Thread by @Pierreschneider

Je viens de lire la lettre d’accompagnement du motu proprio. A certains égards c’est encore pire que le MP lui-même; François ne se prive pas de réécrire l’histoire quand ça l’arrange.

Mais cela confirme l’interprétation que j’en avait: le missel de 62 n’est plus rien, le missel de 69 redevient la *seule* norme liturgique dans l’église latine et il est implicitement demandé que les tradis *l’adoptent*.

Donc c’est la ligne dure, soutenue par un argument historique: 1°) l’indult de 84 puis le motu proprio de 88 étaient là pour faire du bien aux lefevristes et cicatriser le schisme,

2°) nombre de non-lefevristes, pour qui ce MP n'était pas prévu (mon oeil), en ont profité, limite on en a abusé… d’où 3°) Summum Pontificum qui tente d’organiser le chaos et fait l’expérience des deux « formes » parallèles en pariant sur un enrichissement réciproque.

Mais 4°) l’enrichissement n’a pas eu lieu (mon oeil, bis) et la forme extraordinaire est devenue l’étendard qui rallie une contestation qui menace l’unité de l’église (parfois trop assimilée par F à l’obéissance, me semble-t-il)…

et donc 5°) la récré est finie, le seul missel c’est celui de 69, et l’usage de la forme extra a vocation à disparaître à long terme car : 6°) il y a dans le missel de 69 tout ce que désirent les tradis sincères, à commencer par le Canon Romain.

D’ailleurs 7°) la situation de séparatisme a été remontée par les évêques et ce sont ces derniers qui autoriseront ou non le missel de 62, y compris pour ceux qui l’utilisent, qui devront demander l’autorisation de continuer à l’utiliser.

Un os à ronger pour les tradis : 8°) oui, la liturgie doit être digne et priante et les évêques sont priés au détour d’une virgule de faire cesser les abus dans l’autre sens. Ca y est, on est consolé?

Comme je le disais plus tôt, à force d’avoir Burke, Schneider et consorts qui font les cons, ça devait arriver, et ça aurait du arriver plus tôt. François est prompt à reconnaître que les concessions de Benoit XVI étaient une expérience ratée…

…mais il ne dit pas un mot des libéralités qu’il a eu lui-même, bien légèrement, avec les lefebvristes, notamment de leur accorder la faculté de confesser légitimement.

On pourrait contester aussi, si l’on est pinailleur, qu’il n’y a pas eu d’enrichissement. Il y en a eu deux. Le premier, c’est l’enrichissement des messes ordi par les messes extra (dans l’autre sens il n’y a rien eu).

Le second enrichissement a eu lieu à un niveau dont le pape ne parle jamais: celui des fidèles. Avant 2007, aller à une messe extra, c’est aller chez les fanatiques; c’est se marquer socialement et intellectuellement. Après 2007 ça devient acceptable.

Le biritualisme, s’il a eu lieu, a eu lieu chez les fidèles qui ont alterné formes extra et ordi après 2007 alors qu’avant c’était bien plus rare, même si certains « ordi » allaient dans des messes « extra », le contraire était exceptionnel.

Tout cela laisse penser qu’il y a eu un enrichissement, ou une porosité, mais à sens unique; et donc que le motu proprio SP n’a enrichi que le milieu tradi de nouveaux éléments « ordi", milieu qui est resté dans ses murs en retour.

A qui cela va-t-il profiter? Probablement à la Communauté St Martin, qui séduira les légalistes avec une liturgie proche du missel extra, qui semble florissante actuellement, et qui ordonne, ce qui n’a certainement pas échappé aux évêques.

Et à la FSSPX qui tentera de récupérer les déçus qui auraient été tôt ou tard irrécupérables par l’église mainstream.

A cet égard, la mini-crise de Dijon semble n’avoir été qu’un signe avant-coureur de ce qui se passe maintenant; sans doute parce que l’ordinaire avait lu une version préparatoire du MP. A la lumière de Trad. Cust., Mgr Minnerath est totalement dans la ligne de Rome.

En particulier, la ligne de certains instituts, FSSP notamment, qui laisse à ses prêtres la liberté de refuser ou pas la concélébration, est devenue intenable et il est probable qu’on va leur demander un acte d’allégeance prochainement.

On peut imaginer (mais c’est de la politique fiction à ce stade) qu’un refus de la concélébration (ou de tout autre point de contentieux) conduira à l’expulsion de l’institut tratra du diocèse.

On aura donc une FSSP et un IBP marginalisés et traités comme des désobéissants par la Congrégation à laquelle ils viennent d’être rattachés. Je ne donne pas cher de leur peau.

Les obédientialistes, qui n’ont jamais été formellement schismatiques (l’ICRSP notamment) modifieront sans doute deux ou trois choses pour se ménager une nouvelle zone de confort et ne feront pas de vagues, comme auparavant.

Les monastères tradis ont, à ma connaissance, un lien avec l’ordinaire du lieu (implantés depuis longtemps, représentés au conseil épiscopal, accoutumés au modus vivendi avec le reste du clergé diocésain).

L’objet du motu proprio TC n’est pas de régler son compte à l’oncle excentrique mais au fils prodigue: ils devraient donc rester largement tranquilles.

Nous allons avoir des semaines intéressantes.