Jour 6, au procès des #AttentatsJanvier2015. Aujourd'hui encore, la cour d'assises spéciale va entendre des survivants de #CharlieHebdo. Hier, à la barre, plusieurs proches de victimes et des rescapés ont déjà témoigné, et raconté l'horreur. Témoignages tous bouleversants.
Voici le compte-rendu web @franceinter d'hier, jour 5, signé @ChPiret.
franceinter.fr/justice/l-odeu…
Ce matin, c'est Simon Fieschi qui doit témoigner le premier. Il a été grièvement blessé par les terroristes, ce 7 janvier 2015. Marche toujours difficilement.
Vous pouvez retrouver son portrait par @ChPiret
franceinter.fr/justice/le-tem…
La parole de Simon Fieschi, aussi à écouter sur @franceinter, ici, avec les témoignages de Sigolène Vinson, autre survivante de #CharlieHebdo, et Michel Catalano, l'imprimeur de Dammartin-en-Goële, qui a été l'otage des Kouachi.
franceinter.fr/emissions/le-z…
L'audience rouvre pour le jour 6 au procès des #AttentatsJanvier2015.
Me Coutant-Peyre, l'avocate du principal accusé réclame des audiences plus courtes, dit qu'elles sont épuisantes pour les avocats et accusés, et réclame d'abréger les faits car "ils sont connus", et que les terroristes qui ont tué ne sont pas dans le box.
Le président la recadre : "une question de décence !" pour les victimes, les survivants, qui ont livré hier des témoignages bouleversants. "On va pas leur dire on est fatigué", tranche le président, qui pense d'abord aux parties civiles, les plus éprouvées.
Me Marie-Laure Barré, avocate de plusieurs parties civiles s'offusque de cette demande de Me Coutant-Peyre. Alors que c'est si dur pour les victimes "de poser des mots sur l'indicible. Il n'est pas question de synthétiser ce qu'ils ont à dire", prévient Me Barré.
Une autre avocate de la défense, Zoé Royaux, se lève : "il est hors de question de limiter la parole des parties civiles", mais les avocats de la défense rappellent que les accusés sont rentrés vers minuit, se sont levés vers 5h, et doivent "se reposer pour assurer leur défense"
Me Coutant-Peyre : "qu'on ne se méprenne pas, j'ai une infinie compassion pour les victimes, mais le procès a un objet, déterminer les responsabilités et il faut que nous soyons en état de le faire"
#AttentatsJanvier2015
Le président appelle le premier témoin du jour à la barre : Simon Fieschi, survivant de #CharlieHebdo, grièvement blessé dans l'attentat. Il marche difficilement.
Le président : "voulez-vous être assis ?"
Simon Fieschi, qui marche avec une béquille, répond : "je tiens à témoigner debout".
Le président fait installer une chaise si besoin.
Le témoignage sera éprouvant.
Silence absolu dans la salle.
#AttentatsJanvier2015
Simon Fieschi : "je suis rentré à #Charlie en 2012 au poste de webmaster. Mon rôle était de publier les articles sur le site, animer les réseaux sociaux". ll a 36 ans.
Simon Fieschi a parlé d'une voix calme, avec une force incroyable, sans larmes, pendant plus de vingt minutes, sans jamais s'asseoir sur la chaise à roulettes placée à côté de lui au cas où. La salle a retenu son souffle pendant tout son récit, particulièrement bouleversant.
Simon Fieschi, commence à raconter le 7 janvier 2015. Il était assis à son bureau, près de la porte d'entrée de #CharlieHebdo. Il précise d'abord qu'il n'a pas vu les vidéos que la cour a visionnées avant-hier. On y voit les terroristes tirer sur lui et on le voit s'écrouler.
Simon Fieschi : "je me souviens de la porte qui s’ouvre extrêmement violemment, une déflagration. Je me souviens de mon champ de vison en diagonale. Je me souviens d’entendre Allah Akbar et plus tard on ne tue pas les femmes et je vois passer les deux hommes cagoulés".
Simon Fieschi : "Je perds connaissance, ce qui m’a sans doute sauvé la vie. Quand je me réveille, je me souviens de ce silence qui a été décrit. Je me souviens d’une grande difficulté à respirer". C'est impossible, précise-t-il, d'évaluer le temps qui passe à ce moment.
