RETOUR SUR L’ÉTAT PSYCHIQUE DES GENS POST RECONFINEMENT ET ATTENTAT :
Hier, j’ai eu une longue journée de consultations. J’ai trouvé toute ma patientèle psychiquement atteinte. Voici un résumé des idées qui sont le plus revenues
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- C’est comme si j’étais dans un monde dont je ne comprends plus les règles. Je navigue à vue.
- Le virus et le terrorisme sont un ennemi invisible, ça peut surgir n’importe quand
Là nous avons deux idées qui reprennent le fait que les gens ne savent plus comment anticiper
les dangers, comment se sentir protégés. C’est typiquement ce qui crée les conditions des traumatismes. Ça implique une hypervigilance constante de peur de ne pas voir arriver un danger et donc bcp d’angoisse car malgré cela rien n’est maîtrisable & beaucoup des outils psychiques
de protection que nous utilisions ne sont plus opérants (accumuler du savoir quand il n’y a pas de réponse, se réfugier dans la fête quand il y a confinement, tout préparer à l’avance quand on ne sait pas de quoi demain serait fait, etc.)
- Je ne peux plus me réfugier dans mes
libertés individuelles à
cause du confinement ni dans la communauté qui s’effrite (référence aux attentat)
- J’ai à la fois envie d’être complètement seul et d’être entouré de mes ami.e.s. Je ne peux faire ni l’un ni l’autre à la maison où il y a toujours quelqu’un et d’où je
ne peux pas sortir pour voir les autres.
Là c’est un brouillage des limites entre l’espace personnel et l’espace social qui peut empêcher de vraiment se ressourcer, empêcher de conserver un rythme (ou une division des espaces) structuré qui donne du sens à la vie, rassure
- J’ai vu les gens se battre au supermarché, j’étais terrifié et après j’ai entendu pour l’attentat. Je me sentais effaré de ce qui s’était passé et en même temps terrifié de voir les musulmans sommés de rendre des comptes. J’ai peur de la guerre civile. J’ai l’impression que
tout le monde est potentiellement menaçant
- Les gens ne sont plus capables de faire attention les uns aux autres, je voudrais vivre sur une île déserte, ils me font peur
Là c’est vraiment la question de ce qui fait société, ce qui nous permet de tenir ensemble. L’autre devient
une potentielle menace. On finit par se replier sur soi, ce qui renforce l’etrangéite de l’autre et le rend encore plus menaçant. Ça nourrit aussi une impression de solitude, car il y a impossibilité de partager symboliquement les fardeaux du moment à l’échelle de la société
- C’est la fin du monde
- Tout s’écroule, il n’y aura pas de retour en arrière
- J’ai l’impression que nos vies vont n’être que souffrance, car après il y aura la crise, le réchauffement climatique, la montée des extrémismes et la guerre
- Je me dis que je n’aurais pas du faire
d’enfants
Là il y a une coloration nettement dépressive et en même temps toutes ces angoisses sont valides donc il ne faut pas les balayer. La question qui se pose à nous tou.te.s en ce moment c’est justement de vivre avec ces angoisses sans sombrer. Comment recomposer un
monde et des possibles aménagements autour de ce qui s’effondre ? C’est un travail qui se rapproche du deuil. Il faut être vigilant.e à ce que le côté dépressif n’avale pas tout pendant trop lgtps.
- Je n’aimerais pas faire votre métier en ce moment comment vous supportez ça ?
J’ai entendu ça à chaque consultation aujourd’hui. C’est vraiment un signal d’alerte pour moi : la peur en fond que même les psy ne supportent pas la charge anxieuse actuelle. Et en même temps peut-être aussi la recherche de la communauté : que même le psy puisse dire que oui
c’est dur et que vous ne ressentez pas tout ça parce que vous êtes trop sensible
- Ma formation va se finir mais c’est comme si les choses n’existaient pas, j’ai l’impression que ça ne s’ancre pas
La question des étapes symboliques. Gardent-elles le même sens quand elles sont
vécues à distance sans tout ce qui fait rituel habituellement ? Est-ce que ce que nous faisons dans ce temps suspendu a de la valeur ? Comment continuer de construire du sens dans ce contexte ?
- J’ai peur que ma maman meure
- Au premier confinement, mon père a été gravement
malade du covid/j’ai perdu un proche/j’ai été maltraité à la maison
Là il s’agit de réelles séquelles traumatiques, il faut absolument que ces personnes aient un soutien rapproché par quelqu’un.e de formé.e à ces problématiques pendant tout le confinement.
J’espère que ces
mots vous aideront à vous sentir moins seul.e avec ce que vous ressentez, que cela vous donnera des pistes de réflexions et surtout que cela montrera qu’on a encore une communauté, même dans l’angoisse.
