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1/n Pour mieux comprendre la Covid19, deux études me paraissent particulièrement importantes. Il s'agit d'études de cas. La première est une étude allemande que j'avais repérée il y a qqs semaines en preprint et qui a été publiée par la suite dans @nature nature.com/articles/s4158…
2/n A la fois très intelligente et rigoureuse, elle permet d'apporter un début de réponse à des questions fondamentales sur ce virus avec lequel nous allons devoir vivre pendt qq temps.
3/n La deuxième est une étude française (Lescure) portant sur des patients hospitalisés suivis à Paris et Bordeaux. A la différence de l'étude allemande, cette dexuième étude sur 5 patients inclue des patients graves hospitalisés en réanimation.
4/n L'étude allemande est particulièrement dense et elle permet d'apporter des ébauches de réponses à des questions comme: quelle est la relation entre la charge virale et les symptômes? A quel moment un patient avec des symptômes modérés n'est plus contagieux?
5/n Quelles sont les difficultés posées par la sérologie? etc
Cette étude porte sur 9 patients avec des symptômes modérés issus d'un cluster apparu en janvier à Munich et qui avaient tous été contaminés par le même sujet index.
6/n Ces 9 patients jeunes ou d'âge moyen sans plus de précisions, ont tous eu des évolutions favorables, malgré des atteintes pulmonaires pour 2 d'entre eux. Ils ont eu de prélèvements multiples avant le début ou au tout début des symptômes et tt au long de l'évolution.
7/n Il est important de connaître l'évolution chez ce type de patients car les patients avec des symptômes modérés ne nécessitant pas une hospitalisation constituent probablement non 80% mais plutôt de l'ordre de 98% des patients Covid19+.
8/n Tous les virus respiratoires circulant de manière habituelle chez l'Homme y compris les coronavirus ont été recherchés et il n'y avait pas de co-infection. On peut donc affirmer que les symptômes observés étaient dus au SARS-CoV-2.
9/n Des analyses par RT-PCR ont été faites quasi quotidiennement afin de préciser la charge virale sur les 9 patients à partir de prélèvements du nasopharynx, de la gorge des crachats et des selles. 27 analyses sur les urines et 31 sur le sang également.
10/n Sur la charge virale et la contagiosité plusieurs constations importantes. 1-Bien que les prélèvements aient commencé au début voire avant le début des symptômes les charges virales oropharyngées ont suivi une pente descendante (courbe orange)
11/n Ceci indique que, probablement, la charge virale et la contagiosité potentielle est maximale avant le début des symptômes. C'est un point très important parce que cela définit ce qui fait la différence avec le SARS de 2002, pour lequel le virus ne se répliquait pas >
12/n dans l'oropharynx et pour lequel la charge virale était 1000 fois plus faible et le pic de charge viral était plus tardif. Donc, contrairement au SARS de 2002 le SARS-Cov-2 en passe par une étape de réplication dans l'oropharynx et n'a pas besoin de pénétrer profondément>
13/n le tractus respiratoire pour pouvoir se répliquer. Cette facilité à se répliquer dans les voies aériennes supérieures peut être un facteur expliquant sa plus grande contagiosité.
14/n 2-Deuxième observation concernant la charge virale, la charge virale observée dans les prélèvement oro-pharyngés n'a pas de rapport clair avec les symptômes observés. Un individu asymptomatique peut avoir une charge virale élevée.
15/n 3-La charge virale dans les prélèvements oro-pharyngés est en rapport avec la réplication virale et pour les 9 patients, il n'y avait plus de réplication virale dans la groge après le 5ème jour.
16/n NB: le test PCR permet de détecter du matériel génétique viral avec une très bonne spécificité , mais ne permet pas de dire si ce matériel correspond à du virus infectant ou non.
