On continue notre série d'articles consacré à la Peste noire. Aujourd'hui, épisode 8 : « Peste, dépression, décroissance ? ». L’épidémie médiévale - tout comme celle d'ajd - a en effet de sérieuses conséquences économiques, mais aussi environnementales. Un thread ⬇️ ! #histoire 
La catastrophe démographique (rappelons que la Peste tue au minimum 30% des Européens, beaucoup plus dans certaines régions) entraîne un fort ralentissement de l’économie. Mais, comme toujours, il y a des gagnants et des perdants...
Parmi les perdants, on compte notamment beaucoup de petits nobles et de riches cultivateurs, qui gagnaient leur vie en revendant le produit de leurs exploitations. Or la population a davantage baissé que la production agricole => surplus agricoles => baisse radicale des prix
Ruinés, ces petits nobles sont nombreux à miser sur la carrière des armes pour maintenir leur niveau de vie… et participent ainsi à entretenir un climat de guerre et d’insécurité.
En revanche, les salariés – s’ils survivent – sont mieux lotis. Moins nombreux et donc très demandés, ils peuvent exiger des salaires beaucoup plus élevés : celui des maçons parisiens passe ainsi de 30 à 95 deniers par jour entre 1348 et 1359 !
À la campagne, les tenanciers – qui louent la terre qu’ils cultivent – héritent d’exploitations plus étendues et surtout plus fertiles. Le spectre de la famine est écarté : les paysans ne peuvent plus s’enrichir, mais ils mangent mieux qu’avant la Peste
Vous avez sûrement vu ces images sur l’eau des canaux de #Venise qui devient d’un coup plus claire. Au Moyen Âge aussi, la #décroissance économique se traduit par une baisse immédiate de l’empreinte écologique des hommes
À partir du milieu du XIVe siècle, de nombreux villages sont abandonnés à la nature : la forêt progresse, notamment sur les terres les moins fertiles. Les sources écrites évoquent notamment la nouvelle prolifération des loups...
Cette reforestation peut même être cartographiée avec précision grâce aux études études de pollens – la palynologie, si vous voulez briller au prochain #skypéro – menées par les archéologues.
Ce progrès de la forêt traduit à la fois la mort de beaucoup d’habitants et le fait que les survivants se réinstallent sur des terres plus fertiles. En Suède, il faut par exemple attendre 1360-1370 pour qu’on voit une augmentation significative du nombre de fermes abandonnées
D’ailleurs, toutes les terres désertées ne retournent pas à la forêt : les meilleures sont intégrées à d’autres exploitations, restées en activité ; d’autres sont transformées en pâturage pour le bétail. Même la forêt, source de bois et de gibier, n’est pas improductive.
Bref, ces espaces restent marqués et, dans une certaine mesure, entretenus par l’homme, ce qui par la suite a pu faciliter la reprise. Plus qu’un recul de l’activité anthropique, la crise s’est traduite par une reconfiguration de ses liens à l’environnement.
On peut se prendre à rêver que la crise actuelle, quoique beaucoup moins sévère, fasse de même... La suite au prochain épisode !