Prenez bien soin de vous
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Vous êtes plusieurs à m'avoir demandé, suite à mon tweet, comment on réagit en tant que psy, devant quelqu'un qui tient un discours complotiste et si on essaye de le ou la raisonner. Je crois que ce n'est pas mon rôle de juger le discours ou les croyances de ⤵️
mes patient.e.s parce que cela voudrait dire que j'érigerais mon opinion en norme. J'interviens très concrètement quand je sens que le discours en question met directement la vie de quelqu'un.e en danger. Par exemple, si un.e patient.e me dit que comme le covid n'existe pas iel
va rouler des pelles à toutes les personnes PCR+ puis aller passer toutes ses journées dans une maison de retraite, là je vais intervenir très concrètement. Apporter des études scientifiques, essayer d'expliquer, etc. Mais mon rôle à moi c'est surtout de comprendre à quoi les
#cequejefaismal Le médicament donne le diagnostic. Voila une démarche que j'ai vue dans les services de psychiatrie axés comportementalisme. Si le patient répond à une classe de médicament, cela détermine sa pathologie. Je vais vous expliquer pourquoi je trouve ça humainement
très dangereux avec deux exemples. Une de mes patientes a fait ce qu'on appelle un virage maniaque sous anti-dépresseurs, c'est à dire qu'elle s'est mise à être agitée, désinhibée, speed. Ce qu'il faut faire dans ces cas là, c'est diminuer/arrêter l'antidépresseur et s'il
y a un besoin persistant de réguler l'humeur, plutôt passer sur un thymorégulateur. Mais pourquoi en tirer des conclusions ? Le psychiatre qui avait prescrit l'AD a dit à ma patiente que si elle faisait une réaction c'est que probablement elle était bipolaire. Il n'y avait aucun
réponse AUX MALADES CHRONIQUES qui me reprochent depuis ce matin de parler des séquelles du covid parce que pour elleux c’est validiste (car le covid est déjà médiatisé) et qui me disent, en gros, que c’est bien fait pour ma gueule parce que ça me sensibilise à leur lutte ⬇️
1- D’abord, je suis profondément blessée. Depuis ce matin, je travaille avec des larmes dans la gorge. C’est la première fois que j’ai envie de me barrer de Twitter. Je trouve ça injuste et je vais essayer d’expliquer pourquoi :
2- A titre professionnel, j’accompagne des malades chroniques depuis des années. Des personnes ayant des maladies objectivables pour les médecins comme le lupus, le syndrome néphrotique, la SEP, etc. Des maladies mal reconnues comme la maladie de Lyme, la fybromyalgie ou
Le décret qui permet l’accès à la qualification de « maladie professionnelle » pour le covid est paru. C’est une honte, nos dirigeants, loin de respecter leur engagement, continuent de cracher à la gueule des gens : 1- il faut avoir une sérologie ou une PCR positive alors qu’on
sait que les malades de Mars-Avril n’ont pas eu accès à la PCR et parfois à la sérologie seulement 4 mois après leur contamination (une étude démontrait que les anticorps pouvaient se négativer dans cet intervalle) et que bcp de malades ont des sérologies négatives (même ayant
Eu des PCR positives) et il existe plusieurs hypothèses sérieuses qui étudient le pourquoi. 2- Il faut avoir reçu de l’oxygénothérapie. Je rappelle qu’en mars pour être hospitalisé il fallait sérieusement desaturer. Les limites de SAO2 déclenchant l’hospitalisation étaient
Ceux qui se découvrent grands féministes quand il s’agit de libérer les femmes de l’Islam, vous êtes juste islamophobes. J’ai lu le Coran et j’ai aussi lu la Bible. L’avez-vous lue aussi ? Si on reste collé au texte, je vous rappelle que la Bible est très misogyne et
propose tranquillement de tuer les enfants des ennemis. Dans ces cas là vous trouvez des interprétations très symboliques ! Arrêtez d’infantiliser les femmes, laissez les choisir leur foi, leur tenue, leur profession même si vous pensez que ce n’est pas un bon choix. Et suivez
des comptes de femmes musulmanes, qu’elles soient voilées ou pas. Écoutez les penser, parler, prendre position. Écoutez ce qu’ELLES ont à dire ou lieu de baser vos réflexions sur des fantasmes. Vous reproduisez encore et encore la même logique : penser savoir à la place des
Bilan de la journée :
- une patiente m’a amené un magazine de finance capitaliste pour faire remonter ma tension car ça va m’énerver (ses mots 😂)
- une patiente autiste était très dérangée par les draps que je mets sur mes fauteuils (et que je change entre chaque patient), on
est allées ensemble dans ma réserve pour qu’elle choisisse le sien et sa couleur et j’ai promis qu’elle aurait toujours le même et ça l’a rassurée ❤️
- une patiente autiste prof a eu une rentrée tellement difficile qu’elle est arrivée en s’étant mordu les doigts jusqu’au sang, je
l’ai désinfectée et lui ai mis un pansement et ça a permis une super séance sur ce qu’elle ressent qd on ignore ses besoins vs qd on prend soin d’elle 🤗
- mon patient aux idées suicidaires dont je vous ai parlé est toujours en vie, il était content du lien qu’on a gardé pendant