17/n Comment faire, dès lors, pour savoir si le matériel génétique retrouvé par PCR correspond à du virus infectant? Il faut isoler le virus, ce qui veut dire le cultiver en laboratoires sur les cellules cibles qu'il infecte pour voir s'il se réplique.
18/n C'est ce que Wölfel et coll ont fait et ils se sont rendus compte que pour des charges virales encore assez importantes pour être quantifiées prélevées dans l'oropharynx le SARS-Cov-2 ne pouvait pas être isolé.
19/n Donc 4- après le jour 8 il devient très peu probable d'isoler le virus sur des prélèvements naso ou oropharyngés. Ce qui veut dire que pour ces patients peu symptomatiques même une charge virale élevée dans l'oropharynx n'est plus forcément infectante après J8.
20/n La méthode d'isolation virale est une méthode lourde et longue qui ne peut pas être utilisée en routine et à grande échelle.
21/n 5- les virus sont plus facilement isolés dans les crachats (expectorations), où ils ont montré des signes de réplication plus tardivement, jusqu'à J9 chez ts les patients et la charge virale y a même présenté un pic à J10 J11 chez les 2 patients qui ont eu des atteintes pulm
22/n Contrairement aux 7 patients qui n'ont pas eu d'atteinte pulmonaire les 2 patients qui ont eu une atteinte pulmonaire ont continué à avoir des charges virales quantifiables dans les crachats après j10-11 et jusqu'à 28 jours.
23/n Les auteurs proposent de faire d'autres études pour évaluer la valeur pronostique d'une charge virale prolongée dans les crachats. Les charges virales et la cinétique au niveau des poumons pr le SARS-Cov-2 sont tout à fait comparables à celles du SARS.
24/n 6- Les auteurs ont montré élégamment que la réplication virale dans les poumons était un phénomène indépendant de la réplication dans la sphère ORL. NB: la charge virale dans les crachats reflète ce qui se passe dans les poumons.
25/n Je résume cette première partie. Contrairement au SARS 2002, le SARS-Cov-2 a la capacité de se répliquer dans la sphère ORL où on peut trouver de fortes charges virales infectantes avant le début des symptômes même chez des patients peu symptomatiques.
26/n La possibilité d'isoler le virus à partir d'un prélèvement (virus infectant) est proportionnel à la charge virale, mais elle devient nulle pour des charges virales quantifiables assez élevées qqs js (3 js ici, après J8) après la fin de la réplication (à J5 dans l'oropharnx)
27/n Les symptômes (fièvre, toux) ne sont pas forcément en rapport avec la charge virale. En revanche, une charge virale dans les crachats élevée après J10-11 est en rapport avec une atteinte pulmonaire.
28/n Tout se passe comme si l'infection se déroulait en deux phases: une première de réplication dans l'oropharynx, une deuxième, ne survenant que chez une minorité de patients, de réplication dans les poumons. Cette 2ème phase se présente comme celle du SARS 2002.
29/n Comme je l'ai dit, l'étude de Wölfel et coll est très très bien conçue et réalisée et très très dense en informations. Je vous laisse digérer tout ça et je continue demain😀
30/n Je poursuis.
J'ai parlé jusqu'ici des prélèvements faits dans la sphère ORL et dans les crachats, cette dernière étant un reflet de la présence de virus dans les poumons. Mais qu'en est-il des autres fluides, excrétas humains dans ce groupe de 9 patients peu symptomatiques?
31/n Là aussi cette remarquable étude apporte des réponses. En ce qui concerne le sang (31 prélèvements) et les urines (27 prélèvement), aucun des prélèvements n'est revenu positif. On peut en déduire que, probablement, ni le sang, ni les urines, ne sont contaminants .
32/n Il en va différemment des selles, où du matériel génétique viral est régulièrement retrouvé par PCR. Ce matériel génétique semble être en grande partie le reflet et suivre l'évolution de celui retrouvé dans les poumons (expectorations ingurgitées).
