Bon, vous êtes des centaines de milliers à avoir donné au Zevent et à pouvoir bénéficier d'une réduction d'impôt, c'est donc une bonne occasion d'en parler, pour comprendre pourquoi malgré les apparences, il faut détester ça... mais pourquoi vous devriez quand même y recourir.
Déjà, comment ça fonctionne. Promis ça va être simple. Imaginons une réduction d'impôt de 100% : ça signifie que si vous donnez 1€, alors votre impôt (si vous en payez) sera réduit de 100% de ce don, et donc de 1€.
Avec une réduction d'impôt de 75%, si vous donnez 1€, votre impôt (si vous en payez) sera réduit de 75 centimes.
En particulier, dans le cas d'ACF et du Zevent : si vous avez donné 1500€, vous pouvez bénéficier d'une réduction d'impôt de 1080€ :
=> 750€ (75% des 1000 premiers €)
=> plus 330€ (66% des 500€ au dessus de 1000)
Donc, imaginons Pierre, qui doit payer cette année 2000€ d'impôt sur le revenu. Si Pierre a donné 1500€ au Zevent, il ne devra payer que 2000€-1080€ = 920€ d'impôt.
Bon, jusque là, c'est simple. Qu'en penser ?
(Pour la suite, je vais (au début en tout cas) confondre réduction d'impôt et crédit d'impôt, qui fonctionnent presque de la même manière.)
Commençons par dire une première chose importante : l'objet d'une réduction ou d'un crédit d'impôt, c'est souvent d'être incitatif.
Par exemple, l'objet du CITE, le crédit d'impôt à la transition écologique, était de dire "dépensez pour faire isoler thermiquement votre maison, et l'Etat en paiera une partie". Pas déconnant.
Mais si c'est assez clair quand on parle du CITE, ça devient bien moins clair quand on parle du crédit d'impôt travail à domicile, par exemple : l'Etat vous paie une partie de vos frais de ménage/jardinage/etcaetera.
C'est supposé encourager l'emploi de personnel à domicile et aider les moins riches à se payer ce personnel... Si ça s'entend pour la garde d'enfants par exemple, je suis plus dubitatif pour le jardinier ou le gardien (et comme on va le voir, aux frais des autres contribuables).
(C'est aussi supposé inciter à déclarer le personnel de maison. M'est avis qu'il existe d'autres moyens...)
C'est encore moins clair quand il s'agit d'achat d'oeuvres d'art ou de financement d'associations ou de partis politiques. Vous allez comprendre.
Si je suis disposé à réduire ma fortune de 100€ au profit d'une association, sans réduction d'impôt, je peux donner 100€ et c'est tout. Alors qu'avec une réduction d'impôt de 75% par exemple, je peux donner beaucoup plus : 400€ en fait.
En effet, en donnant 400€, mon impôt est réduit de 300€... qui allaient de toute façon quitter mes mains. Au final, je suis donc moins riche de 100€ que dans la situation où je n'ai pas fait de don.
Ca peut paraître pas mal (surtout quand on n'a en tête qu'une ONG caritative, mais il n'y a pas que ça), ça permet de démultiplier ses dons.
Sauf qu'en fait, avec mon don, c'est l'Etat qui a quelque part donné de l'argent... pour une cause décidée par moi.
(Pour être plus exact, une réduction/crédit d'impôt est une "dépense fiscale" : c'est pas de l'argent qui sort des caisses de l'Etat, c'est de l'argent qui n'y rentre pas (ce qui est tout comme) et va directement là où j'ai décidé de le dépenser.)
De fait, une réduction d'impôt peut être vu comme un mécanisme qui, en payant un peu plus cher que ce que je devrais sinon payer en impôt, me permet d'acheter le droit de diriger une partie des ressources de l'Etat vers une dépense de mon choix.
A titre personnel, je trouve ça particulièrement dérangeant philosophiquement, l'idée de dire que si on est prêt à y mettre le prix, on peut décider de l'allocation de l'argent de l'Etat... plus que les autres citoyens !
Normalement, c'est le rôle du vote et de l'élection que de déterminer quels projets de société on veut voir avancer et lesquels on ne veut pas, c'est pas chacun d'entre nous de son côté qui paie pour voir financer ce qui nous intéresse par l'Etat... et donc par les autres quoi.
