As t-on enfin résolu le problème de la fusion?
C'est ce que laisse à penser cet article de @01net suite à l'annonce de @CFS_energy il y a 2 jours. En fait c'est plus compliqué que ça. Un petit fil pour mettre les choses en contexte.
Petit rappel. Pour générer de l'énergie par fusion, il faut satisfaire un critère dit de Lawson, qui dit que le produit de la densité du combustible, de sa température et du temps de confinement doit être supérieur à une valeur donnée.
Ce temps de confinement dépend du courant électrique dans le plasma, du rayon majeur du tokamak et du champ magnétique. Pour ITER le champ magnétique max est 5.3T, le courant a une limite également. Il a donc fallu faire une machine très grande
ITER a un rayon majeur de 6m et la machine avec le cryostat fait 29mx29m
La taille de la machine et le fait que les composants doivent être alignés avec des précisions extrêmes posent d'énormes difficultés.
Et en suivant cette voie DEMO (le démonstrateur industriel) devrait être encore plus gros. Ce qui pose de sérieux doutes sur comment réussir cela, sachant qu'ITER est déjà hyper complexe.
Le développements de supraconducteurs dits à haute température (en théorie à -196 degrés plutôt que -269 comme ITER) permet de générer des champs magnétiques plus élevés et également de simplifier le refroidissement.
(Source. M. Greenwald)
La puissance fusion dépend du champ à la puissance 4 (x2 pour le champ implique x16 pour la puissance), et le confinement augmente avec le carré du champ.
On peut donc envisager des machines plus petites!!
C'est exactement ce que propose @CFS_energy
L'idée? Utiliser des supraconducteurs haute températures et un champ magnétique beaucoup plus élevé qu'ITER pour générer la même puissance avec une machine plus petite. Il y a d'autres innovations proposées (bobines démontables), mais c'est vraiment le gros selling point.
La physique du concept est très robuste. C'est exactement la même qu'ITER. Même mieux, comme ITER est beaucoup plus gros que les tokamaks précédents, et que certains effets dépendent de la taille, il y a des questions en suspens pour ITER.
Mais: jusqu'à il y a 2 jours, on n'avait jamais vu de bobines de la taille du mètre faite avec ces nouveaux matériaux: REBCO (Rare-Earth Barium Copper Oxide), c'était donc le premier jalon pour CFS.
C'est ce qui a été démontré il y a 2 jours. Un champ de 20T (4 fois celui d'ITER) pour une bobine qui fait la moitié de la taille nécessaire pour SPARC, la machine qui doit démontrer un gain supérieur à 1.
Une belle démonstration
Du coup c'est bon la fusion c'est réglé?
Pas tout à fait. La fusion c'est plus de l'ultra-trail que du sprint...
Prochaine étape: SPARC. Une machine assez compacte, avec un champ de 12 teslas prévus pour générer 50-100 MW de puissance thermique. Mais surtout un gain supérieur à 2- le record actuel est de 0,7...
Le but de SPARC est d'être le premier plasma à générer plus d'énergie qu'on en injecte.
La physique de SPARC est solide, et a été publié de façon transparente cambridge.org/core/journals/…
La construction de SPARC doit démarrer en 2021. Attention, la machine générera certes de la puissance mais sur un mode pulsé (quelques secondes à la fois), c'est vraiment pour démontrer le principe et valider la physique
CFS parle ensuite du premier réacteur générant de l'électricité commercialisé vers 2025. On notera que commercialisation est assez vague...
En pratique, il faut quand même construire et tester SPARC, ce qui prendra un peu de temps, et un réacteur doit opérer sur des longues échelles de temps, sera une installation nucléaire, devra générer du tritium etc...
Il reste quelques débats sur la faisabilité d'une machine très compact. En l'histoire montre que la fusion a le don de nous réserver des surprises...
Si on peut penser que la construction de ARC (le réacteur) pourrait commencer vers 2025, cela prendra beaucoup de capitaux et du temps de construction- ce sera un démonstrateur. Bref on n'y est pas encore.