33/n Le virus n'a jamais pu être isolé dans les selles, indiquant que les selles ne seraient pas contaminantes chez ces individus peu symptomatiques. Néanmoins en une seule occasion les investigateurs ont retrouvé un marqueur de réplication virale.
34/n J'y reviendrai mais il faut savoir que les coronavirus, dont on connaît une trentaine de virus circulants parmi lesquels 7 ont circulé où circulent chez l'homme, sont connus pour provoquer des symptômes gastro-instestinuax chez les animaux.
35/n Pour le SARS-Cov-2 il a été noté que la diarrhée pouvait faire partie des symptômes à prendre en compte, en particulier chez les personnes âgées. On sait aussi qu'il existe des récepteurs à la molécule cible du SARS-Cov-2 dans les cellules intestinales, l'ACE2 .
36//n Les auteurs pensent qu'il existe une réplication chez ces patients dans les intestins, mais que le virus y est aussi inactivé. Ils notent aussi que la disparition de matériel génétique dans les selles semble liée à la réponse immunitaire humorale (taux d'anticorps).
37/n Au total. Les symptômes (fièvre, toux) chez ces individus peu symptomatiques se terminent dans les 8 jours. Le virus est constamment plus facile à isoler dans les crachats et il peut y persister jusqu'à 3 semaines, même si les crachats ne sont plus contaminants après 11 js.
38/n En revanche, chez ces patients qui arrivent à contrôler l'infection, ni le sang, ni les urines, ni les selles ne sont contaminants.
39/n Nous allons maintenant parler des anticorps (immunité humorale acquise), ce qui va nous amener aux problèmes posés par la sérologie et à comprendre, je pense, pourquoi on nous annonce des tests sérologiques fiables qu'on ne voit pas venir.
40/n Il y a beaucoup de manières de doser les anticorps. Un type de test souvent utilisé par les laboratoires de biologie s'appelle ELISA (Enzyme labeled immunosorbent assay)
41/n Toutes ces méthodes permettent de doser des anticorps, de les quantifier. Ce qu'on ne sait pas forcément en les dosant c'est : 1- s'ils sont spécifiques de ce virus, les réactions croisées avec d'autres virus entraînent un risque de faux positifs >
42/n c'est à dire que sans le savoir forcément on est en train de doser des anticorps dirigés également contre un autre virus. 2- si ces anticorps peuvent neutraliser le virus et donc si ce sont des anticorps "neutralisants" capables de combattre efficacement le virus.
43/n Dans cette étude, le test d'immunofluorescence a permis de mettre en évidence une séroconversion (apparition d'anticorps spécifiques qui peuvent être dosés dans le sang). Mais les auteurs ont observé des réactions croisés contre les 4 coronavirus circulant habituellement.
44/n Pour en avoir le coeur net ils ont utilisé des techniques de séroneutralisation, difficilmt utilisables en routine car elles nécessitent d'avoir du virus et des cellules cibles du virus. Ms cette technique est très sensible et spécifique et permet d'écarter ds réact croisées
45/n Les auteurs proposent d'utiliser une technique de microneutralisation (miniaturisation du test et lecture au microscope) qui permet de limiter la quantité de virus, et cellules cibles utilisées.
46/n Les auteurs ont ainsi constaté qu'il y avait bien une séroconversion et l'apparition d'anticorps neutralisants contre le virus, que celle-ci survenaitt pour la moitié des sujets pendant la première semaine et au plus tard 14 jours après le début des symptômes.
47/n C'est plus tôt que pour le SARS. Mais, en revanche, cette séroconversion ne semble pas avoir une influence déterminante sur la charge virale.
48/n Ni non plus sur l'évolution clinique, ici favorable. Tout au plus remarquent-ils qu'un sujet ayant un faible taux d'anticorps excrète du virus dans les selles pendant une durée prolongée.
49/n Je reprends, car l'immunologie est certainement la discipline la plus complexe dans les sciences biologiques.
