Thread by @simonflandin

Professionnalisation & Sécurité industrielle @ESCPeurope sous l'égide de la @LaFonCSI 230 acteurs et actrices de la recherche et de l'intervention, une journée prometteuse et une contribution de la recherche en formation des adultes de @UNIGEnews

Un constat initial : la formation pro est un levier de développement de la sécu industrielle dont les effets sont généralement estimés insatisfaisants, d'autant qu'elle représente un investissement très important. On sait aussi que "mesurer" ces effets est très difficile.

La formation est soumise à un système de contraintes externes et internes nombreuses (règlementations, exigences des différentes parties prenantes, utilité perçue et acceptabilité parfois limitées du point de vue des professionnel.le.s, etc.)

Un.e "bon.ne professionnel.le" est-il ou est-elle qqn qui sait bien respecter les normes, règles et procédures ? Ou qqn qui sait les utiliser dans la mesure où elles sont pertinentes, et s'en affranchir dans le cas contraire (imprévus, impensés...) ?

La sécu serait à la fois dans la capacité des pros 1) à réaliser un travail de qualité dans des situations ordinaires qui garantissent la perf en général et la sécurité en particulier, 2) à produire les ajustements nécessaires pour enrayer les dynamiques de dégradation et......

3) à "rebondir" suite à une perturbation massive, à une désorganisation critique, y compris "hors cadre". Pour encourager ces capacités il faudrait penser conjointement la conception des situations de travail et la conception des situations de formation.

Benoit Journé @IMTAtlantique : les entreprises suivent globalement et historiquement des traj. d'évolution : depuis un ensemble de "savoir-faire métier" qui ont éclos par l'entreprenariat, à une organisation managériale s'accompagnant d'une professionnalisation de la direction.

Benoit Journé : un enjeu de transformation contemporain serait de réconcilier, par de nouvelles organisations du travail, la professionnalité "opérationnelle" et la professionnalité "managériale", dans les différents métiers et échelons hiérarchiques.

Hervé Laroche @ESCPeurope les managers ne st pas une catégorie homogène. "Manager" peut être pensé comme un métier, mais aussi et p-ê surtt comme un outil RH permettant d'organiser des carrières. Le M "de proximité" a le même nom que le M de la boite, ms pas les mêmes conditions!

Benoit Journé L'activité RH répond à une logique propre qui n'a pas, le plus souvent, bcp de lien avec le travail qu'elle organise. La culture commune d'entreprise tend à se déliter sous les effets de tendances lourdes comme la professionnalisation et la sous-traitance intensive.

Un schéma vertueux de professionnalisation serait la construction par les acteurs de leur propre professionnalité "au frottement" de celle des autres, y compris d'autres métiers, sans croire qu'il suffirait de déléguer aux métiers tous les enjeux pros de perf et de développement.

Hervé Laroche : le management n'est pas forcément l'ennemi du bien commun et l'opérationnel son garant. Citant Clémenceau : "il ne faut pas laisser la guerre aux militaires" - mais ne pas oublier que ce sont bien les militaires qui font la guerre.

B Journé Appréhender conjointement les enjeux de performance et de sécurité demandent une organisation réflexive et apprenante aidant les pros à "faire sens" dans leurs situations de travail. Difficulté à le faire et à obtenir un sens partagé.

Penser le collectif : on n'extrait pas un individu du collectif pour le former avant de le "rebrancher" dans son collectif. La form doit s'occuper du collectif d'emblée. La notion de communauté de pratique est utile pour dépasser les segmentations de la form en thèmes ou contenus

Journé citant Habermas : Communiquer c'est chercher un accord sur la base d'une diversité voire d'une divergence de points de vue. Il s'agit d’œuvrer à la construction collective des meilleurs compromis entre (i) les préoccupations des pros et (ii) les objectifs de l'entreprise

Laroche : renoncer à l'idée de stabilité. On ne résout jamais les problèmes une fois pour toutes. Il faut tout le temps recommencer. Les managers de proximité ont un rôle clé dans ce processus. Contrôler la dérive des compromis entérinés, renégocier, réajuster - et prendre le tps

Pourquoi ne pas profiter des formations obligatoires, et de tous les lieux et temps disponibles, à la marge voire en remplacement de l'existant, pour ouvrir les espaces de dialogue nécessaires ? Pour déconstruire "l'hypocrisie organisationnelle", la discursivité lénifiante ?

Ou au moins pour élaborer une hypocrisie organisationnelle plus fonctionnelle et plus soutenable ! Et rendre le travail plus efficace et plus supportable, ce qui n'est jamais gagné.

