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Sep 4, 2020 12 tweets 3 min read Read on X
4 septembre... comme le 4 septembre 1870, jour de Proclamation de la IIIe République.

Profitons de cette date pour expliquer brièvement comment la naissance de la IIIe République illustre notre thèse (avec @saintvictor75) d’un républicanisme français pluriel et dialectique. Image
1. Ce 4 septembre 1870, le camp républicain qui avait perdu tout espoir de voir revenir la République après les résultats du plébiscite du 8 mai 1870 s’empare de l’Hotel-de-ville à la faveur de la défaite de Sedan, de l’abdication de Napoléon III et d’un soulèvement populaire.
2. Mais cette proclamation du mot, plus petit dénominateur commun des hommes sur le balcon de l’Hotel-de-Ville, ne dit rien du contenu du nouveau régime. Alors recommence, comme en 1848, l’affrontement interne au sein de la République.
3. L’erreur classique est de voir (de façon négative ou positive) la Rép. comme un bloc monolithique et homogène.

En réalité, comme nous l’avons mis en lumière avec @saintvictor75 dans notre #HistoiredelaRépublique, la République en France est le fruit d’un processus dialectique
4. La République advenue en 1870 illustre cette tension interne qui couve entre les différentes « sensibilités » républicaines depuis 1792 et qui ne vont pas tarder à se combattre.
5. Le républicanisme libéral de plusieurs grands noms du Gouvernement de La Défense nationale (Ferry, Simon, Favre, Arago) butte rapidement sur les républicanismes plébéiens et jacobins qui animent les esprits parisiens (Blanqui, Delescluze, Pyat) de la future Commune de 1871.
6. Elles jettent dans le trouble de farouches républicains (Clemenceau, Gambetta, Louis Blanc), opposants au Second Empire, qui ne savent que choisir entre la légalité (nouvelle Constituante) et le
lignage de la Révolution française (résistance parisienne aux Prussiens)
7. Cette lutte fratricide profitera au camp conservateur qui jusque là avait toujours été anti-républicain (même si on en distingue des prémices en 1795, 1799 et 1848) et profitera de l’occasion pour opérer une mue et faire advenir la République conservatrice (Thiers).
8. Méditons cet événement pour s’extirper de la vue un peu courte qui veut jeter l’opprobre sur l’ensemble de la République.

En pénétrant dans son sein saute aux yeux la tragédie de sa véritable existence parcourue de clairs-obscurs.
9. Ainsi, si pour la gauche la Semaine sanglante ordonnée par la République conservatrice de Thiers reste une plaie ouverte, elle doit avoir en tête qu’au même moment c’est au nom de la République qu’elle livre un des épisodes les plus flamboyants de son histoire : la Commune.
10. Ce qu’on appelle alors « la majorité » (derrière Delescluze) se veut l’héritière de 1792 et poursuit le combat commencé à la Révolution française.

Cela donnera un programme qui fascinera jusqu’à Marx et qui dessinera pour lui puis pour les révolutionnaire russes de 1917
l’horizon d’une société idéale : La République démocratique et sociale.

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Nov 13, 2020
"Oblomov" est une figure en Russie aussi évocatrice qu'un "Faust" ou qu'un "Dom Juan".

Retour sur une oeuvre fondamentale de la littérature qui a fascinée aussi bien Pontalis que Levinas, et dont Dobrolioubov dans un article fameux en a fait une doctrine : "l'oblomovisme". Image
1. "Oblomov" (1859) est l'oeuvre majeure de l'écrivain russe Ivan Gontcharov (1812-1891). Il a été considéré comme un livre essentiel dès sa parution par ses contemporains parmi lesquels on trouve Tolstoï ou Dostoïeveski qui ont chacun fait part de leur admiration.
2. L'histoire du roman est bien connue: c'est l'histoire d'un homme qui ne veut pas quitter son divan.

Ce court résumé ne laisse pourtant pas imaginer la richesse de cet ouvrage en tt point extraordinaire. Car derrière cette apparente simplicité se cache un roman philosophique
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Nov 7, 2020
On se demande toujours si cela vaut la peine de gaspiller du temps à critiquer les choix éditoriaux de Stéphane Bern ou la propagande contre-révolutionnaire d'un L. Deutsch, mais puisque beaucoup me demandent mon avis sur la série Netxflix "La Révolution", je vais en dire un mot.
1. En réalité, je ne devrais rien rajouter à ce qu'a dit @jcbuttier : c'est un navet.