Le risque principal de faire des tests sérologiques de mauvaise qualité est de trouver des faux positifs et de rassurer à mauvais escient les personnes testées.
50/n Cela limite aussi la valeur de ces tests pour évaluer le pourcentage de la population immunisée. Plus le pourcentage réel est faible, plus le % de faux positifs sera proportionnellement important pour un test donné. J'avais expliqué ça dans un thread
51/n D'autre part, le rôle de cette immunité humorale (anticorps), n'apparaît pas déterminant pour ces sujets ayant une évolution favorable, ce qui ne veut pas dire qu'elle ne peut pas jouer un rôle, peut-être important, pour éviter les complications graves.
52/n Donc, si je résume, l'immunité humorale ne semble pas déterminante dans l'évolution de la charge virale, n'empêche probablement pas l'infection initiale (on diagnostique un Covid19) mais cela n'exclue pas qu'elle puisse être importante pour éviter les complications graves.
53/n Est-ce étonnant? Non, quand on lit la littérature des spécialistes du coronavirus, car tous mettent en avant le rôle particulièrement important pour cette famille de virus, de l'immunité innée.
54/n Je poursuivrai + tard sur l'étude de Lescure et aussi sur les vaccins.
Et je fais remarquer que cette remarquable étude, passées quasi inaperçue au milieu de la masse d'études de mauvaise qualité et seult remarquée par Nature a été financée sur fonds PUBLICS
55/n A retenir que on ne peut connaître le caractère contaminant d'un prélèvement (savoir si le sujet est contagieux) que si on isole le virus en culture (la charge virale est tromps), et qu'on ne pt être sûr que les anticorps neutralisent l virus qu'avec une séroneutralisation.
56/n L'étude de Lescure était d'abord destinée à tester le remdesivir. Elle est moins homogène et moins réfléchie que l'étude allemande. Elle porte sur les 5 premiers patients d'origine chinoise diagnostiqués avec le Covid19 en Europe, hospitalisés à Paris et Bordeaux.
57/n Les patients ont été pris en charge à des moments différents de l'évolution, 3 sur 5 patients présentent une évolution délétère et parmi ceux-ci, le patient le plus âgé est décédé.thelancet.com/journals/lanin…
58/n Les différences avec l'étude précédente sont les suivantes: patients pris en charge à des moments différents de la maladie, sévérité des patients variable, pas de prélèvements des crachats, peu d'isolement des virus, patients suivis par 2 équipes différentes.
59/n Malgré tout cela il n'y a rien dans cette étude qui vienne contredire les constats faits dans l'étude allemande, au contraire.
Plusieurs patients sont des proches. Le patient 1 est l'époux de la patiente 4. Le patient 3 80 ans, est le père de la patiente 5.
60/n J'ai résumé les caractéristiques et l'évolution des patients.
61/n Voici une autre présentation de ces patients et de leur évolution.
62/n On constate que même pour les patients 1 et 2 , qui vont présenter des complications plus tard, il n'y a plus de charge virale quantifiable au niveau du nasopharynx après J9.
63/n En revanche, seul le patient âgé de 80 ans, qui a une défaillance multiviscérale à J6 et une réplication virale intense avec présence de virus y compris dans le sang ( ce qui n'est le cas d'aucun autre patient), continue à présenter une charge virale prolongée dans le nasop
64/n On peut en déduire que les prélèvements nasopharyngés ne sont pas utiles pour anticiper une complication pulmonaire telle que celle qui survient vers J10-J11 chez les patients 1 et 2. Les prélèvements au niveau des crachats le sont davantage.
65/n L'intérêt principal de cette étude est de permettre d'avancer l'hypothèse de 3 présentations cliniques chez l'adulte, auxquelles il faudrait ajouter une quatrième chez l'enfant. Les mécanismes mis en oeuvre sont différents .
Je les ai résumées ci-dessous.
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