
On oublie aussi que la climatisation coûte cher à l’installation et du fait de la consommation énergétique. On retrouve la précarité énergétique connue pour le chaud en hiver, sachant que les +précaires sont souvent les +vulnérables à la chaleur. 15/ 👉 nature.com/articles/s4159…
Côté exposition, La lutte contre l’effet « îlot de chaleur urbain » est primordiale. Ce phénomène est désormais bien connu
👉 16/
Il faut aussi parler de l’îlot morphologique urbain : ces espaces ont des caractéristiques physiques favorables au développement d’un ICU nocturne moyen ou fort. S’ajoutent les caractéristiques des bâtiments. Ici un exemple pour Strasbourg.
Dans un autre fil qui plaide pour la généralisation de la climatisation, M. Cobra cite cet article vulgarisé du CNRS et Valéry Masson (pas Valérie Masson-Delmotte attention), spécialiste de climatologie urbaine.
La climatologie urbaine est justement un champ pluridisciplinaire qui a donné lieu au projet MApUCE, qui permet de connaître pour sa ville. Pour ceux qui veulent aller plus loin, vous pouvez aussi lire l’HDR de Julia Hidalgo Rodrigues, du LISST.
Dans cet autre 🧵, une affirmation de M. Cobra sur végétation/clim permet de comprendre le problème de son raisonnement. 21/
En se focalisant sur la climatisation, on rate l'exposition et la vulnérabilité. Si la climatisation est un ajustement réactif et palliatif, parfois indispensable, elle ne permet pas d'aborder la transformation structurelle dont on a besoin pour s'adapter. 22/
Baisser la surmortalité en ville alors que le climat va continuer à changer est une question d'aménagement, d'urbanisme, d'architecture : nouvelle utilisation de l'eau, la végétalisation, hauteur des bâtiments, forme/taille des rues, couleurs, matériaux, etc.
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La généralisation de la climatisation est une maladaptation.
⚠️Il y a un continuum adaptation/maladaptation (AR6). Les solutions ne sont pas universelles ou intemporelles.
Les « solutions » présentant un risque de maladaptation doivent être utilisées au cas par cas. 24/
La généralisation de la climatisation n’est donc pas une solution. Inaccessible aux plus précaires, qui font partie des plus vulnérables, elle ne résout pas le problème, voire l'aggrave.
👉 La baisse de la mortalité passe par une adaptation « transformationnelle » globale. 25/
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Le métier d’enseignant ne se limite pas à vulgariser des connaissances pour les transmettre aux élèves. Chaque enseignant, quelle que soit sa discipline, accompagne un individu en construction vers l’autonomie intellectuelle, ie, vers la capacité à penser par lui-même.
1/
Un enseignant apprend à ses élèves à penser : comprendre les énoncés, formuler des questions, raisonner, construire les réponses, les étayer. Et quand il apprend à connaître, il apprend à hiérarchiser, à trier, à organiser son savoir.
2/
Les mots en -té ont la côte en ce moment sur le réseau.
C'est l'occasion d'un petit 🧵sur la manière dont on construit des concepts et des notions en sciences humaines et sociales, qui évitera à l'avenir les faux-procès.
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Les sciences humaines et sociales (SHS) travaillent avec des « concepts » et des « notions », qu’elles contribuent à forger et à définir. Ces concepts sont à la fois des résultats de recherche dites empiriques, des outils de travail et des modèles descriptifs et explicatifs.
Au départ, on cherche à décrire un fait social (propriété, caractéristique, processus, etc.) qu’on a établi, documenté, qualifié, mesuré. On va donc essayer de trouver le bon mot pour le nommer. Et ce n’est pas facile…
Les inondations dans le Pas-de-Calais donnent lieu à beaucoup d’approximations, de simplifications et de commentaires à l’emporte-pièce. Pour s’y retrouver dans ce sujet à la fois compliqué et complexe, petit 🧵.
On déroule 👇
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On parle d'inondation quand il y a submersion par de l’eau. Cette eau peut venir du ciel (précipitations) ou de la mer (submersion marine). Ces dernières peuvent se produire sur des côtes basses, notamment en cas de tempêtes (surcote). 2/ eaufrance.fr/les-inondation…
Les précipitations peuvent être intenses et concentrées dans le temps ou s’étaler sur plusieurs jours, mois, semaine.
Ici, un excellent dossier cartographique du journal @lemondefr .
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Ce matin, @franceinter nous offrait 120 secondes stupéfiantes, sous couvert de pluralisme, sur le thème, « le pacte vert [et l'action climatique] pourraient ébranler la démocratie »
Plutôt que d'attaquer celui qui parle, examinons ses arguments.
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« L’Europe, c’est 8% du CO2 mondial » « 92% des émissions de CO2 ne viennent pas d’Europe ».
C’est vrai.
Voici par exemple un graphique tiré du Datalab du Ministère de la transition écologique, daté de Décembre 2022, réalisé par @I4CE_ 2/
Mais...
L’Amérique du Nord (AN), c’est 13%.
EU + Europe hors UE + ex URSS, c’est 16%.
Si la Chine est plus émettrice (30%), la triade (AN, Asie orientale, UE) émet quasi autant.
Sans compter les émissions importées (produites ailleurs, consommées chez nous).
👇 (GIEC, 2022) 3/
Marre d’entendre « c'est bon, il pleut, il n'y a plus de risques de sécheresse » ?
Pour comprendre les liens entre précipitations, températures et risques, distinguer les types de sécheresseS et ne plus confondre (aléa) sécheresse et (risque de) pénurie, suivez le 🧵
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La sécheresse météorologique correspond à un déficit pluviométrique. Il ne pleut pas ou pas suffisamment, par rapport aux moyennes (les normales).
⚠️ Le terme « normale » est statistique, pas normatif. C’est une valeur de référence. 1/
La sécheresse météorologique ne doit pas être confondue avec la sécheresse hydrologique. Cette dernière désigne le déficit de débit des cours d'eau, des niveaux bas des nappes ou des retenues.
NB : Le niveau de l’eau dans les nappes est mesuré par des piézomètres. 2/
Un beau travail d’équipe pour valider l’air de rien, une quantité d’erreurs factuelles, perdues dans un océan de confusion. Allez, on démêle le vrai du faux.
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J’ai déjà expliqué l’importance de ne pas confondre régulation et substitution et pourquoi il était faux de considérer que l’eau non prélevée sur un territoire était perdue, à partir du moment où elle ne servait pas les êtres humains dudit territoire. 1/
Passons « sur les huîtres et les moules qui détestent l’eau douce ». @MarieMeziere répond en montrant la confusion entre apports d’eau douce (nécessaires) et apports brutaux et massifs (notamment en hiver du fait du drainage et du ruissellement). 2/