La « #PMApourtoutes » se fait encore attendre. Mais pas besoin d’attendre 2021 pour trouver des femmes qui se débrouillent pour avoir un bébé entre elles – du moins dans la fiction... La preuve avec un poème irlandais du XIIe siècle ! Un thread ⬇️! #histoire#medievaltwitter
Ce texte, conservé dans un manuscrit appelé le Book of Leinster, met en scène un roi irlandais du VIIIe siècle, Niall Frosach, donnant audience lors d’une foire. Vient le voir une femme avec un bébé, qui a l’air bien embêtée...
Cette femme jure en effet n’avoir pas couché avec un homme depuis des années : elle demande alors au roi d’utiliser son « pouvoir royal » pour trouver la vérité et lui dire qui est « le père charnel de cet enfant ».
Rien d’étonnant jusque-là. L’association entre le roi et la vérité se retrouve très souvent dans les romans arthuriens. L’épisode lui-même fait penser au jugement du roi Salomon, et ce n’est évidemment pas un hasard.
Bon. Le roi réfléchit un peu, puis demande à la femme : « t’es-tu déjà amusée au lit avec une autre femme ? ». La femme dit que oui. Bingo !
Le roi explique alors calmement que « cette femme s’était unie à un homme juste avant, et la semence qu’il avait laissée dans son ventre, elle l’a fait couler dans le tien pendant vos acrobaties ». Le mari de l’autre femme est donc le père du bébé ! CQFD.
Et voilà : dans un texte du XIIe siècle, une configuration qu’on jurerait caractéristique de notre époque, avec un transfert de sperme permettant à une femme d’avoir un bébé avec une autre femme...
Pour les médiévaux, l’important dans l’histoire, c’est le roi et sa parole de vérité. Nos yeux contemporains, eux, s’arrêtent évidemment plutôt sur cette relation lesbienne assumée dans le texte, et présentée comme totalement banale.
De fait, le roi ne sermonne pas du tout la femme. Plus encore : elle se présente en disant qu’elle n’a pas « commis de péché » avec un homme, mais quand le texte parle de sa relation avec une autre femme, il n'emploie pas cette idée de péché
Cela ne surprendra que ceux et celles qui pensent, à tort, que l’homosexualité est unanimement condamnée au Moyen Âge. L'homosexualité masculine n'est en réalité condamnée qu'assez tard et à des degrés très variables - on en avait parlé dans cette vidéo !
Quant à l'homosexualité féminine, elle semble largement banalisée et peu de sources en parlent. Ce qui reflète aussi le fait que les auteurs de textes, très majoritairement des hommes, ne s’intéressent pas à la sexualité féminine
Dans le poème irlandais, ce qui compte, c’est de trouver le père de l’enfant. La femme, qui significativement n’est pas nommée, ne peut visiblement pas l’élever seule, et encore moins bien sûr l’élever avec son amante... Ce n'est tout simplement pas possible à l'époque.
Cela dit, par son absence de condamnation, le poète révèle que ces relations faisaient partie du paysage normal de l’époque : le roi y pense tout de suite, et il n’y a rien de scandaleux à ce que deux femmes, dont l’une est mariée, fassent ainsi des « acrobaties » ensemble.
Le poème est réécrit au XVIe siècle. Là encore, le texte ne condamne pas du tout la relation entre les deux femmes, décrite en termes très explicites : « as-tu déjà joué avec une autre femme ? A-t-elle placé son corps tout contre le tien, s’est-elle étendue entre tes cuisses ? ».
Une autre version va encore plus loin : quand la femme dit que oui, elle a bien couché avec une autre femme, elle explique que c'est parce que sa partenaire, mécontente des prouesses sexuelles de son mari, avait besoin d’une femme pour étancher son désir... !
Ces deux femmes anonymes n'anticipent pas du tout, bien évidemment, sur la PMA moderne. L'histoire n'est pas possible d'un point de vue biologique, et on a vu que pour l'auteur cette relation entre femmes passait au second plan (le vrai enjeu, pour lui, c'est le roi).
Mais l’intérêt de l’histoire est ailleurs. A tous ceux qui aiment convoquer un Moyen Âge homophobe, il est facile de rappeler que la réalité, tant sociale que littéraire, est infiniment plus complexe.
Ironiquement, ce n’est que dans la traduction anglaise de 1938 que l’histoire est censurée : comme quoi notre XXe siècle « moderne » peut être plus frileux que le XIIe siècle... !
C'est en forgeant qu'on devient... forgeronne ! Eh oui, au Moyen Âge, on rencontre des femmes forgeronnes dans les sources : pas dans la fiction, dans la vraie vie. Des femmes qui travaillent le fer et le feu, fabriquant armes et outils...