Simon Fieschi : "Je me souviens de la voix de Laurent Léger qui dit "oh merde, Simon !" Je me souviens quelques temps plus tard que deux personnes, Suzie et Matthieu, venus à mes côtés dans le fauteuil dans lequel j’étais coincé, et en me parlant ils m’ont maintenu conscient"
Simon Fieschi pense être resté une dizaine de minutes blessé dans son fauteuil de bureau : "j'ai trouvé cette cette attente un peu longue, j’étais en état de choc. Quand les secours sont arrivés, ils ont mis un moment à m’extraire du fauteuil dans lequel j’étais"
Simon Fieschi : les secours "m’ont plongé par terre avec les jambes en l’air. Je me souviens de poser des questions, savoir ce qui s’était passé, et si les autres allaient bien. Je sentais que quelque chose de grave c’était passé".
Simon Fieschi : "On me palmait des jambes, on me demandait si je sentais quelque chose, je ne sentais rien.
La seule chose que je voyais, je voyais du sang, mon sang et peut-être celui qui avait coulé en salle de rédaction, dans lequel les secours avaient marché".
Simon Fieschi : "L’image qui me reste, c’est celle de cette traînée de sang dont je ne comprenais pas encore le sens a ce moment-là. On m’a traîné sur une civière. On m'a descendu. On m'a emmené à l'hôpital. Je cherchais le numéro de ma mère."
Simon Fieschi : "Je ne trouvais pas les deux derniers numéros, j’ai passé tout le chemin à chercher les derniers numéros de ma mère. Quand je suis arrivé à l'hôpital, à la Salpêtrière, on m'a mis dans le coma. Le 7 janvier s'arrête".
Simon Fieschi apprendra le 7 janvier 2015 une semaine plus tard, "le coma a duré une semaine, j’ai appris le 7 janvier bien après"
Simon Fieschi : "On a tiré sur moi deux balles. Une m’a touché. L’entrée de la balle est à la base du cou sur le côté droit, sortie dans l’omoplate gauche. Sur son chemin,
elle a touché ma colonne vertébrale. Je suis venu pour vous raconter l’effet d’une balle"
Simon Fieschi : "Je suis venu pour vous raconter l’effet d’une balle de kalachnikov, en ce qui me concerne. J’ai passé cinq semaines en réanimation, 8 mois en hospitalisation complète. J’essaierai d’être un peu synthétique"...
Simon Fieschi : "À ma sortie de réanimation, j’ai pu être stabilisé, j’avais les côtes brisées, l’omoplate explosée, et des infections à répétition, et une paralysie complète à ce ce niveau-là". Il montre sa poitrine.
Simon Fieschi : "Quand je suis arrivé aux Invalides, je suis resté un peu plus de 8 mois en hospitalisation complète.
Je dois faire un travail de rééducation à vie pour ne pas perdre ce que j’ai réussi à récupérer."
Simon Fieschi, toujours droit à la barre, avec une dignité incroyable : "Je suis tiraillé aujourd’hui au moment de témoigner, car je n’ai aucune envie d’offrir ma douleur, mais je n'ai aucune envie de cacher les conséquences, je vais essayer de naviguer entre les deux"
Simon Fieschi : "Les séquelles d’un tir l’arme de guerre, quand on survit, sont de trois ans. D’abord, des séquelles physiques. J’ai eu une chance énorme, la paralysie complète est devenue partielle".
Simon Fieschi : "Les articulations de l’épaule, du bassin, sont gravement et irrémédiablement endommagées, ce qui complique la marche. Les jambes ont des tremblements. Mon périmètre de marche est extrêmement limité".
Simon Fieschi : "L’atteinte à la colonne vertébrale a diminué ma taille de sept centimètres. Il y a des conséquences sensorielles, qui sont connues pour provoquer des douleurs neuropatiques, les nerfs continuent à envoyer un signal douloureux".
Simon Fieschi : "Ces douleurs, on ne peut pas s’en débarrasser, j’ai perdu en sensibilité, notamment sur les mains, les jambes". Il parle d'une "sensibilité en mosaïque".
Simon Fieschi : "Mes deux mains ont perdu en motricité. La gauche surtout". Dit qu'il a "perdu au niveau du pouce", ne peut plus "taper à la machine, faire ses lacets". Et le jeune homme, encore plein d'humour : "je ne peux plus faire un doigt d'honneur, parfois ça me démange !"
Simon Fieschi : "Les douleurs sont de moins grande intensité qu’à ma sortie d’hôpital, heureusement. Elles sont devenues chroniques. Ces douleurs ne disparaissent jamais. Elles sont usantes, physiquement et psychologiquement".
Simon Fieschi : "Je dirais que j’ai aussi des séquelles psychologiques. Pendant longtemps, j’ai cru que j’en étais à l’abri. C’est quelque chose qui est venu après, quand l’état physique s’est stabilisé et n’est plus devenu le problème principal."
