Voilà maintenant 296 jours qu’avec Charbel nous sommes sortis de chez nous pour filmer et documenter la révolution (Thawra ثورة) qui traverse le #Liban. Aujourd’hui, cette journée est une étape décisive. « C’est tout ou rien » nous confie nos proches.
A quelques heures de l’événement, les esprits se réveillent fatigués et inquiets « Il y a de fortes chances que je finisse en prison, peut être même que je meurt. Mais trop c’est trop, #Beyrouth est dévasté, l’heure est venue qu’ils paient ! » nous confie Ahmad. 
Le 17 octobre dernier, très rapidement, le mot d’ordre du soulèvement avait été « Thawra selmiye » ( Révolution pacifiste ) ou « Thawra mabsuta » ( Revolution heureuse ). Aujourd’hui le mot d’ordre est plus grave : « Al istqalat aw al mushaniqat : La démission ou la potence ».
Nous ne savons pas si le peuple ira jusqu’à commettre de meurtre. Si il veut un nouvel État, il souhaitera sans doute le bâtir sur autre chose que le sang et aura besoin d’un soutien international qui ne pourrait cautionner cette action, même en dépit de la catastrophe.
Cependant je me souviens aussi d’une conversation avec des proches révolutionnaires le mois derniers. « Ils ne lâcheront pas le pouvoir. Le seul moyen c’est qu’ils aient peur, très peur. Peur pour leur propre vie à tel moins qu’il leur devienne nécessaire de quitter le pouvoir »
Il est midi. Avant de partir pour la manifestation, nous apprenons la mort d’Alexandra. Innoncente. Morte de ses blessures. Elle avait trois ans... A la rage se mêlent les larmes.
Il est certains que la journée sera violente, très violente. Nous nous équipons du mieux possible pour nous sécuriser et nous rendre visible avec Charbel. Nous savons que la neutralité ne nous protégera pas des coups portés sur la foule.
Des députés ( ceux du parti des Kataebs ) viennent d’ors et déjà d’annoncer leur démission.
3 heures avant l'heure officielle, la place est déjà noire de monde. Des potences sont érigées au centre de la place. L'Armee est dépêchée de manière impressionnante.
3 heures avant l'heure officielle, la place est déjà noire de monde. Des potences sont érigées au centre de la place. L'Armee est dépêchée de manière impressionnante.
Je rejoint mon ami Ahmad. Les rues se remplissent de manière impressionnante. Des femmes portent le deuil, la foule hurle les slogans de la Révolution du 17 octobre : "LE PEUPLE VEUT FAIRE TOMBER LE RÉGIME !"
Très rapidement, les forces intérieures tirent sur la foule du gaz lacrymogène. Ils espèrent la faire se disperser. Ce gaz est le même utilisé en janvier dernier lors de la "semaine de la colère". Il est très acide et brûle aussi la peau.
Dans la foulée des manifestants essaient de rentrer dans le parlement. Les forces intérieurs tirent des balles en caoutchouc. Les premiers blessés s'effondrent sur la place.
De mon côté, je fonce en première ligne pour rentrer dans un bâtiment abandonné. Ici des manifestants lancent des cocktails molotovs et des pierres sur les forces intérieures postées autour du parlement.
Je me fraye un chemin dans les débrits, en évitant les fenêtres que les tireurs surveillent en contrebas, arrivé sur le toit, la vue de la Place des Martyrs est impressionnante et me rappelle les premiers jours de la révolution. La colère a uni le peuple du #Liban
En descendant j'entend des tirs de semi automatique. Georges Nader, ancien général de l'armée me confirmera après que 8 personnes ont été blessée par ces balles réelles. La tension monte. Une journaliste de L’Orient le Jour confirme avoir vu des blessés au plomb.
Malgré cela et l'intensification des gazs, la foule garde ses positions. Si cette manifestation avait eu lieu quelques semaines avant l’explosion, la Place se serait vidée en quelques minutes, preuve que cette journée était particulière.
Ahmad a pris avec d'autres manifestants le contrôle du ministère de des affaires étrangères. Ils y accrochent une affiche " #Beyrouth, capitale de la révolution" et brûlent les portraits des politiciens accrochés au mur.
Ahmad est sur le toit, il prononce un discours.
Les révolutionnaires veulent contrôler les ministères à défaut du parlement. Ils souhaitent faire du ministère des affaires étrangeres le quartier général de la révolution.
Les révolutionnaires veulent contrôler les ministères à défaut du parlement. Ils souhaitent faire du ministère des affaires étrangeres le quartier général de la révolution.
D'autres ministères sont pris, notamment celui de l'Énergie. Les manifestants tentent de voler des documents confidentiels qui serviront de preuves dans l'affaire de l'explosion.
La nuit tombe. Nos amis Bachar et Mattew nous accompagnent. Ils nous préviennent en cas d'attaque, et arrêtent les capsules de gaz lacrymogène pour nous pemettre de couvrir les événement.
Les forces intérieurs continuent d'innonder le centre de #Beyrouth au gaz lacrymogène.
Mattew et Bachar s'inspirent des stratégies manifetsantes de Taïwan pour nous protéger.
Charbel et moi sommes bien équipés.
Mattew et Bachar s'inspirent des stratégies manifetsantes de Taïwan pour nous protéger.
Charbel et moi sommes bien équipés.
Pendant ce temps l'armée est intervenue au ministère de l'intérieur pour déloger les révolutionnaires avec des balles en caoutchouc. Nous n'avons plus de nouvelles d'Ahmad depuis.
Le Premier Ministre Hassan Diab a annoncé la tenue d'élections anticipées. Une revendications qui divisait les manifestants ces derniers mois. D'abord par crainte de clientelisme dans cette période de crise économique...
Ensuite par crainte d'autres tricheries sur les élections comme cela a déjà été le cas quand des candidats indépendants se présentaient
Le bilan provisoire dans la soirée est donc de 250 blessés. De notre côté moi et Mattew avont seulement reçu une balle en caoutchouc de petit diamètre et quelques inhalation de gaz. Nous pourrons redescendre demain.
Demain nous verrons donc quelle tendance prend ce que nous pouvons appeler le grand retour de la revolution. À savoir vers quoi celui-ci va aboutir...
" Le gouvernement allonge la liste des victimes de son incompétence en réprimant ceux qui demandent leur liberté " me confie Lina une libanaise de Baalbeck au retour.
