Thread : L’alimentation en Kabylie au XIXe siècle ⵣ🥘
Le couscous est en Kabylie la base de l’alimentation ; il y porte le nom de seksou. Le seksou n’est autre chose que de la farine granulée par une opération manuelle qui entre spécialement dans les attributions des femmes.
Placée dans un vase en terre dont le fond est criblé de trous, cette farine granulée subit une sorte de coction par la vapeur qui se dégage d’un récipient inférieur, qui contient de l’eau, de la viande, des légumes et des plantes aromatiques. 🥣
Les familles qui sont dans l’aisance mangent le seksou guirden, qui est fabriqué avec la farine de froment, les moins aisés, consomment le seksou-n-timzin ou de farine d’orge, le seksou el-bechna ou de farine de sorgho, le seksou ubellout ou de farine de glands. 🌰
Lorsque la pâte est arrivée à un degré de cuisson convenable, on la renverse sur un grand plat de terre vernissée ; la viande est mise par-dessus ; chaque convive creuse dans la pâte avec sa cuillère une cavité dans laquelle il verse le bouillon. 🥄
Ce bouillon, très relevé en goût par une assez forte proportion de poivre et de piment, coloré en rouge par de la poudre de tomate, constitue la sauce du seksou ou la merkâa. Tous les convives sont rangés autour du même plat. 🌶
La viande que l’on met à la marmite pour la préparation du couscous est tantôt de la chair du mouton (aksoum), tantôt celle du bœuf (aksoum bouzgueur).  🥩
La viande est encore assez ordinairement servie, dans les repas kabyles, sous forme de rôti (akanif) ; on prépare de cette façon la perdrix, la caille et, en général, tous les petits oiseaux. 🐥
Malheureusement, la viande n’est pas, pour un grand nombre de Kabyles, la nourriture la plus habituelle : beaucoup n’en mangent qu’une fois par semaine, et s’en procurent le jour du marché.
Pour les plus défavorisés, la consommation se fait seulement lorsqu’un événement important devient l’occasion d’une timecheret ou distribution, à laquelle participent tous les membres du village, riches ou indigents.

Cf timechret :
A chacun des marchés qui se tiennent une fois par semaine dans chaque grande tribu, on abat des bœufs, des moutons en assez grand nombre. 🐂🐑
les gens qui y viennent en foule pour vendre les produits de leurs industries ou de leurs terres retournent rarement chez eux sans consacrer une partie de leurs bénéfices à l’achat d’une provision de viande, si petite qu’elle soit.
Le lait est servi dans presque tous les repas, ou bien frais (aïfki), ou bien sous forme de caillé (tiklitt, agouglou) ; à l’époque des grandes chaleurs, le lait aigri(ir’i) constitue une boisson agréable et rafraîchissante. 🥛
Les principaux légumes qui entrent abondamment dans l’alimentation des Kabyles sont : l’artichaut et le scolyme cultivé, dont les nervures foliales sont mangées crues ou bien cuites dans le bouillon.
De nombreuses variétés de légumineuses proprement dites, pois, haricots, fèves ; auxquelles il faut joindre, par analogie de composition, le gland doux (bellout).
Ces produits féculents sont cuits à l’eau, ou réduits en farine et granulés pour entrer dans la préparation du couscous.
Le pain, préparé avec des farines imparfaitement blutées, se présente sous un aspect assez artisanal. Le levain (ir’es-en-temtount), obtenu par la fermentation d’une petite quantité de pâte pendant 20 heures, est incorporé par le pétrissage à une masse de pâte nouvelle. 🫓
Après les manipulations convenables, cette pâte est divisée en petites portions aplaties, que l’on saupoudre de farine, à la surface desquelles on incruste des graines aromatiques, et que l’on met au four ou dans une casserole de terre.
Le pain ainsi fabriqué (aghrom-en-temtount) est mal levé, et imparfaitement cuit. Une autre espèce de pain (aghrom akouran) est préparé sans levure et avec des farines de qualité très inférieure ; on trouve ce pain dans les ménages, sous forme de galette.
Les fruits abondent en Kabylie et entrent pour une part considérable dans l’alimentation. Le figuier est cultivé partout. Les figues sont séchés pour être conservés pendant l’hiver, sont, par la grande abondance de leur production sont une grande ressource.
Un colporteur kabyle quelconque part pour Alger en n’emportant, comme provisions de bouche pour l’aller et le retour, que deux ou trois galettes de son pain le plus noir et à peine un kilogramme de figues sèches. Les figues de Barbarie.
Les jardins fournissent aussi du raisin délicieux, des poires, des pommes, des melons, des pastèques, etc. 🍎🍉🍇
En résumé, au point de vue de la qualité, le régime alimentaire de la majorité des Kabyles présente la plupart des conditions que l’hygiène peut prescrire : c’est un régime mixte, composé de substances végétales et animales, et qui réunit tous les principes trophiques immédiats.
Au point de vue de la quantité, le régime n’était guère que trop insuffisant dans la Kabylie du XIX e siècle, pour de nombreuses individualités.