Simon Fieschi : "Je n’ai pas eu de dépression, mais je peux dire que je suis dans le post-trauma et que je le resterai toute ma vie."
Simon Fieschi : "J’ai des problèmes de concentration.
Des épisodes de colère, de tristesse".
Simon Fieschi : "Aujourd'hui encore je souffre, ou je suis protégé, je ne sais pas très bien, par un phénomène de dissociation. Une sorte de sentiment d’irréalité comme si c’était arrivé à quelqu'un d'autre. Tous les souvenirs sont là, avec une forme de voile".
Simon Fieschi dit qu'il essaye de continuer à vivre, à "essayer de voir le verre à moitié plein, je suis vivant, le journal continue".
Simon Fieschi : "Aujourd’hui, je ne peux plus travailler à plein temps. J'ai un sentiment de perte même si j’essaye de ne pas trop faire de comparaison entre l’avant et l’après."
Simon Fieschi : "Le fait de lutter contre la paralysie fait voir le bon côté des choses tout le temps mais génère une fatigue abyssale, qui ne disparait jamais. Tous mes mouvements, tous mes actes sont arrachés à cette fatigue".
Simon Fieschi : "J’entends parfois que nous sommes des rescapés. C’est toujours un mot qui me fait drôle, comme si on avait échappé à ce qui s’est passé. J’ai pas eu ce sentiment. Aucun de ceux qui étaient là, vivants ou morts, aucun d’entre nous n’a échappé à ce qui s’est passé"
Simon Fieschi : "Je me considère plus volontiers comme un survivant que comme un rescapé. Avec ce que ça implique de chance. Le terme de victime est exact mais me déplaît".
Simon Fieschi : "Le terme de victime est exact, mais me déplaît car il y a quelque chose de passif. Je dirais que la victime a des droits, et heureusement, et j’ai l'impression qu’en tant que survivant, on a des devoirs".
Simon Fieschi : "Je suis venu avec le sentiment de devoir de témoigner de ce que font les armes de guerre. Témoigner que, en ce qui me concerne cette balle, elle m’a pas raté et elle m’a pas eu. Et quand j’y pense, je me dis c'est la même chose pour le journal". #CharlieHebdo
Simon Fieschi : "J'avais envie de témoigner, pas pour me plaindre, mais pour montrer les épreuves, desquelles on s’est relevé, desquelles on continue à se relever".
#AttentatsJanvier2015
Simon Fieschi : "Ce moment judiciaire est extrêmement important pour nous tous. Une fois que la justice aura fait son travail, nous, on restera dans les conséquences" des faits.
Simon Fieschi achève ainsi son témoignage, toujours debout, face à la cour et devant les accusés. Il a les mains jointes, ces mains qu'il ne sent plus comme avant. La salle est recueillie, dans un silence impressionnant.
#AttentatsJanvier2015
Personne n'ose lui poser de question, ni parmi les magistrats de la cour, ni parmi la centaine d'avocats.
Simon Fieschi, 36 ans, reprend sa béquille blanche, et s'éloigne de la barre, en boitant. La salle d'audience le regarde, bouleversée.
#AttentatsJanvier2015
Après le témoignage poignant de Simon Fieschi, la cour d'assises spéciale a entendu ce matin celui de Fabrice Nicolino, journaliste à #CharlieHebdo, spécialisé dans les questions d'environnement, grièvement blessé, lui aussi, dans l'attentat du 7 janvier 2015.
Fabrice Nicolino et Simon Fieschi se sont d'ailleurs retrouvés hospitalisés ensemble, durant des mois après l'attentat auquel ils ont survécu à #CharlieHebdo, le 7 janvier 2015.
Fabrice Nicolino : "Je suis entré à #CharlieHebdo en 2009. En ce qui concerne le 7 janvier 2015, je n'ai pas grand chose de plus à vous raconter. J'ai pris trois balles dans la peau. Une à chaque jambe et une dans le bas de l'abdomen".
Fabrice Nicolino : "J'ai entendu les assaillants crier Allah Akbar. Ensuite, c'est un peu le trou, je baignais dans mon sang".
Fabrice Nicolino : "Je me sens beaucoup moins touché que Simon (Fieschi), que Philippe Lançon qui ne viendra pas vous l'expliquer. Je me sens diminué. Les conséquences, j'ai pas tellement envie d'en parler".
Fabrice Nicolino a peu envie de parler mais répond surtout aux questions. Raconte que c'est la deuxième fois qu'il est victime d'un attentat islamiste, la première fois c'était en 1985, rue de Rivoli, une bombe, dans "un cinéma juif où on projetait un film sur Eichmann".
