🔴Avec le collectif @nosservicespub nous publions cette semaine la 1ere édition du Guide du devoir de réserve, pour inciter les agents publics à reprendre la parole sur leurs missions.
➡️ L'occasion de revenir sur l'actualité et les enjeux d'une notion méconnue et controversée⤵️
Beaucoup de chemin a été parcouru depuis le XIXe siècle. A l'époque, on allait jusqu'à considérer que les fonctionnaires "qui aliènent leur liberté pour un traitement ne devraient pas voter" (F. Burdeau).
Jusqu'au régime de Vichy, le contrôle s'étend même aux choix matrimoniaux !
A partir du statut de 1946, un mouvement d'émancipation des agents commence.
En 1954, le Conseil d'Etat annule une décision empêchant à 5 candidats de se présenter au concours de l'ENA, le directeur ayant affirmé à l'un d'entre eux qu'il refusait... parce qu'il était communiste.
En 1983, nouveau pas franchi : le statut général voté par le Parlement consacre dans son article 6 la "liberté d'opinion" des fonctionnaires.
On leur reconnaît la plénitude des droits de citoyens : dans leurs fonctions, la règle est la stricte obéissance. En dehors, la liberté.
C'est le 1⃣er enseignement de notre guide : la règle en dehors de nos fonctions, c'est la liberté d'opinion.
La notion de "devoir de réserve" n'apparaît pas dans le statut ! C'est une pure construction par les juges, "au fur et à mesure", par exception au principe de liberté
Cette définition jurisprudentielle est redoutable : elle concourt à un flou sur le contenu de la notion, à la formation d’un « halo » du devoir de réserve, qui conduit à en sur-interpréter la portée.
Alors que cette "réserve" n'est autre chose qu'un synonyme de "modération".
Et encore, la réserve s'applique surtout aux propos médiatisés, portés par des agents en situation de responsabilité hiérarchique...
Mais l'effet est là : l'autocensure.
Chacun cherche ainsi à masquer ses opinions, ou ne les exprime qu'avec une inquiétude : la « placardisation »
Et c'est un 2⃣e enseignement de notre guide : le devoir de réserve est d'ordre *disciplinaire*.
C'est à dire que la sanction d'éventuelles dérives est strictement encadrée par les textes. On ne sanctionne pas n'importe comment, les agents ont des droits.
Et nous les rappelons.
Allons plus loin : si notre expression ne fait pas l'objet d'une procédure disciplinaire, alors elle ne *peut pas* être sanctionnée.
La "placardisation" pour une expression publique, le refus d'une formation, etc : c'est interdit
Cela porte d'ailleurs un nom : une discrimination.
Surtout, et c'est peut-être le 3⃣e enseignement de notre guide, l'expression des désaccords *en interne* n'est pas soumise au devoir de réserve.
Le devoir de réserve ne s'applique que pour l'expression publique. Et on le répète : c'est une exception. La règle, c'est la liberté.
En interne, la règle est la neutralité : ne pas faire douter de notre loyauté au service public. Et la loyauté, c'est aussi pouvoir dire quand on pense qu'on fait fausse route.
On propose un petit schéma pour remettre les choses à leur place :
Au fond, en publiant ce guide, le collectif @nosservicespub porte un message principal : la parole des agents publics est d'utilité publique.
Prendre la parole, c’est donner des clefs de lecture à l’ensemble des citoyen.n.es sur le fonctionnement des services publics.
Nous prenons le contrepied de certaines recommandations des chartes de déontologie, actuellement en généralisation, qui contribuent à étendre le halo du devoir de réserve.
Garder un silence public (pudique) sur les problèmes des services publics relève-t-il de la déontologie ?
Plus encore, il faut remarquer que l'(auto)censure des agents est à géométrie variable : pas de soucis pour vanter la "modernisation" de l’admin ou la baisse des dépenses publiques...
Débattre des moyens d'atteindre les objectifs est autorisé. Questionner leur légitimité, moins.
Nous portons un message clef : la forme et les modalités de l'action publique sont des enjeux politiques, qui gagnent à être éclairés par l’intervention des personnes qui la conduisent.
La liberté d'opinion des agents publics est un droit.
C'est aussi une nécessité démocratique.
