Si je vous dis « Paquette de Metz », je suis presque sûr que cela ne vous dit rien. Pourtant, cette femme du XIVe siècle a eu une vie étonnante. Dont on ne sait rien, ou presque. Et c’est tout l’intérêt...
Je vous raconte ⬇️! #histoire#medievaltwitter
Paquette de Metz apparaît dans trois lignes du récit de voyage de Guillaume de Rubrouck. Ce moine franciscain a été envoyé par Louis IX de France en ambassade auprès du khan mongol, dans un contexte où on pense que les Mongols pourraient se convertir au christianisme
Guillaume fait un long voyage jusqu’au cœur de l’empire mongol, avant de revenir jusqu’à Acre. Il laisse un magnifique témoignage de cette ambassade, dans lequel il décrit les paysages, les coutumes, les pratiques politiques de l’empire mongol.
A la cour du grand khan, Guillaume mentionne « une femme de Metz en Lorraine, nommée Pasca ou Paquette ». Cette femme, qu’on ne connaît par aucun autre document, a selon lui « été capturée en Hongrie ».
Ce qui soulève déjà une question : comment cette Lorraine s’est-elle retrouvée en Hongrie ? Un pèlerinage ? Un voyage commercial ? A-t-elle accompagné un mari, un fils, un professeur, ou voyagé seule ? On ne peut pas le savoir, mais c’est intéressant de se poser la question.
C’est « juste » un exemple individuel, qui évidemment ne peut pas être généralisé, mais qui rappelle que les hommes et les femmes du Moyen Âge sont mobiles, pour plein de raisons. Si vous voulez en savoir plus, cf les supers cours de Catherine Kikuchi :
Paquette a été « capturée en Hongrie », probablement lors des grands raids que les Mongols lancent contre cette région en 1241-1243. On la retrouve ensuite à Karakorum, à... 7000 km de là.
Selon Guillaume, « cette femme nous conta les étranges et incroyables misères et pauvretés qu’elle avait souffertes avant de venir à la cour du khan ».
Là encore, on n’en saura pas plus. On peut donc tout imaginer.
Paquette a probablement été vendue comme esclave, peut-être plusieurs fois. Elle a dû passer par plusieurs pays, apprendre plusieurs langues. Tout en conservant, de toute évidence, son identité, en tout cas assez pour se présenter comme « Paquette de Metz » à un voyageur français
A la cour du khan, elle fait partie de l’entourage de Chubei, l’épouse du khan Möngke. Cette dernière est chrétienne : c’est même ce qui motive l’ambassade de Guillaume. Paquette est donc plutôt haut placée, même si son rôle précis nous échappe.
Elle a également fondé une famille sur place : selon Guillaume, « elle était à son aise et avait quelques moyens, ayant un jeune mari russien, qui s’entendait fort bien aux bâtiments, et dont elle avait trois beaux enfants ».
On n’en sait pas plus. Son mari « russien » est probablement un chrétien, en tout cas pas un Mongol. Ses enfants vont sûrement grandir et vivre en Mongolie. Sont-ils chrétiens ? Vont-ils le rester toute leur vie ? Encore une fois, aucune idée.
Voilà : trois lignes, au détour d'un texte, pour évoquer une femme née à Metz qui termine sa vie au cœur de l’empire mongol. Contrairement à Guillaume ou à Marco Polo, elle ne nous a pas laissé de récit de ses voyages. Mais quand même, quelle vie elle a dû avoir... !
Ces trois lignes n'ont l'air du rien. Mais ce sont sur ces lignes, et sur les vies qu'elles évoquent, que les historiens et historiennes travaillent. Derrière les grandes figures de Marco Polo, combien de Pâquettes anonymes qui ont traversé les continents ?
• • •
Missing some Tweet in this thread? You can try to
force a refresh
Vous avez (trop) chaud ?
Et si je vous disais que durant les croisades, les croisés ont eux aussi souffert de la chaleur, au point parfois... de mourir ? Je ne sais pas si ce thread va vous rafraîchir, mais ça vous cultivera... Un thread ⬇️!
La chaleur frappe violemment les croisés quand ils arrivent en Orient. Les chroniques de la croisade le répètent tout le temps, preuve que ça a marqué les contemporains : "les nôtres étaient brûlés par la chaleur dévorante", "la chaleur avait grandement affaibli l'armée"
Les mois d’été sont les plus redoutables. Les auteurs mettent en garde contre le « redoutable mois d’août » ou encore contre « juillet, mois insupportable à cause de l’ardeur du soleil ». Autant que possible, on décale les opérations militaires pour éviter d'agir en plein été.
