Thread by @MSR_Tlse

Si, lors du #confinement, vous êtes plutôt #TeamNude, alors ce #thread écrit par @MathieuS31 est fait pour vous.

Dès aujourd’hui, on vous raconte tout sur la nudité des Grecs et des Romains 🍑
#StayNudeAtHome

#ThreadAuxBellesCourbes

D’abord, en France, se montrer nu est puni par la loi, être habillé est une norme sociale.

L’article 222-32 du code pénal dit que "l’exhibition sexuelle imposée à la vue d’autrui est punie d’1 an de prison et de 15000 € d’amende"⛔️

La nudité, comme les vêtements, est porteuse de sens : social, moral ou religieux.
Selon l’époque, elle peut signifier la puissance physique, le sacré, la perfection mais aussi la honte.
Dans tous les cas, elle ne laisse personne indifférent.

Dans l’art chinois, par exemple, on ne représente pas le nu sauf dans le cadre érotique.
Mais dans la culture asiatique comme dans d’autres civilisations, le vêtement "couvre" trois fonctions : orner, communiquer, protéger.

Le vêtement est donc révélateur des classes sociales.
Il ne faut donc pas représenter le nu, sinon les fonctions que jouent le vêtement disparaissent.

Pas de vêtement, pas de différence ; pas de différence, tout le monde nu ; tout le monde nu... tout le monde nu... #Astérix

Nous vous proposons donc un voyage dans le monde des courbes, des fesses, des muscles, des galbes, des sinuosités, du nu... dans l’Antiquité gréco-romaine.

Car la nudité est l’un des héritages les plus importants laissés par les Grecs !

Les Grecs, comme les Romains d’ailleurs, ne passaient pas leur vie à poil ! Mais ils pouvaient se passer de tissu : comme nous aujourd’hui, aux thermes (chez nous = 🛁), au 🛌, mais aussi, nous le verrons, au gymnase !

Pour les Anciens, la nudité ne signifie pas être nu. Elle est un choix et non un état artificiel qui feint le naturel. Elle n’est représentée que dans certaines circonstances particulières et codifiées. #Keskidi

Depuis l’Antiquité, le nu masculin renvoie à des fonctions sociales nobles : athlètes, héros... Il cache autant qu’il révèle (comme la barbe ➡️ #ThreadAuPoil) et implique donc l’idéal masculin parfait, l’excellence personnelle et les valeurs individuelles.

Pour les dirigeants, l’honneur est synonyme de vertu, l’arétè.
L’homme, en Grèce comme à Rome, se doit d’être habillé. Le vêtement célèbre la valeur primordiale du citoyen, comme les statues de togati le montrent.

📷 @christelmolinie / @WikiCommons

Suite du #ThreadAuxBellesCourbes

Bien sûr, il existe des moments durant lesquels on représente l’homme nu. C’est le cas du sport. Homère mentionne que les Achéens portaient un simple pagne lors des jeux funèbres de Patrocle, alors que les spartiates pratiquaient le sport nus.

Mais tout le monde n’est pas admis au gymnase, lieu où se pratique le sport. D’ailleurs, ce lieu qui désigne l’ensemble des équipements liés à la pratique sportive vient du mot grec gumnos, qui signifie "nu".

#NBA_Naked #RIPKobeB

Eschine, orateur athénien du IVe siècle avant notre ère, cite une loi athénienne qui interdit ce lieu aux esclaves et leurs fils, à l’homme sans entraînement (apalaistratos), aux prostitués, au saoul, au dément ou à tous ceux qui exercent un métier d’agora.

Selon #RadioPookie, ce même orateur accusa Timarque de s’être entraîné nu, en pleine assemblée. Il faut dire que le Timarque en question était un fervent supporter du Macédonien Philippe II.
Vengeance est donc rendue.

Au gymnase donc, on y entre habillé mais on passe par l’apodytêrion, le vestiaire, qui permet de revêtir son "habit de nudité". La nudité est donc exceptionnelle et les 👨‍🦰, les citoyens, se transforment en athlètes.

