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Michaël Mangeon

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Saviez-vous qu’en 1957 se déroule un grave accident #nucléaire dans le complexe militaire soviétique de Maïak ? 60 ans plus tard, un nuage radioactif survole l’Europe…ravivant le souvenir de cet événement.

Thread 2 : 1957, l’accident de Kychtym ⚛️🤯

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1/ Pendant la Seconde Guerre mondiale, des espions amènent à Staline des preuves de l’existence de programmes nucléaires occidentaux. Le dirigeant soviétique décide de lancer en 1942 le développement d’une bombe atomique dirigé par le physicien Igor Kourtchatov.

2/ Après le largage des bombes US sur Hiroshima et Nagasaki, c’est dans la discrétion que le premier réacteur (de #recherche) russe démarre en décembre 1946 dans l’institut Kourtchatov de Moscou. Le réacteur F1 à l’uranium « naturel » est modéré au graphite et refroidi à l’air.

3/ Les soviétiques souhaitent rattraper leur retard sur les #USA. Résultats : les recherches se déroulent à un rythme effréné. Dès l’autonome 1945, la prospection géologique commence pour chercher l’emplacement d’un site #nucléaire militaire dans une zone proche de l’Oural.

4/ Le choix se porte sur un site entouré de lacs et de rivières. En février 1946, la conception du site est terminée et la construction démarre en avril. Dès octobre 1946, les premiers « atomistes » russes arrivent dans le dénommé « complexe 817 ».

5/ Les installations sortent de terre : un réacteur #nucléaire de production de plutonium (réacteur "A"), une installation radiochimique et une installation métallurgique... L’idée est simple : obtenir rapidement une bombe atomique.

6/ A proximité du site, une ville est construite pour les travailleurs de Maïak : Tcheliabinsk-40 dans l’oblast (région russe) de #Tcheliabinsk, non loin de la ville de Kychtym.

7/ Tcheliabinsk-40 et le site #militaire qui prendra le nom de Maïak (ou Mayak) sont des zones fermées. « Sécurisées » par le NKVD (Commissariat du peuple aux Affaires intérieures) et gardées par des miliciens, elles n’existent sur aucune carte.

8/ Le réacteur A « Annouchka » (graphite comme modérateur et l'eau légère comme réfrigérant) démarre le 22 juin 1948. Le 29 août 1949, la 1ere bombe atomique russe (RDS-1/plutonium/22 kt) explose sur le site d'essai de #Semipalatinsk. Le monde entre dans la guerre froide.

9/ Dans la course à la bombe et à une époque où les connaissances sur les effets de la radioactivité sont limitées, les problématiques de #sûreté nucléaire, de #radioprotection ou de gestion des déchets sont secondaires.

10/ Dans les premières années de fonctionnement du site de Maiak, les doses reçues par les travailleurs sont très importantes. Pour l’année 1951, la moyenne annuelle de dose reçue est d’environ 1 Sv ! (La limite est aujourd’hui de 0,02 Sv pour les travailleurs du nucléaire).

11/ De même, à l’époque, on considère que les fleuves et rivières permettent de diluer la radioactivité issue des déchets nucléaires les plus radioactifs. A la même période, la rivière Columbia sert de déversoir pour les effluents radioactifs du site d’Hanford (photo) aux USA.

12/ Entre 1949 et 1956, les effluents liquides les plus radioactifs du site de Maïak sont directement rejetés dans la rivière « Techa » qui coule dans la zone du site. A partir de 1951, les déchets sont disposés dans le lac appelé « Karatchaï ».

13/ Entre 1951 et 1957, des villages situés à proximité du site sont évacués en raison de la forte contamination de l’eau et de l’air. Il s’agit de la première gestion post-accidentelle d’un territoire contaminé, tracée secrètement par la bureaucratique soviétique.

14/ En 1953, on décide de traiter le problème : on stocke les déchets les plus radioactifs dans des cuves de 300 m3, en acier inoxydable, placées dans des tranchées en béton et partiellement enterrées dans le sol à 2 km du site.

15/ Un système de refroidissement à l’eau mis en place pour ces cuves mais, selon le récit des travailleurs du site, il présente de nombreuses défaillances.