#CharlieHebdo, pour l'anniversaire de l'attentat, Fabrice Nicolino a écrit un long texte pour raconter "les conditions effarantes dans lesquelles l'équipe bosse", mais n'a pas envie de raconter davantage le 7 janvier 2015.
Fabrice Nicolino s'emporte parce qu'en "2020, il est inconcevable qu'une équipe de journalistes #CharlieHebdo soient en état de siège à Paris. Et aucun journal n'a daigné venir s'intéresser à ce qu'il se passait".
Fabrice Nicolino crie à la barre qu'il veut continuer plus que tout à défendre "la liberté", la liberté qu'il estime "en danger". Et il quitte la barre.
Philippe Lançon, grièvement blessé à la mâchoire le 7 janvier 2015 aurait dû venir témoigner. Mais l'écrivain, qui a parfaitement raconté sa douleur et ses traumatismes dans son livre bouleversant "Le lambeau", n'a plus la force, ni l'envie de venir raconter à la barre.
Eric Portheault, de #CharlieHebdo, ne viendra pas lui non plus. Son avocat montre un certificat médical.
L'audience a été suspendue vers 12h15, et reprendra à 13h45 au procès des #AttentatsJanvier2015.
Comptes-rendus dans le 13h de @franceinter avec @ChPiret et sur le web avant ce soir...
L'audience reprend avec le témoignage de Laurent Sourisseau, dit Riss
#CharlieHebdo #AttentatsJanvier2015
Il raconte l'histoire de #CharlieHebdo qui a reparu en 1992, explique-t-il. Titre redonné par Wolinski, qui avait été parmi les premiers à lancer le titre en 1970, avec Cavanna et le professeur Choron.
Riss, caricaturiste et auteur de bandes dessinées, est aujourd'hui directeur de la publication de #CharlieHebdo. Il a succédé à Charb, son ami, après l'attentat du 7 janvier 2015. Attentat qu'il a raconté dans son livre "Une minute quarante-neuf secondes", le temps de l'attaque.
Riss raconte la publication des caricatures de Mahomet, en 2006, celles dessinées par Cabu, en soutien aux caricaturistes danois. C'est là qu'il a senti la première "fracture" dans les menaces.
Avant, ils avaient surtout caricaturé l'église catholique, dans les pages de #CharlieHebdo.
Riss parle d'une "fracture qui se creuse d'année en année", puis en 2011, avec les révolutions arabes, "on s'était dit on va faire parler Mahomet sur la charia".
Riss, sur une caricature de 2011, signée Luz : "on s'est dit on va faire une caricature plutôt sympa", dans la nuit le journal a été incendié, "on a jamais su qui avait fait ça"
Riss : "on voyait d'année en année, ce qui nous semblait anodin dans les années 90, prendre une tournure grave". Il parle des menaces.
Riss : après, "il a fallu se faire à quelque chose de nouveau, la protection"
#CharlieHebdo
Riss explique que début 2013, seul Charb était protégé. Luz et Riss ne l'étaient plus. 2013, Charb devient nommément visé par Al Qaïda.
Riss explique que Charb craignait d'être attaqué chez lui et de nuit. Il avait fait une demande de port d'arme qui n'a jamais été acceptée.
#CharlieHebdo
En 2014, un véhicule de police stationnait devant #CharlieHebdo, puis il a été enlevé, mais Riss n'a pas l'impression que la menace était maximale fin 2014.
Le président interroge Riss sur le 7 janvier 2015 : "vous êtes présent".
Riss : "C'était une conférence de rédaction classique. On entend deux claquements. J'ai pensé à du matériel défectueux".
Riss : "Puis j'ai vu Franck Brinsolaro (l'officier de sécurité de Charb) se lever et sortir son arme, il a dit, ça c'est pas normal, c'était la première fois que je le voyais sortir son arme"
Riss raconte ensuite qu'il ont tous vu les terroristes surgir. Hommes en noir cagoulés. "J'ai eu l'impression qu'il était surpris de nous voir si nombreux".
Riss : "je me suis dit que faire ? Je me suis mis sous le bureau de Charb, après j'ai plus rien vu, et c'est à ce moment-là que les tirs ont commencé"
Riss : "J'attends mon tour, je vois pas comment je vais sortir d'ici, je me dis je vais mourir ici, sur le sol de #CharlieHebdo , dans mon journal"
Riss : "Je comptais les secondes, je me demandais si j'allais recevoir une balle dans la tête ou dans les poumons. Chaque seconde compte, devient précieuse".
