Thread by @Enthoven_R

La polémique #Bruckner / #Diallo a le mérite de poser la question de la responsabilité. Pour le dire simplement : peut-on être tenu pour responsable d’un crime qu’on n’a pas commis ? 👇🏿

Eric #Zemmour ou Renaud Camus sont-ils responsables, par leurs propos, de l’attentat de #Christchurch ? Le tueur était ouvertement adepte de la théorie du « grand remplacement. » Difficile de ne pas y voir sinon une cause, du moins un lien. Mais une « responsabilité » ?

Certains n’hésitent pas à le penser, qui considèrent que Zemmour (ou Renaud Camus) ont intellectuellement « armé » le terroriste. Ça se défend. Mais ça coince.

1) Quelle responsabilité reste-t-il à l’auteur du crime, quand on y voit d’abord la main d’un théoricien ?

2) Peut-on faire à une théorie le procès des conduites qui s’en réclament ?

Darwin était hostile au « darwinisme social » qui voulait appliquer ses découvertes aux sociétés humaines pour y justifier la « sélection naturelle ».

Nietzsche détestait que son beau-frère mît ses paroles au service de l’antisémitisme, Deleuze s’inquiétait qu’on fît de son œuvre, en mai 68, un viatique pour le chaos. Etc.
Bref, il ne suffit pas d’avoir dit quelque chose pour être « responsable » de ce qu’un autre en fait.

Pour en revenir à nos 🐏, une chose est de croire au « Gd remplacement », tt autre est de passer à l’acte en son nom. Et les nbx qui, sans tuer qui que ce soit, sont persuadés que Zemmour a raison prouvent qu’une théorie ne suffit pas au terroriste. Encore faut-il être un tueur.

Venons-en à Pascal Bruckner, qui accuse Rokhaya Diallo d’avoir « armé » idéologiquement les tueurs de #CharlieHebdo en signant le texte ci-dessous, en 2011, contre « l’#islamophobie » présumée du journal…
indigenes-republique.fr/pour-la-defens…

Il est vrai que ce texte ahurissant a été écrit APRES le 1er attentat contre #CharlieHebdo et voyait une aubaine financière dans cette catastrophe, et fustigeait la rentabilité d’un « buzz médiatique » autour de « l’islamophobie ambiante »...

A la lisière du complotisme (ou de l’accusation d’escroquerie à l’assurance), le texte assure que ce cocktail Molotov « risque plutôt de relancer pour un tour un hebdomadaire qui, ces derniers mois, s’enlisait en silence ds... les difficultés financières »

En s’attardant sur l’islamophobie présumée de Charlie Hebdo plutôt que sur l’horreur d’un attentat, et en dénonçant depuis des années un « racisme systémique » dont témoignerait « l’obsession de l’Islam », #RokhayaDiallo a-t-elle intellectuellement armé les terroristes ?

Comme avec Zemmour et Renaud Camus, là encore, ça se défend, et là encore, ça coince.

La thèse du « racisme et de l’islamophobie systémiques » n’est pas la cause de l’attentat de #CharlieHebdo. Ms, comme la thèse du gd remplacement, elle acclimate nos esprits à une rhétorique qui convient aux tueurs et permet, après coup, d’expliquer (sinon d’excuser) leur geste.

En somme, le fantasme d’un « racisme systémique » ou la confusion délibérée du blasphème et du racisme fait le lit du terrorisme islamiste, comme le fantasme d’une « guerre de remplacement contre l’homme blanc » fait le lit d’un attentat d’extrême-droite.

Mais dans les 2 cas, il est abusif de parler de responsabilité.
Tous ceux qui adhèrent à ces discours indigents sans passer à l’acte en témoignent.

Bruckner a tort de dire que les paroles de Rokhaya Diallo ont « entraîné » les attentats de janvier 2015. Comme on a tort de penser que les thèses de Renaud Camus ont causé l’attentat de Christchurch.

Si dangereuses soient-elles, les paroles de Rokhaya Diallo n’ont pas joué dans l’attentat de Janvier 2015 le même rôle que les paroles du père de famille justement mis en examen "pour complicité d’assassinat " dans la mort de #SamuelPaty. Là est la responsabilité.

Et en disant les choses comme il le fait, Bruckner fait à une championne du 1er degré l’inestimable cadeau de se présenter en victime. C’est bien simple : chaque fois qu’un adversaire de Mme Diallo lui donne l’occasion de dire « ce que vous dites est scandaleux », elle a gagné.

En disant les choses comme ça, Bruckner « arme » les filous qui tentent à tout prix d’assimiler les républicains et l’extrême-droite.

Enfin, en disant les choses comme ça, Bruckner soude une gauche désemparée par l’islamisme, dont l’extrême-droite est l’unique adversaire, en lui donnant l’occasion de retrouver de la voix pour dénoncer, hélas à juste titre, une accusation parfaitement excessive.

Mais Bruckner a raison de penser que les paroles de Rokhaya Diallo, et toutes les confusions qu’elle entretient entre racisme et laïcité depuis 10 ans, ne sont pas innocentes. Et nourrissent les assassins en motifs plus avouables que le goût du sang (ou le goût des vierges).

Comme il n’était pas faux de voir dans la théorie du Grand remplacement, au moment de l’attentat de Christchurch, une idéologie délétère dont l’adoption validait la violence raciale et le meurtre.

« Irresponsabilité » serait + exact. Au lieu de chercher des responsables, pourquoi ne pas chercher des "irresponsables" (Zemmour ou Mme Diallo) qui, par leurs mots, donnent aux terroristes les moyens de vivre leur geste comme une conséquence, et non leur seule responsabilité ?