• • •

Missing some Tweet in this thread? You can try to force a refresh
 

Keep Current with 𝐇𝐈𝐒𝐓𝐎𝐈𝐑𝐄 𝐊𝐀𝐁𝐘𝐋𝐄 ⵣ🔰

𝐇𝐈𝐒𝐓𝐎𝐈𝐑𝐄 𝐊𝐀𝐁𝐘𝐋𝐄 ⵣ🔰 Profile picture

Stay in touch and get notified when new unrolls are available from this author!

Read all threads

This Thread may be Removed Anytime!

PDF

Twitter may remove this content at anytime! Save it as PDF for later use!

Try unrolling a thread yourself!

how to unroll video
  1. Follow @ThreadReaderApp to mention us!

  2. From a Twitter thread mention us with a keyword "unroll"
@threadreaderapp unroll

Practice here first or read more on our help page!

More from @HistoireKabyle

1 May
Quel est le style de combat des Kabyles lors des guerres et batailles d'Antan ?
Les kabyles étaient réputés pour leur férocité au combat dès lors des expéditions Française en Kabylie, notre style de combat était une sorte de guerilla, nous utilisions notre environnement grâce à une maîtrise parfaite de nos terres
Armés d’un long fusil, d’un sabre droit et d’une paire de pistolets, les Kabyles s’avancent au combat tribu par tribu, chacune marchant sous son drapeau porté par le plus brave.
Read 9 tweets
30 Apr
Thread : Le rôle des Marabouts 👳🏻‍♂️ dans la société Kabyle :
Les Arabes ainsi que les Kabyles ont une grande vénération pour les marabouts, pieux personnages qui remplacent parmi eux les ministres et les ulémas des villes.
Tout individu qui s’est rendu célèbre par ses vertus, par sa probité, par une conduite exempte de cupidité et de violence, enfin par sa grande régularité à s’acquitter des devoirs de la religion, peut devenir marabout ou saint.
Read 14 tweets
28 Mar
[Thread] 📜
La vérité sur la mort du colonel Amirouche 🔰🐺
Une véritable légende s'était édifiée, autour du personnage d'Amirouche. Il était pour les musulmanes de Kabylie un chef invulnérable, qui depuis des mois et des mois tenait tête à l'armée française et à ses chefs les plus qualifiés.
Le général Massu avait lui-même commandé, dans le secteur de Dra-El-Nizan, une opération dirigée contre lui. Les militaires eux-mêmes en étaient venus à le considérer comme leur plus dangereux adversaire.
Read 18 tweets
28 Mar
[Thread] 🔰Il y a 62 ans jour pour jour mourait "Le Loup de l'Akfadou"🐺 à Bou Saâda, ath yerham Rebbi colonel 🤲
⬇️⬇️⬇️⬇️⬇️⬇️⬇️⬇️⬇️
Read 8 tweets
26 Mar
[Thread]📜
Le mythe de "La nuit rouge de la Soummam" ⛰️ Image
Durant la Bleuite (opération française), le commandant Si H'Mimi et Amirouche perpètrent un massacre en 1956 dans la Soummam. Image
Appuyé par les sources coloniales qui traitaient Amirouche Aït Hamouda de terroriste sans pitié je le rappelle, la France se servit de cette évènement en exagérant le nombre de morts. Image
Read 6 tweets

Did Thread Reader help you today?

Support us! We are indie developers!


This site is made by just two indie developers on a laptop doing marketing, support and development! Read more about the story.

Become a Premium Member ($3/month or $30/year) and get exclusive features!

Become Premium

Too expensive? Make a small donation by buying us coffee ($5) or help with server cost ($10)

Donate via Paypal Become our Patreon

Thank you for your support!

Follow Us on Twitter!