Riss : "Et puis je reçois un coup dans le dos, comme un coup de pioche, de fourche, à partir de cet instant, je me suis mis en apnée, et les tirs continuaient".
Riss : "Presqu'aussitôt après, je l'ai entendu revenir et dire où est Charb, Charb, Charb ?" Riss ajoute que Charb était sûrement à côté de lui.
Puis Riss a entendu encore deux ou trois coups de feu. Puis le silence total. Puis une fusillade lointaine qui se déplace dans l'espace et s'éloigne, et "c'est fini"
Riss : "Moi je n'ai pas bougé d'un millimètre pendant toute cette séquence. Puis j'ai entendu des voix que je connaissais. La voix de Sigolène Vinson. Les gens murmuraient. Là, je me suis retourné sur le dos, avec pour seule vision, le plafond".
Riss : "Je ne savais pas si ce que j'avais était grave ou pas, je craignais une hémorragie interne. Sigolène commençait à pleurer, je lui ai dit appelle les secours"
Riss : "Fabrice Nicolino gémissait, il appelait à l'aide, je me demandais quand les secours allaient venir, et je me disais pourquoi ils disent rien les autres ? Et j'ai dû me résoudre à cette conclusion que tous les autres étaient morts. C'était leur silence à eux"
Riss : "Je voulais pas voir. La dernière fois que je les avais vus, c'était cinq minutes avant, ils étaient tous vivants". A la barre, Riss a la voix qui se met à trembler. Il avait contenu son émotion jusqu'alors.
Riss raconte comment un pompier l'a aidé à enjamber le corps de Charb. "J'avais la tête qui me tournait. Des secouristes sont venus, ils m'ont enfourné dans une ambulance".
Riss se souvient qu'il parlait tout le temps quand les pompiers l'ont emmené car il avait peur de mourir, sinon. "J'étais pas sûr encore d'être vivant".
Riss se souvient de son arrivée à l'hôpital, où il a vu sa femme, sa soeur et son frère.
Riss a été blessé à l'épaule. "Il fallait juste attendre que les os se ressoudent".
Riss : "On savait pas ce que j'allais récupérer. Mais je peux pas lever le bras". Il montre à la cour, que son bras droit reste bloqué, il ne peut plus le lever haut.
#CharlieHebdo
Riss : "Au lendemain du carnage, on est écartelé. Vous n'avez pas à gérer que votre situation personnelle, c'est collectif. Et ça touche un journal, ça pose un vrai problème politique aussi. On devient acteur, est-ce qu'un journal va disparaître dans une démocratie ?"
Riss : "Pour moi, refaire le journal, ça s'imposait, c'était un peu le moment de vérité de toute l'histoire du journal".
A la barre, Riss baisse les yeux, la tête, souvent, les mains jointes et croisées sur son manteau noir sur sa chemise blanche. Il a les jambes qui bougent, nerveusement.
#CharlieHebdo
Me Richard Malka, l'avocat de #CharlieHebdo lui pose une question sur la religion et les libertés. Riss pensait qu'en France, "on pouvait dessiner ce qu'on voulait".
Me Malka fait diffuser sur grand écran la Une de #CharlieHebdo dessinée par Cabu en 2006. Ce dessin représentait Mahomet avec cette légende : "débordé par les intégristes". Cabu faisait dire à Mahomet "c'est dur d'être aimé par des cons". Les accusés regardent, calmement.
Me Malka demande pourquoi avoir publié à nouveau ces caricatures le jour de l'ouverture du procès avec cette Une "Tout ça pour ça !". Riss estime à la barre : "C'est pas des dessins très très méchants".
Riss : "Pour moi, c'est un journal intemporel, #CharlieHebdo"
Me Malka lui demande ce qu'il ressent depuis 2015 après la mort des grands dessinateurs. Riss : "je suis comme tronçonné en deux. Il y a une gêne à continuer à vivre et pas eux. Pour moi, ils sont toujours à mes côtés" Il dit que souvent, il regarde des choses en pensant à eux.
Me Malka : "vous pouvez marcher dans la rue avec votre femme ?"
Riss : "je peux faire ce que je veux, mais est-ce que c'est prudent ?"
Me Malka demande à Riss si l'attentat a changé quelque chose dans sa vie personnel.
Riss, avant 2015, avait un projet d'adoption auquel sa femme et lui ont dû renoncer. "Je me suis dit jamais on confiera un enfant à quelqu'un sous protection".
Me Malka, avocat de #CharlieHebdo : "vous invitez des amis chez vous ?"
Riss : "jamais". A cause de la protection. Il se sent comme assigné à résidence.
