Depuis quelques temps, c’est la foire à la saucisse.
Entre les négociations de la nouvelle PAC (dont les arbitrages ne sont pas tranchés) , sa déclinaison en France (pas tranché non plus de façon définitive), c’est à qui défendra son bout de gras
Chaque fédération, chaque syndicat y va de son couplet, quitte à taper sur les voisins pour obtenir une gratte, et au passage se faire bien voir de ses adhérents.
C’est à qui expliquera qu’il est le plus méritant, le plus vertueux, le plus propre.
Je rappelle que valoriser une méthode agricole en se basant sur ce qui nous arrange uniquement (la production a pas cher, l’impact environnemental, etc) est absolument malhonnête puisque toute politique agricole doit être mesurée en prenant en compte l’ensemble des éléments :
Sinon, c’est comme si vous disiez au gens de ne se déplacer que en vélo pour pour la simple et bonne raison que ça ne pollue pas.
C’est tout à fait vrai, mais ça occulte les trois quarts du sujet «déplacements individuels »
Alors oui, c’est le rôle des syndicats, des organisations professionnelles ou d’associations-relais que de forcer le trait pour obtenir satisfaction. Ils vont faire des pancartes, des slogans, des happenings.
Ils vont essayer de toucher le grand public pour faire pression sur les autorités , mais aussi, ne l’oublions pas, pour ménager leurs adhérents : on ne compte plus les manifs agricoles qui ne servent que de « soupapes » , qui ne sont là que pour extérioriser une colère...
...alors que les vraies tractations sont déjà en cours voir terminées.
C’est humain, ce n’est pas grave.
Ce qui l’est en revanche, c’est de s’échiner à pointer les défauts des voisins quand soi-même on a pas les fesses propres.
Alors on va expliquer les choses de façon un peu brutale :🔞🔞
➡️L’agriculture conventionnelle n’a pas le monopole de la production élevée à pas cher
➡️L’agriculture bio n’a pas le monopole du respect de l’environnement
➡️L’agroécologie est un joli mot dans lequel chacun met ce qu’il veut
➡️La frontière entre les uns et les autres est très poreuse, les méthodes s’échangent, s’essaient. Personne n’est enfermé dans des cases
➡️Les labels sont surtout là pour rassurer le consommateur .
➡️Les pratiques agricoles changent d’une année à l’autre, en silence, sans que vous ou que les élus le sachent.
➡️ Il n’existe pas d’agriculture qui ne prenne pas en compte son impact environnemental.
Le « gros céréalier de la beauce agri-manager » c’est un cliché qui est né dans les années 80/90.
A l’époque, vous n’aviez ni internet, ni téléphone portable, Chirac n’avait pas été élu président et André Agassi avait encore des cheveux.
Vous voulez vraiment essayer de comprendre notre époque avec ces codes-là ?
On est capable, si on cherche, de trouver des défauts à tout, à tous les modes de production. C’est vraiment ça qu’on veut ?
Plus une catégorie pointe les défauts des autres, plus elle tend le bâton pour se faire battre.
Et vu de l’extérieur, deux agriculteurs qui se jettent des noms d’oiseaux ou des sous-entendus, ça fait deux perdant.
A.chaque.fois.
Chaque agriculteur oriente son mode de production en fonction de pleins de critères :
✅Son terroir
✅ Son climat
✅Sa facilité à trouver les intrants dont il a besoin
✅Ses débouchés commerciaux
✅Le revenu qu’il peut tirer de sa ferme en fonction de tout ça
✅Ses envies et ses valeurs : chacun sa sensibilité plutôt sur les productions végétales, les animaux, les fruits, le maraîchage, la vigne, etc; mais aussi l'utilisation de matériel, de produits phytosanitaire, le labour, bref , c'est vaste.
On n’oriente pas sa production de telle ou telle manière parce que notre voisin nous le demande, parce que ça fait mieux ou parce que c’est la mode.
Ce n'est pas comme ça que ça marche
A la fin, c’est le consommateur qui est le juge de paix :
❌si personne n’achète ce que vous produisez, vous êtes morts.
❌S’il refuse de payer assez cher pour ce que vous produisez, vous êtes mort aussi.
Tournez ça comme vous voulez : le marché alimentaire est segmenté en gammes, il le sera toujours, et on doit produire ce qui se vend, sinon les gens achètent à d’autres que nous.
Les changements se font sur des périodes longues, parce que la nature nous l’impose : le blé met 9 mois à pousser, un veau met 9 mois à naître, et un investissement sur un bâtiment agricole s’amorti sur plusieurs années.
Et on ne parle pas d’un verger ou d’une vigne, là il faut attendre de longues années avant d’avoir un retour sur investissement.
Il ne s’agit pas de changer une machine ou d’acheter une voiture électrique.
J’utilise volontairement le terme « retour sur investissement », car l’agriculture n’échappe pas aux règles de l’économie de marché dans laquelle nous sommes, et les agriculteurs et trices ont tout à fait le droit de vouloir gagner un maximum de revenu avec leur ferme.
Il n’y a aucune raison qu’ils restent pauvres . Aucune.
Donc, toute transition est à risque, puisqu’il faut rompre un équilibre pour en trouver un autre.
Il faut bien étudier la situation et imaginer l’avenir, il faudra continuer ) rembourser ses emprunts d’avant sans certitude sur le revenu futur.