16/ Le 29 septembre 1957 à 16h30, la défaillance du système de refroidissement entraine l’évaporation de la solution liquide contenant les déchets, suivie de la formation de « sels secs » de nitrate et d'acétate.

17/ Un puissance explosion chimique propulse le couvercle de la cuve 25 mètres plus loin et 70 à 80 tonnes de déchets contenant quelque 20 MCi (740 MBq) de radioactivité (51,4 pour Tchernobyl). La plus grande partie de cette radioactivité reste dans la zone du site.

18/ Néanmoins, dans les heures suivantes, un nuage radioactif se déplace vers le nord-est jusqu'à une distance de 300 à 350 kilomètres du site. Les retombées radioactives provoquent la contamination d’une région qui sera nommée : « trace radioactive de l'Est de l'Oural ».

19/ Alors que des milliers de villageois sont évacués et que des liquidateurs tentent de décontaminer les environs, l’accident #nucléaire est gardé secret par les soviétiques.

20/ Si l’accident n’est pas spécifiquement détecté par d’autres nations, des rumeurs (essai nucléaire raté, accident dans un réacteur…) sortent dans la presse les années suivantes. La CIA obtient des informations sur l’événement sans en connaitre la cause exacte.

21/ Maïak n’en a pas terminé de ses déboires. En 1968, le lac Karatchaï, très contaminé, s’assèche. Le vent transporte des poussières radioactives sur les territoires environnants. Jusqu’en 1976, ces différents événements ne font l’objet d’aucune publication.

22/ En 1976, un dissident soviétique, Zoreh Medvedev, dévoile l’existence de l’accident de 1957 dans le journal New Scientist, puis rédige un livre : « Nuclear disaster in the Urals » qui fait l’objet d’un engouement important.

23/ Les experts du monde entier, dont certains doutent de la véracité du témoignage de Medvedev, tentent d’en savoir plus sur le sujet et publient des rapports émettant diverses hypothèses autour de du « mythe » ou de « l’énigme » de Kychtym.

24/ Après Tchernobyl, la politique de la « Glasnost » (transparence) est mise en place (Gorbatchev). Dans une URSS au bord du gouffre, les soviétiques dévoilent officiellement l’accident à l’AIEA en 1989. Il sera classé au niveau 6 sur 7 de son échelle des évènements nucléaires.

25/ De nombreux rapports, russes, puis internationaux sont publiés après 1989 sur la catastrophe et des équipes de scientifiques et d’experts se rendent sur place.

26/ Enfin, comme on peut le voir sur cette magnifique archive vidéo de l’INA, la ville secrète de Tcheliabinsk-40 (devenue Tcheliabinsk-65 entre temps) est rouverte début 90’s et prend le nom d’Ozierk. L’énigme de Kychtym semble enfin résolue…

27/ …Le spectre de l’accident de 1957 va ressurgir à l’automne 2017 : Un « mystérieux nuage » contenant des traces de #radioactivité artificielle (ruthénium 106) survole l’Europe, sans qu’aucun accident ne soit déclaré…

@IRSNFrance

@IRSNFrance

28/ Alors que les spéculations se multiplient, l’@IRSNFrance publie en novembre 2017 une carte issue d’une simulation : la zone de rejet la plus plausible se situerait entre la Volga et l’Oural. Le site de Maïak devient le suspect numéro un.

29/ L’étude conclue que si les conséquences en France sont inexistantes, les zones proches de l’accident pourraient nécessiter une mise en œuvre de mesures de protection des populations.

30/ Une nouvelle étude en 2020 vient confirmer cette thèse et précise que le ruthénium viendrait de combustibles usés de réacteurs civils russes (VVER-440), régulièrement retraités à l'usine de Maïak.

31/ Plus de 60 ans après l’accident de 1957, Maïak n’a pas encore livré tous ses secrets !

Affaire à suivre…
😉

32/ PS 1 : Concernant les photos, beaucoup ne sont pas datées et ne sont pas forcément placées dans l’ordre chronologique. Néanmoins, il s’agit à chaque fois de photos vérifiées. C’est pourquoi vous ne verrez pas de photos de liquidateurs par exemple !

33/ PS2 : Je ne donne pas trop de détails sur les données de contaminations pour éviter un « thread fleuve ». Je peux vous orienter vers des rapports.