14 février... comme le 14 février 1879, jour où la IIIe République décide (à nouveau) de faire de "La Marseillaise" l'hymne national.
Proposition d'une brève analyse afin de déconstruire plusieurs idées reçues sur cette chanson.
Thread (👇)
1. Un hymne d'avant la République
Ecrite dans la nuit du 25 au 26 avril 1792, par Rouget de Lisle, un capitaine du génie de l'Armée française, elle est rédigée alors que la France n'est pas encore "républicaine". Elle ne le deviendra qu'entre le 10 août et le 22 septembre 1792.
2. Un chant guerrier ?
Guerrier oui, impérialiste non. "La Marseillaise" est en effet écrite en réaction à la déclaration de guerre de la France à François II, roi de Bohème et de Hongrie (i.e. l'Autriche), après que ce dernier ait refusé de disperser ses troupes en Rhénanie.
Il n'est aucunement mu par le désir d'invasion. C'est un chant avant tout "révolutionnaire", marqué par l'idée de "défense" de l'oeuvre de la Révolution, qui appelle à un soulèvement nécessaire de tous les citoyens pour répondre aux menaces que font peser la Contre-Révolution.
3. Un chant racialiste ?
Le mot "impur" a pu faire penser à certains qu'il y avait dans "La Marseillaise" une notion de "pureté" du sang. C'est un contresens total, et un anachronisme, liés au prisme déformant des théories eugénistes et racialistes du XIXe-XXe.
Le concept de "sang impur" fait écho à la phrase -"ce sang était-il donc si pur ?"- prononcée par le révolutionnaire Barnave en juillet 1789 après le lynchage de Foullon (et son gendre Berthier), l'intendant général qu'on accusait d'affamer le peuple pour des raisons d'agiotage.
En disant cela, Barnave soulève la question de sa culpabilité et dit Foullon moins innocent que veulent le croire quelques députés de l'Assemblée qui s'indignaient . C'est à cette occasion que Robespierre dira : "M. Foullon a été pendu [...] par arrêté du peuple".
4. "Le chant de l'humanité"
Loin de la caricature du chant raciste et impérialiste qu'on a pu en faire, "La Marseillaise" chante l'air sacré de la liberté, la résistance à l'oppression, le peuple victorieux & le combat contre la Tyrannie.
Il dit "tous les peuples sont nos amis"
C'est cette spécificité qui conduira "La Marseillaise" tout au long du XIXe et du XXe a être chantée par des mouvements révolutionnaires du monde entier et à devenir "un des chants qui appartiennent à l'humanité" (M. Vovelle)
"Oblomov" est une figure en Russie aussi évocatrice qu'un "Faust" ou qu'un "Dom Juan".
Retour sur une oeuvre fondamentale de la littérature qui a fascinée aussi bien Pontalis que Levinas, et dont Dobrolioubov dans un article fameux en a fait une doctrine : "l'oblomovisme".
1. "Oblomov" (1859) est l'oeuvre majeure de l'écrivain russe Ivan Gontcharov (1812-1891). Il a été considéré comme un livre essentiel dès sa parution par ses contemporains parmi lesquels on trouve Tolstoï ou Dostoïeveski qui ont chacun fait part de leur admiration.
2. L'histoire du roman est bien connue: c'est l'histoire d'un homme qui ne veut pas quitter son divan.
Ce court résumé ne laisse pourtant pas imaginer la richesse de cet ouvrage en tt point extraordinaire. Car derrière cette apparente simplicité se cache un roman philosophique
On se demande toujours si cela vaut la peine de gaspiller du temps à critiquer les choix éditoriaux de Stéphane Bern ou la propagande contre-révolutionnaire d'un L. Deutsch, mais puisque beaucoup me demandent mon avis sur la série Netxflix "La Révolution", je vais en dire un mot.
