ANDRÉ MARIE MBIDA, LE PREMIER MINISTRE REBELLE :: #CAMEROON
Par Mouna Mboa
Ainsi présenté, André Marie Mbida n’apparait pas dans toute sa dimension. Il faut relever qu’il avait travaillé pour le Trésor Camerounais, avait été agent d’affaires avec à l’époque,
des revenus mensuels qui se situaient entre 500 000 et 1 000 000 de FCFA. C’est dire que l’homme disposait d’un pouvoir d’achat le mettant à l’abri du besoin. Mais pourquoi avoir embrassé la politique ?
C’est la question que beaucoup d‘observateurs se posent encore aujourd’hui. Etait-ce par conviction ou dans le but de s’enrichir ?
Militant convaincu ou opportuniste ?
Traiter André Marie Mbida d’opportuniste serait une erreur monumentale. Il aura été le contraire de ce que d’aucuns pensent. Il était tout dévoué à la cause des travailleurs et des paysans du Cameroun.
C’est en ce sens qu’il créé le mouvement traditionnel de promotion culturelle dénommé Anacsama. Et c’est à cause de son militantisme qu’il claque la porte du Bloc Démocratique Camerounais (BDC) alors qu’il venait d’être élu député à l’Assemblée Territoriale du Cameroun (ATCAM)
pour fonder le Comité de Coordination du Cameroun (COCOCAM). Sa rupture d’avec le BDC de Louis-Paul Aujoulat aurait pour origine des soupçons de trahison de ce dernier à l’endroit d’André Marie Mbida qui ne l’aurait pas supporté.
Mais Abel Eyinga, de regrettée mémoire, lui pensait que l’origine de la rupture entre Aujoulat et Mbida était le fait que Mbida avait réussi à se faire élire à l’Assemblée nationale Française et qu’Aujoulat avait été battu par lui. Une possible affaire de jalousie.
Il avait écrit dans son ouvrage « Élu malgré tout Mbida tire les conséquences de l'attitude du laïc missionnaire en rompant définitivement avec lui, avec l'organisation des "aujoulatistes" aussi: le BDC ». Et à la suite de la répression sanglante de la réunion de l’Union des
Populations du Cameroun (UPC) convoquée par Félix Rland Moumié, l’administrateur colonial Roland Pré avait ordonné l’arrestation massive des militants de ce parti dont il avait auparavant décidé de la dissolution.
C’est alors qu’André Marie Mbida se fait remarquer au cours d’une campagne pour l’amnistie des prisonniers politiques en s’appuyant sur un bulletin ronéotypé dénommé NKU (Le Tam-Tam). Lors des élections législatives du 02 Janvier 1956, dans la troisième circonscription,
il se présente comme le défenseur des petits et propose entre autres actions, le relèvement du prix des produits d’exportation essentiels, cacao et café, et la suppression des intermédiaires qui défavorisent les petits planteurs.
Il défend également les fonctionnaires et les chefs autochtones ou coutumiers qu’il propose de rémunérer et demande une évolution des institutions. Il propose une épuration des cadres dans l’Union française et revendique « un acheminement progressif du Cameroun vers son autonomie
, et plus tard vers son indépendance ». Lors de ces élections législatives, il bat Charles Assalé et Louis-Paul Aujoulat. Le 23 décembre 1956, l’Assemblée Législative du Cameroun (ALCAM) remplace l’Assemblée Territoriale du Cameroun (ATCAM) et
des élections législatives sont organisées. Les candidats étant autorisés à se présenter en leur propre nom, Mbida et ses camarades y prennent part et sont élus. Ils créent alors le groupe parlementaire dénommé les Démocrates Camerounais (DC),
qui deviendra plus tard le Parti des Démocrates Camerounais dont le Docteur Louis- Tobie Mbida, son fils préside les destinées depuis le retour du multipartisme dans les années 90.
Auréolé par cette victoire, André Marie Mbida va poser des actes de bravoure qui seront vite interprétés comme des actes de provocation.
