Hello les Twittos ! Bon, Ça fait un an que je suis sur Twitter et je me suis dit que j’allais faire un petit bilan de mon expérience de chercheur sur le réseau. J’ai trois observations principales. Un peu de pessimisme et un peu d’optimisme. 1/
La première, connue, est celle de la bulle informationnelle et sociale qu’on se crée sur Twitter. D’aucuns disent que Twitter est une machine à biais de confirmation. C’est vrai, c’est documenté, et je pense que Ça crée une polarisation folle. 2/
Mais ce qu’on oublie aussi c’est que, si on est curieux et ouvert, c’est aussi un formidable outil pour aller voir des arguments qu’on n’entendrait jamais dans son réseau proche. Et Ça, c’est une ouverture sur autrui très précieuse à mon goût. 3/
Même si Twitter n’est pas représentatif, cela m’apprend beaucoup sur la diversité des arguments et points de vue. Quand on fait du quantitatif comme moi, lire ces discussions permettent de mieux formuler des hypothèses à tester ensuite. 4/
La deuxième observation en tant que chercheur, c’est bien sûr et hélas la pauvreté de certains débats. C’est très frustrant de résumer des travaux de recherche complexes, avec leur part d’incertitude en quelques lignes. 5/
C’est le jeu, certes, mais Ça me rappelle quand j’ai dû résumer ma thèse en un tweet. 3 ans de recherche en 2 lignes. La science tend vers la complexité, Twitter vers la simplicité. C’est l’exact opposé mais c’est un média important pour diffuser nos conclusions. 6/
Le corollaire c’est que les bons chercheurs ne sont pas nécessairement les plus doués pour Twitter. On a une disproportion parfois folle entre les réalisations académiques et l’audience Twitter parce que cela ne relève pas des mêmes compétences. 7/
Ça me fait mal au cœur de voir de brillants collègues avec une faible audience mais pourtant avec une réputation académique excellente. Twitter n’est pas le monde académique, certes, mais Ça m’attriste car on apprendrait beaucoup à les écouter. 8/
Une chose important que je souhaite rappeler, c’est que l’art est difficile mais la critique est aisée. C’est très difficile de réaliser des travaux, mille choses auxquelles on doit penser. Et c’est très facile de buzzer sur Twitter avec une critique plus ou moins fondée. 9/
Cependant, Twitter est un outil incroyable pour communiquer avec des citoyens intéressés par nos travaux. Je suis admiratif du nombre d’entre vous qui lisez et comprenez des études scientifiques, souvent en tant qu’autodidactes ! 10/
Je ne sais pas si j’aurais la foi, comme vous, d’aller prendre sur mes soirées après de longues journées de travail pour lire la dernière étude dans PNAS. Ça fait beaucoup de bien et Ça me motive de nous savoir lus ! 11/
Le troisième point, qui m’inquiète le plus, c’est la présence d’un discours anti-science et d’un lobby très fort de la part des industriels qui véhicule de fausses informations. 12/
J’ai plusieurs fois échangé avec une journaliste qui affirme, publiquement et manifestement à tort, que l’OMS dit de manger de la viande est nécessaire à une alimentation saine ou alors que les animaux n’ont pas d’émotions. Comment discuter face aux fake news ? 13/
J’ai également un lobbyiste qui reprend mes tweets pour crier à la désinformation quand je partage des publications scientifiques. Ou bien qui interpelle mon employeur sur Twitter, alors que c’est ce même employeur qui a financé, en toute connaissance, les recherches en jeu. 14/
Le paroxysme peut-être à été une discussion sur le projet 20 mesures : alors que Sciences Po avait tout validé, un utilisateur menaçait de saisir la direction pour tromperie. La même direction qui a financé une partie du projet et m’a donné leur logo pour mettre sur le site.🤦‍♂️15/
C’est très déprimant de voir autant de désinformation. Dans le milieu académique, je ne dis pas que c’est parfait, loin de là,mais on peut discuter sur la réalité, sur des faits. Comme voir sur le site que l’OMS ne dit pas que la viande est nécessaire à une alim saine, point. 16/
Un collègue me disait « J’ai vu tes tweets : c’est fou de devoir dire que les animaux ont des émotions, il suffit de vivre avec pour s’en rendre compte ». Oui, mais c’est Ça Twitter parfois, devoir discuter de l’évidence. 17/
C’est discuter face à des lobbyistes (journaliste ou de profession) qui tiennent des discours manifestement faux, avec une assurance désarmante. Qui écoutera le public : le lobbyiste sûr de lui ou les chercheurs qui doutent ? 18/
Alors je trouve cela fatiguant mais je me dis que nous ne pouvons pas leur laisser le champ libre.Ces lobbys ont beaucoup d’argent et si nous, la recherche publique, ne sommes pas là pour rappeler l’évidence, à œuvrer pour l’intérêt collectif, alors la désinformation continue.19/
Malgré tout, je tire un bilan positif de Twitter, surtout au travers des rencontres que j’y ai faites, dont les échanges enrichissent beaucoup ma pensée. Et Ça c’est très précieux. Merci ! 20/20

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