Et enfin, même avec un premier réacteur en 2030, pour vraiment avoir un impact, il faut ensuite en construire à la chaine. Ce dont je discute ici.
Energie cachée
Continuation d'un article récent sur les sujets de l'énergie grise et de l'emprise énergétique. Petit zoom sur une étude récente analysant l'emprise énergétique de 44 pays et montrant l'importance de prendre en compte l'énergie grise
Thread
L’énergie grise désigne toute l’énergie nécessaire lors du cycle de vie d’un produit ou d’un matériau, c’est-à-dire l’énergie nécessaire pour l’extraction, la transformation, la fabrication, le transport… à l’exception de l’utilisation finale. usbeketrica.com/fr/article/l-e…
L'emprise énergétique, sur le modèle de l'empreinte carbone, se définit comme la somme des énergies requises pour satisfaire les besoins en énergie d’un groupe de personnes ou d’un individu.
#Fusion101
‘La fusion c’est pour quand’ (2/3)
Récemment, Jeff Bezos et Bill Gates se sont mis à investir dans la fusion ce qui a boosté certaines initiatives privées qui annoncent un réacteur pour dans 10 ans pour certaines. Voyons cela en détails #fusion#energie#weareiter
Si on entend parler de plus en plus de ces ‘start-ups’ développant des concepts de réacteurs la plus ancienne- TAE anciennement Tri-Alpha- a été fondée en 1998. Elle fut assez discrète à ses débuts,mais après 20 ans est toujours en phase de développement
On compte 28 initiatives privées, recensées dans la liste ci-dessous. Si 5 ou 6 sont très visibles, beaucoup d’initiatives sont très discrètes et il est parfois difficile de savoir si elles sont actives ou non.
#Fusion101
Suite de ma série sur la fusion. Dans ce thread, tentons de répondre à la question ‘La fusion c’est pour quand ?’ en allant un peu plus loin que la célèbre blague ‘la fusion c’est pour dans 30 ans et… ça le sera toujours’ #fusion#energie#weareiter
Petit historique. Tout commence en 1920 quand Arthur Eddington suggère que les étoiles tirent leur énergie de la fusion nucléaire de l’hydrogène en hélium. « Nous rêvons parfois que l'homme puisse apprendre à la libérer et à l'utiliser à son service »
Les recherches démarrent vraiment à la fin de la 2ème guerre mondiale mais sont initialement secrètes, guerre froide oblige. Les USA, l’URSS, l’Angleterre rejoints ensuite par la France. 2 voies en parallèle : la recherche sur la bombe H, et le confinement magnétique…
#Fusion101
Suite de ma série sur la fusion. Après avoir discuté de l’extraction de la puissance, intéressons-nous aux matériaux. Quels matériaux peuvent supporter les conditions extrêmes de la fusion nucléaire ? Quelles propriétés doivent-il posséder ?
Tout d’abord, même si le plasma proche des surfaces est plus froid que les 150 millions °C du centre, les flux de chaleurs sont de l’ordre de 10MW/m2, et sont accompagnés de flux de particules très intenses, pouvant éroder le matériau, et de neutrons très énergétiques.
Le matériau idéal devrait avoir une grande conductivité thermique, de bonnes propriétés mécaniques, être résistant aux chocs thermiques, ne pas trop s’éroder, ne pas intéragir avec le tritium, ne pas s’activer sous l’impact neutronique… Un mouton à 5 pattes.
#Fusion101
La fusion nucléaire consiste, en simplifiant beaucoup, à chauffer un gaz à 150 millions de degrés dans une boite métallique pour générer de l’énergie.
Comment récupère-t-on cette énergie ? et surtout quels sont les contraintes sur les matériaux proches du plasma ?
La réaction de fusion deutérium-tritium produit un neutron, qui porte 80% de l’énergie de la réaction et un atome d’hélium qui porte les 20% restants.
Le plasma est confiné par un ensemble de champs magnétiques. Les particules sont chargées (positivement pour les ions, négativement pour les électrons). Dans un champ magnétique une particule suit les lignes ‘de force’ et suivent un mouvement de gyration autour de ces lignes