Parce que oui, ces 300€, ils viennent de quelque part. Sans le don, ils allaient servir à abonder le budget de l'Etat, et ensuite à payer des choses avec (autres que la dépense fiscale).
Avec mon don et la réduction de mes impôts, non seulement l'Etat a donné 300 € à l'asso de mon choix, mais en plus, il doit lever 300€ d'impôt en plus sur le reste des citoyens, vous, s'il veut garder constant l'argent qui sort pour tout le reste.
Donc non seulement, c'est un braquage démocratique, mais c'est aussi un braquage littéral.
Mais c'est pas fini. Jusque là, j'ai fait comme si réduction d'impôt et crédit d'impôt étaient la même chose, alors que la différence est tout sauf anodine.
Vous avez peut être remarqué tout à l'heure, que je précisais à chaque fois "votre impôt, *si vous en payez*, sera réduit de tant".
Reprenons notre exemple où je calculais la réduction d'impôt de Pierre.
Maintenant, imaginons Paul. Paul a aussi donné 1500€ au Zevent, mais Paul ne doit payer que 1000€ (et non 2000€ comme Pierre) d'impôt sur le revenu. Après réduction d'impôt, Paul ne devra payer que 1000-1080€ = 0€ d'impôt !
Et pas -80€.
Si votre réduction d'impôt est supérieur à votre impôt, dommage pour vous, mais l'Etat ne vous rend pas d'argent. Pour ça, il faut un crédit d'impôt.
Un crédit d'impôt, c'est comme une réduction d'impôt, au détail près que si votre baisse d'impôt dépasse le montant total de votre impôt (comme l'exemple de Paul), alors l'Etat vous fait un chèque, qui serait de 80€ pour Paul.
Vous noterez que pour quelqu'un qui paie beaucoup d'impôt (parce qu'il gagne beaucoup), comme Pierre, peu importe, entre réduction ou crédit d'impôt, ça lui est égal : tant que la réduction ne dépasse pas le montant de son impôt, c'est équivalent.
Par contre, pour quelqu'un qui paie peu ou pas d'impôt (parce qu'il gagne peu), comme Paul, mieux vaut un crédit d'impôt.
Comme Paul, mais comme pleeiiin d'autres gens : il y a déjà 60% des foyers fiscaux qui ne paient pas d'impôt sur le revenu.
Cette différence entre réduction et crédit d'impôt a une conséquence politique considérable mais inconnue :
- dans l'exemple de Pierre, l'Etat a reçu 1080€ d'impôts en moins puisqu'il a payé 1080 des 1500€ de don : le don a donc couté 420€ à Pierre.
- dans l'exemple de Paul, avec un *crédit* d'impôt, l'Etat aurait reçu 1000€ d'impôts en moins, et fait un chèque de 80€ à Paul, l'Etat aurait donc payé 1080 des 1500€ de don, et donc pour Paul aussi, le don aurait coûté 420€.
=> Un crédit d'impôt est neutre, peu importe le montant d'impôt de celui qui donne...
- mais dans l'exemple de Paul, avec une réduction d'impôt, l'Etat a reçu 1000€ d'impôts en moins, et il n'a donc payé que 1000 des 1500€ de don (pas 1080) : le don a couté 500€ à Paul et pas 420€.
=> Le crédit d'impôt est neutre, peu importe le montant d'impôt de celui qui donne... mais la réduction d'impôt, elle, rend les dons plus chers pour les moins riches !
Et là, c'est le moment où je vous dis que les dons aux campagnes électorales et aux partis politiques font l'objet d'une réduction et non d'un crédit d'impôt...
Et inutile de vous dire à quels partis donnent les riches et les pauvres...
Si vous voulez avoir une idée de l'influence énorme que ça a, lisez Le Prix de la Démocratie de @CageJulia, dont je ferai un jour un résumé (je ne peux pas, là, il est dans un carton de déménagement).
@CageJulia En un mot : « Une tête une voix », c'est une fiction, les riches votent avec leurs dons, et la droite est très largement avantagée par les trois phénomènes décrits ci-dessus :
1 - les crédits d'impôt comme les réductions d'impôt permettent de payer un premium pour flécher soi même où l'Etat va dépenser,
2 - au frais du reste de la société,
3 - et s'agissant des réductions d'impôts, ça ne le permet qu'aux riches.