Afin de ne pas exciter des désirs homoérotiques, les athlètes utilisaient le kunodesmê, une bride de cuir qu’ils attachaient à leur prépuce. C’était le seul morceau de tissu toléré sur le corps, bandeau dans les cheveux mis à part. #FashionWeek

📷 art.thewalters.org/detail/27085/p…

D’ailleurs, dans les représentations, pour des critères probables de beauté, le pénis était petit, avec un long prépuce. Pour les Grecs, ne pas dévoiler le gland signifiait être maître de son corps, comme sur ce 🏺 peint par Euphronios au Ve s. av. n. è.
📷 Sailko / @WikiCommons

Les hommes circoncis, avec ou sans petit prépuce, subissent des moqueries générales, tout comme les hommes avec de gros sexes, parodiés dans les comédies des poètes grecs célèbres comme Épicharme ou Aristophane.
📷 @MathieuS31

La représentation de sportifs en action est une excuse parfaite, pour les artistes, de montrer leur savoir-faire en matière de symétrie, de proportion des corps, d’équilibre, afin de magnifier la beauté juvénile et l’idéal athlétique. Avec + ou - de réussite 👇
📷 Materia Viva

Un des maîtres en la matière se nomme Myron, sculpteur au Ve s. av. n. è. en Grèce. Avec une vache et une vieille ivrogne de Smyrne, son autre oeuvre fameuse est "Le Discobole", dont une réplique romaine en marbre de Paros se trouve au MSR
📷 @photos_floues / @WikiCommons

L’original était une fonte en bronze. Il montrait un lanceur de disque dont les muscles sont en tension. La position des bras dessine une sorte d’arc, près à lâcher son projectile. Mais la position du lanceur semble peu vraisemblable pour un humain normal ! 🤷‍♂️

Les femmes en Grèce ont aussi accès au gymnase. À Athènes le sport leur ait autorisé malgré l’absence d’image à ce sujet. À Sparte, les jeunes filles "montrent leurs cuisses" (Plutarque), à la lutte ou durant les courses rituelles. #DealWithIt
📷 images.perseus.tufts.edu/images/1992.06…

À Rome, elles sont représentées en bikini, pratiquant différents sports : les haltères utilisés pour le saut en longueur, un jeu avec une 🏐, la 🏃‍♀️ ou encore le lancer de disque. Néanmoins qu’il ne s’agit là que de sport de loisir et non de compétition.
📷 Disdero / @WikiCommons

Le nu féminin est toujours inhabituel. Lorsqu’il apparaît, il induit une charge érotique ou une représentation de la sphère divine. Il est aussi lié aux cultes de la fertilité. L’exemple le plus connu du nu féminin est sans doute Vénus/Aphrodite.
📷 @photos_floues / @WikiCommons

Au passage, n’oublions pas que dans l’Antiquité l’image, quelle qu’elle soit, est avant tout une création masculine. Peu de femmes ont peint ou sculpté en Grèce ou à Rome. Il faut donc relativiser un peu les modes de représentations...

Cette statue de Vénus (👆), trouvée en 1881 à Toulouse, est dérivée de la fameuse Vénus de Cnide, sculptée par Praxitèle vers 340 av. n. è. Ses formes et ses rondeurs sont bien éloignées des modèles de magazines peoples d’aujourd’hui ! #BalanceTonGras

Les nymphes aussi sont représentées la poitrine dénudées, comme c’est le cas sur les mosaïques retrouvées dans la villa romaine tardive de Saint-Rustice : Doto ou encore Thétis, mère d’Achille et assise sur Triton sont montrées poitrine nue.

Les critères de beauté antique n’étaient pas les nôtres : une femme parfaite était celle dont le corps lui permet d’enfanter et possède donc un bassin développé et une poitrine opulente pour nourrir sa progéniture.

