Le livre, écrit en France au XVe siècle, recueille plusieurs centaines de devinettes, sous un format « Question / Réponse ». Les demandes sont en rouge, les réponses en bleu. Certaines sont très brèves, d’autres sont de véritables petites énigmes.
Parfois, les devinettes ressemblent à des blagues contemporaines : « qu’est-ce qui a huit pieds, trois culs et une queue ? » => réponse : « deux hommes sur un cheval » (bon, ok, des blagues racontées par des enfants de 7 ans, mais ça reste drôle !)
On devine à travers ces devinettes un humour souvent absurde, du type « blagues des éléphants » ajd. Exemple « pourquoi le coq picore-t-il la paille ? » => réponse : « parce qu’il ne peut pas la mordre ».
Ou encore : « qu’est-ce qui ressemble le plus à la tête d’un bœuf ? » => réponse : « la tête d’une vache ».
(celle-là me fait beaucoup rire)
Les devinettes font appel à un univers à la fois domestique (plein de questions sur des meubles, des outils, les rapports mari/épouse, etc) et agricole/rural (plein de questions sur des arbres, des fruits, des saisons, des animaux).
Certaines devinettes mobilisent des références courtoises et reposent sur des jeux de mots subtils :
« comment offririez-vous aujourd’hui à votre dame une pomme cueillie demain ? »
=> réponse :
« en la cueillant avec la main et non avec le pied »
D’autres mobilisent une culture lettrée, presque universitaire, une forme de virtuosité brillante :
« comment feriez-vous ce que même Dieu ne peut pas faire ? »
=> réponse :
« en parlant à un meilleur que vous ».
D’autres, au contraire, font appel à un humour très scatologique :
« quel est l’arbalétrier le plus habile ? »
=> réponse :
« le pet, qui part vers le talon et remonte vers le nez ». (Spéciale dédicace à @JDDelle_Luche 😉)
A côté de cet humour scatologique, on trouve aussi de nombreuses devinettes mettant en scène des membres du clergé dans des situations pornographiques. Grand classique de l’humour médiéval, qu’on retrouve notamment dans les fabliaux...
Exemple :
« que préféreriez-vous, qu’un prêtre vienne chevaucher votre femme chez vous, ou que vous l’ameniez se faire chevaucher chez lui ? »
=> réponse :
« Sans comparaison, j’aimerais mieux l’amener chez lui »
Ou encore :
« deux prêtres parlaient à deux béguines, je ne sais pas ce qu'ils se disaient, mais bientôt quatre culs se balançaient gaiement »
=> réponse :
« chaque prêtre tenait deux bouteilles de vin et les balançait en parlant ».
Plusieurs de ces devinettes restent encore aujourd’hui assez explicites :
« quel est le plus grand ennemi d’un riche homme à sa mort ? »
=> réponse :
« c’est son plus proche parent, qui attend sa mort pour obtenir ses biens... »
Mais l’humour de ces devinettes nous échappe souvent. Exemple :
« Pourquoi les enfants nouveaux-nés pleurent-ils ? »
=> réponse :
« parce que leur mère n’est plus pucelle ».
Voilà voilà... Comprenne qui peut, en tout cas, a priori, cela ne nous fait pas rire !
C’est parfois littéralement incompréhensible, faute d’avoir les références : un exemple :
« en temps de Carême, préférez-vous inviter un charpentier ou un maçon à votre table ? »
=> réponse :
« évidemment, un charpentier ! ».
Pourquoi ?? Y a-t-il un jeu de mots ? Une référence culturelle disparue ? Une allusion à Jésus, charpentier ? L’humour de cette devinette nous reste opaque, inaccessible. Preuve, et c’est fascinant quand on y pense, que l’humour, comme le reste, change avec le temps
On vous laisse avec une jolie énigme :
« trois moines passaient, trois poires pendaient ; chacun prend la sienne, et il en demeura pourtant deux sur l'arbre, pourquoi ? »
... 🤔❓🔎
A vous de jouer 😉 ! Et, sur ce, bon dimanche !
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Connaissez-vous les 7 péchés capitaux ? C'est comme les 7 nains, généralement on en oublie un...
En 1475, un enlumineur propose une superbe version illustrée dans un Livre d'heures copié à Poitiers (@MorganLibrary MS M.1001).
Un thread ⬇️!
