"Monsieur, on devait faire un plan chronologique ou thématique"?
Une question récurrente, à laquelle on répond toujours: "ça dépend du sujet." Mais j'ai voulu objectiver cet enjeu de méthode en consultant les rapports de jurys (ENS, agreg) et en comptant. Mini-fil à dérouler (1)
Depuis 2010 il ya eu 39 sujets de dissertation en histoire, pour 19 plans chrono, 14 plans thématiques et 6 propositions mixtes dans les corrigés figurant dans les rapports de jurys. Mais ! un résultat tiré vers le chrono par l'ENS où c'est quasi systématique... (2)
...en grande partie sans doute parce que les programmes ENS sont généralement à cheval sur le XIXe - XXe ce qui permet de dessiner de fortes évolutions chrono. Inversement, en antique et médiévale à l'agreg, le plan thématique semble dominer... (3)
...même si les jurys indiquent systématiquement, avec justesse, que tout bon plan est acceptable, qu'il faut tenir compte du passage du temps dans un plan thématique, tandis qu'il faut éviter de simplement dérouler des faits non problématisés dans un plan chrono (4)
Les rapports, en dépit du caractère normé/normatif de l'exercice, fourmillent en tout cas d'indications & conseils pour y réfléchir ou progresser. Elles figurent toutes sur ce doc dont j'espère qu'il pourra servir aux candidat-e-s et aux collègues (5/fin) parolesdhistoire.fr/wp-content/upl…
(Le doc peut servir au passage simplement de répertoire de sujets, pour qui prépare #agreg ou #ens, et veut avoir une idée effective de ce qui peut "tomber")
PS si vous lisez cela et pensez "cet exercice ultra codifié et dépendant de pareilles recettes n'a aucun intérêt intellectuel" je ne serai pas totalement en désaccord, mais comme c'ets un passage obligé dans la discipline, mieux vaut connaître les règles du jeu pour bien y jouer
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Cette séquence d'une atroce bêtise doit obliger à affronter un des confusionnismes politiques les plus répandus : le "social"/"socialisme" à toutes les sauces y compris à l'extrême-droite , soit pour dire que Vichy/Hitler étaient de gauche, ou que le RN a un programme "social"🧶
Il est évident qu’un très grand nombre d’individus et partis d’extrême-droite 1ère moitié XXe siècle n’arrêtent pas de parler du "social", viennent de la gauche ou extrême-gauche (Doriot, Déat, Mussolini…) ou ont "socialiste" dans leur nom (NSDAP, Parti social français…)
Pourquoi ? Tout simplement parce qu’à l’ère des masses (suffrage universel, presse et radio, politisation populaire) on ne peut plus remporter des succès politiques en ne s’adressant qu’aux notables. Il faut incarner le "peuple", s’adresser à lui, faire des promesses "sociales"
Ça fait des années que la fachosphère est en boucle sur "la gauche était à Vichy / les résistants à l'extrême-droite", générant des memes médiocres. C'est aussi lassant que déprimant, mais je me suis quand même décidé à corriger ce grand n'importe quoi - à toutes fins utiles.
Le livre de Simon Epstein "un paradoxe français" a fait beaucoup de mal aux esprits confus sur ce plan, en illustrant des trajectoires ambiguës de figure de gauche antisémites ou devenues vichyste, faisant perdre de vue à certains l'épine dorsale maurrassienne du régime...
...ainsi que cette simple évidence: des gens passés de la gauche à l'extrême-droite, comme Déat ou Doriot, doivent être considérés pour leur point d'arrivée et non leur point de départ. Pour eux, pour Laval, pour Marquet (etc.), la gauche est un lointain souvenir en 1940.
Imaginons un papier prépublié (1) ayant reçu des critiques (2, 3) qui l’invalident entièrement.
Imaginons maintenant qu’il soit repris en revue (4), sans modification, ni même citer un mot de ces critiques.
Dans quelle discipline serait-ce possible ? Un indice, ça commence par E
Pour qui s'intéresse à ces enjeux, les textes sont accessibles en ligne, en particulier l'article collectif "peut-on faire l'économie de l'histoire" sur @devhist :
Et pour @AEAjournals : how can you publish a paper that has been empirically proven false?devhist.hypotheses.org/3921
Nous n'avons jamais reçu de réponse à ce texte de la part de @CageJulia @saumjha A. Dagorret et P. Grosjean, qui n'ont tout bonnement pas tenu compte des remarques factuelles invalidant leur travail, au point de ne pas les citer dans leur article.
(Mini fil historiographie)
Que disent les mémoires d’HDR de la profession historienne ? Une équipe les a étudiés durant des années dans le cadre de séminaires et d’une ANR. Il en résulte le volume « Histinéraires » (1)
Pas de révélations majeures à mon sens mais plusieurs chapitres intéressants, en particulier celui de B. Müller refaisant l’historique du passage de la thèse d’Etat à l’HDR, et celui de V. Heimendiger qui comprend une analyse quanti des env. 250 mémoires d’HDR étudiés
Christian Delacroix s’interroge sur la place (plutôt modeste) du débat historiographique dans les mémoires d’HDR et livre un « panthéon » assez révélateur des références les plus citées dans ces textes. Panthéon très masculin aussi, sans surprise compte tenu des dates du corpus
Diapo de conclusion du cours d’historio : 10 raisons de faire de l’histoire et de tenir cette discipline pour importante, en écho à la question notée par Marc Bloch dans son Apologie pour l’histoire, "papa, explique-moi donc à quoi sert l’histoire" Quelques explications à suivre.
1. Accroître les connaissances
L’histoire ne « sert » à rien et n’a pas à servir : elle est une science et l’activité de production du savoir se suffit à elle-même (Lucien Febvre, « l’histoire qui sert est une histoire serve »)
2. Répondre à des curiosités et à certaines demandes sociales
Mais il existe des demandes sociales légitimes pour connaître tel ou tel aspect du passé, parfois même formulées par des autorités : l’histoire savante peut éclairer individus et sociétés (ex. mission Matteoli, 1997)
Ok c’était une nazie française qui a envoyé des gens à la mort en les dénonçant, mais c’était « une femme libre au tempérament incandescent »
Si la fiction a bien sûr tous les droits, elle n’a en revanche aucune obligation de sombrer ainsi dans l’indignité @editionsLattes
Ceci ne vaut évidemment pas caution aux violences sexistes de la Libération ni déni de la relative complexité du parcours de Simone Touseau cf. ces travaux
Réaction inspirée par ce post public d’un descendant d’une de ses victimes