Pour cela, mères et nourrices modelaient le corps des petites filles à l’aide de bandelettes d’emmaillotage, qu’elles serraient ou relâchaient selon les zones choisies. Les Goths, eux, préféraient déformer le 💀. #AreYouInsane ?

📷 Hadès

Ces modèles de la nudité 🙍‍♀️ existent depuis la préhistoire : on en a retrouvé sur les parois de la Grotte de la Marche dans la Vienne ou sur des sculptures comme la Vénus de Willendorf en Autriche ou celle de Lespugue en Haute-Garonne.
📷 Locutus Borg / @WikiCommons

Vers -2500, en Méditerranée, se sont des figurines qui sont sculptées en marbre ou en bois, représentant des femmes ou peut-être des déesses-mères. Puis les représentations féminines se couvrent. #CachezCeSein...

Depuis la fin du 7e. siècle av. n. è., la nudité est l’apanage des 👱‍♂️. Il faut attendre Praxitèle pour voir le premier nu féminin depuis bien longtemps. Mais il s’agit là encore d’une déesse et non d’une jeune fille.
📷 @Jastrow75 / @WikiCommons

Les divinités ne peuvent pas être vues sous leur véritable forme, ni même dans le plus simple appareil... Demandez à Actéon… 🐕

Les artistes jouent entre curiosité du spectateur et pouvoir de la déesse de l’Amour et de la beauté, Aphrodite.

📷 Daniel Martin / MSR

Les occasions pour montrer des femmes nues, aux yeux de tous, ne sont donc pas légion. C’est pourquoi les artistes ont travaillé les drapés féminins, plus proches des corps, augmentant ainsi le pouvoir érotique derrière le dissimulé.
#DrapéMouillé

📷 Daniel Martin / MSR

Les Romains, malgré leur fascination pour l’athlétisme grec, associent nudité avec décadence et immoralité. C’est pourquoi, pour le sport, ils peuvent s’entraîner nus ou porter un pagne. #NotAManLikeThat

📷 @MathieuS31

En dehors des thermes, la nudité était donc une transgression sociale, une dépravation de la moralité. Mais ça n’empêchait pas les Romains de se baigner, en extérieur, dans une natatio, la piscine. À Toulouse, les vestiges de l’une d’elles sont conservés à Ancely.

La nudité peut aussi être le « vêtement » du héros, alors que les militaires portent la cuirasse. L’Empereur, chef de guerre, peut être aussi sculpté sans habit militaire ou toge, à l’image de Trajan.

📷 Daniel Martin
ℹ️ villachiragan.saintraymond.toulouse.fr/partie-02-gale…

La nudité héroïque, au MSR est l’apanage d’Hercule et ses 12 Travaux, découverts à Chiragan. Le demi-dieu est représenté fort, grâce à ses muscles, et réfléchi. Il incarne la figure du citoyen modèle.

📷 Daniel Martin
ℹ️ villachiragan.saintraymond.toulouse.fr/partie-04-l-an…

Les femmes mariées portaient la stola, symbole de la citoyenne, comme c’est le cas de la toge pour les hommes. Quand elles se promènent, elles se couvrent de la palla, ne laissant que le visage découvert.

📷 Daniel Martin
ℹ️ villachiragan.saintraymond.toulouse.fr/partie-02-gale…

Cette anti-nudité cache le corps, indiquant que ces Romaines sont indisponibles sexuellement, donc mariées. On cache leur corps à cet effet. Les formes sont effacées par de longs tissus amples, ne provoquant aucun désir masculin.
#LockedUpInside

Dans le Digeste, oeuvre juridique ordonnée par l’empereur byzantin Justinien au VIe s., il est indiqué que « si donc une 🙍‍♀️ n’a pas été vêtue en femme de bonnes mœurs, celui qui se sera adressé à elle n’est pas tenu de l’action d’injures. »

