Cette défiance se retrouve ailleurs, mais sans doute pas dans les mêmes proportions.
La défiance vis-à-vis de l’exécutif est moins forte en 🇮🇹 et au 🇬🇧, et beaucoup moins forte en 🇩🇪
Cette défiance est notamment liée au fait que les dirigeants français, depuis plusieurs décennies, sont convaincus que la 🇫🇷 a absolument besoin de devenir plus compétitive.
L’idéologie de nos dirigeants ? Nous ne surmonterons nos difficultés qu’avec des politiques de l’offre.
Les politiques menées ? Adaptation à la mondialisation, baisse du coût du travail (et flexibilité), baisse des impôts sur le capital, austérité dans les services publics, etc.
Le problème ? Une majorité de la population 🇫🇷 s’oppose à ces orientations ⤵️
On se retrouve donc avec une classe politique persuadée qu’il est *nécessaire* d’aller à l’encontre des vœux de la majorité sur le plan économique et social.
@fhollande déclarait ainsi : « l’économie de l’offre […] n’était pas mon engagement, mais […] était une nécessité ».
Ce décalage durable (reconduit avec l'arrivée au pouvoir d'@EmmanuelMacron) entre les idées au pouvoir et les aspirations de la majorité des citoyens a trois conséquences majeures pour le pays : 1) Une défiance généralisée 2) De la démagogie 3) Une profonde impuissance
1) Une défiance généralisée
Cela fait longtemps qu’une bonne partie de la population se rend compte qu’elle n’est plus entendue.
Ce sentiment est particulièrement fort au sein des classes populaires.
Une telle défiance produit des effets à chaque crise.
Qu’il s’agisse de pandémie ou d’inflation, les 🇫🇷 sont en général beaucoup plus insatisfaits que leurs voisins. Sans doute est-ce en lien avec le fait qu’ils se méfient beaucoup plus de leurs dirigeants…
Cette défiance, à mon avis, est surtout un symptôme.
Le point de départ est la perte de confiance des dirigeants 🇫🇷 dans les choix sociaux et économiques de la population.
Autrement dit, ce sont les dirigeants qui ont perdu les premiers confiance dans le système démocratique….
2) De la démagogie
Comme le gouvernement dispose d’une base électorale (et sociale) assez étroite, et comme il entend imposer ses arbitrages socio-économiques coûte-que-coûte, il se sent obligé de limiter son impopularité par de la démagogie sur les autres sujets.
Nous avons eu un cas d’école récemment avec #Kohlantess
Au lieu d’user de leur crédit pour élever le débat (surpopulation carcérale, conditions de détention dégradées, question des moyens, réinsertion), @GDarmanin et @E_DupondM ont fait de la surenchère dans l’indignation.
Une certaine démagogie (notamment sur les sujets identitaires et sécuritaires) est en quelque sorte rendue nécessaires par le choix *idéologique* de mener des politiques de compétitivité.
(Une démagogie qui, d’ailleurs, reste sans effet sur les problèmes…)
3) Une profonde impuissance
Des dirigeants impopulaires auront toujours du mal à engager de grandes réformes. Ce qui constitue un vrai handicap dans une période comme la nôtre, marquée par les crises et par la nécessité de nous renouveler largement.
Par exemple, nous vivons au-dessus de nos moyens et il va falloir entreprendre un effort de sobriété énergétique.
Mais comment demander des efforts à la population quand on dépense son (maigre) capital politique pour flexibiliser le travail et reculer l’âge de la retraite ?
Autre verrou idéologique : ne pas augmenter les impôts, même pour les classes supérieures ou les grandes entreprises.
Résultat : endettement pour subventionner des importations de pétrole. Et austérité dans les services publics, malgré les conséquences dramatiques de long terme.
Bref, l’idéologie de la compétitivité (et des politiques de l’offre) de nos dirigeants a, me semble-t-il, des effets majeurs sur la vie démocratique 🇫🇷
Pour tout dire, je crois que c’est bien elle qui est la principale responsable du blocage de notre système politique.
