Magali Reghezza Profile picture
@magalireghezza.bsky.social Géographe. Environnement, risques et catastrophes, résilience et adaptation. Compte personnel.

Mar 31, 2023, 36 tweets

Un beau travail d’équipe pour valider l’air de rien, une quantité d’erreurs factuelles, perdues dans un océan de confusion. Allez, on démêle le vrai du faux.
🧵

J’ai déjà expliqué l’importance de ne pas confondre régulation et substitution et pourquoi il était faux de considérer que l’eau non prélevée sur un territoire était perdue, à partir du moment où elle ne servait pas les êtres humains dudit territoire. 1/

Passons « sur les huîtres et les moules qui détestent l’eau douce ».
@MarieMeziere répond en montrant la confusion entre apports d’eau douce (nécessaires) et apports brutaux et massifs (notamment en hiver du fait du drainage et du ruissellement). 2/

C'est de la biodiversité que dépend notre survie.
Zones humides, sols et sous-sols, seront déterminants pour la neutralité carbone (captage). Santé humaine, animale, environnementale font système (one health).
Spoiler : présentement, c’est déjà pas brillant
3/

Quels sont les principaux messages de l’AR6 sur les impacts du changement climatique sur l’eau & l’adaptation?
Voici le résumé produit par le GIEC pour l'Europe, qui distingue en Europe, plusieurs zones. Regardez l'encadré sur WCE (Europe occidentale et centrale).

Et ce 🧵de @Goneri76, auteur principal du groupe II du GIEC, qui explicite.
+ de sécheresses,+ de vagues de chaleurs, une température moyenne + chaude. 4/

Il existe trois types de sécheresse qui peuvent (ou non) se combiner :
➡️ météorologique : déficit de précipitations
➡️ hydrologique : faible stockage dans les nappes et/ou faible débit des cours d’eau
➡️ édaphique/agricole : faible humidité des sols
4/
inrae.fr/actualites/que…

On entend souvent citer le GIEC pour dire qu’il pleuvra plus en hiver.
Si c’est le cas, pourquoi ne pas stocker l’eau l’hiver, quand elle est abondante, pour l’utiliser l’été, en période de déficit pluviométrique, de basses eaux ou d’étiage, et de sécheresse du sol?
5/

Parce que, d'abord, cette affirmation « plus de pluie en hiver » est non significative .
Comme le montre @cassouman dans un 🧵, c’est vrai pour l’Europe du Nord, mais les projections des modèles restent incertaines pour la France.
6/

Il n'y a pas de signal robuste sur les 🌨️ hivernales.
➡️ l'Oscillation Nord Atlantique est en effet le principal pilote des précipitations hivernales en Europe. Elle doit être prise en compte dans l'estimation des changements futurs (Chap8 #AR6 #GIEC ) 7/

En revanche, un printemps plus précoce diminue le temps de recharge des nappes et l’évapotranspiration, aggravée par l’augmentation de la température moyenne et des extrêmes.
cf. ce 🧵 de @SergeZaka
8/

ET il est établi scientifiquement (certitude) que l’indice hydrique des sols va diminuer en été :
➡️ les précipitations estivales ↘️,
➡️ à cause de la chaleur, évapotranspiration et évaporation ↗️, comme le ruissellement (sols secs).
9/

De +, entre 1959 et 2018, le volume ANNUEL d’eau douce renouvelable provenant des 🌨️ a ↘️ dans 41 % des sous-bassins, presque tous situés dans le sud. Les territoires les plus fragiles pour l’accès à l’eau se situent majoritairement dans l’ouest.
10/
…stiques.developpement-durable.gouv.fr/evolutions-de-…

Car, et c'est assez contre-intuitif (ah le bon sens), la pluie seule ne prédit pas la disponibilité de la ressource.
11/

Ainsi, entre 1959 et 2018, le changement le + remarquable est l’↗️ de l’évapotranspiration (annuelle et saisonnière) dans la majorité des sous-bassins en automne & hiver et dans tous les sous-bassins au printemps.
12/

Conséquence : on a déjà une ↘️ de 14% de l’ « eau douce renouvelable » (eau qui entre sur le bassin et n’est pas évapotranspirée) sur la période 1990-2018.

Cette ↘️ du volume annuel est OBSERVÉE à partir de 2002 avec une forte hétérogénéité selon les sous-bassins.
13/

Dans les territoires où la ressource augmente (le Marais Poitevin), les résultats sont hélas à nuancer du fait de l’extrême variabilité inter-annuelle et de la sensibilité aux bornes temporelles choisies. Ceci explique le paradoxe qui suit.
14/

La baisse structurelle de la ressource se traduit par de + en + de territoires classés en zones de répartition des eaux (ZRE).
Les ZRE sont des zones où est constatée une insuffisance, autre qu'exceptionnelle, des ressources hydriques par rapport aux besoins.
15/

Dans le Marais-Poitevin, alors que beaucoup d’eau circule (pas eu le temps de vérifier les volumes énoncés dans l'extrait), en Charente-Maritime, les ZRE couvrent la quasi totalité du département depuis 2003. Dans les Deux-Sèvres, c’est la totalité (source SDAGE).
16/

Revenons au consensus scientifique.
Le stockage étant une solution d’adaptation (et non d’atténuation, rien à voir avec le stockage du carbone), l’AR6 du GIEC a évalué les différentes options.

