Petit point serovar : hier je vous ais expliqué ce que c'était un sérovar, mais comment on le détermine ?
l y a plusieurs méthodes afin de déterminer microbiologiquement le sérovar d'une Salmonella. PFGE, PCR...je ne vais pas tous les décrire parce que le thread devient long, mais je vais parler de la méthode de référence utilisé par mon laboratoire d'accueil.
A l'ANSES, on utilise le sérotypage par agglutination. Qu'est-ce que c'est ? En gros, c'est réaction spécifique entre un anticorps présent dans un sérum test et un antigène porté par le microorganisme étudié, comme expliqué dans le schema (crédit : ac-montpellier)
Vous vous souvenez du schema Kauffman–White d'hier ? Pour trouver le sérovar d'une Salmonella, on va tester plusieurs sérum, et voir s'il y a une agglutination. Par exemple ici voici les tests de serum pour identifier une S.Enteridis (1,9,12 : g,m : –).
Petite image pour que vous visualisez à quoi ça ressemble une agglutination (crédit : Statens Serum Institute)
Je reviens donc sur l'enquête. On a vu que dans les coprocultures, on avait retrouvé de la Salmonella.
Du côté de la source hydrique, on recherche de Salmonelle dans l'eau et....il n'y en a pas. Nada. Donc on lève l'interdiction de consommer de l'eau le 5 juillet.
On se re concentre sur cette fameuse fête de l'école qui reste l'hypothèse la plus probable.
94 % des malades avaient consommé du jambon lors de cette fête, mais des personnes non-malade en avait consommé également. Mais ça reste la piste la plus plausible.
En plus, des personnes qui n’avaient pas participé au repas, mais qui avaient consommé des restes de jambon ont été malades. Avec ça, on récupère les restes de jambons, et on recherche de la Salmonella.
Ces souches sont envoyées à l'ANSES (comme j'avais dit tout à l'heure, les souches alimentaires ça part chez eux).
Et bingo, on trouve une contamination sur la surface du jambon, mais pas dans le cœur
Et les souches retrouvées chez les humains et sur le jambon correspondent à des S.Typhimurium avec le même profil. Comme la TIAC est très localisée, on peut établir de manière assez forte le lien entre les cas de salmonellose et le jambon.
Des prélèvements d’ambiance et d’environnement de l’entreprise de salaison du jambon ont été négatif.
Une contamination croisée suite à manipulation après cuisson semblait donc la plus probable, donc l'enquête s'est conclu que la contamination était sûrement dû à un support contaminé, soit par des mains contaminées, ou les deux.
Et voilà le 26 juillet, la Cire a envoyé une note de rétro-information résumant les investigations et les conclusions de l’enquête.
Ce qui a été difficile dans cette enquête, et dans la plupart des enquêtes épidémiologiques, c'est qu'il peut y avoir énormément d'hypothèses, et que certains moments les épidémiologistes n'arrivaient pas à trouver la source de la contamination.
Le fait qu'il y ait eu des cas de gastro-entérites avant la fête de l'école a poussé l'enquête vers une source hydrique. De plus, tout le monde avait ingéré du jambon pendant la fête de l'école, et donc il n'y avait pas eu d'association significative au risque de maladie.
Enfin, il y avait plusieurs jambons, donc ils n'étaient peut-être pas tous contaminés.
Sur cette enquête, il y avait des restes de jambon qui étaient contaminés. Et c'est une chance ! Parce que dans la plupart des cas, il n'y a pas de restes des repas, surtout si une TIAC est déclarée longtemps après le premier patient.
J'en profite également pour dire qu'en France, beaucoup de TIAC sont repérés avec les systèmes de surveillances.
Par exemple, le CNR de Pasteur avait découvert en 2005 une épidémie de Salmonella Agona parce qu'ils avaient reçu plus que d'habitude d'échantillons à analyser sur une période assez courte.
