12 décembre 1917. Des centaines de poilus quittent les tranchées pour 15 jours de permission de noël.
Il quittèrent la guerre pour finalement finir en enfer.
L’histoire du plus grand et du plus tragique accident de train français.
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11 décembre, Italie - Gare de Bassano del Grappa.
Ils sont mille soldats français à s’entasser dans ce train dit de permissionnaires.
15 jours de permission, après tant de batailles, tant de morts, ça ne se refuse pas.
Ils sont venu prêter main-forte au troupes italienne qui ont pris une grosse dérouillé à la bataille de Caporetto.
Ces soldats français ont sauvé l’Italie et son grenier à blé du nord.
Le front est consolidé. Ils méritent bien du repos.
Ils s’entassent dans la joie, au milieu des dizaines d’accents régionaux.
Ils sont Picard, Toulousain, Breton, Albigeois, Marseillais.
Les voitures et wagons débordent, le confort est spartiate.
Mais qu’importe!
Au bout du rail déjà pointe le sourire des femmes et des enfants.
Il y a 17 voitures / wagons dans ce train, soit en moyenne 60 soldats par caisses.
En sachant que le gabarit était bien plus petit que nos rames modernes.
Mais en ce froid mois de décembre, ça a du bon d’être coller les uns aux autres.
Mais pour l’instant, on coupe le train en deux.
Il doit franchir ce qu’il y a de plus terrible pour un train.
La montagne, les alpes.
Et une seule locomotive ne suffira pas à tracter ce lourd train de 530 tonnes.
Péniblement, et en passant par le tunnel de Frejus, ils arrivent en France. La mère patrie.
Enfin.
La gare de Modane.
Pour eux ce n’est pas qu’une gare, c’est la terre natale.
Le temps de réformer le train avec ses 17 wagons, les soldats sortent fumer sur le quai, beaucoup descendent toucher le sol.
Dernière cigarette.
Un train express de passagers partira devant eux.
Privilège du grade aidant, tous les officiers quittent le train de poilus pour monter dedans.
Les soldats voient ainsi partir leurs chefs dans des voitures chauffées.
Je m’arrête là pour vous décrire le train des poilus.
Le train numéro 612.
Une seule locomotive va le tirer jusqu’à Lyon.
Derrière, encadrant les 17 voitures passager, deux fourgons.
Mais attention, tout le train n’est pas totalement freiné.
il y a dans les trains des « wagons freins » .
En gros le freinage est assuré par un agent dans sa guérîtes, qui a à sa disposition un frein à vis.
Quand le conducteur siffle, un coup, il freine, deux coup, il défreine. (Pour faire simple).
Voici donc la composition du train:
Freiné = 🟢
Pas freiné = 🔴
🚂 🚋🚃🚃🚃🚃🚃🚃🚃🚃🚃🚃🚃🚃🚃🚃🚃🚃🚃🚋
🟢 🟢🟢🟢🟢🔴🟢🔴🔴🟢🔴🔴🟢🔴🔴🟢🔴🔴🔴🟢
Pour un train chargé à bloc c’est pas très sécuritaire.
On estime à 70 tonnes la masse des soldats, à rajouter au 530 tonnes de train initial.
C’est, pour l’époque, un train extrêmement compliqué à conduire.
Seules les trois premières voitures sont freinés au « frein direct continu ».
Freiner avec des agents serre frein n’est pas la procédure pour des trains de voyageurs.
Mais ce train militaire est considéré par la compagnie ferroviaire comme un train de marchandises.
Et au départ de Modane, ça descend directement.
Beaucoup, vraiment beaucoup.
Du 30/1000. C’est à dire que tous les 1000 mètres, le trains descend de 30 mètres.
En ferroviaire c’est énorme.
Il s’élance à 22h47 de Modane et entame directement la descente dans la vallée.
Les premiers kilomètres se passent bien, mais assez rapidement le train prends de la vitesse.
Malgré les sifflets d’urgence du conducteur, le serrage désespéré des « Serre-frein »,
Il atteint la vitesse de 135 km/h.
Et à ce rythme, rien n’est prévu pour tenir.
L’attelage entre la locomotive et le premier fourgon rompt.
La loco continue sa course folle, seule.