Alors nous espérons que ce guide pourra donner des outils pour l'expression publique de chacun.e.
Il est en accès libre sur notre site.
Et n'hésitez pas à le partager autour de vous : qui sait, c'est peut-être le début d'une prise de parole collective ? 🤗 nosservicespublics.fr/guide_devoir_r…
PS : Plusieurs éléments de ce fil proviennent également d'un article co-écrit avec Grégory Rzepski, paru en novembre dernier dans le @mdiplo.
Pour aller plus loin ⤵️ monde-diplomatique.fr/2020/11/BONTEM…
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48h à l'#AssembleeNationale sur la gravité des sanctions en cas de non-vaccination, mais pas sur la question essentielle : la stratégie de "contrainte" du gouvernement suffira-t-elle à vacciner toute la population ?
Tant d'énergie déployée pour des débats si mal posés...
Non pas qu'il ne faille pas en débattre, les enjeux sociaux derrière sont majeurs.
Mais si on avait pu passer un peu plus de temps à travailler des solutions aux inégalités face à la vaccination ou des moyens de créer la confiance, on aurait gagné des semaines précieuses.
Sauf un amendement bienvenu sur la vacci des mineurs isolés, la question des moyens pour aller chercher les populations éloignées de la santé était incroyablement absente.
Scoop : ce ne sont pas les 15% de plus de 80 ans non-vaccinés qui se sont rués sur doctolib lundi dernier.
L’Assurance maladie vient de publier ses données sur la vaccination contre le covid-19 par département.
Les résultats sont très inquiétants.
Les alertes des soignant.e.s depuis des mois sont désormais chiffrées : la stratégie vaccinale du gouvernement crée des inégalités (1/X)
Quels sont ces chiffres ?
Au 23 mai, le taux de vaccination France entière (2 injections) était de 16% de la population totale.
En Seine-Saint-Denis, c'était 10%.
Écarts similaires sur la primo-injection (37% France entière contre 23% dans le 93).
Attention à l'interprétation :
En effet, on a vacciné prioritairement les personnes âgées, or la population de Seine-Saint-Denis est bien plus jeune : seuls 16% ont plus de 60 ans, contre 25% sur la France entière.
Il faut donc prendre en compte plutôt le taux de vaccination par âge.
Mais là aussi, ça pique.
Des grands corps au 93, j'ai énormément appris. Y compris sur les dysfonctionnements structurels et idéologiques de l'Etat.
Alors il y a 2 jours nous avons lancé @nosservicespub pour porter de l'intérieur une parole alternative.
Rewind (1/X)⤵️
J'ai rejoint l'Etat pour y servir "l’instrument dont dispose la société pour conduire son propre avenir"
(comme je disais dans mon intro du grand O de l'ENA)
C'était un peu naïf, j'avais des grands et beaux idéaux.
Et j'y crois encore ..!
Mais la pratique m'a rendu moins naïf :
Et cela dès ma première expérience professionnelle.
Je contrôlais une agence de l'Etat.
Au sein de l'agence ils étaient 120, pour un budget RH de 15 M€.
Mais ils étaient trop peu, donc ils faisaient appel à 60 prestataires en continu. Pour un budget "prestataires" de... 15M€.
Je manque d'élégance, pardon : les premiers à en avoir parlé sont @_reflets_, où @jacquesduplessy signe une analyse fort précise de notre note
(merci !)
👇🏻
[Coup de gueule]
Je crois qu'on ne mesure pas bien la gravité des conséquences de l'opération de communication absurde qui a eu lieu ce WE sur la vaccination anti-Covid.
"Coup d’accélérateur partout en France" s'est gargarisée toute la presse.
Mais à quel prix 😠😡 ? ⤵️
Littéralement TOUS les médias en ont parlé : TV, chaînes d'info en continu, presse écrite nationale ou régionale, magazines people...
"50 000 personnes", "vaccination de masse", "grande campagne", n'en jetez plus !
Faut dire qu'on avait sorti le grand jeu :
➡️Les chiffres: "plus de 100 centres ce WE en Ile-de-France"
➡️ Le déplacement chez les pompiers (on aime tellement les pompiers)
➡️ Les témoignages de gens soulagés
➡️ Les DG ARS et les préfets de sortie
Et surtout les belles photos ✨