‼️ Le GIEC n’est pas prescriptif, il ne recommande rien.

17/

Sur les « bassines », l’évaluation du GIEC note le coût, les impacts environnementaux négatifs et indique qu’elles ne seront pas suffisantes au-delà de certains niveaux de réchauffement climatique.
16/
ipcc.ch/report/ar6/wg2

L'ARS ne parle pas évidemment pas de Sainte-Soline.
Le désormais célèbre rapport du BRGM montre que la bassine permet d’améliorer la situation estivale pour les nappes et les cours d’eau, puisqu’elle se substitue aux prélèvements estivaux dans les nappes et les cours d’eau.
17/

En revanche, le périmètre de l’étude (qui n’est pas un choix du BRGM) n’intègre pas le changement climatique, n’inclut pas les impacts sur la biodiversité ni celui des seuils d’autorisation de prélèvement dans la nappe, et porte sur le passé.
👇
18/

Le point biodiversité n’est pas anecdotique. L’excellent 🧵 de @DoGui3891 indique qu'on risque de parler prochainement de l’outarde canepetière, dont la protection n’a rien à voir avec l’affection que les écologistes porte à la nature sauvage (sic).
19/

Un 🧵@TerreTerre13 précise les spécificités géologiques de la région. @florencehabets complète pour Sainte-Soline (sens des écoulements).
Elle revient sur les évaluations des bassines DÉJÀ construites( manque de recul et peu d’appareils de mesure).
19/

Pour résumer on a :
✅ Un consensus scientifique sur les limites des bassines et les risques de maladaptation
✅ Des expertises robustes dont les conclusions ne sont pas contestées
✅ des expertises limitées par le cadrage (la question) de départ, les données, le manque de recul.

Dans le « débat » actuel, on confond sécheresse (aléa) et pénurie (risque).
La pénurie résulte d’un déséquilibre entre l’offre et la demande.
Problème : on a une offre (eau disponible) qui ↘️ inexorablement et une demande (prélèvement) constante, sinon croissante.
22/

🔴 Alors oui, face à des sécheresses intenses et chroniques, des vagues de chaleur + intenses, fréquentes, longues et précoces, il est INDISPENSABLE de stocker l’eau pour répondre aux besoins vitaux des hommes (hydratation), des animaux et de la végétation (irrigation).

23/

Y aura-il assez d’eau à stocker pour faire face aux sécheresses? Quel impact des prélèvements hivernaux dans (et sur) les réservoirs naturels ?
Le problème n’est pas le prélèvement, mais les volumes prélevés et les seuils à partir desquels les prélèvements hivernaux sont ⛔️.
24/

Alors pour ou contre les bassines?
Ainsi formulée, la question n’a aucun sens. Elle polarise inutilement le débat, avec les conséquences dramatiques actuelles, tout en le réduisant à un problème technique, alors que c'est d'abord un choix politique.
25/

On devrait plutôt se demander si:
1⃣ on s'est engagés dans les réponses les + efficaces et si l’efficacité des bassines compense leur coût (financier et écologique)?
2⃣ on ne fabrique pas un actif échoué (un équipement qui sera + ou - rapidement inutile/inutilisable)
26/

Il est contradictoire d'investir massivement et surtout, systématiquement, dans une politique de l'offre (plus d'eau disponible), alors que face à la ↘️ irréversible de la ressource, il faut ↘️ la demande.
27/

En 2019, les assises de l’eau ont acté une ↘️ des prélèvements 10 % d’ici 2025 et de 25 % en 15 ans d’ici 2035).
En février 2022, le Varenne de agricole de l’eau mise sur le stockage hivernal et les gains d’efficacité.
/28

agriculture.gouv.fr/conclusions-du…

De même qu’il faut proscrire les activités intenses en carbone, nous devrons éviter au maximum les pratiques intenses en eau. Dans l’agriculture, c’est une révolution agricole qui nous attend, dans laquelle la technique soulagera les coûts de transition, mais ne suffira pas.
/29

Tant que la neutralité carbone ne sera pas atteinte, la ressource en eau ↘️, a fortiori si les prélèvements excèdent les limites physiques. N’en déplaisent aux tenants des réalités alternatives, à qui de trop nombreux médias donnent la parole, au nom du pluralisme.
30/

Pour conclure, 🙏à ceux et celles qui ont alimenté ce 🧵et à tous ceux qui ont échangé avec moi de manière courtoise (je pense aux agriculteurs notamment), qui ne sont pas forcément d’accord avec ce que je dis, mais qui prennent le temps de lire et de discuter.
31/

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