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Michaël Mangeon

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Saviez-vous qu’en 1987, à Goiânia (Brésil), 2 ferrailleurs trouvent une source radioactive sur le site d’un ancien hôpital ?

Tout le quartier veut voir et toucher cette mystérieuse substance bleuâtre…

Thread 3 : 1987, l’accident de Goiânia
#nucléaire #radioactivité #médecine

1/ Cette histoire se passe au #Brésil, dans un quartier pauvre de la grande ville de Goîania, capitale de l’Etat de Goiás. Un institut privé de traitement du #cancer, l’ « Institut Goiano de Radioterapia » (IGR) est construit en 1972 au nord de la ville.

2/ Les installations de l'institut comptent notamment des salles de téléthérapie au césium 137 et au cobalt 60. La téléthérapie est une technique de radiothérapie en #médecine #nucléaire dans laquelle la source radioactive n'est pas en contact direct avec la tumeur traitée.

3/ L’appareil de téléthérapie au césium 137 comprend une capsule de source radioactive scellée (dans du plomb et d'acier inoxydable) dans une tête rotative. La source contient 93 g de chlorure de césium radioactif (50,9 TBq de césium 137).

4/ En 1985 l'Institut de #radiothérapie cesse de fonctionner. L’unité de télétherapie au cobalt 60 est déplacée, mais, suite à un différend sur la propriété de l’unité de césium 137, celle-ci est laissée provisoirement sur le site.

5/ Alors que la déconstruction du site débute, l’ancienne salle de télétherapie au césium 137 est encore en place. Malgré la surveillance du chantier de démolition, celui est régulièrement visité et « squatté ».

6/ Le 10 septembre 1987, 2 ferrailleurs, attirés par la présence de métaux de valeur sur le site, se rendent sur place, un jour où la sécurité n’est pas présente. Ils trouvent l’appareil de téléthérapie au césium 137 et sont intéressés par le brillant boîtier en acier inoxydable.

7/ Ils chargent l’appareil sur une brouette et le ramènent dans la maison de l’un des ferrailleurs, située à 500 m du chantier. Ils commencent à démonter l’appareil. Dans les heures et les jours suivants, ils vomissent mais pensent être victimes d’une intoxication alimentaire.

8/ 1 des 2 ferrailleurs a la main qui enfle et va consulter son médecin qui le renvoie chez lui en diagnostiquant une sorte de réaction allergique alimentaire. L’appareil est placé sous un arbre dans le jardin de la maison et l’autre ferrailleur continue de démanteler l’appareil.

9/ Le 18 septembre il perfore la capsule contenant la source et en extrait une partie. Pensant qu'il pourrait s'agir de poudre à canon, il tente de l'allumer, en vain…

10/ Le même jour, il vend l’appareil à un ami qui possède une casse (photo). Une nuit, dans son garage, ce dernier remarque une lueur bleue (Fluorescence ou effet Cerenkov dû à l'absorption d'humidité) émanant de la capsule source. Fasciné, il ramène la source chez lui.

11/ Dans les jours qui suivent, il invite famille et amis à la maison pour voir cette découverte extraordinaire. Un collègue l’aide à retirer des fragments de césium 137 et en ramène chez lui. Plusieurs familles sont alors en contact avec la précieuse poudre...

12/ La nièce du propriétaire de la casse manipule la source en mangeant. Certains vont même jusqu’à enduire la poudre radioactive sur leur peau. Le propriétaire de la casse revend le matériel à une seconde casse le 27 septembre.

13/ Alors que le nombre de malades se multiplie, la femme du propriétaire de la première casse est persuadée du lien avec cette mystérieuse poudre. Elle récupère la source dans un sac et l’emmène, par le bus à l’hôpital le plus proche.

14/ Alors qu’on diagnostique dans un premier temps une maladie « tropicale », les médecins se rendent compte petit à petit du problème.

15/ Un physicien médical équipé d'un scintillomètre (débitmètre de dose avec un détecteur à scintillation très sensible aux radiations) est appelé en renfort. Arrivé sur place, son appareil est directement en butée (au niveau max) et il doit en utiliser un autre moins sensible.

16/ Alors que les pompiers veulent ramasser la source et la jeter dans une rivière, les médecins arrivent à les convaincre de boucler le secteur avec la police.

17/ Dans les jours et semaines qui suivent, les autorités tentent de retrouver les zones contaminées au sein de la ville avec une voiture équipée en appareillage de mesures et un hélicoptère.

18/ Des dizaines maisons seront détruites en raison de la contamination. Dans le jardin de l’un des ferrailleurs, on mesure un débit de dose de 1.1 Gy/h (Le 2 octobre 1987)…D’autres zones seront décontaminées pendant plusieurs semaines.

19/ Les déchets (aujourd'hui enterrés) sont déposés dans une zone de stockage temporaire de près de 3500 m3. L’activité totale récupérée est estimée à 44 TBq, ce qui représentent environ 85 % de la source.

20/ Le stade de football de la ville (un million d’habitants) est réquisitionné pour « dépister » les malades. Près de 130 000 personnes se sont présentées dans les hôpitaux à la suite de cet accident. 250 personnes présentaient des résidus radioactifs sur leur corps.

21/ Au final, 20 personnes ont été hospitalisées dont huit avec un syndrome aigu d’irradiation pour des doses évaluées entre 3 et 7 Gy.

22/ La femme du propriétaire de la casse et deux employés meurent quelques semaines plus tard (entre 4,5 et 5,7 Gy). C’est également le cas de la nièce du propriétaire de la casse (7 Gy). Ils seront enterrés dans des cercueils en plomb.

23/ Certains protagonistes vont néanmoins survivre à de très fortes irradiations. C’est notamment le cas du propriétaire de la casse (7 Gy), ainsi que des 2 ferrailleurs (6,2 et 2,7 Gy).

24/ La région fut durement touchée économiquement suite à cet accident et compte de nombreux cas de dépression dans la population. Les personnes contaminées subirent des discriminations.

25/ Des médecins, anciens propriétaires de la clinique furent condamnés. L'accident a été classé au niveau 5 de l'échelle INES.

26/ PS : Les extraits videos 6, 9 et 11 sont tirés du film (fiction se basant sur les faits) « Césio 137, O Pesadelo De Goiânia (1990) ». Les autres photos et vidéos sont directement liées à l’accident.

27/ PS 2 : Volontairement, je ne montre pas ici de photos des brulures liées aux irradiations. Vous en trouverez dans la section photos du rapport de l’AIEA : www-pub.iaea.org/mtcd/publicati…