Allez, voilà ce qui est devrait être l'un des derniers #thread dédié à l'infographie #antinucleairesVSclimat de @sdnfr. Ils nous affirment, cette fois, que le #nucléaire serait « totalement hors délai »... Really ?
Et ça commence fort avec « en moyenne, 10 ans pour construire un réacteur ». Là, j'ai deux options. La première, c'est de faire l'idiot, et abuser de leur manque de contexte. Dans ce cas, je regarde différents parcs nucléaires mondiaux.
Exemple au hasard, le parc nucléaire français : le temps entre le lancement de la construction et la divergence du coeur, il est en moyenne de... 6.3 ans. Et même 6.0 ans si j'exclus les réacteurs de 1450 MW qui ont été plus problématiques.
On pourrait de telle sorte regarder des tas de pays qui ont eu des programmes nucléaires ambitieux : construire des réacteurs en plus de dix ans, c'est l'exception, pas la règle.
L'autre option, c'est d'être de bonne foi et supposer qu'ils ont oublié de préciser qu'ils parlent des réacteurs de 3è génération. Mais... Ça serait une approche illogique.
En effet, iil s'agirait là de comparer sur un échantillon réduit (une poignée de réacteurs en service) de têtes de série non représentatives. Est-ce qu'on parle des performances de l'éolien sur la base du prototype de Smith-Putnam, aujourd'hui ?
Ou, plus sérieusement, pour comparer des sauts de générations à d'autres, est-ce qu'on juge l'éolien sous le seul spectre des balbutiements hors de prix de l'éolien offshore ? usinenouvelle.com/article/les-in…
Donc non, un réacteur d'une filière mature, ça ne se construit pas en dix ans en moyenne. Un peu plus de 5 ans, 6 à 7 disons. Pour un GW de production, si ce n'est toujours pilotable, constante, aux arrêts pour maintenance près.
Et si l'EPR, puisqu'il est donné en exemple, ne parvient à réduire ses délais et coûts à des niveaux raisonnables... Il perdra le marché, tout simplement, au profit des chinois, russes, coréens, américains. Les réacteurs actuels ou futurs.
Parce que la vision centrée sur la France et les difficultés de l'EPR n'est pas fidèle à ce qui se fait ailleurs dans le monde, avec un marché actif de 55 réacteurs en construction...
En Russie, Turquie, Brésil, EAU, Argentine, Chine, France, Inde, Pakistan, Ukraine, Taiwan, Slovaquie, Japon, Finlande, Biélorussie, Bangladesh, Corée du Sud, États-Unis.
Passons à la suite : 9% d'émissions de GES évitées en mettant un réacteur en service un réacteur tous les 15 jours, ce qui serait impossible ?
Les comparaisons sont foireuses : le nucléaire n'a pas vocation a être la solution unique alternative à toutes les formes d'énergies fossiles, mais surtout dans la production électrique. Et il n'est pas déployable dans le monde entier comme solution unique...
Alors jugeons le non pas sur des extrapolations absurdes d'hypothèses infondées, mais sur ce qui a été, et ce qui peut être projeté à l'avenir.
Le record historique du nucléaire, c'est une augmentation de la production de 600 kWh/hab/an, en moyenne sur 10 ans. En Suède.
Donc là, on est certes dans de la haute performance, mais réaliste.
Et l'on va évidemment considérer que le nucléaire viendrait à la place de production au charbon, car ça serait notre objectif prioritaire.
On remplacerait donc 600 kWh/an/hab de charbon à ~850 gCO2/kWh par du nucléaire à ~50 g/kWh en comptant large. Gain de 800 grammes de CO2 par kWh nucléaire produit.
Et l'on parle d'une production en hausse de 600 kWh par an et par personne. Donc des émissions annuelles de CO2 par habitant qui baisseraient de 480 kg, et ce chaque année pendant 10 ans en moyenne. Arrondissons à 500.
La moyenne de l'Union Européenne, elle est à 8700 kg de CO2 émis en 2017 par habitant. Qui refuserait de baisser ses émissions à 8200 kg en 2018 ? 7300 kg en 2019 ? Sous les 5 tonnes en 2025 ? C'est possible, en développant le nucléaire comme le fit autrefois la Suède.
