Thread 2 - 1. En cela, la zététique est dans son fondement une menace pour les représentativités électives, pour le politicien alignant concepts oiseux et chiffres nébuleux, pour les « pompeux cornichons » qu’entartait savamment l'ami Noël Godin et pour toutes les institutions
2. plus ou moins mandarinales confondant autorité et compétence. La zététique dans son programme sert à tirer sur la fausse barbe de Lorànt Deutsch et des frères Bogdanoff, à faire s’envoler les hauts de forme des puissants et montrer que comme dans le conte d’Andersen, certains
3. empereurs sont nus.
Toutefois, avec 2015 de l’explosion YouTube et du nombre de vulgarisateurs qui s’emparèrent du sujet, le travail de terrain et d’éducation populaire propre à des structures comme le @CollectifCorteX par exemple ou les Petits Débrouillards, a régressé, et
4. le caractère subversif de la zététique s’est craquelé. Le problème de l’amateurisme dans le scepticisme n’est pas récent, mais il fut poussé loin quand des vidéastes furent pris, au nombre de pouces bleus qu’ils généraient, pour des experts scientifiques de la question.
5. Plein de bonnes intentions, et non sans talent, le spectacle pédagogique prit le pas sur l’expertise de terrain, et des pédagogues accumulant des milliers d’heures de route, des philosophes du scepticisme ou des spécialistes des sciences de l’éducation se retrouvèrent maintes
6. fois occultés, au mieux par de talentueux orchestrateurs de talk-show modernes, au pire par des opportunistes germanopratins, cela jusque dans des réunions ministérielles.
Les attentats de Paris firent craquer encore quelques coutures de cette zététique malmenée.
7. Des décideurs se revendiquant de la démarche, pensant avoir un certificat d’autodéfense intellectuelle en ayant appris une liste de sophismes ou regardé 3 vidéos, foncèrent tête baissée dans la doxa de la déradicalisation. Si la zététique lave plus blanc les toges des sectes,
8. pensaient-ils, elle devrait laver plus blanc les barbes des salafistes. Mais la prémisse était mineure : en ciblant uniquement le mécanisme religieux, était opportunément évincés tous les aspects endogènes de la question terroriste, depuis le traitement des vagues
9. d’immigration en France jusqu’aux politiques d’interventions militaires dites « humanitaires ». Le doute méthodique que le programme étatique aurait dû instiller se ramollit, probablement sous l’effet humidifiant des mannes de fond débloquées pour l’occasion. D’un coup tout
10. le monde, même parmi ceux qui conspuaient la démarche sceptique quelques heures plus tôt, voulut s’emparer qui d’allocations de recherche sur la question, qui de programmes d’interventions en milieu carcéral, permettant tous les excès (le stage proposant des jeunes rentrés du
11. Jihad du sabre à caresser des hamsters en étant certainement le plus navrant).
La période YouTube et post-attentat teinta la zététique, devenue enfin populaire, d’une certaine incohérence intellectuelle. Comme le Dieu de Pascal, la zététique était devenue une sphère infinie
12. dont le centre était partout et la circonférence nulle part. Tout le monde pouvait y tailler sa blouse à sa convenance. Là où le programme critique de départ se voulait sans limites, même et surtout envers soi-même, chacun put se complaire dans des positions parfois
13. pantouflardes : prompt à débunker l’homéopathie, les croyances New Age et les allégations paranormales, mais beaucoup moins à aller regarder les détails des branches sur lesquelles le zététicien moderne de la génération Y est assis : patriarcat, privilège raciaux,
14. méconnaissance des sciences humaines et sociales, en particulier des minority studies. Se sont produits des paradoxes étonnants : des YouTubers faisant de la critique des médias, et écornaient efficacement Le Point ou La Croix, sans toucher au fonctionnement délinquant de
15. leur plate-forme, ou des réseaux sociaux, pourtant autrement plus puissant que Le Point, sur lesquels ils relaient leurs contenus. Des célébrités du milieu encouragent à acheter leurs ouvrages chez Amazon, sans penser à mal, mais sans égard par exemple pour la politique
16. d’écrasement des librairies ou du référencement des petites éditions.
Des œillères permettent à d’aucuns de déceler adroitement un biais d’échantillonnage dans une étude sur la réflexologie plantaire, et de passer à côté du même biais dans un papier sexiste. À d’autres
17. dénoncer à juste titre les conflits d’intérêt de certains médecins, comme Jacques Benveniste, ou Andrew Wakefield, sans rendre visibles leurs éventuels liens d’intérêts, entre autres avec la plate-forme de diffusion hégémonique qui les rémunère s’ils dépassent un certain
18. seuil d’abonnés. Mohammed Mansouri, directeur délégué de l’autorité de régulation professionnelle de la publicité, regrette que 55 % seulement des influenceurs prennent soin de préciser clairement leurs partenariats et placements de produits, – et en appelle d’ailleurs à
19. l’apprentissage d’un Code de la route en influence marketing (4).
