Dans l’Occident médiéval, la femme est considérée comme inférieure à l’homme, ce qui se traduit notamment par le droit pour l’époux de la frapper pour la « corriger ». Cette violence est légalement autorisée, même si la justice tente de la modérer
Dans certains cas, l’époux-meurtrier peut échapper aux poursuites judiciaires en dressant un portrait particulièrement diffamant de son épouse, afin d'obtenir le pardon de son crime.
Par exemple : à Loudun, en mars 1448, Jean Minot tue son épouse à coup d’écuelle (…), et justifie son crime en disant que son épouse est une ivrogne, qui prend des amants et dilapide sa fortune...
Cependant, ce type de cas n’est pas à généraliser ! La justice médiévale pouvait aussi se montrer sévère à l’encontre des violences faites aux femmes. De ce fait, elle sait entendre la cause de celles qui, pour la défense de leur vie, en viennent à tuer leur époux violent...
C’est le cas, par exemple de Marie la Murgière, en 1415, près de Bar-sur-Seine. Mariée à Symon de Breuil, violemment frappée lors d’une dispute, elle le tue mais la justice lui pardonne son geste car elle a longtemps supporté les coups de son mari
Derrière ces pratiques judiciaires transparaît une vision de l’épouse et du mariage où la femme doit se soumettre à la voix des hommes... et surtout à celle de son mari.
Les traités d’économie domestique, rédigés par des hommes, à l’image du Mesnagier de Paris (1392-94), ne cessent d’ailleurs de rappeler que la norme sociale est l’obéissance et la soumission des femmes, quitte à passer par la violence
À partir du XIIIe siècle, la Querelle des femmes, une polémique littéraire sur le statut des femmes dans la société, s’installe et fournit un foisonnant espace de débats où s’opposent violemment les discours « pro » et « anti-femmes ».
Parmi ces derniers, Les lamentations de Matheolus (v. 1295), furieusement virulent, n’hésite pas à dépeindre les femmes comme un péril constant. Celles-ci auraient même rendu son auteur chauve et à moitié aveugle...
En réponse, de nombreuses voix se sont élevées pour s’insurger contre ces idées et contre l’auteur même des Lamentations. Une femme surtout, Christine de Pizan, auteure de la Cité des Dames (1405) mais également des hommes ont pris position.
Le Moyen Âge, dans la condamnation de la domination masculine, aussi bien devant les tribunaux que dans la littérature, a ainsi été le théâtre de combats qui peuvent entrer en résonance avec ceux d’aujourd’hui.
Et il est intéressant de voir que les mouvements féministes contemporains sont allés chercher la figure de la « sorcière », devenue un symbole de la lutte contre la domination patriarcale... (poke @monachollet !)
Contrairement à ce qu’on pense souvent, la « chasse aux sorcières » caractérise surtout le XVIe siècle
Néanmoins, dès le XIVe siècle, accuser une femme (ou un homme !) de sorcellerie permet de nuire à sa réputation, mais peut aussi l’envoyer sur le bûcher... Le mot « sorcière », employé uniquement par des accusateurs, garantit alors l’exclusion du corps social
Dans de nombreux cas, devant les tribunaux, le soupçon de sorcellerie participe à construire la "mauvaise vie" des femmes qui sont accusées et contribue à précipiter leur marginalisation et leur condamnation.
C’est le cas par exemple de Casine La Mâtine, entendue au Parlement de Paris en 1414, accusée d’être rebelle, adultère, et d’avoir tué son époux par sorcellerie. Mais elle se défend ! Cf ce super thread de @MGPerbellini :
Lorsque les sources judiciaires le permettent, on voit ainsi que les femmes résistent de leur mieux à l’accusation de sorcellerie. Y compris par la violence : en 1408, à Guise, Marguerite de Flanguys tue son mari qui vient de l’insulter de « putain et sorcière »...
Au Moyen Âge, 95% de la population vit à la campagne et de la terre. Pour les paysans, les grands prédateurs - ours, lynx et surtout loups - ne sont pas une menace lointaine mais un risque économique majeur et permanent.
Dès lors, certains royaumes vont littéralement faire la guerre au loup.
Charlemagne crée ainsi les luparii, des chasseurs de loups professionnels, dispensés du service militaire : faire la guerre contre les Saxons n'est pas plus important qu'éliminer les loups !
