Un témoignage à lire +++. Il est bouleversant, il peut être effrayant pour de futurs parents (ou personnes qui envisagent une grossesse) mais il décrit une réalité vécue par un nombre incalculable de femmes.
Le Covid évidemment y joue le rôle de goutte d'eau supplémentaire, de catalyseur des difficultés et d'obstacles préexistants et c'est en cela que les statistiques que j'ai partagé hier sur l'absence de "baby boom" du confinement ne m'étonne guère...
J'aimerais quand même dire un mot sur le concept de "dépression du post-partum". Je sais combien il peut être précieux pour les femmes qui le vivent ou l'ont vécu: parce que nommer le mal c'est déjà un peu le combattre, ...
parce que entendre "madame, vous faites une dépression du post-partum" c'est entendre "je ne suis pas folle, je ne suis pas une mauvaise mère, je n'ai pas échoué là où j'ai l'impression que tout le monde a réussi, c'est "juste" une maladie".
Donc si on est malade, c'est qu'on n'est pas responsable, qu'on n'est pas coupable, qu'on n'exagère pas. Dans notre société, être malade, c'est une vraie reconnaissance de ce qu'on vit.
Mais (oui, j'assume pleinement ce mais) quand on regarde en détails le parcours des jeunes et futurs parents, et surtout des jeunes et futures mères. On lit quoi? Une solitude incroyable, des premières nausées jusqu'aux nuits sans sommeil.
Une angoisse incroyable, pour son enfant à naître, pour soi, pour sa famille. Renforcée par cette odieuse injonction à "ne pas stresser, parce que c'est mauvais pour le bébé".
Une absence totale de soutien de la part de la société. Pas de soutien psychologique, pas de soutien matériel, pas de soutien social. Etre parent, ça reste une affaire d'individu, à peine de couple (vu le peu de temps qu'on accorde au second parent pour être présent)
Sans compter qu'une grossesse, c'est se confronter, parfois pour la première fois de sa vie à la peur de la mort, mais aussi à la déchéance physique (avoir mal, ne plus pouvoir se mouvoir, être dépendante pour les gestes du quotidien)
Comment dans ces cas là peut-on penser dire à une femme "vous êtes malade" "il faut vous faire soigner"? ON les a rendu malades. ON les a poussé jusqu'au bout des limites du supportable, au bout de leurs forces, de leurs ressources physiques et psychologiques.
Quand on me dit "elle a fait d'une dépression du post-partum", je ressens le même genre de chose que lorsqu'on dit "elle a été violée". Non, elle n'a rien fait du tout, elle est VICTIME de cet abandon social dans lequel on plonge les jeunes mères.
Pour moi, pathologiser l'épuisement et les sentiments dépressifs extrêmes des jeunes mères revient pour la société a se dédouaner de l'immense responsabilité qu'elle porte dans cet état.
Alors bien sûr, il reste impensable d'invisibiliser le terme de dépression du post-partum puisque c'est actuellement la seule façon de faire reconnaître ce vécu douloureux partagé par tant de femmes mais...
... il faut absolument garder à l'esprit qu'on ne combattra JAMAIS le problème à sa base, tant qu'on refusera de déconstruire ce cache sexe social qu'est la DPP pour prendre pleinement la mesure de la dimension politique du travail procréatif.

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3 Feb
#chroniquesdedaronne Ca me fait penser à la fois où j'ai accompagné la classe de PS de mon gamin à la visite de l'expo Yoko Ono.
Parmi les installations, il y avait un labyrinthe de verre au centre duquel était placé une magnifique cuvette de WC dorée.
Imaginez déjà un groupe de 10 gamins de 3-4 ans dans un labyrinthe de verre. On leur avait fait tendre les mains devant eux sinon ils se prenaient des beignes toutes les cinq secondes.
Read 7 tweets
27 Oct 20
En tant que journaliste, certes pigiste, mais journaliste non moins, je partage entièrement cet étonnement et plus généralement une incompréhension totale du traitement médiatique de la question du rôle des écoles dans la pandémie.
Dès le mois de mai, je me suis étonnée que les médias se fassent l'écho de l'étude de l'Institut Pasteur sur la contagiosité des enfants sans en relever (ou si peu) les biais.
... que les médias acceptent de donner voix à la Société française de pédiatrie sans leur demander d'argumenter leurs affirmations catégoriques sur la non contagiosité des enfants, qui relevaient pourtant du pur argument d'autorité
Read 19 tweets
2 Oct 20
Qu'on soit pour ou contre l'IEF, cette disposition constituerait un recul historique inédit dans les libertés individuelles. Qui plus est elle n'est justifiée par AUCUNE donnée tangible. Les terroristes français se sont tous assis sur les bancs de l'Ecole de la république.
On peut se satisfaire de cette disposition en pensant qu'elle va faire chier les aristos, les cathos, les amishs bref, les gens qui ne sont pas comme nous. Mais souvenez-vous: on entend le bruit des chaînes que lorsqu'on bouge.
En attendant, pendant que l'opinion publique conspue ce choix pourtant ultra minoritaire et déjà très contrôlé, l'Ecole de la république peut gentiment continuer d'oublier les milliers d'enfants en situation de handicap non scolarisés, les milliers d'enfants qui dorment à la rue
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30 Sep 20
Une réflexion qui me paraît très utile pour dépasser ces débats naphtalinés sur la taille des jupes et la visibilité des nombrils.
Parce qu'au final, on a toutes et tous consciences que certaines personnes sont statistiquement plus touchées que d'autres par les agressions. Par ex, les femmes savent qu'elles auront globalement un peu plus la paix après 35 ans qu'avant 25 (même s'il y a des exceptions!)
Face à cette relative hétérogénéité (je dis relative, car je ne connais pas de femme qui n'a jamais connu aucune forme d'agression sexiste/sexuelle, ou de harcèlement de rue), on ne peut pas s'empêcher de formuler des hypothèses.
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30 Sep 20
Personne n'a néanmoins cru bon d'expliquer en quoi cela serait "contre-productif"? Les médecins expliquent partout que même un masque mal porté vaut mieux que rien. L'argument n'est donc pas sanitaire.
Par ailleurs, cela ne correspond pas aux recommandations de l'OMS, qui exclut seulement le port du masque avant 6 ans. Et non entre 6 et 11 ans, où sans être recommandé en systématique, il avait été pointé comme pertinent dans les zones de circulation active.
Alors que craint-on réellement? Que les enfants de 6 à 11 ans apprennent moins bien avec un masque ou en soit traumatisés ? Comment expliquer alors que ce choix soit fait par nos voisins européens, italiens, allemands, espagnols? Seraient-ils donc tous inconscients?
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28 Sep 20
J'ai une question de curiosité à propos de la découverte que le laboratoire Pasteur de Lille a annoncé lavoixdunord.fr/870155/article…
Pour éviter (entre autres) un effet "gourou phocéen", les chercheur-euse-s, n'ont pas dévoilé le nom de la molécule prometteuse. Mais ils envisagent néanmoins (appel de fonds en cours) de mener des essais cliniques dessus. Ma question est donc...
Dans quelle mesure le nom de la molécule pourra encore rester secret? Dans quelle mesure ne devront-ils pas la dévoiler aux patients recrutés pour le futur essai?
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