Thread by @Enthoven_R

Aucun noir (à part Michael Jackson) ne blanchit avec l’âge.
Aucune femme ne change de sexe malgré elle.
Mais tout « jeune » est, à son corps défendant, un futur vieillard.
L’ennemi ("#Boomer") qu’il se donne n’est pas son adversaire ni son antipode, mais son destin👇

Comment brandir comme une vertu en soi le fait (hautement provisoire) d’être jeune ?
Contrairement à l’assignation religieuse, aux pratiques sexuelles ou à la couleur de la peau, la jeunesse n’a aucune chance de durer.

Il n’est pas innocent, en cela, que #OKBoomer ne soit pas
#OKbabyboomer.
Le « baby » est tombé. Car il faut (autant que possible) oublier que les vieillards d’aujourd’hui étaient les bébés d’hier. Le slogan neutralisateur est aussi l’outil du déni.

Ecoutez, pourtant, deux jeunes de 52 et 53 ans se promettre que le monde de demain, « quoi qu’il advienne » leur appartient…

Ecoutez un jeune de 67 ans se moquer des faux-culs de son temps

Ecoutez un jeune mort en 1987 faire la morale à un futur président lui-même encore jeune, qui mourra neuf ans après lui (à 1,00)

Certains s’en sortent en expliquant qu’être jeune, c’est « penser jeune » et qu’à ce titre, on peut être vieux sans être vieux et jeune sans être jeune… Autrement dit, à 100 ans, Greta #Thunberg continuera d’être « jeune dans sa tête ». Pourquoi pas ?

Mais alors, de deux choses l’une : soit on a les idées de son âge (et alors on s’apprête à changer d’idées en entrant dans l’horrible âge adulte), soit on a l’âge de ses idées (et alors la jeunesse n’est pas une affaire d’années, mais seulement une affaire d’opinions).

Ce dilemme est celui de Maupassant dans une merveilleuse nouvelle intitulée « Jadis », où une grand-mère libertine née au XVIII siècle explique à sa petite-fille bigote que quand on croit à l’amour unique, on se promet bien du malheur dans la vie…
fr.wikisource.org/wiki/La_Maison…

Qui est la plus jeune ? Qui connaît le mieux l’avenir ? La centenaire libertine qui se souvient d’avoir aimé de nombreux hommes ? Ou la gamine conservatrice qui veut n’en aimer qu’un seul ? Que faire et que penser, quand les idées sont plus jeunes que les artères ?

Si à vos yeux, malgré ses opinions, c’est la petite-fille qui est la plus jeune, ça veut dire qu’on a les idées de son âge et qu’alors, puisque la vertu d’être jeune est soluble dans le temps, #GretaThunberg deviendra une vieille chouette comme tout le monde.

Si c’est la grand-mère qui est la + jeune (= si on a l’âge de ses idées et que « être jeune » consiste à refuser le conservatisme malgré le poids des ans), alors la date de naissance n’est plus un critère de jeunesse, et il n’y a plus aucun sens à dire « #OKboomer. »

Qui plus est, en se dépeignant flatteusement comme un groupe homogène en guerre contre les méchants ministres et l’incurie des générations précédentes, la « jeunesse » ne fait que reprendre, à l’échelle de la planète, un rôle qu’elle tient depuis la naissance des manifs.

En 1986 en France, la jeunesse de France défilait aux cris de « Devaquet, t’es foutu, la jeunesse est dans la rue ! ». 5 ans + tard, la nouvelle jeunesse criait « Jospin, t’es foutu, etc », puis « Villepin, t’es foutu… », puis Fillon, Darcos, Ferry, bientôt Blanquer ?

Mêmes phrases, mêmes slogans, même enthousiasme et même néant d’effets... Mêmes réformes ajournées aussitôt re-proposées par les successeurs. Les seules variations entre ces conflits jumeaux portent sur le nom du ministre à foutre et la largeur des pantalons. 👍

Comme si les « jeunes » auto-proclamés étaient chargés non pas de changer le monde, mais, au contraire, d’en assurer l’éternelle répétition

Comme si le rôle des gardiens juvéniles du temple, historiquement, était de faire en sorte (en accomplissant les mêmes gestes et en criant les mêmes slogans) qu’à toute époque, l’avenir ressemblât au passé.