Après Word et PowerPoint, l’intrusion fracassante d’outils propriétaires comme Skype, Zoom et autres Discord, irrespectueux des données privées suscita peu de réaction. On connaît le flygskam, désignant la
20. honte ou le sentiment de culpabilité de se déplacer en avion : la philosophie du logiciel libre, elle, qui repose sur sensiblement les mêmes points que la zététique, n’a pas encore inspiré le GAFAMskam, et s’il est pratiquement impensable de se passer désormais de ces plate-
21. formes, au moins cultiver un petit scrupule de produire de la vulgarisation semi-franchisée
Alors que la zététique était, à l’instar de l’éducation populaire, cultivée comme un bien commun, ans la lignée du laboratoire de zététique de l’Université de Nice-S-A, dirigé par
22. Henri Broch (ou de div. associations, du @ComitPara1 à l’OZ), elle a amorcé une sorte de start-upisation, et s’est inféodée à des outils média peu regardantes dudit bien commun. Comble, elle est même devenue suspecte : en présentant leurs luttes de justiciers de la Lumière
23. de la technoscience contre les ténèbres, les gros sabots, légion dans la « communauté zét » et écrasent un peu trop fort les petites fleurs maladroites des contestations populaires. Critiquer les OGM ou les pesticides vous classe facilement bouffeur de fleur. Discuter du
24. spécisme vous ravale vite à naïf mystique. Il est souvent difficile d’expliquer aux nouveaux créateurs de contenus ou influenceurs des réseaux sociaux se présentant rationalistes que la virulence d’une critique se nuance à l’aune du rapport de domination. Un sophisme dans la
25.critique du brevetage des semences, ou le refus du puçage des troupeaux par qq éleveurs, est à traiter avec la même méthode, mais pas avec la même force, qu’un sophisme de la plaquette de communication du syndicat agricole technocapitaliste FNSEA, ultra-écrasant.(fin thread 3)
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thread 3-1. En rejetant dans la catégorie hippie une majorité des contestations anti-technologiques ou anti-industrielles, la zététique « hype » ressemble trop à un lance-napalm technolâtre, raillant des questions pourtant centrales sur le plan de la vie publique, comme la
2. propriété des semences ou la casse méthodique de la paysannerie d’auto-suffisance à échelle locale.
Du fait que leur modèle entrepreneurial n’est pas toujours transparent, que leurs liens d’intérêt pas toujours publics, et qu’ils se retrouvent trop souvent du côté du manche,
3. tous les ingrédients sont là pour qu’on suspecte certaines voix actuelles du rationalisme (en particulier à l’AFIS, l’association française pour l’information scientifique) de promotion plus ou moins volontaire d’intérêts économiques dominants.
Thread 1 - 1. La zététique, sur une fine couche de glace - pré-print de l'article dans Manière de Voir/Monde diplomatique
-> là monvoisin.xyz (ou plus bas, en moche)
Vu que dans chaque polémique zététique on me demande mon avis, même quand je n'ai pas suivi, autant
2. prendre le risque de la créer moi-même. Comme conseillait Cocteau, "Puisque ces mystères nous dépassent, feignons d'en être l'organisateur".
Vient de sortir en kiosque le numéro d'oct/nov 2021 de ce magazine, titrant : "Vérités et mensonges au nom de la science". On m'y a
3. demandé deux articles, dont sur les dérives possibles de la zététique.
Ça donne ceci : La zététique, sur une fine couche de glace. monde-diplomatique.fr/mav/179/MONVOI…
Comme je souhaite que @mdiplo puisse décemment vendre son numéro, j'attends pour la mise en ligne du papier dans sa forme
1/ Uɴᴇ sᴇᴜʟᴇ ʜɪʀᴏɴᴅᴇʟʟᴇ ɴᴇ ғᴀɪᴛ ᴘᴀs ʟᴇ ᴘʀɪɴᴛᴇᴍᴘs ᴀᴄᴀᴅᴇ́ᴍɪǫᴜᴇ.
(Pré-print de "Études publiques, éditeurs privés", monde-diplomatique.fr/mav/179/MONVOI… cosigné avec l'incroyable Camille Noûs dans Manière de Voir/@mdiplo, octobre-nov 2021).
2/ Il est plus facile d'aller le lire sur mon blog (là monvoisin.xyz/une-seule-hiro…)
Par rapport à la version papier, s'ajoutent mon analogie avec la mafia des décorateurs (sic !) et ma référence à Jonas Salk. Merci à Hicham Berrada pour l'illustration, série « Présage », 2007.
3/ J'ai bénéficié pour cet article des lumières et critiques d'Edward Ando, @hervemaison, @pdessus, Livia Stahl, Nicolas Pinsault, Philippe Descamps et @dom_muller et tel un minipouce, je me suis hissé sur les épaules de géant·es : @ringo_ring@sci_hub_, @NousCamille,
.
1/ Poggendorff, faire du faux pour avoir l’air vrai
J'aime l'illusion de Poggendorff. C'est un cas génial pour illustrer le fait que les artistes en savent parfois plus long que les scientifiques, et que qqch peut avoir l'air plus vrai s'il ne colle pas strictement à la réalité.
2/ Je m'explique. Notre cerveau distord la continuité d'une diagonale cachée par un obstacle.On jurerait dans l'exemple ici que c'est la ligne bleue qui se prolonge par la noire, et non la rouge. Et pourtant...
3/ Quand j'avais une dizaine d'années, j'avais voulu dessiner pour une raison obscure le drapeau britannique au feutre. Et j'avais bien constaté que les diagonales de l'Union Jack, qui forment en fait la croix de Saint-Patrick... n'étaient pas raccord. Jugez plutôt. Marrant, non?
(1/7) Réponse à l'énigme pour gens qui s'ennuient (niveau 12)
Je la donne puisque des internautes ont tué le game !
Rappel de la question : Quel est le lien (que je viens de découvrir) entre l'effet placebo et le duo Peter and Gordon assez justement oublié à mon avis ?
(2/7) Et non, rien à voir avec le groupe britannique Placebo
Réponse : aucun, c'était pour vous faire écouter de force ce duo improbable.
Je plaisante.
Vraie réponse : l'un des chanteur est le fiston de Richard Asher, père du paradoxe du même nom et élément de la gamme des
(3/7) effets contextuels :
« Si vous pouvez croire avec ferveur à votre traitement, même si des études contrôlées ont démontré qu’il est pratiquement sans effet, alors vous obtiendrez de bien meilleurs résultats, vos malades iront beaucoup mieux, et vos revenus aussi. Cela