1. En réalité, je ne devrais rien rajouter à ce qu'a dit @jcbuttier : c'est un navet.
Et comme pour tout navet, le seul commentaire à y ajouter devrait être d'encourager à passer son chemin et d'aller ouvrir un livre de Michelet, Quinet, Mathiez, Walter ou Soboul.
2. Mais il y a une chose qui peut et doit susciter plus que ce désintérêt. C'est l'effet délétère que peut produire cette série.
J'ai tendance en effet à considérer que toutes nos analyses doivent partir du réel, des conditions matérielles de vie, de l'ethos populaire
L’automne rôde à nos portes et le mois nouveau appelle à relire (ou lire) cette nouvelle souvent délaissée de Flaubert (« Novembre », 1842),
écrit de jeunesse qu’il a un peu renié et qui éclaire pourtant si bien toute son œuvre. #VendrediLecture#Thread#litterature
1. Il y a « plusieurs » Flaubert.
Le jeune Flaubert, le Flaubert de la maturité et le Flaubert au soir de sa vie.
Le dernier est réactionnaire en atteste ses commentaires sur la Commune,
Celui du milieu - le plus connu - a quelque chose d’un « anar’ de droite », détestant
2. les conventions bourgeoises sans chercher à y substituer une société nouvelle.
Il y a chez ce Flaubert une sorte de refus de ce Monde qui n’investit pas pour autant le souffle socialiste/marxiste de son temps que d’aucuns croient alors régénérateur.
Pour les amoureux d'Histoire des idées politiques, un petit thread sur un livre peu connu mais à l'influence pourtant majeure sur l'histoire révolutionnaire :
"Que faire" (1863), de Nikolaï Tchernychevski,
ce roman qui a bouleversé Dostoïevski, Lénine, Emma Goldman, Nabokov...
1. "Que faire ?" n'est pas un traité politique mais un roman à première vue assez inoffensif et dont on peine au commencement à comprendre pourquoi il a tenu une place si importante dans la littérature révolutionnaire.
2. Quelque part entre Goethe, Balzac et Dostoïevski, il narre les problématiques amoureuses & sociales de différents protagonistes (Vera Pavlovna, Lopoukhov, Kirsanov) dans un style un peu ampoulé et pas toujours simple à suivre (le problème de traduction est palpable).
Ici et là, on interroge sur ce que la politique peut et doit répondre à la situation de désolation que nous traversons. Nous ratons, je crois, une étape.
Nous intimons la politique pour masquer que nous avons en grande majorité abandonné son préalable fondateur : le politique.
Nous avons oublié les enseignements de la philosophie politique, nous avons oublié que nous sommes enfants d'une tragédie : nous sommes animal social, condamné à devoir vivre avec les autres.
La création de la Cité découle de cette fatalité, le nomos grec, le jus romain aussi.
La récente gestion de cette donnée par la démocratie est "un accident" comme le dit Moses Finley dans L'Invention de la politique. C'est à dire qu'elle est une nouveauté de l'Histoire, un bien précieux que nous sommes en train de perdre faute de ne plus "penser le commun".
La Nation est un mot qui pose question. Je le comprends car je ne l’ai pas reçu en héritage et j’appartiens à une génération pour laquelle il est un mot chargé négativement. Je sais bien ce qu’il charrie.
J’ai toutefois décidé de le questionner pour @RevueGerminal
Explications.
1. J’essaie de comprendre d’abord pourquoi ce mot est tant rejeté.
J’y vois 2 raisons principales. D’une part, il est lesté des horreurs du XXe s : les 2 guerres mondiales, le colonialisme, le fascisme, la Shoah. Il est perçu comme le premier domino qui entraîne les autres dans
une réaction en chaîne funeste. Il faudrait dc veiller à ne jamais le remettre debout
D’autre part, l’extrême-drte, qui traditionnellement mobilisait plutôt la monarchie & le catholicisme, use désormais du vocable depuis que la gauche l’a abandonné, créant ainsi un cercle vicieux