Un thread ⬇️!
Ces forgeronnes sont peu nombreuses. C'est logique. Les sources médiévales s'intéressent le plus souvent aux hommes, aux chefs de famille, et par ailleurs les femmes sont exclues des guildes ou corporations, et donc des sources de ces institutions.
Mais on en croise de temps en temps ! Ainsi de cette "Alice la Haubergière", c'est-à-dire littéralement "la fabricante de hauberts", active dans les années 1300-1310 à Cheapside (Angleterre), ou de "Eustacha l'Armurière", active en 1348.
Y a-t-il un "techno-féodalisme" ? Cette comparaison est très présente en ce moment...
Petit fil pour montrer 1/ pourquoi le concept est peu pertinent scientifiquement et 2/ pourquoi cette comparaison s'inscrit dans une histoire longue du médiévalisme ⬇️
L’hypothèse du "techno-féodalisme" : l'économie numérique a régressé vers des sites privés, qui seraient en fait de nouveaux « fiefs », dirigés de manière autoritaire par des patrons (= les nouveaux seigneurs), imposant leurs outils aux usagers (= les nouveaux serfs).
Selon ces deux auteurs en particulier, cette nouvelle économie serait "féodale" car articulée autour de la recherche d'un monopole et d'une rente, et pas du profit. Les techno-seigneurs (= Musk) toucheraient une rente, tout en se déconnectant du système de production.
#VendrediLecture Vous connaissez probablement Robin des Bois. Ou du moins... vous croyez le connaître, comme le montre ce livre coécrit par @breton_justine @HMedievale et @JFruoco et publié chez @LibertaliaLivre !
Un thread pour vous parler de ce livre passionnant ⬇️
Le livre se divise en trois parties. Dans la première, @JFruoco revient sur l'origine de la légende de Robin des Bois. La première référence écrite date de 1377, dans un texte qui évoque "les rimes de Robin Hood", preuve qu'il y avait des récits oraux avant leur mise à l'écrit...
@JFruoco Au XVe siècle, puis surtout au XVIe siècle, les contes et ballades de Robin sont mis par écrit. A cette époque, Robin est encore un yeoman, membre d'une classe sociale de petits propriétaires terriens libres. Il illustre une société parcourue par de vives tensions sociales.
En voilà une étrange pièce... Il s'agit d'un dinar en or, frappé en 695.
Mais... l'islam n'interdit-il pas les représentations d'êtres vivants ? Bien vu, Jean-Kévin ! Comment comprendre cette pièce alors ?
Un thread ⬇️!
Les conquêtes arabes sont rapides. Comme souvent lors de la naissance d'une nouvelle entité politique, les Arabes copient d'abord les modèles monétaires pré-existants, en les modifiant légèrement.
On a ainsi des monnaies arabo-sassanides, comme ce dirham d'argent frappé en 675-676, où on retrouve l'effigie d'un roi sassanide, mais avec un texte arabe dans la marge (en l'occurrence la bismillâh).
Les travaux de #NotreDame sont terminés, avant sa réouverture au public le 8 décembre. Visiblement, le résultat est superbe... 🤩👏
Mais au fait, connaissez-vous l'histoire (médiévale) de ce lieu ? Un thread pour tout savoir sur cette cathédrale si spéciale ⬇️!
Comme beaucoup d'églises, #NotreDame a une longue histoire derrière elle. Elle est édifiée sur le (probable) site d'un temple gallo-romain (à Jupiter peut-être), comme le prouve le "Pilier des Nautes" retrouvé en 1711 dans les fondations de la cathédrale (ajd au @museecluny !)
@museecluny C'est là qu'on construit une basilique, au VIe-VIIe siècle. Dès cette époque, l'église a le statut de cathédrale, et elle est alors dédiée à... saint Etienne !
Premier incendie en 857, par les Normands... 🔥
Le retour des "corvées médiévales" ? Pour illustrer cette idée, @EugenieBastie utilise ici une enluminure hyper célèbre, très présente sur Internet notamment.
Et si je vous disais que cette enluminure ne représente pas du tout ce qu'on croit y voir... ?
Un thread ⬇️!
Cette enluminure vient d'un manuscrit copié vers 1320, probablement en Angleterre, peut-être pour la reine Isabelle de France.
En 1553, la reine Marie d'Angleterre acquiert ce superbe psautier, magnifiquement illuminé, d'où son nom de "Psautier de la reine Marie".
Le manuscrit rassemble un Ancien testament, un psautier (donc un recueil de Psaumes), un bestiaire et des vies de saints, le tout en latin avec quelques passages en français. Il est illustré par 800 enluminures, toutes de la main du même enlumineur (ou enlumineuse)