Finalement, comme nous nous rendons de + en + compte que les politiques de compétitivité ne sont plus du tout en phase avec la situation du monde actuel, il est peut-être temps de prendre les devants et de changer de logiciel ⤵️😉
On débat beaucoup de pouvoir d'achat en ce moment. Mais je ne suis pas sûr que les gouvernants se rendent compte que l'on a affaire à un problème SYSTÉMIQUE.
On ne s'en sortira pas en ne prenant que des mesures conjoncturelles (primes, chèques énergie, aides, etc.).
1/14
👇
Le problème du pouvoir d'achat naît de la conjonction de 3 tendances :
1⃣ Un niveau de vie qui stagne depuis 2008.
2⃣ Des dépenses contraintes qui augmentent, surtout pour les classes populaires.
3⃣ Des normes de consommation de plus en plus élevées.
1⃣ Depuis la crise de 2008, le niveau de vie après redistribution augmente au ralenti, voire régresse en bas de l'échelle sociale.
Evolution du niveau de vie médian : +3,6% entre 2008 et 2019 (à gauche).
Evolution du niveau de vie du 1er décile : -0,2% (à droite).
On entend beaucoup parler de ce qui menace nos régimes politiques : l’ingérence de pays autoritaires, l’abstention, « les extrêmes », etc.
Mais on oublie généralement une menace majeure : la perte de confiance de nos dirigeants dans le gouvernement républicain !
Un 🧵
👇
@EmmanuelMacron a refusé le débat au 1er tour des présidentielles.
Aux législatives, il n’y a pas eu de grande confrontation entre #LREM et les principaux partis d’opposition. La #NUPES et le #RN ont plutôt été renvoyés dos-à-dos comme « les extrêmes ».
Comment Emmanuel Macron et ses soutiens voient-ils les choses ?
Je n’ai pas d’informations de première main, mais il est probable qu’ils sont convaincus d’incarner, dans une période difficile, la voix de la raison et de la modération.
L'idée centrale est la suivante :
La sobriété ne devrait pas être vue comme le sacrifice de nos intérêts sociaux et économiques au nom de nos responsabilités écologiques. Car, dans notre situation, la sobriété représente en fait une véritable voie d'amélioration.
Un peu plus en détail :
Nous vivons collectivement au-dessus de nos moyens.
Notre pression sur l'environnement est trop forte. Le pays accumule les déficits. Nous n'avons pas de marges de manœuvre budgétaires pour financer les services publics et préparer l'avenir.
Le #RN est clairement le 1er parti au sein des classes populaires.
Pour que cela change, je crois qu'il faut que la gauche soit capable de convaincre sur 3 choses : l’insécurité, le travail et la crédibilité économique. #UnpopularOpinion
Ne vous fâchez pas, j’explique.
1/36
👇
En 2022, Marine Le Pen a recueilli au premier tour plus d’un tiers des voix des classes populaires (ouvriers et employés).
Par rapport à 2017, elle a même légèrement amélioré son score chez les employés.
Le visuel du report des voix entre 2017 et 2022 montre qu’en l’espace de 5 ans, la gauche n’a récupéré à peu près AUCUNE voix au Rassemblement national !
Cela semble un sujet secondaire dans le débat public.
Et pourtant, il joue un rôle majeur dans les choix économiques de nos dirigeants : la plupart des efforts demandés aux travailleurs visent à stimuler les exportations pour réduire le déficit.
Cela fait longtemps que la guerre est + ou - sortie du champ de l’expérience des 🇪🇺
Du coup, nous sommes un peu démunis quand elle frappe à la porte…
Un 🧵 sur 2 écueils à éviter : 1) oublier le tragique de l’histoire, 2) se laisser emporter par l’ivresse du combat.
👇
(Je précise que je n’ai aucune expertise particulière sur le conflit en cours.
En revanche, comme ma thèse de doctorat critiquait l’idée d’une pacification du monde, j’ai eu l’occasion de regarder un peu les questions liées à la paix et à la guerre ⤵️ academia.edu/12650106/2015_…)
Cela fait un bout de temps que nous, Européens, avons abandonné nos responsabilités internationales aux 🇺🇸
Il s'est agi pendant longtemps de nous protéger contre les chars soviétiques. Et depuis la fin de la guerre froide, nous nous sommes plutôt accommodés de cette situation.