Thread by @Bouletcorp

Vous êtes prêts pour un énième fil râleur sur les auteurs ? Allons-y !

https://twitter.com/atlftraducteurs/status/1136447985133543424

Déjà je remercie @20Minutes d'avoir consacré un article à nos soucis. Je trouve qu'il survole un peu rapidement le problème et caricature un peu mais c'est quand même chouette d'en parler.

Maintenant le truc qui m'emmerde: l'idée que la surproduction est LE problème. Parce que oui et non. Un éditeur à qui je parlais de surproduction m'avait ri au nez, genre "bah tu peux faire moins de livres, hein ! La surproduction c'est toujours les autres !"

Or il faudrait parler des CAUSES de la surproduction. Mais là la réponse est simple: l'exploitation des auteurs, le recul de leurs droits. Quand tous les éditeurs se sont mis d'accord entre eux pour quitter les prix à la page pour passer au forfait, les auteurs ont perdu.

Si les éditeurs continuaient a payer correctement à la page, ils ne POURRAIENT pas surproduire: la variable économique qui permet la surproduction ? La marge des auteurs.

La paupérisation des auteurs c'est aussi le report d'une partie du travail de graphisme sur eux. Naguère l'auteurs fournissait des dessins, c'était à l'éditeur de les rendre imprimables. Désormais on exige de l'auteur qu'il ait son propre ordi et fournisse des fichiers calibrés.

Et je ne compte pas les opérations publicitaires non-payées de type dédicaces et autres "on peut reprendre deux-trois dessins pour le site web ?" Et "tu nous fais un petit truc pour notre instagram". L'auteur doit faire sa propre promo.

Et une dernière chose: à la fin de l'article le petit tacle sur les blogueurs qui privilégient la quantité au détriment de la qualité: merde. Les coms en dessous des Jean-Pierre Bon Sens qui pleurent le pauvre savoir-faire qui disparaît au profit du copier-coller: double merde.

La qualité d'un travail n'a pas grand chose à voir avec la justesse des perspectives ou le nombre de petits traits. Je n'échangerais un tome de Reiser contre dix tomes de blagues de Bigard alors que c'est bien colorié sans dépasser et qu'ils ont dû y passer plus de temps.

C'est aussi con que de compter les pages d'un livre pour décider s'il est mieux qu'un autre. La BD est un langage, et comme dans tout langage une ligne bien écrite, même en une minute, peut être plus forte qu'un pavé de 500 pages fait en 10 ans.

Après, Schuitten est un génie et on fait beaucoup de merde en ligne (moi y compris, mais je ne m'adresse pas de la même façon, ni au même public selon que je fais une connerie sur un blog ou un scénario de 160 pages) mais ça n'est pas MOINS de travail.

Bref tout ça pour dire que les auteurs ont été pris comme paillasson depuis plus de vingt ans et que les demandes de régulation des droits d'auteur à un minimum de 10% ne sont pas un caprice. C'est une rustine indispensable pour maintenir à flots une profession qui est à bout.

Bambou a récemment franchi ce pas. Si Bambou peut le faire, Glénat, Delcourt, Casterman et tous les autres "gros" peuvent aussi.

Voilà. Sur ce je mute direct le fil parce que je suis en vacances et que j'ai la flemme de me re-engueuler sur le sujet aujourd'hui. Bonne journée 🧡