Thread by @LarrereMathilde

6 décembre 1986

Malik Oussekine mourrait sous les coups de la police
agé de 22 ans

on n'oublie pas

tristesse

c'était au coeur d'un mouvement contre la sélection à l'Université...
Lycéen-nes et étudiant-es étaient dans la rue
contre la reforme Devaquet...
Une réforme qui voulait instaurer la sélection à l'entrée à l'Université

Les jours précédents, les manifestations des étudiant-es avaient subi des répressions policières et connu des heurts entre manifestant-es et force de l'ordre. Le climat était tendu.
politis.fr/articles/2016/…

Le 4 décembre sur les Invalides, il y avait eu une cinquantaine de policiers blessés, et 2 blessés graves chez les étudiants, dont un avec une main arrachée...

le 5 décembre, une manifestation sauvage part de la Sorbonne, parcours qq rues sur la rive droite avant de revenir à la fac dans l'après-midi sans incidents. s'en suit une occupation de la Sorbonne dans la nuit du 5 au 6 décembre

Les CRS sont mobilisés autour de la fac, attendant l'ordre d'entrer et de vider les occupant-es.

Ordre qui leur parvient le 6 décembre vers 1 h du mat.

la Sorbonne est évacuée...

Au même moment, autre ordre a demandé aux voltigeurs motocyclistes de faire des rondes pour rechercher de prétendus « casseurs »

Ces "voltigeurs" sont deux policiers montés sur une moto ; l’un conduit, l’autre est armé d’une grande matraque de bois dur.
Ils ont été mis en service par Robert Pandraud, ministre délégué à la Sécurité auprès du ministre de l'Intérieur, Charles Pasqua

Pendant ce temps, Malik Oussekine,22 ans, étudiant à l'École supérieure des professions immobilières (ESPI), qui n'avait par ailleurs rien à voir avec les manif et l'occupation de la sorbonne sort d'un club de jazz où il avait passé la soirée.

Mais voila que sans la moindre raison il est pris en chasse par des voltigeurs...
Poursuivi rue Monsieur-le-Prince, Malik Oussekine croise Paul Bayzelon, 26 ans, fonctionnaire au ministère des Finances, qui rentre chez lui, au numéro 20
Paul Bayzelon lui ouvre la porte du hall.

Mais alors que tous deux viennent d'entrer, un des policiers parvient à se glisser à l'intérieur lui aussi et ouvre à ses deux collègues.

Selon le témoignage de Paul Bayzelon, les trois CRS rouent de coups de pied et de matraque, dans le ventre et dans le dos, Malik Oussekine, tombé à terre, qui leur dit pourtant qu'il n'a rien fait

P. Bayzelon essaie de venir en aide au jeune mais est frappé aussi. Il déclarera que les policiers "se sont précipités (sur Malik) et l’ont frappé avec une violence incroyable. Il est tombé, ils ont continué à frapper à coups de matraque et de pied dans le ventre et dans le dos".

Un autre témoin décrira "des taches de sang sur les murs et des éclats de verre des plaques de boîte à lettres - brisées", et le patron de l'hôtel Stella fera le récit des CRS "dans un état incroyable (...) hurlant des ordres comme à la guerre"

Dix minutes plus tard, le SAMU, arrive et tente d'apporter les premiers soins, puis transporte Malik Oussekine en réanimation aux urgences chirurgie à l’hôpital Cochin, où il est déclaré officiellement décédé à 3 h 20 (il était en fait mort déjà sur les lieux)

je me souviens de la cour de mon lycée Charlemagne , en grève, le matin du 6 décembre
On arrivait, on savait pas, y'avait pas les portables, pas FB, pas twitter

et là
l'affreuse nouvelle que nous rapporte une camarade

on était nombreux et nombreuses à pleurer dans la cour

Ce même samedi 6 décembre, Alain Devaquet, choqué par la violence policière, démissionne. (autres temps...)

Le 9 décembre, le gouvernement Chirac enterre la réforme.

Le 10 décembre fut le jour de nombreuses et massives marches silencieuses de deuil à l'appel de la coordination nationale étudiante, de la CGT, de la CFDT et de la FEN

Malik Oussekine est enterré au cimetière du Père-Lachaise, ce même jour du 10 décembre 1986

Le brigadier-chef Jean Schmitt (53 ans) et le gardien de la paix Christophe Garcia (23 ans), les deux voltigeurs directement impliqués dans sa mort, sont jugés pour « coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner ».

Alors que l'avocat général demandait cinq ans de prison dont trois fermes, ils sont condamnés le 27 janvier 1990 à une peine symbolique : respectivement cinq et deux ans de prison avec sursis.

Les deux policiers échappent donc à la prison, alors même qu'ils étaient restés libres durant les trois années qui avaient précédé le procès

le corps des voltigeurs fut alors dissous, mais comme vous le savez, il a été réorganisé depuis 2016. Ils étaient hier pour protéger le meeting de Z*mmour

Le 6 décembre 2006, une plaque commémorative est posée sur les lieux du drame
mais elle est erronée
Malik Oussekine n'a pas été frappé à mort "lors" d'une manifestation, mais le soir, alors qu'il ne se passait RIEN
et la plaque ne précise pas Frappé à mort PAR LA POLICE

Que la terre te soit légère Malik Oussekine, on ne t'oublie pas, on ne t'oubliera jamais
comme aucune autre victime des violences policières