Et comme pour tout navet, le seul commentaire à y ajouter devrait être d'encourager à passer son chemin et d'aller ouvrir un livre de Michelet, Quinet, Mathiez, Walter ou Soboul.
2. Mais il y a une chose qui peut et doit susciter plus que ce désintérêt. C'est l'effet délétère que peut produire cette série.

J'ai tendance en effet à considérer que toutes nos analyses doivent partir du réel, des conditions matérielles de vie, de l'ethos populaire
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Nov 6, 2020
L’automne rôde à nos portes et le mois nouveau appelle à relire (ou lire) cette nouvelle souvent délaissée de Flaubert (« Novembre », 1842),
écrit de jeunesse qu’il a un peu renié et qui éclaire pourtant si bien toute son œuvre.
#VendrediLecture #Thread #litterature
1. Il y a « plusieurs » Flaubert.
Le jeune Flaubert, le Flaubert de la maturité et le Flaubert au soir de sa vie.

Le dernier est réactionnaire en atteste ses commentaires sur la Commune,
Celui du milieu - le plus connu - a quelque chose d’un « anar’ de droite », détestant
2. les conventions bourgeoises sans chercher à y substituer une société nouvelle.

Il y a chez ce Flaubert une sorte de refus de ce Monde qui n’investit pas pour autant le souffle socialiste/marxiste de son temps que d’aucuns croient alors régénérateur.
Read 16 tweets
Nov 3, 2020
Pour les amoureux d'Histoire des idées politiques, un petit thread sur un livre peu connu mais à l'influence pourtant majeure sur l'histoire révolutionnaire :

"Que faire" (1863), de Nikolaï Tchernychevski,

ce roman qui a bouleversé Dostoïevski, Lénine, Emma Goldman, Nabokov...
1. "Que faire ?" n'est pas un traité politique mais un roman à première vue assez inoffensif et dont on peine au commencement à comprendre pourquoi il a tenu une place si importante dans la littérature révolutionnaire.
2. Quelque part entre Goethe, Balzac et Dostoïevski, il narre les problématiques amoureuses & sociales de différents protagonistes (Vera Pavlovna, Lopoukhov, Kirsanov) dans un style un peu ampoulé et pas toujours simple à suivre (le problème de traduction est palpable).
Read 22 tweets
Nov 1, 2020
Ici et là, on interroge sur ce que la politique peut et doit répondre à la situation de désolation que nous traversons. Nous ratons, je crois, une étape.

Nous intimons la politique pour masquer que nous avons en grande majorité abandonné son préalable fondateur : le politique.
Nous avons oublié les enseignements de la philosophie politique, nous avons oublié que nous sommes enfants d'une tragédie : nous sommes animal social, condamné à devoir vivre avec les autres.

La création de la Cité découle de cette fatalité, le nomos grec, le jus romain aussi.
La récente gestion de cette donnée par la démocratie est "un accident" comme le dit Moses Finley dans L'Invention de la politique. C'est à dire qu'elle est une nouveauté de l'Histoire, un bien précieux que nous sommes en train de perdre faute de ne plus "penser le commun".
Read 5 tweets
Oct 25, 2020
La Nation est un mot qui pose question. Je le comprends car je ne l’ai pas reçu en héritage et j’appartiens à une génération pour laquelle il est un mot chargé négativement. Je sais bien ce qu’il charrie.
J’ai toutefois décidé de le questionner pour @RevueGerminal
Explications.
1. J’essaie de comprendre d’abord pourquoi ce mot est tant rejeté.
J’y vois 2 raisons principales. D’une part, il est lesté des horreurs du XXe s : les 2 guerres mondiales, le colonialisme, le fascisme, la Shoah. Il est perçu comme le premier domino qui entraîne les autres dans
une réaction en chaîne funeste. Il faudrait dc veiller à ne jamais le remettre debout
D’autre part, l’extrême-drte, qui traditionnellement mobilisait plutôt la monarchie & le catholicisme, use désormais du vocable depuis que la gauche l’a abandonné, créant ainsi un cercle vicieux
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