Casser en priorité l'organisation descendante de type "faites en sorte que" et "ne nous parlez pas des problèmes" qui rendent le travail intenable notamment des managers de proximité et favorisent le silence organisationnel et la souffrance au travail

François Daniellou : les règles ne couvrent pas tout, les problèmes sont irréductibles, les contradictions non discutées grèvent la vitalité du collectif, les articulations entre sécurités gérée et réglée doivent être pensées collectivement en associant novices et experts

Citant Darré : "le métier sert à éviter d'errer seul devant l'étendue des bêtises possibles"

Comment faire ? 1) Partir des situations concrètes et non de généralités 2) Accepter les différences et favoriser le débat 3) Soutenir les managers qui s'y emploient car c'est couteux 4) S'auto-prescrire une attention et une bienveillance qui ne se décrète et ne se prescrit pas

Un ex. d'espace de débat sur le travail : "la causerie" chez @enedis. Rendue possible par l'intervention du chercheur Raoni Rocha : opportunité d'un EDT intitulé "la causerie", avant le traditionnel "brief" quotidien : on se voit, on se dit bonjour, on partage des infos, des pbs

Constat : de très nombreux problèmes trouvent des solutions immédiates lorsqu'ils sont partagés dans le collectif, qui s'autorégule de façon très économique dans ses habitudes de fonctionnement sans passer par le management, ou à la marge. Prises de recul régulières et consenties

"Avec nos mots à nous pour parler de nos faits à nous", insiste le chef de pôle d'Enedis. Un rituel organisé qui contribue à la confiance et à la responsabilité. Moins de retards, plus d'engagement et de participation. Écoute attentive des novices qui y trouvent "un référentiel"

"Au début, c'est dur. En tant que manager la première fois tu en prends plein la tête. Les pbs pros débordent sur les pbs persos. La parole libre est nécessaire mais n'aide pas à cadrer les échanges. Mais quand tu montres que les décisions sont appliquées, ça incite à poursuivre.

Un opérateur : "La causerie c'est super. On voit la différence. On voit tout le monde, du top management aux techniciens. Tout le monde est debout. Ca permet de voir dans quel état sont les gens le matin. Le papa qui dort pas la nuit, il faudra le surveiller sur le chantier".

"Chaque matin on se fait part des dyfonctionnements voire des incidents, et de nos analyses respectives. Et de plein de petites choses qui n'ont l'air de rien mais qui importent : l'état des routes, la météo, les spécificités d'un chantier, etc."

"Un jour c'est moi qui relate un incident. Je fais une consignation pour une opération d'élagage. Je lis ma fiche de manoeuvre, visée et conforme. Mais je me souviens d'une modification du circuit que j'ai remarquée la veille, et la faisant remonter on évite un accident probable"

"Ce cas-là je le présente avec l'idée qu'il pourra peut-être servir aux autres à l'avenir. La causerie ça sert à se parler : des fois c'est une réflexion poussée sur la technique, des fois c'est un coup de gueule pour le bordel dans le camion."

Hervé Laroche : Les EDT sont un outil contre la normalisation de la déviance (Vaughan), les habitudes néfastes, les pbs latents, les petits soucis qu'on met volontiers sous le tapis voire qu'on finit par oublier, et qui un jour peuvent se combiner et créer des très gros soucis

B. Journé : Définir ce qu'est et qui est un.e bon.ne professionnel.le nécessite un jugement et un référentiel, donc d'un système de représentations particulier. Comme tout système il est utile qu'il soit à la fois stable, fiable ET ouvert, discutable.

Chef de pôle Enedis: le cadrage des échanges nécessite 3 modalités: 1) la souscription collective et explicite aux règles qu'on se donne, 2) l'animation par qqn qui doit dire "stop, on est hors sujet", 3) la régulation collective des sujets à aborder dans un tps qui est contraint

Tous les mois un compte-rendu des causeries est présenté en comité de pilotage des 17 bases opérationL, ce qui permet de capitaliser les solutions, même si les solutions ne sont pas toujours directement appropriables d'une base à l'autre, et qu'il faut les retravailler localement

Des ressources sont maintenant disponibles chez Enedis pour que des EDT puissent être instaurés à d'autres échelons et sur des sujets spécifiques, avec des modalités progressivement enrichies, notamment par des recueils de traces d'activité (photos, vidéos)

Le chef de pôle insiste sur le fait que le plus dur c'est de faire exister le dispositif. En faisant progressivement l'expérience de son utilité, les gens s'en saisissent et il finit par fonctionner de façon assez économique.

B Journée indique que ces espaces ne sont pas naturels et que leur instauration réussie révèle une organisation performante et/ou prometteuse dans plusieurs dimensions. NDR : la recherche ne s'intéresse pas assez aux conditions d'émergence et de pérennisation de ces dispositifs.

Vincent Boccara @u_psud : Evaluer pour repenser la formation.
D'abord une approche classique pour analyser les pratiques en entreprise adaptée de Kirkpatrick (1975) : normative, à court terme, centrée sur l'apprenant, non située dans le travail, répondant à des objectifs RH

Absents : multiplicité des acteurs, construction de la professionnalisation, accompagnement du développement, travail réel.
Vers une évaluation plus formative articulant la politique de professionnalisation, les dispositifs de professionnalisation et les parcours professionnels.

Un modèle d'évaluation alternatif dont l'entrée est le parcours professionnel et qui vise à prendre en compte la multiplicité des points de vue.
Mais quelle méthode pour tenir ces enjeux sans en faire une usine à gaz ? La thèse d'Audrey Marquet @SNCF devrait apporter des réponses

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