Des actes de bravoure et quelques faits marquants
En septembre 1957, de passage à Paris, il présente le Cameroun comme un Etat-pilote en Afrique. Il affronte ouvertement les Français et décide de mettre un terme à la ségrégation raciale qui prévaut dans les grandes villes et
que l’écrivain Eza Boto décrie fort opportunément dans son ouvrage Ville Cruelle. Il invite par ailleurs les colons à retirer de leurs cafés, les affiches qui portent la mention « interdit aux chiens et aux Noirs ».
Et tout colon accusé de racisme était aussitôt expulsé du territoire Camerounais sur son ordre. On dit d’ailleurs qu’il avait expulsé en quelques mois plus de Français qu’il n’y en a eu en plus de 50 ans d’indépendance.
Ancien séminariste, il s’en prend également au clergé et demande la Camerounisation de celui-ci et on lui attribue l’initiation du mouvement qui conduit à la désignation des curés Camerounais dans diverses paroisses, ce qui lui vaut la haine de Monseigneur Graffin,
Evêque de Yaoundé. Enfin, on peut relever que le 12 Janvier 1958, il crée le Parti des Démocrates Camerounais à Abong-Mbang à l’Est du pays.
Un comité directeur est élu pour la circonstance, un programme politique adopté de même qu’une devise « Dieu-Patrie-Justice-Egalité » et un emblème, le « coq vigilant et courageux ».
Mais le fait le plus marquant de cet homme politique aura été le refus de conduire le Cameroun vers « une certaine indépendance ». Les administrateurs Français verront aussitôt en lui un politicien intelligent et courageux et décideront de mettre un terme à sa carrière politique
qui ne venait que de commencer. Il confirmera cette position lors de l’une de ses envolées. « Pendant 51 ans, vous n’avez pas formé de gens, à présent vous voulez vous en aller : pas question ».
Des faits qu’il confirmera le 27 février 1959, devant la Quatrième commission des Nations Unies, en même temps que le rejet de l’Union Française.
C’est encore lui qui introduit à l’Assemblée Législative du Cameroun (ALCAM) le 24 Octobre 1957, un projet de loi portant création de l’emblème du Cameroun et le 26 Octobre 1957, le projet de loi portant adoption de l’hymne officiel, l’ancien « Chant de ralliement »
des élèves instituteurs de l’Ecole Normale de Foulassi et de la devise du Cameroun « Paix-Travail-Patrie ». Et ceci en contradiction avec les dispositions coloniales du statut du 16 Avril 1957 sur l’autonomie du Cameroun qui voulaient que l’Etat sous tutelle du Cameroun
ne devait disposer d’aucun de ces signes de souveraineté. André Marie Mbida rendait-il à la France ce qu’elle-même avait fait des dispositions des
Nations Unies du 19 Décembre 1946 qui imposait à l’administration Française de laisser flotter le drapeau des Nations Unies sur les bâtiments administratifs au Cameroun ?
Last but not the least, le 15 Février 1958 à Paris, André Marie Mbida rompt son affiliation au groupe socialiste SFIO. La goutte d’eau qui fait déborder le vase et le Haut- Commissaire de la République Française corrompt des députés Camerounais
parmi lesquels un certain Njoya Arouna mais également Ahmadou Ahidjo avec 200 000 FCFA pour qu’ils retirent leur confiance en Mbida. La suite, on la connait.
