Fabrice Epelboin Profile picture
Creative technologist, serial entrepreneur, teacher #infowar #cyberwar #geopo (ex CELSA, ScPo Paris, IAE Poitiers), Stephen Colbert wannabe. #Team @_Reflets_

Dec 21, 2022, 25 tweets

#TWITTERFILES s01e08 #PENTAGONE #PSYOPS

Où l'on apprend que Twitter assiste le Pentagone dans différentes opérations d'influence destinées à accompagner ses guerres et celle de ses (ex) amis Saoudiens au Yemen.

Je dois vous dire que ce genre de choses est l'un de mes sujets de prédilection depuis plus de dix ans. Je l'enseigne dans différentes institutions. Un peu de mise en contexte pour comprendre pourquoi ce type d'astroturfing, le militaire, est fondamental.

L'astroturfing sur les réseaux sociaux dans lequel nous baignons tous aujourd'hui, ces différentes opérations d'influence pratiquées aussi bien par des Etats, des entreprises et parfois même des groupes militants, est né au sein de l'armée, à priori en 2009.

On retrouve en effet la trace de SCL, la maison mère du célèbre Cambridge Analytica, dans une opération de contre insurrection au Yemen destinée à soutenir l'Arabie Saoudite en 2009.

Cambridge Analytica, riche de ce savoir faire, réalisera vite que le civil offre des débouchés commerciaux fantastiques, et ira ainsi pirater plein d'élections un peu partout (mais principalement en Afrique), avant de s'attaquer au Brexit et de se mettre au service de Trump.

SCL et l'armée US seront le creuset d'où sortiront les talents qu'on retrouvera dans un tas d'opérations d'astroturfing, comme celles qui ont permis de contrer l'opposition au gaz de schiste aux US ou en Europe (raté) quelques années plus tard. researchgate.net/publication/33…

SCL n'est pas nécessairement le patient zéro, c'est juste à ce jour celui qui s'est fait clairement identifié derrière la plus ancienne opération d'astroturfing (aka online PsyOps) mise à jour pas une investigation.

Il est fort possible que 8200 (la NSA Israëlienne) ou une annexe aient été les premiers à innover sur ce terrain, mais ils sont plus discrets et sans doute plus efficaces, et n'ont pas vendu leurs services auprès d'entreprises et de politiques. electronicintifada.net/content/inside…

La dispersion de leur savoir faire à eux passe par une autre dynamique, celle du grand brassage des compétences et des brevets propre à la startup nation.

La vrai startup nation, pas la vaste arnaque censée importer le concept de rêve américain qu'on nous a servi en France.

SCL-Cambridge Analytica, de son coté, a construit dès 2014-2015 de l'armement électronique et des opérations d'astroturfing, aussi bien pour l'armée américaine que pour la britannique, qui sont parmi les mieux équipées de la planète en la matière.

fastcompany.com/90235437/befor…

Notez au passage que la France est particulièrement en retard dans ce domaine.

La première fois que le pays s'est fait prendre la main dans le pot de confiture de l'astroturfing militaire, c'était fin 2021 à l'occasion de l'opération Barkhane au Mali.

radiofrance.fr/franceinter/le…

Coté astroturfing corporate et politique, par contre, la France sait tenir son rang.

Avisa Partners est un acteur majeur, travaillant aussi bien pour des dictateurs africains qu'a vous convaincre que Uber est un progrès pour le monde du travail.

reflets.info/dossiers/avisa…

Un rapport complet a été publié sur la PsyOps avortée de l'armée française au Mali, et le moins qu'on puisse dire c'est que soit l'armée française est très naïve, et a appliqué pour lutter contre les trolls de Poutine la même technique que CheckNews...

graphika.com/reports/more-t…

Soit ils sont très mauvais, au point d'aller combattre des individus armés d'AK47 avec des gants de boxe, ce qui pour des militaires, relève de la faute.

Cela a permis au passage de réaliser que l'Internet Research Agency (les trolls de Poutine) étaient déjà largement implantée en Afrique dans bon nombre d'anciennes colonies françaises, et s'appliquait à souffler sur les braises du sentiment anti-français post colonial.

Hasard ? Coïncidence ? Derrière l'Internet Research Agency, on trouve Evgueni Prigojine, le "cuisiner de Poutine", également patron du Groupe Wagner, qui fourni des mercenaires au Mali, et qui est également impliqué dans tout un tas de conflits, comme l'Ukraine.

Un business qui marche bien et qui a misé sur l'intégration verticale et le service 360, donc.

Certains experts sont même allés jusqu'à envisager qu'il succède à Poutine et qu'il nous fasse regretter le temps où Vladimir régnait sans partage sur la Russie.

Revenons ceci dit à cet épisode des #Twitterfiles qui montre à ceux qui n'étaient pas au courant que les USA font la même chose, sans ce talent propre à Progojine pour la mise en scène barbare, et avec bien plus de discipline dans les rangs de Blackwater, le pendant US de Wagner.

Cette fois-ci, plutôt qu'un long thread plus ou moins lisible, Lee Fang a écrit un article dans le journal qui l'emploi, The Intercept, ce qui permet (enfin) de revenir à une forme journalistique plus digeste et conventionnelle.

theintercept.com/2022/12/20/twi…

TL;DR pour ceux qui ont la flemme, pendant que le service modération, en roue libre et encouragé par Roth, son directeur, menait ce que les conservateurs US dénoncent comme une guerre culturelle woke (et bienveillante) destinée à faire taire le camp Trump...

...la direction collaborait étroitement avec le Pentagone pour aider les Saoudiens à parfaire l'un des plus grands (et néanmoins très discret) drames humanitaires contemporain : le Yemen.

Le plus interessant dans tout cela reste le traitement qui sera réservé en France à cette information.

Jusqu'ici, l'essentiel de la couverture média consiste à vous expliquer qu'il n'y a rien à voir dans ces #twitterfiles.

Ça va devenir de plus en plus compliqué.

D'abord parce que ce chapitre des #twitterfiles, comme les précédents, se passe sous l'administration Trump, qui ne pouvait ignorer tout cela, sauf à imaginer que Trump n'ait jamais eu la main sur quoi que ce soit, que les USA ne sont pas une démocratie, et que...

Mais pire encore, dans la mesure où l'Arabie Saoudite est, après Musk, le plus gros actionnaire de Twitter, cela impose de faire face à une complexité qui est loin, très loin, du storytelling consistant à pointer du doigt les gentils et les méchants, pourtant si rassurant.

Enfin, cela force à se reposer la question du jeu auquel joue Elon Musk, qui hier encore, et au prétexte d'assister à la finale de la #FIFAWorldCup rencontrait le beau-fils de Trump, architecte des accords d'Abraham, ainsi que quelques émissaires Saoudiens.

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