À Rome aussi donc, rien n’interdit de représenter les héros nus ou des Vénus callipyges. Mais d’autres sont aussi représentés dévêtues, comme les prisonnières de guerre, que l’on retrouve au pied de l’empereur victorieux
📷 @photos_floues / @WikiCommons
ℹ️ pop.culture.gouv.fr/notice/joconde…

Dans la Bible, dans le texte hébreu, la première allusion à la nudité est celle d’Adam et Eve dans le jardin d’Eden.
Le couple est nu mais n’en a pas conscience. Ils ne sont donc pas gênés l’un et l’autre.
#LikeAVirgin

Mais, dans la Vulgate latine, une nuance est ajoutée et on traduit la gêne par "une honte mutuelle".
Chez les Chrétiens, on admet une représentation iconographiques des êtres vivants, à l’image de la culture gréco-romaine.
#LostInTranslation

C’est notamment le cas sur les sarcophages paléochrétiens. Sur l’un d’eux trouvé à Auch dans l’ancien prieuré Saint-Orens, sur un des côtés, Adam et Eve sont représentés de part et d’autre d’un pommier, Eve cueillant le fruit défendu.
📷 @christelmoninie / @WikiCommons

Le sculpteur de ce sarcophage a d’ailleurs probablement utilisé des modèles gréco-romains pour représenter le couple : malgré les disproportions visibles des parties de leurs corps, on remarque le hanchement cher à Polyclète. #JoueLaCommePoly

Ces rapports de proportion ont été codifiés au Ve s. av. n. è. par le bronzier grec Polyclète. Pour lui, la tête d’une sculpture doit correspondre à exactement 1/7e de la hauteur totale. Depuis cette théorisation, cette proportion est reprise et interprétée.
📷 @MathieuS31

Au @MSR_Tlse, une statuette romaine en bronze trouvée en Aveyron, représentant un jeune homme faisait une libation avec une phiale, reprend ce modèle grec : le hanchement déséquilibre le bassin, relevant l’épaule opposée.
📷 @photos_floues / @WikiCommons

La nudité héroïque d’Hercule est aussi réinterprétée sur l’autre petit côté de la cuve d’Auch où est représenté Daniel dans la fosse aux 🦁🦁. Le prophète lève les bras vers Dieu pour terrasser les 🦁🦁, à l’image de celui de Némée en Grèce.
📷 @christelmoninie / @WikiCommons

Au Moyen Âge, l’Église édicte des contraintes quant à la représentation humaine. La nudité et la sexualité sans retenue sont dorénavant considérés comme péché de la chair. On peut donc faire de l’exercice, mais le sport à la romaine est mal vu.

a Basilique Saint-Sernin, édifiée entre le XIe et XIIe s., a été décorée à l’extérieur avec des chapiteaux historiés. Les modèles gréco-romains sont parfois réutilisés comme sur le Chapiteau du péché originel de la Porte Miègeville.
📷 @PierreSelim / @WikiCommons

Remarquons que le personnage cachant son anatomie est l’allégorie des 4 fleuves du Paradis, représentée à l’image d’un dieu-fleuve gréco-romain. #PrudeAndProud

La nudité est aussi synonyme de punition divine comme sur les chapiteaux de la Porte des Comtes. Sur celui de la luxure masculine, deux démons lacèrent le sexe d’un homme nu avec deux crochets. #AïeAïeAïe
📷@PierreSelim / @WikiCommons

La luxure féminine, elle aussi, est illustrée de manière assez animale. En effet, la femme libertine est représentée nue, mordue par deux serpents, parfois aux seins, parfois au sexe. #LeaveMeAlone
📷 JMaxR / @WikiCommons

Puis, à mesure où la Renaissance, partant de l’Italie, se développe vers l’Occident, les nus vont revenir sur le devant de la scène à la faveur d’artistes italiens notamment.

Nous arrivons au terme de notre #ThreadAuxBellesCourbes.

Venez voir #IRL les oeuvres du @MSR_Tlse qui ont illustré ce thread, à la réouverture du votre musée préféré 😉