Il est donc logique, si la puissance publique veut orienter vers tel ou tel système, qu’elle soutienne cette transition pour ceux qui le veulent. Ça n’a rien de choquant.
Et parfois il arrive que l’excellente décision prise l’année A soit parfaite en année B, pas terrible en année C et catastrophique en année D.
C’est la vie de toute entreprise, et l’agriculture n’y échappe pas.
Rien n’est jamais acquis, on travaille avec la nature, avec le climat, avec le sol, avec du vivant. On ne maîtrise pas tout.
Tout cela pour dire que c’est un métier qui par nature est plein d’incertitudes, de contraintes, mais on ne s’en plaint pas, c’est le cas depuis toujours
Et en plus depuis quelques années, nous avons une concurrence exacerbée qui petit à petit, réduit la place de l’agriculture Française en France en dans le monde : plus de la moitié du poulet consommé hors foyer n’est plus produit en France.
On importe aussi de la charcuterie allemande ou espagnole, parce qu’on n’est pas capables de les produire en France en l’état actuel des choses.
On voudrait bien le produire en France, on sait faire, on a tout ce qu’il faut, mais essayez de monter un poulailler ou une porcherie géante type Europe de l’est, vous serez bien reçu.
On préfère les faire venir directement de là-bas, car ce qu’on ne voit pas ne pollue pas, c’est bien connu.
Et que voit-on ? des syndicats, des fédérations qui tirent la couverture chacun a soi , quitte à déshabiller le voisin.
Cette séparation du monde agricole en chapelles n’est pas naturelle, elle se constate au niveau des représentants...
...mais beaucoup moins au niveau des agriculteurs eux-mêmes.
C’est ça qui est fou : ceux qui prétendent parler en notre nom s’inventent des classements qui ne viennent pas du terrain.
C’est éblouissant : le bateau fonce droit sur l’iceberg et on se bat pour changer la couleur des rideaux.
Ne tombons pas dans ce piège facile : il ne profite pas aux agriculteurs, c’est même tout le contraire.
Ne laissons pas les arguments bas du front alimenter les rancœurs.
Nous ne sommes plus assez nombreux pour nous taper dessus.
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Aujourd’hui pour les gens que ça intéresse, j’ai décidé de faire un #thread instructif avec les différentes espèces végétales et animales qu’on peut croiser à la campagne
J’ai pas fait latin assez longtemps , alors ce sera le nom commun à chaque fois ⬇️⬇️
Ici nous avons un arbre.
Ça se distingue facilement des constructions en béton grâce aux feuilles qui se trouvent sur la partie supérieure, et les racines dans la partie souterraine.
En général, ils poussent du bas vers le haut , l’inverse ne s’est jamais vérifié .
Ça c’est une fleur . Ça a des couleurs, parfois ça sent bon, parfois ça sent rien.
Je crois que les abeilles viennent les manger des fois.
Ou alors elles viennent faire caca dedans et c’est ça qui sent bon. On sait pas trop
Un hectare de blé vaut-il un hectare de pois chiches?
Sur une même surface, quelle est la plante qui produit le plus ?
#thread#FrAgTw avec des chiffres dedans pour comprendre des trucs
⬇️⬇️⬇️
Un peu de système métrique avant :
Un quintal, c’est 100 kg.
Un hectare, c’est un carré de 100 mètres x 100 mètres, soit 10 000 mètres carrés.
Je me permets de le préciser, à une époque on avait un ministre de l’agriculture qui avait séché sur la question.
Alors allons-y !
J’ai pris des chiffres moyens, évidemment que dans votre région ou chez le beau-frère c’est différent, hein, mais il faut bien compiler les truc à’ment donné.
Il faut institutionnaliser le truc. Ma grand-mere, ne sachant plus quoi offrir à ses enfants une fois adultes -qui a chaque fois lui disaient de ne rien acheter- eu une idée à la fois loufoque et géniale ⬇️
Elle mettait dans un carton les pires trucs qu’elle avait acheté /reçu en cadeau depuis des années: des objets publicitaires, des ustensiles de cuisine , un dé à coudre, un vieux saladier moche, une agrafeuse , une lampe de poche -sans ampoule-, une chaussette, etc
Elle confectionnait ainsi un carton pour chacun de ses 6 enfants.
Chaque carton était identique à l’extérieur , mais a l’intérieur, c’était un fourre-temps sans aucun sens
A l’origine le grand-père tenait un magasin de tout et de rien, un « bazar » dans un village au pied des monts du lyonnais à la limite de la Loire et du Rhône
MAIS son gagne-pain, c’était magnétiseur : il soignait tout, ou presque. Sa méthode ?
#threadagri : Beaucoup ont raconté ici (et avec talent ) le parcours qui les a menés à devenir agriculteur, ou vétérinaire.
Et bien moi je vais vous raconter comment je ne SUIS PAS devenu agriculteur ! #mylife
Commençons par le début, ce sera plus simple.
Père, son chapeau de cow-boy vissé sur la tête, s’est installé dans la loire (42 pour les ignorants, mais je vous pardonne pour cette fois), au nord de Roanne en 1987.
Auparavant, il avait été successivement :
-Installé en GAEC avec ses frères et son père sur la ferme familiale en Saône-et-Loire :bon, le travail en famille, c’est parfois le meilleur moyen de se brouiller avec tout le monde. Ça n'a pas duré très longtemps.