Me Malka rappelle leurs liens d'amitié. Riss et lui se connaissent depuis 1992, à la renaissance du journal #CharlieHebdo
Après Riss, c'est Patrick Pelloux qui arrive à la barre. L'urgentiste est entré à #CharlieHebdo en 2004. Raconte le "courage de toute l'équipe pour faire vivre la liberté d'expression"
Le 7 janvier 2015, Patrick Pelloux n'était pas dans les locaux de #CharlieHebdo mais a accouru parmi les premiers, après l'attentat, et c'est lui qui a appelé ensuite le président Hollande, en larmes, pour le prévenir de l'attaque effroyable.
Patrick Pelloux, le 7 janvier 2015, avait une réunion avec les pompiers, et devait rejoindre #CharlieHebdo après, Charb lui avait demandé pour la bonne année.
Patrick Pelloux explique qu'il a reçu un appel vers 11h35 d'un membre de #CharlieHebdo : "il avait une voix pas normale, m'a dit viens vite on a été attaqué", il a compris tout de suite que c'était grave et a foncé avec le chef des pompiers
Patrick Pelloux : "J'ai tout de suite vu les impacts, les pompiers qui faisaient un massage cardiaque à Frédéric Boisseau". Jean-Pierre, chef des pompiers, lui a dit tout de suite que c'étaient des armes de guerre.
Puis Patrick Pelloux raconte son entrée dans #CharlieHebdo, le sang, son ami Charb, qu'il ne pouvait plus sauver, Simon Fieschi blessé...
Patrick Pelloux : "ma préoccupation était que ça aille très vite pour sauver les blessés sur place, ça sentait la poudre et déjà l'hémoglobine". Il sait que les blessures par armes de guerre sont fatales plus vite...
Patrick Pelloux : "J'ai essayé de diriger ceux qui étaient là vers l'autre salle de rédaction pour pas qu'ils continuent à voir ces images, ce qui s'appelle le regroupement de victimes"
Patrick Pelloux : "la première équipe médicale venait de l'Hôtel Dieu, c'est les collègues qui ont pris la relève pour la prise en charge des secours"
Patrick Pelloux : "C'était très difficile, pour ma part, il m'a fallu annoncer les décès à des amis très proches, je pense à Chloé Verhac, Véronique Cabut, ça a été très difficile, très difficile..."
Patrick Pelloux : "J'ai aussi annoncé la mort de sa maman à la fille d'Elsa Cayat"
Le président : "vous êtes arrivés au bout de combien de temps ?"
Patrick Pelloux : "en cinq minutes, on n'a pas du tout respecté le code de la route"
Patrick Pelloux : "Je suis médecin urgentiste depuis très longtemps, j'étais pompier de Paris, j’en ai vu des scènes, mais des comme ça, jamais. C’état un carnage".
Patrick Pelloux, raconte ce qu'il a ressenti à #CharlieHebdo le 7 janvier 2015, au milieu du carnage, "j'ai senti comme une fracture à l’intérieur de moi. Il y avait ces blessés à aider. Il y avait ma désespérance de voir Charb dans cet état".
Patrick Pelloux ajoute que c'était dur aussi de "voir les autres mettre un pansement sur les blessés, les garrots. J’étais dans un automatisme".
#CharlieHebdo
#AttentatsJanvier2015
Patrick Pelloux : "C'est très difficile." Il s'étrangle d'émotion. "Parce que quand on fait médecine, c'est pour sauver des gens et s'il y en a que j'aurais voulu sauver, c'est bien eux".
#CharlieHebdo
#AttentatsJanvier2015
Patrick Pelloux poursuit : "Il y avait très peu d'impacts sur les murs, les tirs avaient été très précis"
#CharlieHebdo
#AttentatsJanvier2015
Le président interroge Patrick Pelloux sur son coup de fil à François Hollande juste après la découverte du massacre. L'urgentiste explique qu'il a appelé le standard de l'Elysée, le président l'a rappelé et lui a dit "j'arrive". Patrick Pelloux voulait éviter toute "lenteur".
Patrick Pelloux parle de #CharlieHebdo, "un paradis de culture, un mélange d'idées, c'était apaisant, il y avait des débats d'idées extraordinaires, c'étaient des gens de paix, c'était merveilleux, on ne sait jamais quand le bonheur est là"
Le président lui demande s'il devait aller assister à cette conférence de rédaction de #CharlieHebdo le 7 janvier 2015 ? Patrick Pelloux lui répond qu'il préfère ne pas y penser, "c'est une hypothèse difficile"
La veille, Patrick Pelloux était allé assister à un concert de jazz yiddish avec Charb et sa compagne. Sans doute, il serait venu à la conférence du 7 janvier 2015 sans sa réunion de pompiers, mais "c'est difficile"
Après l'attentat du 7 janvier 2015 à #CharlieHebdo, Patrick Pelloux parle de sa difficulté d'exercer son métier d'urgentiste. Il l'a vu lors des attentats du 13 novembre 2015.