Le premier fourgon sort de la voie au plus mauvais endroit, une tranché encaissée, et au niveau d’un pont.
La voiture située derrière lui s’encastre dans une des piles de soutènement.
Sa vitesse passe de 135 km/h à 0, en une seconde.
Derrière, 14 voitures s’empilent immédiatement.
Elles sont en métal (pour le châssis) et en bois pour la caisse.
Elles sont littéralement compactées par la vitesse.
Ne laissant aucune chance à leurs occupants.
Seules 2 voitures et le fourgon de queue échappent au massacre.
Un incendie se déclare immédiatement.
Empêchant tout secours jusqu’au lendemain.
L’accident a lieu à 1300 mètre de la gare de Saint Michel de Valloire.
La locomotive a fini par dérailler dans cette gare, le conducteur a juste eu le temps de sauter à l’entrée de celle-ci.
Deux divisions de soldats britanniques qui attendaient de monter à Modane se précipitent vers les lieux du drame.
Il faudra aux secours, 5 jours pour trouver tous les corps.
435 morts, 194 blessés. Le plus grave accident de train en France vient d’avoir lieu.
Devant l’ampleur du drame et pour éviter d’annoncer une si terrible nouvelle en pleine fête de noël, l’accident est classé « Secret Militaire » par l’armée.
Les journaux de l’époque sont muselés.
Il n’existe que peu de photos.
Six cheminots seront même jugés en Conseil de Guerre discrètement, dont le mécanicien rescapé.
Aucun ne fut condamnés.
L’affaire ne fut rendu publique que vers 1919.
C’est qu’à Modane, le conducteur avait refusé de partir.
Le règlement imposait une locomotive en queue de convoi.
Pour « retenir » le lourd convoi.
Mais cette Locomotive avait été envoyé sur un autre train (un convoi d’artillerie vers le front).
Un lieutenant avait alors tenté d’imposer le départ du train au mécanicien. Qui refusa.
La guerre entre le règlement de la compagnie et le règlement militaire.
Le capitaine Fayolle, commandant du traffic de la gare intervient et impose au conducteur de partir comme ça.
Le conducteur ne fit qu’obéir aux ordres.
Victoire du règlement militaire…
Aujourd’hui encore, c’est une des plus grande tragédie ferroviaire française, et une des plus grande perte de soldats en dehors du champs de bataille.
Une stèle est érigée dans la commune de La Saussaz sur les lieux du drame.
Les corps des soldats morts ont été déposés au cimetière militaire national de Lyon-La Doua.
Pour rappel, voici un autre thread sur la particularité technique des « Serre frein », un métier très difficile:
Les tunnels ferroviaires, objets de fantasmes et de légendes, mais peu connaissent leurs secret de fabrication.
Thread.⤵️⤵️⤵️
Le tunnel ferroviaire, et son opposé, le pont ferroviaire, sont nés en même temps que le train.
Vers les années 1850, le chemin de fer se développe rapidement.
Et il faut franchir des obstacles: les collines et les vallées.
Parce que les locomotives de l’époque n’ont pas la puissance nécessaire pour gravir de grosses rampes.
Il faut que la voie ferrée soit la plus plate possible.
Quand j’étais en formation de conducteur de train en 2000, j’étais à Creil.
J’ai donc conduit le « premier » RER D du matin.
Et j’ai découvert un autre monde.
Je vous raconte en thread ⤵️⤵️⤵️
J’ai commencé à conduire mes premiers trains avec mon moniteur assis à côté de moi. Dès les premiers mois, on te met « au manche ».
C’est le meilleur moyen d’apprendre.👍
Et le dépôt de Creil avait en charge ce fameux RER.
Le premier d’extrême matinée comme on dit.
Aujourd'hui on ouvre le dossier sur LA légende que tout le monde connaît, soit de nom, soit de goût:
Le sandwich SNCF.
Thread Culinaire ⤵️⤵️⤵️
Il fut une glorieuse époque où pour se restaurer dans un train on se rendait à la voiture restaurant.
On pouvait aussi choisir de manger à sa place en faisant profiter ses voisins de son formidable sandwich au Maroilles sorti du sac.
Manger sur une vraie nappe, servit à la place, le tout avec une bonne bouteille, franchement j'aimerai moi aussi revivre ça au moins une fois dans ma vie.
Pas vous?