Au sommet du #G7Biarritz, le Président de la République a voulu montrer à quel point la 🇫🇷 était à la pointe du combat mondial pour sauver le #climat. Pour ce faire, une après-midi dédiée aux entreprises engagées pour la protection de la planète se tenait ce vendredi à l'Élysée.
Durant cette après-midi, le PDG de CMA-CGM a annoncé que son groupe — n°4 mondial derrière Maersk 🇩🇰, MSC 🇨🇭 et COSCO 🇨🇳 — "n'utiliserait pas la Route Maritime du Nord", en #Arctique.
Une décision qualifiée d'"audacieuse" reprise avec force par le Pdt Macron. On va y revenir…
Cette "Route Maritime du Nord" (RMN) attise les convoitises depuis plus de 500 ans (depuis 1523 en 🇫🇷).
Elle est en fait une partie du Passage du Nord-Est (PNE) qui connecte, via l'#Arctique, les Océans Atlantique et Pacifique. Elle est intégralement située dans les eaux russes.
Le PNE attire aujourd'hui les leaders du transport maritime — mais aussi des câbles sous-marins (pour internet et le trading à haute fréquence) ou encore de la croisière — car cette route réduit environ de moitié le temps de trajet des navires entre l'Europe et l'Asie du Nord-Est
Selon les types de navires, le PNE est déjà praticable aujourd'hui plus ou moins longtemps. Les navires conventionnels (dépourvus de renforcements pour naviguer dans les glaces), peuvent l'emprunter 3 mois par an. Un brise-glace nucléaire peut y naviguer toute l'année ou presque.
A l'horizon 2050, le PNE sera praticable par des navires conventionnels toute l'année, et en autonomie l'été — c'est-à-dire sans avoir besoin d'être escortés par des navires brise-glaces. Les brise-glaces pourront eux ouvrir le Passage Arctique Central, la route du Pôle Nord.
Selon diverses études publiées ces 5 dernières années dans des revues à comité de lecture ou des think tanks sérieux, le PNE et les autres routes arctiques pourraient capter 5 à 20% du trafic maritime entre l'Europe et l'Asie d'ici 2050. Les enjeux sont potentiellement colossaux.
En effet, cela représente potentiellement plusieurs centaines voire milliers de milliards d'euros de marchandises transitant par l'Arctique. C'est la raison pour laquelle toutes les marines nationales des grands pays de l'hémisphère nord s'intéressent fortement à l'Arctique aussi
De plus, cette perspective signifie un futur manque à gagner non-négligeable pour les hubs portuaires et les canaux des mers du sud (Dubaï, Suez, Panama, Singapour...). C'est la raison pour laquelle ils s'investissent désormais diplomatiquement et/ou commercialement en Arctique
Mais sans même attendre 2050, plusieurs études publiées ces derniers 18 mois ont montré que passer par le PNE sur des rotations Shanghai-Rotterdam pour des navires de taille moyenne (3000-4000 conteneurs) était déjà rentable aujourd'hui, l'été, par rapport au Canal de Suez… 😕
Chine, Japon, Corée, Russie, USA, Norvège, Finlande, Allemagne, Royaume-Uni, Islande, Canada, Pays-Bas…tous s'investissent diplomatiquement et/ou commercialement pour développer ce nouvel axe maritime.
CMA-CGM va donc à contre-courant mais est-il vraiment "audacieux" et écolo ?
Dans son communiqué, le groupe va même jusqu'à dépeindre sa décision comme quelque chose de sacrificiel : "CMA-CGM fait le choix résolu de protéger l'environnement et la biodiversité de la planète MALGRÉ l'avantage compétitif majeur que représente cette route". Seigneur.
En réalité, cette décision n'est ni audacieuse ni sacrificielle. Elle s'explique surtout par 6 facteurs industriels, marketing et stratégiques bien moins sexy. L'écologie est ici instrumentalisée et aucun média ne l'a expliqué au grand public jusqu'à maintenant… 😏
1) Même si CMA-CGM voulait pénétrer le marché Arctique (ce qu'il a étudié depuis au moins 2012), le groupe ne dispose aujourd'hui d’aucun navire à capacités glaces, à l’inverse de plusieurs de ses concurrents directs, dont COSCO et Maersk. Le coût d'entrée serait donc important.
2) Selon une étude réalisée par @herve_baudu avec CMA-CGM en 2019, si l'avantage de passer par l'Arctique est bien réel, cet avantage est trop faible à ce stade pour envisager des investissements massifs —ce qui tranche d'ailleurs avec les études réalisées par COSCO, + optimistes
3) Si la question des marées noires n'est plus un problème aujourd'hui grâce à l'émergence de technologies de récupération rapides et efficaces (LAMOR), il n'empêche que les gros porte-conteneurs du groupe nécessiteraient l’escorte de deux brise-glaces à cause de leur largeur…
Auquel cas, sans même marée noire, l'image d'un navire CMA-CGM escorté par 2 brise-glaces, potentiellement nucléaires, pourrait être à elle seule dévastatrice auprès de l'opinion publique si elle était utilisée dans une campagne de dénigrement menée par une ONG ou un compétiteur.
