Thread by @JoliesRousses

[THREAD] Les Jolies Rousses se convertissent vers l’AB. En plein « débat » sur le conventionnel et le bio, je vais tenter de vous expliquer pourquoi nous faisons cette conversion en poules pondeuses.

D’abord, en 2018, au moment de la création de mon projet d’installation, j’avais choisi le cahier des charges AB pour mon atelier avicole : 9000 à 10000 poules, avec une densité de 6 poules/m2, des petites unités de 3000 poules max, un plan de prophylaxie intéressant.

Sauf que le développement de la production a largement dépassé la demande : résultat, un certain nombre de projets ont été abandonnés, dont le mien. Quoi faire à ce moment là ? Je me suis battue, pour avoir le Plein Air, en espérant ensuite me convertir.

Car la chance que nous avons en pondeuses, avec mon groupement, c’est qu’un poulailler Plein Air est conçu pour pouvoir accueillir du bio (mais pas l’inverse à moins d’ajouter du matériel) et ainsi évoluer en fonction du marché.

Concrètement, qu’est ce que cela signifie ? En Plein Air, 9 poules/m2 soit 15000 poules pour la surface que j’ai. Je passerai à 9700 en bio ! Pour quasiment la même surface de poulailler et de parcours. J’ai suffisamment de nids, d’assiettes, pipettes et perchoirs...

...ayant eu 15000 poules. Donc même s’il faut par exemple plus de perchage/poule en bio qu’en Plein Air, par la diminution du nombre d’animaux, j’aurai tout le nécessaire. Et je vais même oser quelque chose !

Revoir mon système de distribution d’alimentation, réinvestir encore (!!!) pour n’avoir qu’une ligne d’assiettes et offrir plus de place à mes poules sur le caillebotis. Rien ne m’y oblige, c’est un vrai choix, qui va me coûter encore.

Côté prophylaxie, j’avais déjà adopté celui de l’AB. Il y a juste un apport de vitamines/minéraux que je ne pourrai plus faire. Mon aliment respectera le cahier des charges AB et nouveauté à la coop, il est traité thermiquement contre les salmonelles. Une sécurité en plus !

Mon poulailler est déjà séparé en petites unités de sorte à avoir en bio 4 parcs de 2425 poules (3000 max/parc). Le parc extérieur est aussi séparé en 4. Il me reste à opacifier les cloisons entre les parcs de poules (à l’intérieur).

Je dois veiller à présent au vide sanitaire à bien utiliser une gamme de produits homologués AB pour le nettoyage du poulailler et du matériel. Je fais déjà du bio contrôle des insectes, donc là encore rien de nouveau sous le soleil.

En fait, vous le voyez, j’avais déjà adopté un certain nombre de « règles » de l’AB, que je trouvais cohérentes et intéressantes. À présent, je vais pouvoir prétendre à une rémunération plus juste par rapport à mes actions et mes choix.

Et sans avoir besoin de dénigrer mes collègues ou de prétendre à plus de subventions (en élevage de pondeuses, l’enjeu de la sub c’est peanuts). Aucune idéologie là-dedans, aucun jugement sur les modes de production. Je m’en carre.

Le bio, pour moi, c’est la possibilité d’offrir de meilleures conditions de vie à mes animaux en leur accordant plus d’espace, m’offrir de meilleures conditions de travail, pour une rémunération quasiment identique voire supérieure.

Alors oui, je vais produire moins, je vais créer un produit plus cher, mais il répond à une demande. Ça fait deux ans que j’espère vivre correctement de ma production. Il suffit de voir les difficultés des négociations avec les GMS pour comprendre...

Que l’œuf ne pèse pas lourd. Et un poulailler de 15000 plein air ne fait pas le poids. Les éleveurs le savent : c’est en 30000 Plein Air que c’est le plus viable. Le coût de production est moins élevé, les conditions de vie sont autant respectées (souvent de la volière)

...même si le nombre dérange certains ! La réalité est pourtant là. Avec mon poulailler, système caillebotis, c’est le passage au bio qui apparaît comme raisonnable et logique étant donné la taille/le matériel/le coût de production. Et ça, il faut l’entendre.

On ne compare pas un Plein air volière et un Plein air caillebotis. Ce sont deux systèmes différents (qui répondent au même cahier des charges). Les poules produisent plus et le coût de production est plus faible en volière. Mais comme c’est 30000, il ne faut le crier trop fort.

Donc finalement, comparer du plein air avec un autre plein air, ça n’a pas vraiment de sens. Ce qu’il faut voir c’est l’optimisation des conditions de vie des animaux et de travail de l’éleveur pour un poulailler donné, pour un fonctionnement donné.

Et puis qu’il y ait « peu de demande », que le marché soit « stable », c’est tant mieux. Pourvu que la filière veille à ne développer trop vite les projets/demande. Et puis ça tombe bien, tout le monde ne veut pas aller vers l’AB ! 😉

Aujourd’hui je touche enfin à mon projet initial. La conversion du parcours est presque achevée (J-8), les démarches se poursuivent. Mon certificateur a déjà fait une premier contrôle. Vivement !

Et au final, ce passage en bio aura plus de répercussions que prévues pour nous. Car évidemment, un élevage ne se pense pas seul. La suite dans un prochain épisode !