1.Dans sa décision du 21 avril 2021, le Conseil d'Etat maintient l'artifice de supériorité constitutionnelle.
On décortique ça ensemble dans un thread.⤵️ #DUE #UE #Europe #ESPSUI conseil-etat.fr/fr/arianeweb/C…
2.Dans son considérant 4, le CE rappelle que la France est tenue au respect du droit de l'UE, tant en vertu du DUE lui même (CJCE, Costa c. Enel, 1964) que de l'article 88-1 de la Constitution, tel qu'interprété par le C.C ( CC, 10 juin 2004, dites "Economie numérique").
3. Il poursuit en rappelant un élement décisif: le juge national est le juge de droit commun de l'UE. Il est chargé au premier chef de son respect, au besoin en écartant l'application d'une loi (parlementaire, mais on peut imaginer référendaire) d'un règlement ou d'un traité.
4.Même un engagement international contraire au DUE, même l'expression directe de la souveraineté nationale doit être écarté devant le DUE. Rien de nouveau ici, la transposition d'une directive, par ex, étant une obligation constitutionnelle ( voir: CE, 8 fév 2007, Arcelor)
5. Voir encore: C.C, DC, 27 juillet 2006, dites "droits d'auteur". Le considérant 5 est lui aussi on ne peut plus classique. L'interprétation suscitée de l'article 88-1, simple article introductif, permet au CE de faire usage de son contrôle de conv ( CE, 20 oct 1989, Nicolo)
6. Tout en ne se débarassant pas de sa jsp Sarran et Levacher de 1998 réaffirmant la primauté de la Constitution dans l'ordre juridique interne, ce que ne reconnaît pas la CJUE dans l'ordre juridique européen. S'ensuit une méthode d'application, assez byzantine, du principe.
7. Pour résumer d'abord: à moins que le DUE entre en confrontation directe avec une disposition de la Constitution du 4 oct 1958, le juge admin ( c'est aussi le cas du juge judiciaire) doit s'assurer de la conformité des actes admin, en écartant au besoin la loi, au DUE.
8. Au DUE, dans son interprétation donnée régulièrement par la CJUE. Au besoin, en s'assurant de la combinaison des deux, autant que faire se peut. Il précise le bémol, déjà donné par le C.C: si l'application du DUE a pour conséquence de priver un citoyen d'une (...)
9. (...) garantie constitutionnelle, alors le JA doit écarter la disposition ou la stipulation du DUE. Mais, après s'être assuré, selon un principe d'équivalence, que la garantie n'est pas aussi assurée par le DUE. Ergo: s'il existe en DUE une protection équivalente, on applique.
10. Dans ce cas, le CE se refuse à tout contrôle de constitutionnalité d'une dispo issue du DUE. Le C.C aussi, puisqu'il se refuse à tout contrôle du même type (C.C, 15 janv 1975, IVG). En cas de difficulté sérieuse d'interprétation, le CE pose une question préjudicielle à la CJ.
11. C'est à dire qu'il saisi la CJUE de la question de savoir si le DUE offre une protection équivalente à la Constitution. Le C.C avait considéré de même, en disant dans les décisions précitées, que la transpo des directives était une obligation constitutionnelle (...)
12. (...) sauf si était en jeu "un principe inhérent à l'identité constitutionnelle de la France". On pense éventuellement à la laïcité, mais en fait très peu de "principes" entrereraient vraiment en contradiction avec le DUE.
La réserve est mince, appliquée pour une part ici.
13. Le juge poursuit dans son considérant 8, et se refuse à opérer une manoeuvre similaire à la Bundesverfassungsgericht allemande ( à vos souhaits).
14. Le CE refuse d'aller là où le Ier ministre ( c'est dire!) lui demande d'aller, c'est à dire qu'il refuse à contrôler que la répartition des compétences entre l'UE et les Etats membres est respectée, selon un modèle ici tout à fait allemand.
