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Suite au recours de G. Thunberg et 15 autres jeunes devant la Convention de l'ONU sur les droits de l'enfant,
je vois passer beaucoup d'approximations de la part de certaines personnes et de nos décideurs politiques.

Je vais donc tacher de corriger ça et on va parler chiffres ⤵️
Mais avant de commencer, faisons un peu d'histoire et plus particulièrement de l'histoire climatique, en
regardant de plus prêt les variations de concentration de CO2 dans l'atmosphère depuis 800 000 ans.
Durant les 800 000 dernières années, on voit donc une oscillation dans les concentrations de CO2. Cette
oscillation, parfaitement naturelle, s'effectue sur des milliers d'années, et permet, en partie, d'expliquer
les phases d'entrée en glaciation et de déglaciation.
Cependant, depuis la révolution industrielle, l'homme, de part son action est venu complètement perturber
cet équilibre et a littéralement fait bondir la concentration de CO2 dans l'atmosphère en l'espace de seulement
1 siècle.
Ainsi, nous sommes passés de 280ppm à 410ppm, soit +45%. Sur une échelle de temps géologique, il faut bien
comprendre que ce changement est très brutal.
Bien, après ce bref instant histoire, ouvrons désormais nos livres de géographie à la page "Qui émet quoi ?"
En valeur absolue, la France représente donc ~1% des émissions mondiales. Les plus gros étant la Chine, les États-Unis et l'Inde. À la vue de ce genre de camembert, certains en déduisent donc que "agir en France ne changera rien, allez plutôt porter plainte contre la Chine".
Sauf que, ce genre de raisonnement traduit une grille de lecture partielle des choses. En effet, comparer des pays en terme d'émissions n'a réllement de sens que si on intègre la dimension population dans l'équation.
C'est mécanique, la Chine compte 1.4 milliard d'habitants contre 65 millions en France. Elle ne peut donc qu'émettre plus, en proportion. Regardons ce que cela donne en ramenant les émissions à la population.
De suite, cela fait relativiser. Certes, en valeur absolue, la Chine émet beaucoup. Cependant, unitairement, le chinois moyen n'a pas forcément beaucoup à envier à l'européen moyen. L'américain moyen, lui, par contre, est hors compétition avec ses 20tCO2eq.
Mais alors la France, dans tout ça ? Car c'est entre autre d'elle dont il s'agit dans l'action de Greta et des 15 autres jeunes.
Avant de regarder plus en détail le cas spécifique français, on va parler de comptabilité carbone et rappeler quelques notions de vocabulaire.
En matière de comptabilité standard, il existe de nombreuses normes.
Pour la comptabilité carbone, il existe également deux méthodes permettant de compter les émissions de gaz à effet de serre.
Pour la première, on va parler "d'inventaire national". Il s'agit de quantifier l'ensemble des émissions de gaz à effet de serre réalisées sur le territoire français. Le fait de faire rouler sa voiture à l'essence ou de se chauffer avec du gaz rentre dans ce périmètre.
Le deuxième mode de comptabilité, quant à lui, étend cette notion d'inventaire en dressant le bilan des imports et des exports. On prend l'inventaire national, on lui ajoute la différence entre export et import, et cela nous donne ce que l'on appelle l'empreinte carbone.
Ainsi, l'empreinte carbone prend en compte les émissions dites "importées". Les émissions liées à notre consommation d'objets fabriqués en Chine sont donc incomporées dans cette empreinte carbone.
Regardons donc comment tout cela a évolué en France.
Bien que les émissions aient effectivement baissées et se situent désormais autour de 6tCO2eq/hab, l'empreinte carbone, quant à elle, n'a pas du tout diminué et se situe autour de 11tCO2eq/hab.
Que peut-on en déduire ? Qu'en réalité, la France a engendré un report de ses émissions nationales vers des émissions qui sont désormais importées.
Parler uniquement d'émissions est donc trompeur. Il faut aussi parler d'empreinte.
Pour un ménage français moyen, comment est répartie cette empreinte ?
Dans le secteur des transports, la voiture individuelle est le premier mode de dépense, car on se déplace au pétrole. Dans le secteur des batiments, c'est l'énergie, car on se chauffe au gaz et au fioul.
En valeur absolue, on retrouve d'ailleurs exactement les mêmes ordres de grandeur. Le secteur des transports est le premier secteur émetteur de gaz à effet de serre en France, suivi par celui des batiments et l'agriculture.
Nous avons donc vu que l'empreinte carbone d'un français moyen se situait entre 11 et 12 tonnes de CO2. Pour atteindre les objectifs fixés par la COP21 de Paris et limiter le réchauffement en dessous de 2° il faudrait réduire cette empreinte à ... 2 tonnes.
Sachant cela, la France se donne t-elle les moyens d'atteindre cet objectif ? Chez nous, la loi prévoit que la France élabore tous les 5 ans une stratégie nationale
bas carbone (SNBC). La première (SNBC1) a été adoptée en novembre 2015.
La SNBC définit la marche à suivre pour conduire la politique d'atténuation des émissions de gaz à effet de serre dans des "conditions soutenables sur le plan économique à moyen et long termes". C'est une feuille de route de réduction des émissions.
Elle définit des plafonds nationaux d'émissions de gaz à effet de serre dénommés "budgets carbone". La première version, SNBC1 ayant été adoptée en 2015, voyons voir comment la France s'en est sortie.
On voit donc que la France, entre 2015 et 2019 a dépassé les budgets alloués et définis par la SNBC1. Au total, les émissions ont bien baissé mais beaucoup moins que prévu.
En sachant tout ça, je vous laisse donc répondre à la question "la France fait-elle sa part ?".
Enfin, certains se sont également amusés à affirmer que la France était déjà vertueuse grace à son nucléaire. Cette approximation révèle une mauvaise compréhension du problème et une confusion entre énergie et électricité.
C'est donc l'occasion pour moi de rappeler qu'en France, l'électricité représente 25% de notre consommation d'énergie finale. Parmis ses 25%, 90% est déjà décarbonné car provenant de modes de production bas carbone, nucléaire et hydro-électrique.
Mais quand on parle d'énergie, c'est une erreur que de borner sa grille de lecture à l'électricité. Il faut regarder le mix énergétique dans son ensemble. Et la France reste encore un pays "tout fossile", avec 40% de pétrole et 20% de gaz.
Voilà, cela vient conclure ce long fil. Pour traiter le problème complexe qui nous intéresse, mieux vaut s'assurer de bien l'avoir compris, et j'espère vous avoir donné tous les éléments vous permettant d'en améliorer sa compréhension.
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