4) Comme l'a dit un directeur régional du groupe lors d'un événement public il y a 2 mois auquel j'assistais, la direction pense justement pouvoir gagner de nouveaux clients en pointant du doigt ses concurrents qui naviguent en Arctique, et en particulier le n°1 mondial Maersk…
L'idée est relativement simple : déployer une stratégie commerciale méthodique à l'échelle locale vis-à-vis des clients afin d'inciter ces-derniers à laisser tomber les armateurs polluant l'Arctique pour leur préférer le groupe français, bien plus respectueux de l'environnement.
5) Enfin, CMA-CGM n’aura tout simplement pas besoin d’aller s'aventurer en Arctique car son partenaire COSCO, dans le cadre de l'"Ocean Alliance", est en train de développer les routes arctiques à son compte. Dit autrement, le groupe français est de toutes façons déjà en retard.
6) Enfin, le groupe marseillais a naturellement beaucoup investi sur la Méditerranée, aussi bien côté européen que côté Maghreb avec, par exemple, le hub de Tanger Med (Maroc), 1er port d'Afrique. Dès lors, CMA-CGM n'a tout simplement pas intérêt à développer les routes arctiques
En somme, CMA-CGM joue donc intelligemment en #Arctique avec ses forces et ses faiblesses. Il n'est pas surprenant que le groupe joue à fond la carte écolo pour essayer d'empêcher ou de ralentir le développement des routes arctiques, surtout avec l'appui du Président.
Cet effort sera vain à moyen et long terme car les forces en présence sont trop fortes et trop multiples pour que les routes maritimes de l'Arctique ne se développent pas. Cependant, cela permettra au moins à CMA-CGM d'en retirer des bénéfices d'image importants à court terme.
En résumé, comme lorsque Donald Trump dit qu'il veut acheter le #Groenland, essayez d'analyser l'info au lieu de simplement relayer des communiqués de presse faciles… surtout quand l'#écologie est instrumentalisée à des fins industrielles, marketing et/ou stratégiques. 🙏😊
FIN
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La #sobriété énergétique est un CHOIX de société VOLONTAIRE, qui traduit une évolution systémique des agents économiques.
L’#austérité énergétique est une organisation de la rareté face à une PÉNURIE SUBIE, conjoncturelle, qui met en exergue 25 ans d’impréparation structurelle.
Et attention : faut pas confondre non plus sobriété, austérité et efficacité énergétique !
L’efficacité est une évolution technologique : on consomme moins d’énergie pour le même service rendu voire mieux, mais ça n’implique pas un changement de comportement (#EffetRebond 😉).
DERNIÈRE MINUTE : selon @bloomberggov et @arctic_today, Donald Trump va bien organiser la vente aux enchères des parcelles pétrolières dans la Réserve Naturelle Sauvage #Arctique (ANWR) d'Alaska le 6 Janvier 2021. 😫
De fait, les enjeux sont énormes.
ENFILADE ⬇️⬇️⬇️
De quoi parle-t-on exactement ?
On parle de l’ANWR (Arctic National Wildlife Refuge), la Réserve naturelle sauvage arctique des États-Unis.
Créée en 1960 et agrandie plusieurs fois, l’ANWR atteint aujourd’hui 78000 kilomètres-carré (autant que la Suisse et les Pays-Bas réunis).
Dans ces 78.000km2, il y a trois zones distinctes. La zone d’habitat sauvage en tant que telle, 32.000km2. La zone dite de "gestion minimale", 40.900km2.
Et enfin, la zone côtière de l’Océan Arctique appelée la "Zone 1002" : 6.100km2. C’est cette partie-là qui nous intéresse…
On parle de l’ANWR (Arctic National Wildlife Refuge), la Réserve naturelle sauvage arctique des États-Unis.
Créée en 1960 et agrandie plusieurs fois, l’ANWR atteint aujourd’hui 78000 kilomètres-carré (autant que la Suisse et les Pays-Bas réunis).
Dans ces 78.000km2, il y a trois zones distinctes. La zone d’habitat sauvage en tant que telle, 32.000km2. La zone dite de "gestion minimale", 40.900km2.
Et enfin, la zone côtière de l’Océan Arctique appellée la "Zone 1002" : 6.100km2. C’est cette partie-là qui nous intéresse…
Fin Août, la #Russie a confirmé la découverte de 5 nouveaux îlots en #Arctique grâce à la fonte des glaces.
Cette semaine, beaucoup de médias se sont emportés, parlant d'"extension de territoire"… Un coup de comm' qui sert les intérêts de Moscou 👇👇
Comme nous l'avons vu dans @arretsurimages fin septembre, en Europe comme aux US, la couverture médiatique des enjeux arctiques reste encore limitée à du spectaculaire, du folklorique ou de l'insolite. Il faut faire rêver, surprendre ou indigner.
En l'espèce, la Russie est un bon client : il est relativement facile de jouer sur les peurs de l'"Ours", en particulier lorsqu'on parle des enjeux territoriaux. Présenter la Russie comme la seule puissance "expansionniste" en Arctique marche à tous les coups : 2001, 2015, 2019…
Tout d’abord, il faut rappeler qu’il n’est pas impossible pour un pays X d’acheter le territoire d’un pays Y avec son consentement. Rien, en droit international, n’empêche un transfert de territoire à condition qu’il existe un consentement démocratique. Et ce, même en #Arctique.
Dans le cas particulier du #Groenland, tout dépend du statut de l'île. Depuis 2009, Nuuk peut déclarer son indépendance du Danemark à tout moment. Ainsi, le Groenland pourrait en théorie déclarer son indépendance et rejoindre immédiatement les USA en se "vendant" de lui-même.