Tout d’abord, il faut rappeler qu’il n’est pas impossible pour un pays X d’acheter le territoire d’un pays Y avec son consentement. Rien, en droit international, n’empêche un transfert de territoire à condition qu’il existe un consentement démocratique. Et ce, même en #Arctique.
Dans le cas particulier du #Groenland, tout dépend du statut de l'île. Depuis 2009, Nuuk peut déclarer son indépendance du Danemark à tout moment. Ainsi, le Groenland pourrait en théorie déclarer son indépendance et rejoindre immédiatement les USA en se "vendant" de lui-même.
Cela nécessiterait un Traité d'achat, lequel devrait être ratifié démocratiquement tant par Nuuk que par Washington. A Nuuk, la ratification pourrait prendre la forme d'un référendum, tandis qu'à Washington le processus de ratification passerait par le Congrès —on va y revenir...
Dans le cas actuel où le Groenland reste un territoire associé au Danemark bien que semi-autonome, le Traité en question devrait être négocié entre Washington et Copenhague car les questions de souveraineté et de politique étrangère directe restent de la compétence du Danemark...
...et le consentement démocratique local du pays vendeur devrait à la fois être obtenu vis-à-vis du Danemark ET du Groenland. Or, ce consentement est absolument inenvisageable à court comme à moyen termes.
Le Groenland a opposé une fin de non-recevoir à Trump et il n'y aura pas de négociations dans un avenir proche. Nuuk veut l'indépendance réelle et ne souhaite pas remplacer une tutelle historique (celle du Danemark) par une autre, qu'elle soit chinoise, américaine ou autre.
Quant au Danemark, s'il venait à perdre le Groenland, il perdrait sa qualité de pays #arctique. Copenhague n’a aucun intérêt à apporter à la proposition de Trump ni à accélérer d'une manière général une émancipation du Groenland sans pouvoir y préserver son influence historique.
Trump et son administration collaborent avec le Danemark et le Groenland au sein de nombreuses instances dédiées à l'#Arctique (Conseil de l'Arctique, ACGF, AEC, ASFRT,...) ainsi qu'au sein de l'#OTAN, entre autres. Ils connaissent la situation. Alors : pourquoi aller si loin ?
D'autant plus que Trump ne peut même pas décider seul d'acheter le Groenland : il a besoin de l'aval du Sénat (pour ratifier le traité d'achat) ainsi que de la Chambre des Représentants (pour voter le déblocage des fonds pour payer la transaction)...
...comme ce fut le cas déjà en 1867-1868, lorsque le Congrès a tout fait pour retarder l'achat de l'Alaska à la Russie afin d'empêcher Andrew Johnson — devenu Président suite à l'assassinat d'Abraham Lincoln — d'en tirer un avantage politique en vue de la présidentielle de 1868.
Alors, vraiment, pourquoi Donald Trump s'est-il engagé dans ce bourbier, au risque de casser encore un peu plus le lien entre les Etats-Unis et leurs alliés européens ?!?
Il faut chercher la raison tant dans la nouvelle politique #arctique de l'administration Trump que dans la dynamique politique interne aux États-Unis alors que s'intensifie la campagne des primaires côté Démocrates. Achat ou pas, le Groenland apporte déjà des bénéfices à Trump 🤨
Les États-Unis redécouvrent leur frontière nord en #Arctique. Déjà en retard sur la #Russie dans la région, Washington se doit de répondre à la pression politique exercée par Moscou, mais aussi par la #Chine car Beijing a pris des positions stratégiques au... #Groenland.
Ainsi, alors que l'administration Trump multiplie les déclarations chocs depuis 18 mois afin d'essayer de reprendre la main sur l'agenda #arctique face à la #Russie et à la #Chine, il n'est pas si surprenant de voir Trump relancer l'idée impérialiste du rachat du #Groenland...
Même si c'est préjudiciable dans la relation avec le Groenland et le Danemark, ce coup de comm' est en fait un ballon d’essai médiatico-politique faisant contre-feu aux multiples annonces russes et chinoises en #Arctique. Et, grâce aux médias et aux réseaux sociaux, ça marche...
La posture #arctique de Trump est défensive: face à la #Chine, qui a su s'insérer dans le vide laissé par 15 ans de désengagement américain vis-à-vis du Groenland, Washington ne peut plus se permettre de laisser l'île inuit s'éloigner de la sphère d’influence des États-Unis...
...car ce serait un risque direct pour la capacité d'influence américaine dans l'ensemble du jeu #arctique, mais aussi, et surtout, un risque majeur pour la sécurité du territoire américain même et de la stabilité des eaux de l'Atlantique-Nord.
En effet, depuis les années 40, le #Groenland est considéré par le Pentagon comme le 1er rideau de défense naturel pour la côte Est des États-Unis et un relais logistique transatlantique. D'où l'installation de la base militaire de Thulé et du hub aérien de Kangerlussuaq.