Patrick Pelloux : "Les blessures ne sont toujours pas cicatrisées, tous autant qu’on est. Blessures physiques et psychologiques se rejoignent dans la souffrance pour les familles, les proches, les amis. C’est un désespoir quotidien."
Patrick Pelloux ajoute : "Je combats la montée de l’islamisme qui touche le monde de la santé. Je suis convaincu que l’islamisme, c’est un fascisme".
Me de Montbrial, avocat d'une partie civile pose une question sur Farid Benyettou, considéré comme un mentor des frères Kouachi dans les années 2000, qui se dit aujourd'hui repenti. Le 7 janvier 2015, Farid Benyettou travaillait à la Pitié Salpêtrière, où les blessés arrivaient.
Patrick Pelloux parle d'une "coïncidence troublante". Farid Benyettou a vite été exclu de cet hôpital. Dans ce procès des #AttentatsJanvier2015, aucune charge n'a été retenue contre lui. Farid Benyettou a purgé sa peine dans l'affaire des Buttes-Chaumont, avec Chérif Kouachi.
L'avocat de partie civile dit qu'il s'étonne que Farid Benyettou ait pu intégrer l'hôpital après sa condamnation dans une affaire de terrorisme.
Patrick Pelloux enchaîne sur son combat pour la défense de la laïcité, "c'est capital. Personne n'empêche de croire, mais qu'on ne nous empêche pas de penser" dit-il, avant de quitter la barre, veste grise, chemise bleue, et masque chirurgical sous ses lunettes rondes.
La cour va maintenant entendre le témoignage de Zhineb El Rhazoui, qui s'est constituée partie civile, et n'était pas présente à #CharlieHebdo le 7 janvier 2015.
Le président lui demande donc ce qu'elle a à dire ?
Zhineb El Rhazoui : "Je n'ai pas vu la scène traumatique, j'étais à Casablanca"
Zhineb El Rhazoui : "Je suis arrivée à #CharlieHebdo par mes combats". Elle parle des caricatures de Mahomet qui n'auraient pas pu être publiées au Maroc, où l'un de ses parents est né.
Elle a rejoint #CharlieHebdo en 2011, année de l'incendie contre le journal.
Elle a publié une BD avec Charb sur l'islam, qu'elle dit avoir beaucoup étudié.
Elle raconte comment elle a appris depuis Casablanca la mort de Charb et des autres. On lui a téléphoné. Dans le téléphone, elle a entendu un cri de bête blessée, "c'était Patrick Pelloux qui pleurait".
Elle parle à la barre de sa culpabilité de survivante. "Aussi parce qu'au journal, je faisais partie de ceux qui portaient le combat éditorial pour lequel ils ont été tués".
L'écrivaine Zineb El Rhazoui parle de Mustapha Ourrad, le correcteur, né musulman comme elle, et dont elle se demande "ce qu'il pensait de ce qu'on écrivait à #CharlieHebdo". Elle s'est dit qu'elle aurait dû mourir à sa place. Surtout qu'il ne venait jamais au journal le mercredi
Avec le temps, Zineb El Rhazoui se dit que les coupables sont ceux qui ont tué. Elle parle de la fatwa contre elle, depuis des années. Le président la coupe, lui demande de "recentrer sur les débats d'aujourd'hui"
Son avocat la défend, dit que depuis ce jour, sa vie a changé, et qu'elle est partie civile, subit les conséquences de cet attentat du 7 janvier 2015
#CharlieHebdo
Elle ajoute : "ma petite personne n'a pas d'importance en soi, mais c'est le contexte global. Derrière ceux qui ont tué, il y a une idéologie. L'assassin continue de courir"
Zineb El Rhazoui estime que "la meilleure chose faite en cinq ans, c'est encore #CharlieHebdo qui l'a fait", elle parle de la nouvelle publication des caricatures de Mahomet. Elle dit qu'elle refuse la "tétanie" et continuera à lutter pour la laïcité.
Zineb El Rhazoui assure qu'elle refusera toujours de se dire "qu'un jour les Kouachi ont gagné". Qu'elle refusera toujours la "censure". Elle parle depuis longtemps à la barre, d'islam et de laïcité surtout, dans un discours convaincu et exalté.
