On sait depuis Tocqueville que non, la démocratie ne repose pas avant tout sur le fait majoritaire.
Tocqueville met en garde contre la tyrannie de la majorité, c'est à dire contre l'usage du fait majoritaire pour nier les droits des minorités. Il notait donc que la démocratie devait impliquer l'existence de droits qui ne pouvaient pas être soumis au fait majoritaire.
C'est ce qui s'appelle l'Etat de droit. Une condition de la démocratie, à la fois pour faire obstacle au risque de dictature et à l'arbitraire du pouvoir et pour protéger les individus. C'est ce que remettent en cause les gens comme Chevenement ou l'extrême droite.
Un bon exemple de tyrannie de la majorité, ça aurait été si le mariage pour tous avait été soumis au référendum : cela serait revenu à laisser la majorité décider des droits d'une minorité. Or, la démocratie, c'est avant tout l'extension de la liberté et de l'égalité.
Pas le pouvoir de la majorité. La majorité peut mettre au pouvoir un leader dictatorial qui mettrait fin à la démocratie. Il faut donc qu'il y ait des règles et des contre pouvoirs qui l'en empêchent et qui soient en dehors du pouvoir de la majorité.
Pour finir sur Chevenement, si vous cherchez quelqu'un qui rejette explicitement l'héritage des Lumières, inutile d'aller plus loin : c'est ce qu'il fait avec cette déclaration
Donc juste parce qu'on rappelle des principes fondamentaux de la démocratie on se prend une volée de fachos dans les mentions maintenant ?
Ah et des libéraux aussi ? Parce que Tocqueville, c'est un communiste sans doute.
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C'est intéressant la panique morale de Marianne et l'UNI, parce que, en fait, si pour quelque raison que ce soit le nom de Samuel Paty n'était pas sélectionné, ils auraient fait le même scandale.
Si les étudiant•e•s n'avaient pas assez voté pour => panique morale
Si un autre nom avait finalement remporté la sélection => panique morale
Si quelqu'un avait exprimé la moindre préférence pour un autre nom => panique morale
L'idée que l'intersectionalité est un nouveau nom pour la convergence des luttes apparaissait déjà dans une tribune aberrante de Marylin Maeso dans le Monde il y a quelques années. Répéter une erreur ne la rend pas vraie.
A priori ce que reprochent certains a gauche à l'intersectionalité c'est précisément de nuire à cette fameuse convergence des luttes...
C'est rigolo comme la justification économique/marchande est perçue comme légitimité mais la justification individuelle/hédoniste non. Ce qui est reproché aux gens, ici, c'est de ne pas savoir "monter en généralité" comme dirait Boltanski.
Parce qu'il suffit de dire "je veux partir en vacances mais pas pour moi, hein, pour relancer l'économie" et ça devient, visiblement, acceptable.
Ce n'est donc pas tant une intention qui est critiquée qu'un manque de compétences légitimes : celles par lesquelles on justifie ses actes, par lesquelles on transforme ses désirs en nécessités acceptables par d'autres.
Tout est faux dans ce tweet. Les approches portant sur le genre et la race ne sont qu'une toute petite partie des SHS, elles ne suscitent un "champ de bataille" que dans les colonnes des hebdomadaires réacs - il faut sortir de St Germain des Près un jour -
Eribon exerce une influence extrêmement faible sur les shs et particulièrement la sociologie française. Et si Eric Fassin fait un bien meilleur travail, il est loin d'avoir un pouvoir démesuré dans le champ.
La question "à quoi faut-il s'assimiler" est très intéressante et je ne peux m'empêcher de vous repartager cet article de Mirna Safi qui fait le point sur l'évolution des théories de l'assimilation dans la sociologie US cairn.info/revue-sociolog…
En gros, pour le résumer rapidement, la sociologie US est partie, avec l'école de Chicago, d'une conception du processus d'assimilation/intégration des immigrés comme d'un rapprochement à la situation moyenne
Mais ce paradigme classique pose rapidement des problèmes car il exige de définir ce qu'est cette fameuse situation moyenne, ce qui scientifiquement n'a pas beaucoup de sens puisque ça implique d'être normatif
Ce qui est intéressant ici et ce qu'il est important de comprendre je pense c'est que ce genre de travail ne tire pas sa représentativité seulement de l'inférence statistique mais aussi d'une autre modalité de généralisation : un entretien biographique est un cas qui peut
s'étudier en tant que tel. Une trajectoire est le produit de son environnement. En étudiant la trajectoire on peut reconstituer l'environnement. De la même façon qu'un archeologue peut, à partir de quelques vestiges, reconstituer la vie des populations passées.