A l'heure de faire l'appel et de découvrir les prénoms de nos élèves, saviez-vous que le Moyen Âge est une période marquée par un changement complet dans la manière de nommer les gens ?
On parle de "double révolution anthroponymique", et c'est passionnant. Un thread ⬇️
Première révolution : la fin des noms romains/romanisés et, notamment, du système des tria nomina (Marcus Tullius Cicero). Avec l'arrivée en Occident de peuples germaniques, ces noms passent peu à peu de mode, même si certains survivent (Marcus, Julius, Felix, etc).
A leur place, on voit apparaître des prénoms... germaniques ! Clovis, Sigebert, Dagobert, Galswinthe, Brunehaut... Ou, moins connus, Leutgarde, Fryshilde, Gansbold, Hildevoud, Protline, Framberte... (oui je sais ça fait rêver hein ?)
Un soldat africain pendant la bataille d'Hastings (1066) ? Réponse de médiéviste : 1/ c'est possible ; 2/ c'est très improbable ; 3/ on s'en fiche car c'est de la fiction ; 4/ ces réactions outrées sont très signifiantes.
1/ C'est possible. Les sociétés anciennes sont plus connectées qu'on ne le pense souvent, et l'Afrique, y compris l'Afrique subsaharienne, n'est pas coupée de la Méditerranée. Il y a des flux de biens et de personnes (marchands, soldats, esclaves, pèlerins, etc).
1/ Ces flux ont d'ailleurs laissé des traces archéologiques, y compris en Grande-Bretagne : dans cet article, des fouilles dans un cimetière anglais du VIIe siècle ap JC où on a retrouvé une personne ayant un ancêtre récent originaire d'Afrique de l'Ouest
On a pris notre courage à deux mains avec @HMedievale et on a regardé « Saint Louis raconté par Philippe de Villiers » diffusé dimanche soir sur CNews. On n’a pas été déçu du voyage, car comme toujours de Villiers propose une vision très personnelle...
Un fil à dérouler ⬇️!
Tout d’abord, deux éléments de contexte. 1/ Philippe de Villiers s’est sans doute appuyé pour cette émission sur son livre « le Roman de saint Louis » publié en 2014, qu'on a lu. 2/ L'émission est sortie dimanche 24 août, veille du 25, jour de la Saint-Louis.
Dès le début, Villiers annonce la couleur : « la vie de saint Louis est un trésor. Les enseignements que j’en ai tiré sont des lumières pour aujourd’hui ». Saint Louis « incarne le beau, le grand, le bien [et] notre civilisation, qui est la civilisation chrétienne »
Quand on pense à la Muraille de Chine, on imagine souvent un édifice comme le Mur dans Game of Thrones...
Mais de nouvelles fouilles archéologiques montrent que ces fortifications médiévales avaient des buts variés, et souvent plus civils que militaires. Un thread ⬇️
Ici, on n'est pas dans la partie la plus célèbre de la Muraille de Chine, mais dans ce qu'on appelle le Medieval Wall System, un ensemble de fortifications de 4000km de long construit entre le Xe et le XIIe siècle, essentiellement par la dynastie Jin
Les archéologues ont fouillé une partie du mur et un fortin situés sur la partie mongole de cet ensemble. Or, la surprise, c'est que le mur en lui-même est un simple fossé accompagné d'une petite pile de terre. Aucune efficacité contre une armée d'envahisseurs... !
Au début de l'année 1195, Lothaire de Segni, un clerc qui va ensuite devenir pape sous le nom d'Innocent III, écrit un petit traité intitulé "Misère de la condition humaine". Il est ici traduit et commenté par O. Hanne (@BellesLettresEd). Un thread (déprimant 😅)⬇️!
Ce texte s'inscrit dans le contexte des traités du type "Mépris du monde", souvent écrits par des moines, qui listent les raisons de détester et de se détacher du "monde", càd du siècle, de la vie laïque avec ses tentations et ses péchés.
Classiquement, le futur pape explique ainsi que l'être humain est bien malheureux. Fabriqué par Dieu dans la terre, la moins noble des substances, conçu dans "le vil sperme", il vient au monde au milieu du sang, des larmes et des cris.