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Ceci est un #thread en 3 parties sur le #nucléaire, la #croissance et les #EnR dans la #TransitionÉnergétique (du secteur électrique).
La première partie est ici :

J'y peste contre une insensée catégorisation "pro-nucléaire = cornucopiens" et "anti-nucléaires = décroissantistes".
Insensée, absurde à qui côtoie au moins l'un ou l'autre des milieux pro- ou anti-nucléaires, car dans chacun, l'on rencontrera des gens qui souhaitent voire ont foi en la croissance durable, et d'autres qui souhaitent ou redoutent une inéluctable récession.
Mon but est de présenter des contre-exemples. Des pro-nucléaires décroissantistes, et pro-EnR très ambitieux sur la croissance.
En vérité, pour le premier cas, je n'ai pas grand chose à dire... Je pense que la plupart d'entre vous connaissez @JMJancovici et son propos.
L'idée, en très bref, est que la décroissance est une fatalité par épuisement des ressources fossiles, mais qu'il vaut mieux la provoquer au plus tôt pour en avoir le contrôle et pour protéger le climat, plutôt que de juste subir.
Et pour le second cas, on va s'intéresser au cas de l'Allemagne, pays Seigneur de la cause anti-nucléaire (dont les vassaux se nomment Autriche et Luxembourg).
Il se trouve que la deuxième partie de ce thread, totalement fortuite car publiée en cours de route par un tiers, vise à explorer l'évolution des émissions de GES du pays comparé à la France.
Je vous laisse lire ça :
Et enfin, ma troisième partie, sur les changements futurs.

Le site energy-charts.de du Fraunhofer Institute, permet de suivre en quasi temps réel le mix électrique allemand, et fournit une foultitude de données plus macro sur leur parc électrique.
Et, depuis peu, il présente aussi l'évolution du parc électrique dans ce qui est le scénario de référence de l'Institut. Avec les objectifs suivants :
- Sortie du nucléaire en 2022
- Sortie du charbon en 2038
- Neutralité carbone du système électrique en 2050.
Le site présente d'autres scénarios, dont l'un à acceptabilité sociale réduite, et l'autre à neutralité carbone de tout le système énergétique, par exemple.
Mais je ne vais parler que du scénario "Reference", qui colle aux trois objectifs sus-cités.
Et voilà en une image ce qu'on peut en tirer.
Le parc électrique allemand s'est vu multiplié par deux entre 2000 et 2020, il est question d'encore multiplier par deux d'ici 2030 et encore par deux d'ici 2045.

Ne parlez pas de sobriété ou de décroissance : on va bourrer les surcapacités pour compenser l'intermittence.
Et malgré tout, on va augmenter notre base pilotable qu'on va alimenter au bois et carburants issus du Power-to-Gas (les "convertisseurs" se répartissent entre PtG et batteries).

Mais voyons plus en détail.
Commençons par ce qui n'est pas présenté par le Fraunhofer. Nucléaire, biomasse, hydraulique, fioul.
À défaut, j'ai fait des hypothèses assez simples : fermeture du nucléaire au rythme annoncé, maintien constant de biomasse et hydraulique,
et réduction linéaire du fioul vers 0 en 2035. De toute façon, pour ces trois moyens de production, on va parler de quelques GW sur un parc de plusieurs centaines, donc mes possibles erreurs ne changeront pas la donne.

Et ça donne ça :
Comprenez bien que je vais vous montrer des graphiques qui indiquent non pas le parc, mais sa variation annuelle. Par exemple, une réduction du parc nucléaire/biomasse/hydro/fioul de 10,5 GW en 2011.
Rien de sorcier sur ce graphe, une vague de fermetures de centrales nucléaires en 2011, une compétition entre biomasse en hausse et nucléaire en baisse ensuite, et une autre vague de fermeture de centrales en 2021 et 2022. Puis la baisse du fioul jusqu'en 2035, et plus rien.
Quant au reste... Ce soir ! Il est plus que temps de retourner bosser.
Passons au charbon, qui n'a, évidemment, pas vraiment diminué ces dernières années.
Et qui devrait réduire de moitié, progressivement, d'ici 2034. Et l'autre moitié en 2035.