15. Il faut comprendre ici que, quand bien même le DUE contraindrait un Etat dans un domaine qui ne lui revient pas, quand bien même le gouvernement ou le Parlement (peu probable pour le CE) abandonnerait une part de sa compétence, il ne bougera pas.
16. Pas de contrôle de conventionnalité inverse donc, c'est à dire pas de sanction de l'intervention du droit communautaire dans le droit national, pas de moyen d'incompétence négative (où une décision est annulée parce que son auteur n'a pas fait pleinement usage de sa comp).
17. Il faut dire que ce type de contrôle est tout à fait habituel dans un Etat fédéral où la répartition des compétences est un enjeu majeur de l'équilibre constitutionnel et en fait politique de ces Etats, comme en Allemagne ou aux Etats-Unis. Bien moins dans un Etat unitaire.
18. Le CE ne saurait effectuer un tel contrôle dès lors qu'il reviendrait à contrôler la jsp de la CJUE elle même, ce qu'il se refuse à faire. Pour le CE, si la CJUE a interprété de manière extensive un principe du DUE, il ne peut rien faire.
19. Si l'on peut déplorer la décision au fond, on ne peut à la fois dénoncer le "gouvernement des juges", et la juridictionnalisation de la vie publique et demander au juge d'accroître encore et toujours ses pouvoirs.
20. C'est aux Etats membres aux même, au sein du Conseil de l'UE, de défendre leurs prérogatives, aux Parlements de dénoncer des empiètements sur leurs compétences.
22. En réalité, on comprend bien que le principe de primauté de la Constitution est un leurre de manière croissante, puisque son imbrication avec le DUE implique qu'elle s'écarte par ses propres dispositions dès lors que le DUE offre un principe équivalent.
23. Aujourd'hui, cette primauté sert avant tout le droit européen, qui bénéficie ainsi d'une légitimité sans égale.
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1. Je profite de ce tweet pour réaffirmer mon opposition pleine et entière au dispositif du passe sanitaire, qui n'est pas nécessaire vu l'expansion de la vaccination et le mantient des mesures barrières. Toutefois, le texte voté la nuit du 11 au 12 mai contient des limites.
2. Première limite, le projet de loi concerne la période de transition s'étendant du 2 juin au 30 septembre 2021 (au lieu du 31 octobre prévu initiallement). Au delà, l'état d'urgence sanitaire sera levé, sauf nouvelle décision parlementaire. #PassSanitaire
3. "À compter du 2 juin 2021 et jusqu’au 30 septembre 2021 inclus, le Premier ministre peut, par décret pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, dans l’intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutter contre la propagation de l’épidémie de covid-19"
1.Un thread sur l'affaire des pêcheries dans les eaux britanniques ➡️
Ce jeudi 6 mai, le gouvernement britannique annonce le déploiement de deux patrouilleurs près des îles Anglo-Normandes afin d’empêcher un blocus de l’île de Jersey.
2.La veille, notre gouvernement annonçait être prêt à stopper l’approvisionnement en électricité de l’île.
Mais que se passe-t-il au juste avec nos pêcheurs ?
3.L’accord entre l’UE et UK relatif à l’accès aux zones de pêches prévoyait en principe le maintien de l’accès à la zone de pêche britannique pour les navires européens jusqu’au 31 décembre 2026 au minimum.
Loin de moi l'idée de faire un procès en moral aux signataires, ni même de contester le risque anticoncurrentiel que fait peser Amazon, ses pratiques d'optimisation fiscale, ou sa politique de management salarial.
Je souhaite ceci-dit souligner un point.
Considérons la parole comme une forme particulière d'action politique. La voix est puissante dans la décision publique en effet. On le voit, dès lors qu'en France, le président de la République s'adresse à la Nation: avant toute acte administratif d'application ses propos
Sont immédiatement considérés comme modifiant le droit. On se souviendra également de la prépondérance orale sur les capitulaires royaux sous le règne de Charlemagne. Ou bien de la légendaire rencontre entre le patriarche Sophronios et le Calife Umar en 637.