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Réunion de l'assemblée territoriale camerounaise 13 février 1957
En 1922, la France obtient officiellement - sous l'égide de la Société des Nations (SDN) - le mandat sur la plus grande partie du protectorat allemand du Cameroun, tandis que le reste du territoire est confié
à la Grande-Bretagne. Le mandat que la France a reçu de la SDN se transforme en 1946 en tutelle dans le cadre de l'Organisation des Nations Unies (ONU). Selon la charte, les puissances coloniales s'engagent à développer la capacité des zones sous tutelle à s'administrer
elles-mêmes, mais les accords de tutelle précisent que la France continue de gérer le Cameroun « comme une partie intégrante du territoire français ». Après la répression des émeutes de Douala de 1945, des intellectuels et syndicalistes camerounais fondent en 1948 l'Union des
Entretien avec le Premier ministre camerounais, Monsieur Ahidjo Ahmadou 10 novembre 1958
Le 10 novembre 1958, le Premier ministre du Cameroun, Ahmadou Ahidjo, est interviewé alors qu'il se trouve sur le point de se rendre à New-York pour demander la levée de la tutelle à l'ONU
et parvenir ainsi à l'indépendance du Cameroun en 1960. Il est également interrogé sur la situation intérieure de son pays, qu'il présente comme « presque normale ».
Après l'adoption de la loi-cadre en 1956, une nouvelle assemblée territoriale est élue au Cameroun, sans la participation du parti indépendantiste, l'Union des populations du Cameroun (UPC), qui est interdit depuis 1955. Cette élection donne logiquement la majorité aux candidats
M. Ahidjo à l'Elysée 14 septembre 1965
Après sa rencontre avec le général de Gaulle, le président du #Cameroun, Ahmadou Ahidjo répond aux questions des journalistes sur la situation intérieure du pays et ses relations avec les autres États africains en présence de Jacques Foccart
Éclairage
Une assemblée territoriale est élue au Cameroun en décembre 1956, mais sans la participation du parti indépendantiste, l'Union des populations du Cameroun (UPC). Interdit depuis 1955, l'UPC est l'objet d'une féroce répression de la part des autorités françaises et
camerounaises. L'élection de 1956 a fait logiquement émerger les personnalités politiques les plus proches des positions françaises, notamment Ahmadou Ahidjo, qui prend la tête du gouvernement local en 1958. La France et Ahidjo demandent en novembre 1958 la levée de
ANDRÉ-MARIE MBIDA, PREMIER MINISTRE, CHEF DU GOUVERNEMENT CAMEROUNAIS : DISCOURS D’INVESTITURE PRONONCÉ, DEVANT L’ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE DU #CAMEROUN LE 15 MAI 1957 À YAOUNDÉ
Monsieur le Président,
Mes chers collègues,
Depuis ces derniers temps, le Cameroun et ses populations voient se succéder une longue série d’importants événements intéressant l’évolution et la vie politique de ce pays.
Ce sont, tout d’abord, les élections législatives du 2 janvier 1956, dont les résultats permirent à un nationaliste camerounais authentique, d’aller se joindre à vos représentants au Parlement français et d’apporter sa contribution aux efforts qu’ils déployaient dans cette
André-Marie Mbida en séjour officiel
Première visite officielle d’un chef d’État camerounais en France #Cameroun 1956
Le Cameroun sous une autonomie très contrôlée
Un décret signé le 16 avril ar le gouvernement français octroie au Cameroun, le statut d'Etat sous tutelle lui conférant une autonomie très limitée, étape transitoire vers l'indépendance. En effet,
la puissance coloniale continue de disposer de larges pouvoirs en matière de politique, commerce et relations internationales mais également en matière d'économie, justice et sécurité intérieure. Elle dispose donc d'un quasi droit de véto sur les affaires internes du Cameroun.
Le docteur Louis-Paul Aujoulat. C’est un catholique français d’origine algérienne. Il arrive au Cameroun en 1935 dans le cadre du processus de la dé germanisation du Cameroun français. Ce jeune médecin crée dans les localités du Sud-Cameroun des dispensaires sous la dénomination
« Fondation Adlucem « . La constitution de 1946 en France crée définit les organes centraux de l’Union française. Aux élections à l’Assemblée française du 10 novembre 1946, parmi les députés du Cameroun Aujoulat est le représentant des citoyens de statut français.
En 1948, Um Nyobé et ses compagnons créent un parti, UPC, dont le programme est l’indépendance et la réunification des Cameroun français et britannique. En 1951, Aujoulat fonde le bloc démocratique camerounais (BDC)