Thread by @FlorentTdOuvill

Pour les besoins de notre article sur les lycées en éducation prioritaire, j'ai dû me pencher dans la jungle des classements réalisés ces 40 dernières années. Allez, suivez-moi dans la jungle, il y a des drôles de trucs.

L'éducation prioritaire, c'est un mot dans l'esprit du grand public : ZEP. Mais en réalité cela fait longtemps que les ZEP n'existent plus sous ce nom. L'éducation prioritaire ce fut et c'est : Clair, Eclair, RAR, APV, PEEP IV, Sensible, Politique de la Ville, REP, REP+ etc.

Au fil des années ces dispositifs se sont parfois succédés, parfois ajoutés les uns aux autres. Au point que 99% des acteurs de l'Education Nationale sont aujourd'hui incapables de faire le point sur qu'est-ce qui est quoi.

Pour les écoles et collèges, la situation s'est relativement (mais pas totalement) clarifiée avec la réforme de 2014 et la création des REP/REP+

Mais en lycée c'est encore la pagaille. Une pagaille sur laquelle j'ai essayé de faire le point dans cet article.
creteil.sgen-cfdt.fr/actu/lycees-en…

Et au coeur de cette pagaille, il y a un classement fantôme. Un classement qui a encore aujourd'hui des effets pour de nombreux personnels. Mais qui n'existe plus vraiment nulle part.

Ce classement c'est le classement "sensible". Ou plus précisément "en zone sensible". Un classement qui date de 1992. Mais dont la liste n'est alors pas publiée... pour éviter les stigmatisations.

Ce classement a-t-il été révisé depuis ? Et bien personne (ou presque) ne le sait. En 2009 une nouvelle liste d'établissements "sensibles" a été établie. Mais rien ne permet d'affirmer qu'il s'agit du même classement "sensible" qu'en 1992.

Et rien ne permet de connaître officiellement les établissements concernés, si ce n'est par le truchement des personnels qui y sont et voient les effets du classement en question.

Le dispositif initial, censé montrer une attention particulière de l'Etat à ces établissements, s'est peu à peu dilué. Seuls demeurent une bonification indiciaire (sorte de prime) et une indemnité pour avoir 2 profs principaux par classe. Pas de quoi changer la face du monde.

Mais les personnels sont légitimement attachés à ces maigres avantages. Et faute d'une quelconque politique ambitieuse d'éducation prioritaire pour les lycées et bien... c'est tout ce qui reste.

La majorité des personnels de ces établissements ne sont souvent pas au courant de l'existence de ce classement et de ses spécificités. Il se mélange avec les autres classements (politique de la ville souvent), d'autres avantages, dans un terme valise : le fameux ZEP

Et ainsi vous pouvez lire ici ou là des articles sur la disparition des ZEP. Qui ont disparu... depuis 2006.

Et voilà donc comment subsiste, au coeur de l'Education Nationale, un classement que personne n'utilise vraiment, dont personne ne parle, qui n'a pas bougé depuis près de 30 ans (ignorant ainsi les évolutions sociales, les constructions etc.)

Un classement dont les bénéficiaires eux-mêmes ne connaissent bien souvent pas l'existence.
Et qui se matérialise uniquement (mais heureusement) sur les feuilles de paye, grâce à l'action de gestionnaires qui se demandent chaque année : mais ça existe encore ça ?

D'ailleurs, est-ce que ça existe encore ? A priori oui. Mais à ce stade je ne suis pas sûr à 100%. Il va sans doute falloir apprendre à la nouvelle secrétaire d'Etat à l'éducation prioritaire que ça existe.

Alors, ce voyage dans la jungle ? Vous voyez que l'Education Nationale réserve de jolis secrets