Thread by @ferocias

On parle aujourd'hui de recourir à l'armée pour renforcer les forces de l'ordre.
En 1910 on avait déjà cette bonne idée... On maintenait alors l'ordre à coups de crosse de revolver sur la tête et de sabre... 1 mort et de nombreux blessés plus tard... ⤵️

Lors d'une grève, l'ouvrier ébéniste Henri Cler, militant anarchiste, est frappé à la tête d'un coup de crosse par un policier le 13 juin 1910. Henri Cler meurt le 21 juin à l'hôpital Saint Antoine (source @MaitronD => maitron-en-ligne.univ-paris1.fr/spip.php?artic… )

Lors des obsèques plus de 10000 personnes sont présentes. Et l'on va assister à des événements qui ne sont pas sans écho aujourd'hui... Les doctrines de maintien de l'ordre sont pour le moins "modernes". Contenir les manifestants, nasse, coups, prise à partie de non manifestants

Les obsèques d'Henri Cler ont lieu le 26 juin 1910. Le lendemain, elles font les gros titres des journaux
Source @Gallica
1 => gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt…
2 => gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt…

La veille au cours d'un meeting ,la CGT et L'Union des Syndicats avaient appelé à manifester le jour des obsèques
(source @GallicaBnF : gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt… )

Plusieurs journaux relatent en détail la journée.
A deux heures de l'après-midi, les manifestants se réunissent devant le domicile d'Henri Cler, 127 rue du Faubourg Saint Antoine.

La manifestation commence alors. On chante "L'Internationale" et "Gloire au 17e" de Montéhus (en 1907 des soldats ont mis la crosse en l'air refusant de tirer sur une manifestation de vignerons à Béziers)

La presse rapporte ces éléments.
Il est alors trois heures de l'après-midi.
(source @GallicaBnF => gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt… )

En passant devant le poste de police situé sur le parcours du cortège, les cris contre la police fusent.
Les agents répliquent... avec des coups de feu... panique évidemment...

Ce sont maintenant des cuirassiers et des gardes républicains qui suivent le cortège à proximité du cimetière du Père Lachaise...

Des heurts (comme l'on dit) ont lieu entre manifestants et forces de l'ordre.
Certain-e-s manifestant-e-s se réfugient dans des boutiques.

La cérémonie a lieu au cimetière de Pantin. Des discours sont prononcés. A 19h tout semble fini mais des manifestants décident de repartir vers Paris. C'est alors que de nombreuses forces de l'ordre bloquent le cortège. Elles ont composées de policiers et de militaires.

Les forces de l'ordre commencent par filtrer les manifestants (je vous avais dit qu'il y avait des échos aux formes de "maintien de l'ordre" d'aujourd'hui! , attention la nasse arrive bientôt ;) )

La troupe finit par charger et tirer. On déplore de nombreux blessés. Les manifestants sont "nassés", ils ne peuvent regagner Paris. On voit même apparaître des Street Medics !

(Alors que des manifestant-e-s (hommes, femmes, enfants, vieillards) cherchent à trouver refuge, ils sont violemment délogés par la troupe... malgré la solidarité de la population et des "Street Médics" de l'époque (les ancêtres de
@CStreetmedic ) #streetmedic

Les journalistes de l'époque tentent de connaître le nombre de blessés parmi les manifestants (la préfecture ne communique que sur le nombre d'agents blessés) poke @davduf ;) et témoignent de la violence de la répression.

Le Dictionnaire Maitron ( @MaitronD ) indique que 40 agents et plus d'une centaine de manifestants furent blessés ce soir-là...
(source : maitron-en-ligne.univ-paris1.fr/spip.php?artic… )

Certains journaux parlent de 300 blessés (50 parmi les forces de l'ordre et 250 parmi les manifestants)

Histoire de conserver la main, le gouvernement de l'époque, bien loin de tenter d'apaiser la colère, choisit une voie bien connue...

Au Conseil municipal de Paris, la manifestation et la répression sont évoquées.
Les socialistes protestent et demandent des explications au préfet Lépine (oui oui le sympathique préfet et son fameux concours!)

En réponse, le préfet Lépine accuse les manifestants de toutes les violences... et reçoit le soutien sans faille de la majorité du conseil municipal parisien.

La réponse judiciaire est sévère. Dès le 28 juin les premières condamnations tombent. Une clôture brisée? Quinze jours de prison...
Jets de projectiles vers un agent (sans le blesser) ? Deux mois de prison...

Il ne fait pas bon évoquer Henri Cler...
Un certain Victor Julliard qui proteste contre l'arrestation musclée d'un individu pour ivresse sur la voix publique, quelques jours après, lance : "En voilà assez! L'autre jour vous avez tué Cler, vous n'en assassinerez pas d'autres"...

Victor Julliard passe immédiatement au tribunal : un mois de prison ferme !
(source @GallicaBnF => gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt… )

En avril 1911 plusieurs participants au cortège du 26 juin 1910 passent au tribunal. Les condamnations pleuvent... Marauze est condamné à huit jours de prison.
Maintenant vous avez qui fut Henri Cler ;)

Ça vous a plu? intéressé? énervé? Vous appris un truc?

La fiche anthrométrique d'Henri Cler qui est au
Source =>
metmuseum.org/art/collection…

metmuseum.org/art/collection…