Zineb El Rhazoui porte une robe à manches chauve-souris. Elle est perchée sur des talons hauts. Ses longs cheveux ondulés sur ses épaules.
La cour n'a plus de questions pour elle. L'audience est suspendue pour ce jour 6 au procès des #AttentatsJanvier2015.
Voici un premier compte-rendu web @franceinter avec le témoignage très fort de Simon Fieschi ce matin.
franceinter.fr/justice/simon-…
Vous pouvez aussi écouter le compte-rendu de @ChPiret dans le 19h de @franceinter et d'autres, sur le web, dans la soirée.

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3 Sep
Deuxième jour du procès #AttentatsJanvier2015 et LT pour @franceinter . La cour d'assises spécialement composée rouvre l'audience. Aujourd'hui, interrogatoires des accusés. Toujours 11 présents sur 14. 3 en fuite -Hayat Boumedienne, et les frères Belhoucine (présumés morts).
Le président Régis de Jorna fait un point sur le port du masque, qu'il exigeait obligatoire hier, ce que des avocats de la défense avaient contesté, estimant qu'on ne pouvait pas juger convenablement des accusés parlant masqués.
L'avocate du principale accusé, Isabelle Coutant-Peyre avait dénoncé une "cour masquée".
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2 Sep
Le procès des #AttentatsJanvier2015 à #CharlieHebdo #Montrouge #HyperCacher s’ouvre à Paris à 9h30. Les accusés arrivent, sous escorte armée. De très nombreux policiers et gendarmes. Sur @franceinter, avec ⁦@ChPiret⁩ nous allons vous raconter ces 2 mois de procès.
À l’intérieur du tribunal judiciaire, les policiers patrouillent avec des chiens qui ont reniflé les salles d’audience. Une salle principale avec 14 accusés jugés (11 présents, 3 en fuite), et des salles de retransmission vidéo. 200 parties civiles et près de 100 avocats.
À l’intérieur de la salle d’audience principale où seront jugés quatorze accusés principaux, regardez aujourd’hui le LT de @ChPiret. Nous suivrons ce procès pendant deux mois à 3, avec le dessinateur Mathieu Boucheron, croquis d’audience exclusifs pour @franceinter
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19 Nov 19
L’ouverture à Paris du procès d’Anne Diana #Clain, jugée avec son mari, Mohamed Amri, pour avoir voulu rejoindre l’EI en Syrie à l’été 2015, avec quatre enfants mineurs. Ils risquent 10 ans de prison pour association de malfaiteurs terroriste.
Anne Diana #Clain a de longs cheveux blonds bouclés, et porte un manteau beige. Mohamed Amri, arbore une petite barbe poivre et sel, et un petit blouson noir matelassé. Des policiers et gendarmes cagoulés les entourent. La sécurité est renforcée à ce procès.
Dans la salle d’audience, les enfants du couple, #Clain-Amri, mineurs, sont venus assister au procès de leurs parents. Ils sont entourés de psychologues et éducateurs. Les enfants ont été placés par des juges auprès de l’Aide sociale à l’enfance. Ils sont aussi suivis par la PJJ.
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31 Oct 17
Après le réquisitoire hier, les plaidoiries de la défense au procès #Merah, aujourd'hui
franceinter.fr/justice/abdelk…
Ce sont les deux avocats de Fettah Malki qui vont plaider les premiers, avant les trois avocats d'Abdelkader #Merah
Abdelkader #Merah est arrivé dans son box, chemise bien repassée, barbe, catogan, lunettes rectangulaires, les yeux levés vers le ciel
Read 127 tweets
30 Oct 17
Dernière semaine du procès #Merah, avec les dernières plaidoiries des parties civiles ce matin, puis le réquisitoire cet après-midi
Dans le box, Abdelkader #Merah, chemise claire, barbe, catogan, lunettes, fixe le plafond, Fettah Malki, petit bouc, regarde ses pieds
L'audience #Merah reprend avec une nouvelle partie civile, un ancien interne de l'école Ozar Hatorah, qui s'avance devant la cour d'assises
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20 Oct 17
15e jour du procès #Merah, avec l'interrogatoire d'Abdelkader sur la religion, pour son "éventuelle adhésion idéologie extrêmiste radicale""
Abdelkader #Merah raconte comment il s'est intéressé à l'islam. "Je recherchais quelque chose pour me donner une paix intérieure".
Abdelkader #Merah : Sabri Essid m'a donné une "nouvelle image de l'islam" que les jeunes de quartier considéraient comme "moyenâgeuse" avant
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