C'est trop lent pour suffire. Mais c'est loin d'être négligeable. Le nucléaire n'est pas la solution, personne ne dira le contraire ; mais il en fait partie.
On passe à la suite. Cinquante fois plus de capacités solaires et éoliennes auraient été installées dans le monde que de nucléaire, depuis 2000.
Bon, je ne vais pas vous faire l'affront de vous expliquer la notion de facteur de charge, vous savez qu'aucun moyen de production ne produit 100% du temps à sa valeur nominale.
Avec 400 GW de nucléaire en service (en comptant les réacteurs japonais dont on attend le redémarrage)pour une production de 2500 TWh, on a un facteur de charge moyen de 71% - plombé, particulièrement, par le Japon.
Pour l'éolien, on parle, en 2017, d'une production de 1100 TWh pour un parc de 515 GW. Pour le solaire, 440 TWh par 400 GW.
Donc des facteurs de charge respectifs de 24% et 13%. C'marrant, ce sont exactement les mêmes valeurs que la France ^^"
Donc si on raisonne en production moyenne et non plus nominale (ou « puissance crête »), les +35 GW de nucléaire, +399 GW de solaire, +497 GW d'éoliens mentionnés deviennent respectivement +25 GW, +52 GW et +119 GW.
Damned, c'est déjà beaucoup moins impressionnant.
Je vous rappelle que je fais une erreur grave, je suis désolé, je compare des choses pas comparable : la production nucléaire n'est pas intermittente comme le solaire ou l'éolien, elle...
Mais j'essaye d'expliquer simplement. Et, de toute façon, mon erreur est en défaveur du nucléaire, donc je m'y autorise.
Pour affiner sur l'intermittence, j'ai déjà abondé sur ce sujet ici...
Revenons à nos moutons. On a réduit le déséquilibre, mais l'éolien colle toujours presque un facteur 6 au nucléaire !
Sauf que... Une autre page de l'infographie, traitée par @astrochnis dans le thread ci-dessous...
Je découvre à cette occasion que les Russes ont en projet un RITM-400, une version boostée de leur petit réacteur RITM-200 prévu comme SMR à terre et réacteur de propulsion navale pour les brise-glaces.
La dernière sortie de Médiapart sur le nucléaire est assez impressionnante. Ils accusent le gouvernement d'avoir empêché l'ADEME de sortir un rapport contredisant les annonces de Macron d'hier sur la nécessite d'un nouveau parc nucléaire.
« Un rapport de 44 pages » précisent-ils : ce n'est manifestement qu'une note de synthèse, pas un rapport complet, comme pour négaWatt 2022 qui n'a sorti qu'une synthèse et pas encore son rapport.
Ou encore comme RTE qui d'abord donna une conférence présentant les principaux résultats, puis sortit une note de synthèse de 60 pages dans la foulée, et le vrai rapport de 600 pages progressivement dans les jours qui suivirent.
Piolle explique qu'il n'y a pas à chercher à forcer un peu le déploiement des renouvelables, il faut prendre tout le temps nécessaire à l'expression de la démocratie.
Ce culte de l'énergie locale, citoyenne et décentralisée.
Côté RTE, on évalue dans le scénario de référence que pour viser le 100% renouvelable à l'horizon 2050, il faut tenir un rythme moyen de 2 GW d'éolien terrestre par an de 2020 à 2050 (hors renouvellement des éoliennes existantes).
C'est à dire quasiment doubler le rythme historique du pays (environ 1.2 GW/an sur 2009-2020), ou tenir de manière constante pendant 30 ans notre rythme record de 2017.
Ou encore faire presque aussi bien que le rythme historique allemand.
Perso, hier encore, j'étais davantage « clairement non » que « plutôt non », pour vous dire. Mais là ce matin, entre les médias qui sont catégoriques et les écolos (dont les élus) qui ont l'air de se préparer à prendre les armes, je doute un peu !
Malgré tout, je m'attends davantage à du vent et des promesses de campagne qu'à du concret.
À la limite, s'il y a une seule chose de concrète que je pense qu'on peut espérer, quelque chose qui n'attendrait pas les élections,