"Ici commence une chanson d'une rare violence : jamais de notre temps n'en fut de meilleure !"
La chanson de geste de Garin le Lorrain, aujourd'hui bien oubliée, fut pourtant la plus appréciée du Moyen Âge... Un thread, plein de morts et de tragique ⬇️!
Cette chanson est la plus copiée au Moyen Âge : connue par 21 manuscrits, contre seulement 7 pour la Chanson de Roland.
Composée au XIIe siècle, c'est aussi la plus longue, avec 18 000 vers : 520 pages dans la nouvelle traduction, superbe, par JP Martin chez @HonoreChampion
@HonoreChampion Cette chanson raconte la longue guerre qui oppose deux lignages (mythiques), au temps (mythique) de l'empereur Pépin.
Dans une guerre sans merci s'affrontent les Bordelais (le comte Fromont et son fils) et les Lorrains (Garin et son frère Bégon).
Au XIIIe siècle, les béguines sont des femmes qui se regroupent pour vivre ensemble, en respectant une règle monastique tout en restant laïques.
Aujourd'hui, je vous partage un superbe texte pour plonger au cœur de la spiritualité de ces béguines, féministes avant l'heure... ⬇️
Ce texte date de la fin du XIIIe siècle. C'est une "disputatio" (exercice classique de l'université de cette époque), un débat, qui oppose un Maître en théologie de l'université de Paris et une béguine.
Dans le texte, la béguine dit "nous", s'opposant au "vous" du Maître.
Vous parlez, nous agissons.
Vous apprenez, nous saisissons.
Vous contrôlez, nous choisissons.
Vous mâchez, nous avalons.
Vous marchandez, nous achetons.
Vous brillez, nous brûlons.
Vous pensez, nous savons.
Vous demandez, nous prenons.
Vous cherchez, nous trouvons.
Dans une conférence donnée hier, J.L. #Melenchon parle de l'histoire médiévale de l'islam et... il dit n'importe quoi (cf cet extrait). Au menu, raccourcis et erreurs, pour renforcer une vision de l'histoire mise au service d'un discours politique.
Un thread ⬇️!
Précision initiale : comme toujours, je discute et réponds volontiers, je précise mon propos si besoin, mais je bloque les insultes, qu'elles viennent de fachoïdes ou de fanatiques de JLM. Soyons cordiaux, soyons intelligents.
La conférence de J.-L. Mélenchon porte sur la situation géopolitique en Orient aujourd'hui. Elle est disponible ici dans son intégralité. L'extrait qui nous occupe, que j'ai découpé pour mettre dans le premier tweet, est à 1h13-1h15.
Ces petites perles de verre bleu n'ont l'air de rien. Mais elles transforment nos connaissances historiques.
Car ces perles, fabriquées à Venise, ont été retrouvées en Amérique... et elles y sont arrivées AVANT Christophe Colomb. Un thread ⬇️ !
Ces perles de verre d'un beau bleu turquoise ont été retrouvées en 2019-2020 dans des fouilles archéologiques en Alaska, sur trois sites de fouilles différents (Punyik Point, Lake Kaiyak, Kinyiksugvik).
Les analyses au carbone-14 permettent de dater ces sites entre 1397 et 1488.
Oui, c'est une grosse fourchette, mais en l'occurrence l'important est que même le terminus le plus tardif se situe AVANT 1492, donc avant que des Européens ne mettent un pied sur le continent américain (scandinaves du Xe siècle mis à part).
Si je vous dis que c'est un outil incroyablement beau, fascinant, la preuve que le Moyen Âge est aussi une époque de sciences et d'inventions, ça vous donne envie d'en savoir plus ?
Un thread ⬇️!
Les volvelles se trouvent dans des manuscrits. Il s'agit d'un instrument fait uniquement de disques de papiers superposés, qui tournent les uns sur les autres ; cela permet de calculer des trucs, notamment astronomiques.
Ici, MS. Ashmole 370, fait vers 1430 en Angleterre.
Ici, la volvelle indique :
- les 8 directions cardinales
- le cycle des 2x 12h
- les mois
- les constellations du zodiaque
- les jours du calendrier grégorien
- les jours du mois lunaire