On commence par l'orgueil, en latin "superbia". Le péché est représenté par un beau jeune homme s'admirant dans un miroir, monté sur un lion. En bas, le démon associé au péché est Lucifer, pointant vers une femme dédaigneuse et méprisante...
Numéro 2, l'envie. Incarné par Belzébuth, ce péché est symbolisé par la pie (oiseau voleur) et, en bas, par des gens qui convoitent le bien d'autrui.
Au XVe siècle, on se met à imprimer un peu partout en Europe. Mais l'imprimerie coûte cher et se lancer dans l'aventure exige souvent de dresser un contrat précis entre imprimeur, auteur, éditeur, libraire... Un thread à partir d'un ouvrage récent ⬇️!
Catherine Rideau-Kikuchi édite ici des contrats d'imprimeurs, trouvés dans les archives de plusieurs villes du nord de la péninsule italique, entre 1470 et 1528. Bravo à l'autrice car les recueils de sources sont toujours précieux ! @EditionsCG
@EditionsCG Ici, focus sur un contrat du 22 mai 1499, conclu à Bologne entre Filippo Beroaldo, humaniste, professeur de rhétorique à l'université, et Benedetto di Ettore Faelli, libraire et imprimeur.
Le plus souvent, on y représente des animaux plus ou moins fantastiques et des scènes du quotidien.
Mais, quand on y regarde de près, on s’aperçoit que ces scènes cachent parfois... des violences sexuelles. Un thread ⬇️!
Je vulgarise ici un excellent et passionnant article écrit par @M_PerezSimon et Delphine Grenet @Grenet81020939, dans ce volume. Merci aux autrices qui me l’ont envoyé et ont relu ce fil ! Poke @RCPPMassoc
@M_PerezSimon @Grenet81020939 @RCPPMassoc Les autrices rappellent que ces scènes de violence n’ont le plus souvent pas été vues ni nommées par les chercheurs. Ainsi de cette sculpture de cheminée de Bruges, intitulée « scène de séduction », alors que les gestes de la femme montrent qu'elle repousse une tentative de viol.
Au VIIIe-IXe siècle, les conquêtes arabes balaient la planète. Une question se pose aux gens : faut-il se convertir ? Au milieu du IXe siècle, Hunayn ibn Ishaq, un médecin chrétien de la cour du calife, distingue 6 raisons de se convertir à l'islam. Un thread ⬇️!
Je tire ce thread du livre suivant : Etienne de la Vaissière, Asie Centrale 300-850 (@BellesLettresEd), plus précisément p. 452-457 !
@BellesLettresEd 1/ La force. Lors des conquêtes, les conquérants imposent souvent l'islam à la pointe de l'épée. Mais cela ne dure pas, et ensuite on n'a aucune trace de violence d'Etat généralisée. L'apostasie est en théorie punie de mort mais c'est rarement appliqué.
C'est en forgeant qu'on devient... forgeronne ! Eh oui, au Moyen Âge, on rencontre des femmes forgeronnes dans les sources : pas dans la fiction, dans la vraie vie. Des femmes qui travaillent le fer et le feu, fabriquant armes et outils...
Un thread ⬇️!
Ces forgeronnes sont peu nombreuses. C'est logique. Les sources médiévales s'intéressent le plus souvent aux hommes, aux chefs de famille, et par ailleurs les femmes sont exclues des guildes ou corporations, et donc des sources de ces institutions.
Mais on en croise de temps en temps ! Ainsi de cette "Alice la Haubergière", c'est-à-dire littéralement "la fabricante de hauberts", active dans les années 1300-1310 à Cheapside (Angleterre), ou de "Eustacha l'Armurière", active en 1348.
Y a-t-il un "techno-féodalisme" ? Cette comparaison est très présente en ce moment...
Petit fil pour montrer 1/ pourquoi le concept est peu pertinent scientifiquement et 2/ pourquoi cette comparaison s'inscrit dans une histoire longue du médiévalisme ⬇️
L’hypothèse du "techno-féodalisme" : l'économie numérique a régressé vers des sites privés, qui seraient en fait de nouveaux « fiefs », dirigés de manière autoritaire par des patrons (= les nouveaux seigneurs), imposant leurs outils aux usagers (= les nouveaux serfs).
Selon ces deux auteurs en particulier, cette nouvelle économie serait "féodale" car articulée autour de la recherche d'un monopole et d'une rente, et pas du profit. Les techno-seigneurs (= Musk) toucheraient une rente, tout en se déconnectant du système de production.