Bref, je vais arrêter ici pour aujourd'hui, j'espère que ce thread vous a plu, demain, on va parler de Whole Genome Sequencing (enfin !), qu'est-ce que ça apporte en plus aux investigations de TIAC et le rôle des bio-informaticiens là-dedans😉
L'enquête si ça vous intéresse : "Investigation de cas groupés de salmonelloses à Salmonella Typhimurium aux Carroz d’Arâches, Haute-Savoie Juin-juillet 2012"
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D'autres exemples sur l'utilisation de données WGS en sécurité sanitaire :
Par exemple, les Danois ont découvert qu'ils avaient des persistances géographiques de certains types de génome de S.Dublin. Ils ont donc des souches qui sont sur le sol danois depuis 20 ans et qui continuent de causer des épidémies. C'est fou non ?
En Allemagne, le WGS a permis de séparer 3 clusters du même sorovar assez rare. Les données portaient à penser à une seule source, mais en réalité il y en avait 3.
Aujourd'hui, je vais enfin parler de mon domaine : la bio-informatique génomique en sécurité alimentaire ! Je parlerais (enfin) de ma thèse demain, mais aujourd'hui, je voulais vraiment prendre du temps pour introduire le sujet.
Hier, on a pu voir comment était résolu les enquêtes épidémiologiques. Aujourd'hui, je vais vous montrer qu'est-ce que les données WGS peuvent apporter aux analyses.
Je vous ferais également un petit thread sur les techniques de séquençage un peu plus tard si ça vous intéresse 😉
Hello hello,
Aujourd'hui comme annoncé, je vais parler de sécurité sanitaire et de caractérisation des Salmonelles.
Je voulais absolument présenter ça avec un exemple concret, et ça a été difficile de trouver quelque chose de bien décrit et publié officiellement en France.
Je vais donc raconter une investigation de cas groupés de Salmonella datant de 2012. C'est un peu vieux, mais l'investigation a très bien été décrite et je ne risque pas de divulguer des informations sensibles 😅
Pour poser les bases, en France, une toxi-infection alimentaire collective (TIAC) est déclarée lorsqu'il existe au moins 2 cas de maladie avec une symptomatologie similaire, souvent gastro-intestinale. En 2018, 1 630 TIAC ont été déclaré.
Comme promis, voici le thread sur les salmonelles ! Ici, je vais décrire rapidement les salmonelles et les classifications des salmonelles 😉
Alors la Salmonella, c'est quoi ? 🦠
Entérobactérie ✅ Bacilles avec des flagelles péritriches (tout autour de la cellule) ✅Gram négatif ✅ 0,7 à 1,5 μm de diamètre✅Superbe photo coloré d'une Salmonelle en contact avec une cellule✅ (crédit NIAID)
Elle provoque des maladies, comme la fièvre typhoïde chez les salmonelle typhiques, ou la salmonellose chez les salmonelles non-typhiques.
Dans ce thread, je vais vous parler un peu de mon parcours et comment j'en suis arrivée à faire de la bio-informatique. Il y a deux types de bio-informaticien : les bio-informaticiens de formation et les bio-informaticiens qui ont appris "sur le tas". Moi, je suis de formation.
J'ai commencé à m'y intéresser en terminale quand il fallait choisir son avenir.
J'aimais bien la biologie, et j'avais commencé à faire un peu d'informatique avec l'option "informatique sciences du numérique" (ISN) qui venait d'être mis en place.
Je me suis dit que j'allais continuer dans ces deux domaines. J'ai donc rejoins l'université de Versailles St Quentin en Yvelines @uvsq pour une licence en Biologie-Informatique.
Je vais commencer la journée en vous expliquant un peu ce qu'est la bioinformatique :
Comme @jessica_compbio l'a très bien expliqué, la bioinformatique est une discipline qui se place à l'interface de la biologie et de l'informatique dont l'objectif est de résoudre des problématiques biologiques avec l'utilisation d'outils informatiques .