Ça va être sympa à gérer en termes de social, ça, avec un paquet d'emplois à évaporer d'un coup.
Ça sera probablement une raison de repousser un peu la fermeture de quelques centrales, comme ça l'a été en France, pour les centrales à charbon ou nucléaire. J'espère seulement qu'on parlera de deux ou trois tranches, pas de 20 GW...
Maintenant, passons aux choses rigolotes, les EnR, totem de la sobriété ! Et commençons par l'éolien terrestre...
Et c'est du lourd ! Il faut mettre rapidement fin à l'essoufflement observé depuis 2017, et repartir de plus belle jusqu'à rattraper les records historiques et les dépasser !
Fini la fluctuation entre 1 et 5 GW par an de nouvelles installations.
Non non, ce qu'on veut, c'est, dès 2027, une cadence fixe à plus de 6 GW par an à construire - en plus du renouvellement du parc ancien ! Il va falloir faire mieux que les meilleures années passées, et soutenir ce rythme : gl hf.
Mais c'est pas le meilleur... On y vient.
D'abord, l'éolien offshore. Avec des ambitions du même genre : chaque année à compter de 2028, faire mieux que tout ce qui aura été fait jusqu'alors. Entre 2 et 3 GW par an à construire.
Là où ça devient complètement excessif, c'est avec le photovoltaïque... un record maintenu trois ans à presque 8 GW installés par an, mais une moyenne probablement moitié plus basse...
Et bien on veut 10 à 15 GW par an supplémentaires, soutenus !
Je pense qu'il serait intéressant de convertir ça en surfaces de toiture et au sol (le site en source donne la répartition entre les deux).
En attendant, essayer d'imaginer la puissance installée cumulée que ça va représenter...

On arrive enfin au meilleur. Prêts ?
TADAAAAM !
Oui, z'avez pas la berlue. Il est question de construire plusieurs GW de centrales à gaz supplémentaires par an. Parce que nécessiter d'un back-up pilotable, etc, vous connaissez les chanson.
Évidemment, promis juré, le gaz naturel sera progressivement remplacé par du biométhane ou de l'hydrogène. Rappelons-nous que l'on veut zéro émissions nettes en 2050.
Suffit de développer les bonnes technologies.
Et en attendant, tant pis pour les émissions de CO2 et de CH4, c'est toujours mieux que le risque nucléaire, pas vrai ?
Et si la production de CH4 ou d'H2 en Power-to-Gas est trop chère, tant pis pour les consommateurs.
De toute façon, après avoir financé un parc dont la puissance installée dépasse de 5x au bas mot la puissance crête appelée sur le réseau, seront-ils à ça près ?
Peut-être seront-ils trop occupés à lutter contre le déploiement, sur toute la surface du pays, de centaines de milliers d'éoliennes. Et qu'ils n'auront pas le temps de s'intéresser au climat ou à leur portefeuille.
Quant à imaginer que l'industrialisation du Power-to-Gas échoue... Mieux vaut ne pas y penser.

Le résultat, tout agrégé, il est là.
Là où le parc était de 100 GW, essentiellement pilotables, il y a 20 ans, on va aller chercher 400 GW de photovoltaïque (+350), 250 GW d'éolien terrestre offshore (+200), 150 GW de gaz garanti-sans-GES (+120).
En comptant sur les électrolyseurs, les batteries, la méthanisation, l'écrêtement et les interconnexions aux frontières pour équilibrer cette énorme surcapacité et une demande qui devra en partie s'y adapter.
On est pile dans la fuite en avant techniciste, se lancer à fond dans un scénario en espérant que les verrous auront sauté avant qu'on se heurte au mur, avec des surcapacités qui font beaucoup plus "culture de l'abondance" que "sobriété".
Donc aussi absurde que la catégorisation « pro-nucléaire = productiviste croissantiste », est la catégorisation « anti-nucléaire = sobre décroissantiste ».

D'ailleurs, je vous invite à réfléchir à ça : pourquoi le nucléaire serait synonyme d'abondance ?
Rien n'interdit de l'utiliser au juste besoin, voire en-dessous des besoins (comme c'est le cas de la quasi-totalité des systèmes électriques qui utilisent du nucléaire dans le monde). Ou bien d'essayer d'en faire une corne d'abondance : c'est un choix de société avant tout.
Là où, comme d'habitude, l'usage des EnR va être piloté par des contraintes physiques... Dont la première demeurera l'intermittence et donc le besoin de compenser par d'énormes surcapacités et/ou des moyens de stockage de masse qui restent à développer.
Sauf à, cas extrême, se contenter des EnR avec leurs problèmes, sans chercher à les résoudre : auquel cas on n'assure même plus le "juste besoin", et c'est plus propice à la précarité et l'effondrement qu'à la sobriété et la décroissance.
Bref, essayez de sortir la réflexion sur les technologies et les moyens de production des guerres de chapelle gauche / droite ou croissance / décroissance. Ça mérite mieux que ces raccourcis et ça rend les choses certes moins simple (le manichéisme a ses avantages) mais plus...
Lisibles ? Ou, en tout cas, leur donne le potentiel de rendre le débat davantage fondé sur des connaissances et des critères mesurables, voire objectifs, et non plus sur des associations outrancièrement simplistes.

Dans une démocratie, c'est bien plus sain... À bon entendeur 😉
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