Ce coup politique aux dépends du #Danemark et du #Groenland — qui n'avait rien demandé mais profite de cette exposition médiatique mondiale à 0 coût — est un ballon d'essai voué à montrer une fois encore la capacité de Trump à faire bouger certaines lignes dans le jeu arctique...
...mais aussi pour montrer à son électorat qu'il est toujours un "deal-maker", un "visionnaire stratège" et un "défenseur de la grandeur de la Nation", quitte à être irrespectueux avec ses alliés arctiques et européens. Ces thèmes sont complètement délaissés par les Démocrates...
...de même qu'ils sont délaissés par les puissances scandinaves et européennes en Arctique. Avec ce coup, il repositionne les Etats-Unis sur les mêmes codes rhétoriques que la #Russie et la #Chine : nous aussi nous sommes une grande nation qui peut remodeler le Grand Nord.
En résumé, pendant que la presse et les réseaux caricaturent Trump, celui-ci mène tranquillement la barque qui l'emmènera jusqu'en novembre 2020. Il fait l'agenda politique, décide du news cycle. N'oubliez pas, c'était sa recette en 2016... 😳 Ne tombez pas dans le panneau !
FIN
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La #sobriété énergétique est un CHOIX de société VOLONTAIRE, qui traduit une évolution systémique des agents économiques.
L’#austérité énergétique est une organisation de la rareté face à une PÉNURIE SUBIE, conjoncturelle, qui met en exergue 25 ans d’impréparation structurelle.
Et attention : faut pas confondre non plus sobriété, austérité et efficacité énergétique !
L’efficacité est une évolution technologique : on consomme moins d’énergie pour le même service rendu voire mieux, mais ça n’implique pas un changement de comportement (#EffetRebond 😉).
DERNIÈRE MINUTE : selon @bloomberggov et @arctic_today, Donald Trump va bien organiser la vente aux enchères des parcelles pétrolières dans la Réserve Naturelle Sauvage #Arctique (ANWR) d'Alaska le 6 Janvier 2021. 😫
De fait, les enjeux sont énormes.
ENFILADE ⬇️⬇️⬇️
De quoi parle-t-on exactement ?
On parle de l’ANWR (Arctic National Wildlife Refuge), la Réserve naturelle sauvage arctique des États-Unis.
Créée en 1960 et agrandie plusieurs fois, l’ANWR atteint aujourd’hui 78000 kilomètres-carré (autant que la Suisse et les Pays-Bas réunis).
Dans ces 78.000km2, il y a trois zones distinctes. La zone d’habitat sauvage en tant que telle, 32.000km2. La zone dite de "gestion minimale", 40.900km2.
Et enfin, la zone côtière de l’Océan Arctique appelée la "Zone 1002" : 6.100km2. C’est cette partie-là qui nous intéresse…
On parle de l’ANWR (Arctic National Wildlife Refuge), la Réserve naturelle sauvage arctique des États-Unis.
Créée en 1960 et agrandie plusieurs fois, l’ANWR atteint aujourd’hui 78000 kilomètres-carré (autant que la Suisse et les Pays-Bas réunis).
Dans ces 78.000km2, il y a trois zones distinctes. La zone d’habitat sauvage en tant que telle, 32.000km2. La zone dite de "gestion minimale", 40.900km2.
Et enfin, la zone côtière de l’Océan Arctique appellée la "Zone 1002" : 6.100km2. C’est cette partie-là qui nous intéresse…
Fin Août, la #Russie a confirmé la découverte de 5 nouveaux îlots en #Arctique grâce à la fonte des glaces.
Cette semaine, beaucoup de médias se sont emportés, parlant d'"extension de territoire"… Un coup de comm' qui sert les intérêts de Moscou 👇👇
Comme nous l'avons vu dans @arretsurimages fin septembre, en Europe comme aux US, la couverture médiatique des enjeux arctiques reste encore limitée à du spectaculaire, du folklorique ou de l'insolite. Il faut faire rêver, surprendre ou indigner.
En l'espèce, la Russie est un bon client : il est relativement facile de jouer sur les peurs de l'"Ours", en particulier lorsqu'on parle des enjeux territoriaux. Présenter la Russie comme la seule puissance "expansionniste" en Arctique marche à tous les coups : 2001, 2015, 2019…
Au sommet du #G7Biarritz, le Président de la République a voulu montrer à quel point la 🇫🇷 était à la pointe du combat mondial pour sauver le #climat. Pour ce faire, une après-midi dédiée aux entreprises engagées pour la protection de la planète se tenait ce vendredi à l'Élysée.
Durant cette après-midi, le PDG de CMA-CGM a annoncé que son groupe — n°4 mondial derrière Maersk 🇩🇰, MSC 🇨🇭 et COSCO 🇨🇳 — "n'utiliserait pas la Route Maritime du Nord", en #Arctique.
Une décision qualifiée d'"audacieuse" reprise avec force par le Pdt Macron. On va y revenir…