Thread by @jasonkstearns

(THREAD DU LIVRE N°2)
Mon livre fournit quelques leçons générales pour les conflits. Je soutiens que la guerre congolaise est portée par son propre élan, elle est devenue une fin en soi. La violence est devenue systémique, dépassant les intentions d'un seul acteur.

Mais au cœur de tout cela se trouve l'État congolais, le plus important des plus de 120 belligérants présents aujourd'hui. Quels sont les intérêts de cet État ? Je soutiens que ces intérêts doivent être étudiés, et non pas supposés ou ignorés. (2/14)

L'attitude des élites a été marquée par une "involution" : la reproduction et intensification de la violence, malgré le coût pour la population et alors que d'autres approches auraient pu être plus bénéfiques pour ces mêmes élites. (3/14)

Cela est dû en 1/2 à des intérêts économiques. Mais la normalisation de la violence - notamment en cultivant l'apathie au Congo et à l'étranger - et l'essentialisation de l'identité ("c'est comme ça que sont ces Swahilis, ces gens de l'Est, ces Congolais") ont contribué. (4/14)

De l'autre côté de la frontière, au Rwanda, des facteurs différents ont produit un résultat similaire : un investissement dans la violence, même lorsqu'elle ne profitait pas au pouvoir. La culture du FPR, les conflits internes et la concentratn du pouvoir ont joué un rôle. (5/14)

La principale menace pour le FPR provient de sa propre armée et de 🇺🇬; sa légitimité provient en partie de la sécurité et de l'héritage du génocide. Mener une guerre contre les "génocidaires" au 🇨🇩 a focalisé l'attention de l'armée et a rappelé la menace du génocide. (6/14)

Je souligne la "symbiose" du conflit congolais - la mesure dans laquelle il est devenu un intérêt direct des élites congolaises (et jusqu'en 2013 rwandaises). Ceci n'est pas maintenu par une grande conspiration mais par l'apathie et un amalgame d'intérêts individuels . (7/14)

Ce n'est pas très éloigné de ce que @KaldorM a appelé "l'entreprise mutuelle". (8/14)

Les Congolais le savent. "Oyo eza système ya lifelo,"
@KoffiOlomide_MM a chanté, "No Nkunda no job", "Ebola business"... autant d'expressions de cette involution des intérêts, de cette symbiose perverse. (9/14)

Comme @luchaRDC a déclaré : "L'État congolais malade et la communauté internationale confuse sont des partenaires stratégiques. Ils gèrent ensemble les problèmes du Congo." (10/14)

Et la situation n'est pas très différente ailleurs sur le continent. Dans de grandes parties du Nigeria, du Sud-Soudan, de la Somalie, de la Libye et de la RCA, la violence est devenue partie intégrante du système de gouvernance. (11/14)

La (néo-)libéralisation a favorisé et renforcé les conflits armés dans certains endroits. Bakassi Boys, Arrow Boys : la rébellion implique des insurgés à la périphérie qui interagissent avec les élites politiques au centre de l'Etat dans un équilibre violent. (12/14)

Il n'est pas surprenant que la contre-insurrection dans de nombreux États africains ressemble souvent plus à du patronage, visant à coopter des stratégies de régime pour exercer l'autorité en dehors de la guerre. (13/14)

Au Tchad, @m_debos a décrit comment la guerre est devenue un "métier". En Guinée-Bissau @henrik_vigh
a décrit des belligérants oscillant entre amitié et inimitié. @AchilleMbembe1 a parlé de "l'intimité de la tyrannie" sur le continent. (14/14)