Thread by @nourrirlemonde

La vaccination contre le Covid est un enjeu mondial : sortons de notre franco-centrisme (et relevons la tête de notre nombril individuel).

Un thread. 🔽🔽

Les monologues disjoints des partisans et opposants de la vaccination sur les réseaux sociaux deviennent insupportables, /

... et l'obsession de certain·e·s envers les anti-vaccination devient indécente. Ces obsessions masquent de façon malsaine le vrai débat politique essentiel que nous devons avoir sur la campagne de vaccination contre le Covid : celui de la gestion de stocks limités à /
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... l'échelle planétaire. Ce débat aurait pu être ouvert si le gouvernement avait assumé et appliqué de façon responsable et compétente l'ordre de priorité proposé par la haute autorité de santé. Hélas, comme il a totalement raté la mise en œuvre de la première phase /
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... (délégation à un cabinet privé incapable, pas d'anticipation, confusions), le gouvernement a préféré créer une diversion en mettant les ratages sur le dos d'une volonté de ménager les opinions et donc en relançant le stérile dialogue de sourds entre pro & anti-vaccin. /
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... Les "réticences françaises" ont bon dos, tiens, alors que le seul problème est une incapacité à expliquer, assumer et s'approprier efficacement la réalité opérationnelle d'une campagne vaste et rapide (en situation d'arrivée de lots insuffisants et progressifs).
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... J'avais déjà expliqué en quoi, s'il avait été géré correctement, l'ordre de priorité élaboré en France était non seulement logique mais impératif sur un plan sanitaire et éthique.

https://twitter.com/nourrirlemonde/status/1345826515682996226

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... En fait, il est essentiel d'élargir ce raisonnement à l'échelle mondiale. Mes doubles réseaux agronomiques (lutte pour l'émancipation paysanne et la souveraineté alimentaire dans les pays du Sud) et anthropologiques m'obligent à regarder cette dimension en face, et /
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... me donnent honte des débats français. Honte, vraiment. Le "problème" n'est pas une réticence de certain·e·s à se faire vacciner (ce contrefeu est grotesque en contexte de pénurie de doses, et celleux qui le ressassent avec jubilation devraient se poser des questions), /
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... mais le cynisme avec lequel la pénurie de doses est gérée au détriment d'une partie de l'humanité.

Premier point élémentaire : les vaccins ne sont pas fabriqués par magie en un temps nul. Les milliards de doses nécessaires pour vacciner la majorité de l'humanité /
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... demanderont + d'un an à être produites. C'est incompressible et normal (les complotistes, rentrez dormir).

Deuxième point élémentaire : dés lors que les doses sont disponibles au compte-goutte (des millions par semaine, c'est du compte-goutte à l'échelle mondiale), /
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... il faut choisir "qui" sera prioritaire. À l'échelle mondiale, vacciner massivement la population ordinaire ne peut pas être possible avant fin 2021 et même sans doute 2022.

Ouaip. Pour les pays pauvres, l'échéance actuelle est 2022.
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... Nous sommes alors devant une alternative, jamais verbalisée par nos gouvernants et éditorialistes, et pourtant politiquement ultra-sensible, sur le plan politique et éthique : la loi du plus fort ou la protection du plus faible ?
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... Par défaut, la règle qui s'applique actuellement est la loi du plus fort, et tant pis si les "faibles" crèvent. Les pays riches (États-Unis, Europe, Israël, Russie, Chine...) ont obtenu un rang prioritaire dans la livraison des vaccins. Les pays pauvres, même s'ils /
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... subissent une pandémie catastrophique (Bolivie, Pérou, Mexique, Afrique du Sud...) n'auront pas de vaccins avant 2022 - en attendant, ils sont priés de mourir en silence. Et, ben tiens, comme par hasard, au sein de nos pays le même schéma se reproduit : au lieu de /
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... penser à protéger d'abord les populations les plus vulnérables, chacun ne pense qu'à sa pomme et réclame le droit d'être vacciné dès qu'il le désire (artistes, animateurs télé, sportifs... et un grand nombre de twittos dans leurs posts).
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... C'est un égoïsme abominable. Ainsi, parce que vous voulez retrouver le plus vite possible une vie "normale", parce que votre nombril passe avant tout, vous réclamez le droit d'être vacciné·e·s tout-de-suite ? Quel droit ? Celui de faire passer votre "tranquillité /
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... quotidienne" avant la VIE des populations à risque en Afrique du Sud, Pérou, etc. ? Quel monstrueux renversement des valeurs !

