Thread by @Pr_Logos

1/ J'eusse aimé ne pas avoir encore lu les romans de Jean Echenoz, pour pouvoir en découvrir maintenant l'esthétique du recyclage, la légèreté ironique de son style.

"Le tocsin, vu l’état présent du monde, signifiait à coup sûr la mobilisation.", dans 14

2/ On sait l'influence qu'a eue Manchette sur Echenoz, lui léguant une forme d'humour situ.

"La situation est simple, on est coincés : les ennemis devant vous, les rats et les poux avec vous et, derrière vous, les gendarmes"

3/ Manchette a construit ses romans en oignon: pour accéder aux couches d'humour désespéré, il faut connaitre la littérature politique sur le bout des doigts et apprécier les détournements.

Chez Echenoz, le truffage est sous le regard de tous.

4/ Chez Echenoz, les personnages peuvent dire des choses comme: "L'amour, tu vois, c'est vraiment comme la neige à Paris."

Chez Echenoz, il y a des personnages qui écoutent "Y en a des bien" de Dider Super sur FIP.

5/ Chez Echenoz, des personnages peuvent habiter rue de Pali-Kao, dans le 20ème arrondissement — rue dont l'usine "squat artistique" reste dans les mémoires des gens de ma génération pour ses concerts d'alternatif — dont les débuts des bérus.

6/ J'attends, comme tous ses lecteurs fidèles, les alexandrins parsemés dans les romans. Dans le sublime Ravel, ce début…
"On s'en veut quelquefois de sortir de son bain"
liberation.fr/culture/2006/0…

7/ Dans mon Echenoz préféré, les Grandes Blondes, le début en faux nouveau roman, "Vous êtes Paul Salvador et vous cherchez quelqu'un." et la chute, après un truffage de scènes d'Hitchcock dans cette longue quête de Gloire:
"Il n'a plus peur du vide, elle n'a plus peur de rien."

8/ Echenoz dévoile ce procédé de séduction de son lectorat dans Au Piano, où des frangines déclament
"sur tous les tons le même alexandrin parfait, classiquement balancé avec césure à l’hémistiche (C’est quinze euros la pipe et trente euros l’amour)"
en-attendant-nadeau.fr/2017/12/05/ent…