Tout ceci étant dit, devez vous renoncer à votre réduction d'impôt suite à votre don au Zevent ? Je ne pense pas.
Vous le demander, ce serait comme si les royalistes disaient aux révolutionnaires "vous êtes pacifistes, vous voulez la paix, alors rendez vos fusils 😏😏😏".
Par contre, dès qu'on en aura l'occasion, la gauche aura tout intérêt à désarmer tout le monde, en faisant un grand coup de ménage sur les crédits et réductions d'impôt (et en substituant ça par des dépenses budgétaires, quand c'est nécessaire).
Deux derniers points dont ce fil n'a pas traité :
- la question de pourquoi il y a tant de réductions d'impôt partout (genre 450-500), qui résulte en partie d'une règle parlementaire abracadabrantesque
On pourrait faire un long thread sur la pertinence de l'ISF, des réductions et des crédits d'impôts, que ce soit au caritatif comme en général, et même sur la pertinence des associations, qui au fond n'existent que parce que l'Etat n'est pas à la hauteur...
(dilemme que connaissent tous les associatifs : "est-ce qu'en aidant, on empire pas le désengagement de l'Etat ?"). Plein de questions excellentes... pour une autre fois, pas là.
Budget de l'aide alimentaire qui est de 56,7 millions au sein des 26 milliards de la mission Solidarité. J'adore le #Zevent, je suis en ce moment même devant Question pour un Streamer, mais juste pour rappeler que le caritatif n'aura jamais la force de frappe du politique. Votez.
J'ai 5mn, donc on va parler de ce joli graphique, sur lequel le gouvernement et les députés LREM se palu... se pavanent depuis une semaine, parce qu'il prétendrait que les pauvres ont gagné plus que les riches sous Macron.
Les journalistes de @CheckNewsfr ont déjà écrit un article dessus, que vous pouvez lire dès maintenant, on reviendra sur ce qui y est dit. liberation.fr/checknews/le-q…
@CheckNewsfr Tout d'abord, d'où vient ce graphique ? Du Rapport Economique, Social et Financier annexé au budget 2022 (page 46), trouvable au même endroit que tous les documents budgétaires : budget.gouv.fr/documentation/…
Tiens, il paraît que je suis une star twitter, moi je pense que jamais assez... Mais on va voir jusqu'où va aller mon ascension après cette bombe politique : j'ai repéré une erreur à 650 milliards d'euros, un quart du PIB, dans les comptes du pays ! Explications ⬇️
Dans une dizaine de jours, comme chaque année, la Direction Générale du Trésor va publier, en annexe au projet de loi de finances, le rapport économique, social et financier (RESF), qui résume la situation du pays.
Quand on voit les cartes, on peut se demander comment malgré des milliers de milliards et 20 ans à former une armée, on perd aussi facilement et aussi rapidement un pays ? Ca va être sévèrement décousu, mais un peu de géopolitique de l'Afghanistan.
Il est impossible de comprendre l’Afghanistan sans comprendre sa géographie. Son paramètre le plus important, c’est qu’à part le sud-sud ouest désertique, le pays est très très très montagneux : imaginez la France (le pays est légèrement plus grand), mais avec les Alpes partout.
Ce que signifient ces montagnes, c’est qu’il y a énormément de cuvettes entre les montagnes, dont on ne peut sortir en général que par une poignée de défilés. Ca a plusieurs conséquences :
Vu que certains vocifèrent sur le Conseil constitutionnel, quelques explications sur cette décision (qui ne surprend absolument personne : on savait tous, en la lisant, que cette proposition de loi serait déclarée non conforme, malheureusement mais logiquement).
Cette proposition de loi (PPL) pour l'hôpital public visait à activer les alinéas 3 à 7 de l'article 11 de la Constitution, la (mal-nommée) procédure du RIP, "référendum d'initiative partagée".
Le RIP, c'est plusieurs étapes : 1) un parlementaire dépose une proposition de loi (PPL) avec co-signature d'au moins 1/5ème des membres du Parlement (185 parlementaires quand il est au complet, un peu moins en ce moment)