Dans chaque pays, certaines personnes risquent beaucoup plus de mourir que d'autres. Dans chaque pays, les systèmes hospitaliers sont /
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... saturés (dans certains pays qui n'auront pas de vaccins avant 2022 à cause de notre égoïsme criminel de riches, il y a déjà des files de brancards où les malades meurent sans même pouvoir être pris en charge). La priorisation de la vaccination est la SEULE solution /
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... pour protéger d'abord les personnes les plus susceptibles de mourir du Covid ET EN MÊME TEMPS pour désengorger les hôpitaux. Je l'avais rappelé dans mon thread précédent : la saturation des hôpitaux dépasse le Covid, ce sont toutes les maladies graves qui ne peuvent /
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... plus être soignées à temps, c'est une hécatombe en cours. Le désengorgement des hôpitaux est LA priorité absolue, vitale, non-négociable. Et c'est mathématique (c'est "épidémiologique") : pour désengorger les hôpitaux alors qu'on ne dispose que d'un nombre limité de /
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... doses pour le trimestre à venir (à l'échelle mondiale), il faut CIBLER les doses sur celleux qui représentent l'essentiel des hospitalisations : personnes âgées avec co-morbidité (ou personnes avec plusieurs co-morbidités). En vaccinant 5% de la population générale, /
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... nous ne réduisons pratiquement pas la saturation hospitalière. En vaccinant 5% de la population mais en ciblant sur les personnes vulnérables, nous divisons la pression hospitalière de moitié voire des trois-quart... et l'essentiel du "problème Covid" est alors levé.
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Nous avons le choix. Nous pouvons décider que notre pomme passe avant tout, et donc accepter l'accaparement des doses par les pays riches et leur utilisation pour vacciner "tou·te·s les volontaires". Ça n'aura presque aucun effet sur la saturation hospitalière, donc nous /
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... serons toujours confinés ou soumis à couvre-feu, et ça laissera crever les pays pauvres. Ou nous pouvons nous souvenir que l'attention aux plus faibles est le meilleur indicateur de la civilisation, et accepter :

- de répartir les doses entre tous les pays les plus /
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... touchés (donc avoir MOINS de doses en Europe, mais plus en Afrique du Sud, Pérou, Argentine, etc.),

- de vacciner prioritairement les personnes les plus à risques (dans tous les pays) pour sauver les systèmes hospitaliers et pour réduire fortement la mortalité.
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Quoi qu'il en soit, assumez. Celleux qui ne cessent de réclamer le droit d'être vacciné·e·s tout-de-suite sous prétexte que vous êtes volontaires alors que vous ne faites pas partie des catégories prioritaires (= vous ne courez que très peu de risque de mourir du Covid), /
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... assumez : votre revendication revient très exactement à appliquer la "loi du plus fort" et à laisser sciemment mourir les millions de personnes à risque à travers le monde, qui n'auront pas les doses que vous aurez accaparées pour votre confort de vie. /
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... Vous pouvez formuler cette revendication indécente parce que vous vivez dans l'un des pays riches qui se sont cyniquement partagé les premiers lots de doses disponibles.

[Bien sûr, les personnes à risques sont légitime à réclamer le vaccin, en France comme ailleurs]
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Pour ma part, j'aimerais évidemment retrouver une sérénité quotidienne grâce à une vaccination rapide (et l'on peut regretter que le monde ne soit pas un fantasme où les vaccins seraient fabriqués par magie), mais mon nombril n'est pas plus rond que celui d'un malade /
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... cardiaque au Pérou ou qu'une résidente d'EHPAD, et j'attendrai que ces personnes puissent être mises en sécurité & que les hôpitaux soient désengorgés avant de réclamer un "droit" indécent.
La liberté s'inscrit dans la responsabilité collective & l'attention à autrui.
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